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Rechercher : jazz

  • Margot T, Vict’rock Hugo et les autres

    À l'écoute de T’M, un autre artiste tombe sous le sens : MoonCCat. Comme elle, le plus dandy des chanteurs se nourrit de textes XIXe siècle pour en proposer une lecture pop-rock sombre, et comme visitée par les esprits de Rimbaud, Baudelaire, Musset et Hugo.

    Ici, c’est T’M qui se colle à l’exercice, preuve que malgré les années et la reconnaissance d’écrivains étudiés dans les manuels scolaires, les textes de ces classiques n’ont rien perdu de leur vie et de leurs qualités subversives. La musicienne se jette comme une affamée sur ces textes du XIXe siècle, donnant à ces classiques ce mélange de dénuement, d’urgence et d’audace.

    T’M c’est Margot Turbil, aux commandes de ce groupe qui n’en est pas vraiment un, ou plutôt qui est sans cesse en évolution. La musicienne entend construire un work in progress qui viendrait chercher ses influences auprès de la scène rock, pop ou jazz. C’est d’ailleurs du jazz que vient Timothée Ledu qui a travaillé avec la chanteuse sur les premiers morceaux déjà disponibles en ligne: "On compose toujours à plusieurs et j'aime mettre en avant aussi les musiciens qui m'accompagne. Comme un peu les collectifs" explique-t-elle.

    Pour la Comédie en 3 Baisers d’Arthur Rimbaud, Margot T épouse l’esprit de ce poème sensuel, cette histoire d’une étreinte surprenant une jeune fille fille. La chanteuse déshabille littéralement Rimbaud et l’érotise dans un esprit rock malicieux qui n’est pas sans renvoyer au Gainsbourg période Love on The Beat: "Pauvrets palpitants sous ma lèvre / Je baisai doucement ses yeux / Elle jeta sa tête mièvre / En arrière : « Oh c’est encor mieux !… / « Monsieur, j’ai deux mots à te dire… » / Je lui jetai le reste au sein / Dans un baiser, qui la fit rire."

    La chanteuse déshabille littéralement Rimbaud

    Invoquer le Gainsbourg des dernières années a du sens si l’on s’arrête au choix du talk-over de T’M dans Perdican. Le Perdican en question est le personnage de la pièce de Musset, On ne badine pas avec l’Amour, et c’est du reste lui qui parle dans une des plus célèbres tirades de la pièce de 1834. Perdigan exprime sans l’avouer explicitement son amour pour Camille, amour qui semble se dérober en raison des craintes de la jeune femme de devoir souffrir. Margot Turbil choisit le parlé-chanté et une orchestration minimaliste pour scander les mots de Perdican, plus actuels que jamais: "Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux ou lâches, méprisables et sensuels ; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées ; le monde n’est qu’un égout sans fond où les phoques les plus informes rampent et se tordent sur des montagnes de fange ; mais il y a au monde une chose sainte et sublime, c’est l’union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux. On est souvent trompé en amour, souvent blessé et souvent malheureux ; mais on aime, et quand on est sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arrière, et on se dit : J’ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j’ai aimé."

    Pour Spleen de Charles Baudelaire, c’est un rock électrique que T’M adopte dans à ce poème à la facture d’un chant funèbre. Grâce à Margot T, plus théâtrale que jamais, Spleen perd ses atours académiques pour revenir à ses origines : un texte sombre, gothique et fin de siècle. "Et de longs corbillards, sans tambours ni musique, / Défilent lentement dans mon âme ; l'Espoir, / Vaincu, pleure, et l'Angoisse atroce, despotique, / Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir."

    Qui aurait dit que Victor Hugo, lui aussi, pouvait être rock ? La preuve est cette troisième adaptation musicale en ligne, Cette nuit, il pleuvait. Margot Turbil slame plus que déclame cet extrait des Châtiments, avec cet esprit rock rugueux qui lui va à merveille : "Cette nuit, il pleuvait, la marée était haute, / Un brouillard lourd et gris couvrait toute la côte, / Les brisants aboyaient comme des chiens, le flot / Aux pleurs du ciel profond joignait son noir sanglot, / L’infini secouait et mêlait dans son urne / Les sombres tournoiements de l’abîme nocturne ; / Les bouches de la nuit semblaient rugir dans l’air."

    Sans nul doute, l’esprit de Victor Hugo, comme ceux de Baudelaire, Rimbaud et Musset se sont réincarnés malicieusement grâce à une artiste rock et électrique.

    T’M, sur Youtube, 2019
    Page Facebook

    Voir aussi : "C’est le plus dandy des albums"

    © Margot T.

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  • Bande d’Idiots

    Il y a du Sanseverino chez Les Idiots, cette joyeuse bande de fadas qui commencent leur premier album, Tout le monde le sait…, par un enterrement de première classe. Celui d’un moribond invitant ses ami.e.s, à l’instar de Jacques Brel, à faire la fête : "Désolé, je voulais par partir / C’est de cette dernière nuit blanche qu’il faudra vous souvenir… / Même mort et enterré / Je veux vous entendre taper du pied" ("Funérailles").

    Nous parlions de Sanseverino. L’auteur des "Embouteillages" est présent dans "Lourdes", au jazz manouche irrésistible et non sans piques pour la ville sacrée et ses fidèles à la "foi sans le fuel". Une attaque en règle contre les religions, que le trio languedocien appuie avec "La boule athée" ("Quand vous me parliez de vos petits Jésus, de vos Gaspard de vos Melchior, / Dans mon esprit ça résonnait / Gérard Majax et Garcimore !"

    Le trio Les Idiots revendiquent l’essence d’une chanson française traditionnelle : accordéon, guitares et voix servent un album résolument acoustique. De sa voix rocailleuse, déchirante et proche de la rupture, Guillaume Boutevillain porte un opus à la très grande humanité, celui de trois grands enfants peu pressés de devenir adultes ("Les grands").

    L’écoute de "Chien d’ivrogne" sur le fidèle compagnon d’un pochtron (le "sac à puce d’un sac à vin") renverra inévitablement au titre homonyme d’Allain Leprest. Le caustique "Tout le monde le sait" est, lui, une adaptation du morceau de Léonard Cohen, "Everybody Knows". Les Idiots ne mettent aucun gant dans cette lecture de la condition humaine, pleine de vie, d’humanité et d’un humour grinçant. Mais non sans engagement, à l’exemple de "La complainte", morceau rock-folk, véhément et terrible : "Je pourris la planète / Me torche avec la loi / Après moi le déluge / Ça ne me regarde pas".

    Trois grands enfants peu pressés de devenir adultes

    Tout aussi engagés, Les Idiots proposent dans "Barre toi de mon herbe" le portrait du "beauf à la Cabu" version 2020 : "Je protège mon jardin / Ma petite vie / Mon chien / Il est pas né celui volera mes petits nains."

    Dans le très bon "Lemmy Gaga" – un titre en hommage à peine voilé à la chanteuse de "Poker Face" – le trio énervé propose le portrait sincère d’une autre de ces figures hautes en couleurs, un rocker camé, "un vrai rebelle", "complètement cramé du cerveau". Il y a de la tendresse dans ce morceau : "T’as pas le droit de te moquer de Lenny / C’était quasi mon meilleur pote / D’ailleurs je bois le même whisky / Je te préviens te fous pas de lui / Tu faisais encore dans ton froc / Que lui il hantait le rock."

    L’amour n’est pas absent, à l’instar de "Noir sur bleu", écrit par Parabellum, ou "Jeux Zinterdits", intime aveu d’étreintes, accompagné d’un accordéon diablement sensuel : "Et puis toucher des lèvres / Sentir tes mains / Jusqu’à la fin / Ne regretter rien".

    L’humour, et même l’humour noir, est omniprésent dans cet album tranchant comme un scalpel de Dexter. Dans "Pelouse maudite", le portrait d’une jeune inconnue ("Elle était blonde se prélassait les seins nus / Couchée dans l’air au soleil du printemps / Elle avait de grands yeux / Et un tout petit cul / Un sourire un peu niais / Qui lui cachait le dents") est le récit du crime d’un psychopathe, soigneusement emballé dans un rythme de jazz manouche.

    Enthousiasmant album à la joie communicative, Tout le monde le sait… fait de la musique et de la vie sans seule religion, sur une planète trouée de plombs. Rien d’irréversible, rassurez-vous : Les Idiots sont là.

    Les Idiots, Tout le monde le sait…, 10H10, 2020
    https://les-idiots.com
    https://www.facebook.com/lesidiotsvousaiment

    Voir aussi : "HK ne lâche rien"

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  • Experience rock of the Salator

    Parlons rock, mais d’un rock beaucoup plus ambitieux que ne le laisse penser l’ouverture et la présentation de l'album Rock Da House de Salah Khaïli.

    Le batteur, auteur-compositeur-interprète propose avec son dernier projet musical un panorama passionnant de son univers, fruit de ses influences et de son travail dans la pop, le rock, le jazz ou la chanson française, comme de ses collaborations avec des figures majeures comme Étienne Daho, Tchéky Karyo, Axel Bauer, Sapho, Lucky Peterson ou Elli Medeiros. Autant dire que Rock Da House ne saurait se résumer à un de ces nombreux albums nostalgiques autant que régressifs, ce qu’il peut l’être par moment (le réjouissant "Rock That Shit"). En réalité, l’opus entend être une authentique expérience musicale pop et rock.

    Si Rock Da House commence à grand renfort de percussions primales, soutenues par un harmonica très blues, le séduisant "Trees In my Head" revendique une insolente fraîcheur, pour ne pas dire juvénilité. Ici, pourtant, le son rock se veut brut, avec ses guitares nerveuses, la voix franche de son chanteur (Salah Khaïli a amené avec lui pas moins de huit chanteurs et chanteuses anglo-saxons, argentin et cubain pour son projet) et bien entendu la batterie rageuse, nerveuse et explosive de celui que la scène internationale surnomme le "Salator".

    "My Son" est une ballade pop séduisante, à l’admirable construction mélodique et au texte tendre, portée par une voix veloutée aux accents de pop seventies. Tout aussi pop, "Blood Sweat And Tears" réjouira les oreilles grâce à un son extrêmement travaillé, à écouter un soir d’été indien en bonne compagnie.

    Cet album prouve que le rock est un animal à sang chaud, à la peau dure et beaucoup moins à l’agonie qu’on veuille bien le dire

    Il faut transgresser les règles, dit en substance le musicien dans un des morceaux ("Escape The Rules"), ce qu’il parvient à réaliser tout au long de cet album prouvant que le rock est un animal à sang chaud, à la peau dure et beaucoup moins à l’agonie qu’on veuille bien le dire.  

    À la recherche de sons pouvant régénérer son univers musical, Salah Khaïli n’hésite pas à aller voir du côté de l’électro-pop. C’est plutôt bien vu : "Flowers" s’inscrit bien dans son époque, tout comme "Love", aux accents funk.

    Au fur et à mesure que l’album se déploie, le rock du "Salator" se révèle comme bien plus complexe et mystérieux. Sensuel aussi ("My Best Friend"). On parlait des influences du batteur, producteur et compositeur : il ne faut pas oublier la world music, que Salah Khaïli s’approprie avec le lumineux "Kiko", nous transportant cette fois du côté de l’Amérique latine.

    "1983" pourra prendre à contre-pied l’auditeur. Morceau nostalgique et régressif renvoyant à la new-wave eighties ? Oui, mais pas seulement. Car dans ce morceau renvoyant à ces "souvenirs déchus",  Salah Khaïli propose un titre passionnant, sans doute le meilleur de l’opus, dans lequel il semble faire le lien avec des sons a priori irréconciliables : la pop, le rock, l’électro, l’urbain, voire même la chanson française. Finalement, "1983" aurait tout aussi bien se nommer "2021" ou, mieux, "83-21".

    Ce samedi 2 octobre, Salah Khaïli participera à la Nuit blanche de Paris, dans son projet Sk & Cool Jazz Édition, sur le parvis de la mairie du 14e arrondissement.  

    Salah Khaïli, Rock Da House, Salah Khaïli Music, 2021
    https://salahkhailimusic.com
    https://www.facebook.com/salah.khaili
    https://www.instagram.com/salah_salator_khaili

    Voir aussi : "Clou en plein cœur"

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  • Bizarre, bizarre

    Andréel est un musicien à suivre, aussi bizarre soit-il. Son univers immédiatement attachant est enveloppé par un style et une orchestration a priori traditionnel : instruments acoustiques, facture jazzy. Bref, une chanson française qui revendique ses origines, tout autant qu’elle affirme une singularité et une forte personnalité. La preuve avec Mr Bizarre, son dernier opus, sorti un an après Tu m’apprends

    Pour autant, le "Monsieur Bizarre" dont il est question est avant tout une autre personne qu’Andréel lui-même : le titre éponyme entend faire le portrait d’un homme singulier, silencieux mais qui sait fait rire les enfants. M. Bizarre est un clown autant qu’un poète facétieux sachant "parler la langue des oiseaux".  

    À côté de ce portrait plein de mélancolie, Andréel se fait plus incisif dans "Marianne" qui se veut le constat d’une histoire d’amour remplie d’incompréhensions, et finalement vaine : "Laisse-moi te montrer comment tu es belle / Quand tu ne laisses pas couler le sang de la haine". 

    Si Andréel se présente sur la pochette de l’album tel un clown triste. Il est vrai que la sensibilité de l’artiste est patente, lorsque, par exemple, dans le morceau "Sans toi", le chanteur évoque sa maman sur un air de tango. Le chanteur capte avec émotion l’auditeur lorsque, jeune papa, il regarde avec amour en direction de sa mère, comme un modèle autant qu’un soutien  et un amour qu’il voudrait retrouver.  "Je gravirai la montagne qui me sépare du monde / Je retrouverai qui je suis… / Nous nous aimerons plus fort".

    Influences jazz qui nous renvoie aux premiers albums de Gainsbourg, période "Black trombone"

    Andréel touche énormément avec cet album intime, pour ne pas dire introspectif. La preuve encore avec "Jeune et ivre", un titre plus pop : Andréel se fait sombre dans ce portrait d’un homme à la dérive, abandonné et seul. Il faut y lire un regret de l’enfance et de l’insouciance lorsqu’il chante ainsi : "Je voudrais encore vivre dans ce pays de jeux / Où j’étais jeune et ivre / Où j’étais heureux". En d’autres termes, l’artiste se sent "étranger" dans un monde violent, obscur et hypocrite qui n’est pas fait pour lui. 

    Dans Tu m'apprends, son précédent album, Andréel s’était entouré de chanteuses et souvent comédiennes - Natacha Régnier, Amandine Bourgeois, Lucile Chriqui et Judith Chemla. Le voici cette fois avec Agathe Bonitzer dans "Quelle magie de vivre", une jolie ballade jazzy en duo dans un talk-over amoureux et romantique : "Donne-moi tes mots / un sourire, une phrase, un regard… Pour vider ta douleur, il faut que tu sois vrai. Les formules empruntées me sont insupportables".  

    Et si derrière Andréel ne se cachait pas l’influence du Serge Gainsbourg des premières années ? La résonance de l’"homme à tête de chou" apparaît évidente dans "La saxophoniste", avec ses influences jazz qui nous renvoie aux premiers albums de Gainsbourg, période "Black trombone".

    La sensibilité, la sensualité et la fausse légèreté sont tout autant des marqueurs pour cet autre titre, "Où l’on s’est rencontrés", une ballade écrite par Isild Le Besco dans laquelle l’attente se fait désir, en attendant de se revoir en tête-à-tête. 

    Dans la même veine, "Ce n’est pas grave", peut s’écouter comme une chanson sur un départ et une séparation, aux sons joliment succédanés ("Ce n’est pas grave de partir / Mais c’est dommage sans rien dire"). C’est aussi le joli portrait d’une femme que l’on imagine irrésistible : "Votre rire traversait Paris", dit-il avec émotion. Andréel s’avère doué dans sa manière de faire de la souffrance des mélodies légères et faussement insouciantes. 

    Après le plus rock et plus incisif "Têtes de cons", "Votre bouche » vient conclure en couleur l’album d’un clown blanc, sur des rythmiques et des sons world music. Andréel y parle d’une femme, d’une histoire d’amour avec elle, et conclut par un constat amer : "C’était cuit / Je pris ma liberté". 

    Andréel, Mr Bizarre, Believe Digital / Inouïe, 2022
    https://www.andreel.com
    https://www.facebook.com/andreelvirtuel
    https://www.instagram.com/andreelvirtuel

    Voir aussi : "Premier extrait du futur album d’Andréel, bien accompagné"

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  • Pas sage Ibère 

    Mieux vaut tard que jamais. Penchons-nous sur la chanteuse pop européenne la plus passionnante, la plus revivifiante, la plus séduisante et sans doute la plus pertinente de la pop européenne – et internationale. La chanteuse espagnole Rosalía sortait en 2022 Motomami, son dernier album, suivie en fin d’année par une version réaugmentée de plusieurs titres. Un opus qui a marqué les esprits autant que les oreilles. Voilà pourquoi une chronique sur Motomami avait sa place ici.

    Un regret cependant, pour commencer : la jaquette et le livret – certes, sexy a souhait – peine à être lisible, y compris dans les titres des morceaux. Mais c’est bien le seul défaut de cet opus qui a fait par ailleurs grand bruit à sa sortie.

    Un mot sur le titre de l’album. "Motomani" est un mot-valise composé des mots "moto" (bien sûr!) et de "mani" qui veut dire "meuf". D’où, la photo d’illustration où l’artiste se montre dans le plus simple appareil – mais avec un casque. Humour ou posture d’une combattante ? Les deux, Ma Générale !

    Le moins que l’on puisse dire est que Rosalía se réapproprie la pop comme personne. "Yo me transformo", comme elle le proclame dans le premier titre "Saoko", incroyable morceau électro, urbain, pop, jazz et… flamenco. C’est à l’image d’un album hétéroclite mais d’une belle cohérence, et sans jamais perdre l’auditeur ("Candy"). On y retrouvera bien entendu l’irrésistible tube interplanétaire "La Fama" avec The Weeknd. 

    Rosalía est réjouissante et surprenante dans sa manière de mixer les sons, les influences, les styles, sans arrière-pensée

    Mais là où l’artiste espagnole révolutionne la pop internationale c’est bien dans le flamenco et dans sa manière de revoir les canons de cette tradition espagnole, en lui insufflant du sang neuf, sans jamais la trahir. Que l’auditeur écoute – voire danse sur – "Bulerías", avec une économie de moyens mais en mettant au centre de ce projet la rythmique si caractéristique de cet art ibère.

    À côté de titres urbains et d’une modernité certaine, avec une musique urbaine ("La combi Versace", en featuring avec Tokischa), électro et enjouée ("Chicken Teriyaki", "Bizcochito"), Rosalía sait poser sa voix veloutée sur quelques accords de piano, pour servir une histoire d’amour (Como un G), parfois traversée de pulsations électros, comme pour mieux l’électriser ("Hentai"). C’est aussi "G3N15", posée et aussi intime et introspectif, hymne à la famille dans un album tout entier consacré à la fête et à l’insouciance.

    L’insouciance et la joie de vivre affleurent à chaque piste de l’album, tout comme la créativité d’une artiste totale ("CUUUUuuuuuute") qui nous offre une vraie aventure musicale. Rosalía est réjouissante et surprenante ("Diablo") dans sa manière de mixer les sons, les influences, les styles, sans arrière-pensée, avec un plaisir manifeste (le court morceau "Motomani" qui donne son titre à l’album) et osant renouer avec des genres que l’on aurait dit has-been : le flamenco, bien sûr, mais aussi le jazz ou le tango (le formidable et sans doute meilleur titre de l’opus, "Delirio de grandeza").

    Un vrai album personnel aussi, sous forme de journal intime, à l’image de son abécédaire ("Abcdefg"), ce qui n’empêche pas de se faire de cet opus un vrai événement musical et pop. 

    Rosalía, Motomami, Columbia, 2023
    https://www.rosalia.com
    https://www.facebook.com/rosalia.vt
    https://www.instagram.com/rosalia.vt

    Voir aussi : "Un cauchemar vieux de 40 ans"
    "Danses avec Barbara Hannigan, de Kurt Weill à la Lambada"

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  • Rencontres avec LeHache

    De rencontres, il en est bien sûr question dans le dernier album de LeHache.

    LeHache appartient à cette veine de chanteurs français nourris au jazz, son "école" comme le précise l’artiste. Pas d’électro, de rythmes urbains et de pop sophistiqué mais des instruments traditionnels – dont la guitare sèche du chanteur – et une orchestration acoustique ramassée et des influences revendiquées du côté de Brassens ("Gardien des secrets"), Sanseverino ("Talkin’ Global Security Blues") et de sons traditionnels, que ce soit la valse dans "Alphonse & Juliette", le flamenco dans "Ubi sunt ?", le jazz manouche revendiqué dans "De l’aut’côté c’est passionnant" ou encore le blues dans le bien-nommé "Businessman Blues".

    LeHache fait de ses Rencontres de jolis portraits, souvent simples et attendrissants, à l’image de ces "Cheveux noir de jais", d’une femme fatale que l’on imagine venir de Méditerranée ("Ubi sunt ?") ou encore cette saynète amoureuse un rien désuète : "Nous Couchés sur ce tapis Le ciel comme un tipi / Le ciel est fait pour toi  / La nuit étoilée te va si bien Quand elle t’habille jusqu’au matin" ("Mon p’tit soleil"). C’est aussi le truculent titre "Mémé m’aimait", un morceau faussement léger inspiré du Petit Chaperon Rouge, chanté avec un sérieux sens d’humour noir et aussi un rien de grivoiserie. 

    C’est aussi et surtout "Une vie dans l’Aubrac", un vrai hymne à nos campagnes

    Pour le titre "Loin de l’hiver", un blues sombre en duo avec Diez, LeHache parle de ces "embouteillages d’amours devant ma porte" et de l’attente qui n’en finit pas.

    Non sans philosophie ni poésie, le musicien fait de ces portraits naturalistes des plongées dans la nature, au cœur d’une province que l’on croit endormie – à tort – lorsqu’elle ne se fait pas contestataire et volontiers anarcho ("Planque-moi ce gilet jaune si jamais tu croises un agent", "Talkin’ Global Security Blues").

    La nature est au cœur du dernier opus de LeHache. C’est "Gardien des secrets", une ballade émouvante autour d’un arbre, presque un autoportrait ("J’offre mon ombre et mes ramures / A ce vieux banc enflammé / J’offre mes nœuds mes veines tordues / A vous tous amants affamés / Je suis toujours là / Je suis gardien du temps et de tous vos secrets"). C’est aussi "Vers l’eau qui dort", où la nature est là encore comme humanisée ("Les lignes de mes mains se feront bien accueillantes"). L’éveil de la nature est aussi celui du désir, nous rappelle en substance le chanteur.  C’est aussi et surtout "Une vie dans l’Aubrac", un vrai hymne à nos campagnes. LeHache assume ici sa provincialité et son amour de la campagne : "C’est l’histoire d’un homme qui ne s’est pas enfui… / Il parle d’un pays".

    Ce pays, LeHache en parle avec générosité et sans tricherie. 

    LeHache, Les Rencontres, Inouïe Distribution, 2022
    https://www.lehache.fr
    https://www.facebook.com/LeHache
    http://www.sylviethouron.fr

    Voir aussi : "Naissance de LeHache"

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  • Deux jeunes filles en fleur à l'orée du siècle

    On a, en France, un rapport passionné avec l'histoire, et s'il est un domaine littéraire qui suscite de l'engouement, c'est bien celui du roman historique.

    Catherine Armessen, que nous aimons sur Bla Bla Blog, vient de sortir son dernier ouvrage, Les Jumelles de Vernajoul (éd. Les Passagères). Ce roman devrait ravir les amateurs d'un genre ayant ses inconditionnels.

    Pour construire "ses" jumelles, Antoinette et Élise, l'auteure s'est inspirée d'une aïeule, prénommée Élise – mais qui n'avait pas de sœur jumelle – et qui a tenu un journal de 1898 à 1920. Cet écrit a servi de matière première à Catherine Armessen pour bâtir une histoire qui nous fait revivre les premières années du XXe siècle.

    Deux bébés sont séparés à leur naissance après le décès de leur jeune mère et de son amant. Elles sont adoptées et vivent éloignées, sans rien connaître de leurs origines. À l'âge de seize ans, leur chemin se croisent dans l'Ariège, à quelques kilomètres du village de leur mère naturelle. Les adolescentes se découvrent sœurs jumelles et finissent par ne plus se séparer.

    À l'orée du siècle, au temps de la Belle Époque finissante, de la loi de séparation de l’Église et de l’État, de la première guerre mondiale, du développement de la médecine (un domaine que l'auteure connaît bien), du modernisme en art, de Guillaume Apollinaire ou de Marcel Proust, les deux jeunes filles en fleur auront besoin l'une de l'autre pour affronter les tourments de ces années de braise et de sang : les traditions sclérosées, les amours contrariés voire interdits par la société, les rivalités de tout genre et surtout la Grande Guerre.

    Dans ce roman d'apprentissage, les jumelles vont traverser une période charnière de notre pays : les tueries de la guerre 14-18, l'émancipation naissante des femmes, les années folles ou le jazz venu des États-Unis, dans une France encore bercée par des traditions multiséculaires, celle des rosaires, des mariages de convenance, du machisme et du patriotisme.

    Ces deux mondes opposés sont réconciliés par Catherine Armessen, sous les traits de deux jeunes filles en fleur.

    Catherine Armessen, Les Jumelles de Vernajoul, éd. Les Passagères, 2016, 305 p.
    http://www.catherine-armessen.fr

  • Festival Ochapito, des spectacles plein Lisieux

    Le Festival Ochapito se déroulera en plein cœur de Lisieux du 4 au 7 octobre 2017 avec, à l’affiche, plus de 30 concerts sur 3 scènes dont un chapiteau dédié à la musique électronique et un espace consacrée aux groupes locaux.

    Depuis 8 ans, cet événement musical met de la couleur et de la musique dans les rues de Lisieux. Au fil des années le festival Ochapito a pris de l'ampleur et a grandi pour devenir une référence dans la musique pour la région Normandie. Un événement exceptionnel qui rassemble dans une programmation éclectique (rock, pop, fanfare, chanson, world ou musique électro).

    Pour 2017, des artistes internationaux tels que Emir Kusturica et The No Smoking Orchestra, Manu Dibango, les survoltés Babylon Circus ou encore Flavia Coelho, Natalia Doco, Jahen Oarsman.

    Cette édition aura pour fil conducteur le thème de l’eau et a pour partenaire l’Agence de L’Eau Seine Normandie. Plus qu’un festival de musique, Ochapito proposera de nombreux événements : théâtre de rue, performances artistiques, expositions, ateliers ou spectacles pour enfants. En bref, quatre jours de fête au cœur de Lisieux, dont la première journée, le mercredi 4 octobre, sera gratuite.

    Les organisateurs nous proposent des réjouissances pour s’en mettre plein les yeux et les oreilles, avec des artistes et des groupes de tous horizons : Fake (rock progressif), Jaja (swing rock), Shifumi Orkestar (airs traditionnels russes, musiques tziganes et yiddish), La Caravane Passe (rock acoustique, hip-hop et électro), Jahen Oarsman (indie folk), Natalia Doco, The Show (soul, funk), Flavia Coelho (mélodies solaires au parfum de Ragga), Monkey To The Moon (space pop), Mado & Les Freres Pinard (rock tzigane), Stanko Marinkovic (rock ethnique), Manu Dibango (world music), The Goaties (punk-rock), Emir Kusturica & The No Smoking Orchestra (punk-rock, jazz manouche, musette).

    À noter aussi la présence de Stereoclip, Citizen Kain, Miss Tick, Madben, Lowkey Et Kardinal, Misstick, Secret Cinema, Moshe Galaktik Ou Chris Honorat.

    Un gros coup d’Ochapito pour injecter du fun, du cool et de la fête à Lisieux.

    Festival Ochapito
    Lisieux, dans l’hyper-centre lexovien.
    Tarif par jour : entre 15 € et 29 €
    Pass 3 jours : 50€
    Entrée gratuite mercredi 4 octobre et samedi 7 octobre (l'après-midi)
    www.festivalochapito.com