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La logique et les mathématiques : tel est l'objet de Logicomix, une des toutes meilleures bandes dessinées de ces dix dernières années. Le personnage principal ? Rien de moins que Bertrand Russell (1892-1970), philosophe connu pour son Histoire de la Philosophe occidentale (1945), pacifiste, mathématicien et logicien.
Lorsque Logicomix débute, les auteurs de la bande dessinées, qui se sont eux-mêmes mis en scène et en image, s'interrogent sur la ligne à suivre pour leur ouvrage. Ils choisissent de le faire démarrer en septembre 1939, lorsque Bertrand Russell est sollicité par des isolationnistes de l'Université de Princeton. Dans une atmosphère fiévreuse, le mathématicien et pacifiste depuis la première guerre mondiale, raconte son existence devant des étudiants tour à tour électrisés, passionnés, dubitatifs et conquis.
Bertrand Russell ne cache rien des cinquante premières années de sa vie : son enfance d'orphelin dans le manoir inquiétant de Penbroke Lodge, sa découverte des mathématiques,son initiation à la logique grâce à George Edward Moore, son ambition de donner une base solide aux sciences et aux mathématiques. Le cœur de Logicomix réside dans les travaux et l'écriture, avec Alfred North Whitehead, des Principia Mathematica, ainsi que la vie amoureuse de Russell depuis sa rencontre et sa relation ambiguë avec Alys Whitebread.
Grâce à son scénario brillant, qui s'étale sur presque 350 pages, ce roman graphique englobe une masse incroyable de savoirs : mathématiques, logique, philosophie, mythologie, art et littérature. Il est question des ambitions et des doutes de Bertrand Russell mais aussi de ses homologues mathématiciens et logiciens, souvent connus uniquement pour leurs travaux : Georg Cantor, Gottlob Frege, Kurt Gödel, David Hilbert, Henri Poincaré, Alan Turing, John Von Neumann ou Ludwig Wittgenstein. Des notes explicatives en fin de livre éclairent un peu plus les parcours de ces scientifiques.
Avec un sens de la vulgarisation remarquable, les auteurs de Logicomix, Apóstolos K. Doxiàdis, Christos Papadimitriou, Alecos Papadatos et Annie Di Donna, parviennent à dévoiler au plus néophyte des lecteurs quelques notions de mathématiques et de logique : l'algorithme, la théorie des ensembles (plus complexe qu'il n'y paraît), le théorème d'incomplétude, le paradoxe de Russell ou l'auto-référence. L'auto-référence est d'ailleurs au cœur du concept artistique de Logicomix.
On peut trouver la facture graphique de Logicomix – très ligne claire – assez peu révolutionnaire. Il n'empêche que ce roman graphique est une réussite prodigieuse, au point d'avoir été salué comme une des meilleurs bandes dessinées de ces dix dernières années et comme l'un des ouvrages majeurs de l'année 2009.
Apóstolos K. Doxiàdis, Christos Papadimitriou, Alecos Papadatos et Annie Di Donna, Logicomix, éd. Vuibert, 2009, 348 p.
Normandie Impressionniste célèbre cette année le portrait. Parmi les 800 manifestations, la galerie Duchamp, à Yvetot (Seine-Maritime), propose de s’intéresser à la place du portrait dans notre société contemporaine, obnubilée par les écrans et l’hyperpersonnalisation (réseaux sociaux, selfies, omniprésence de la photo et de la vidéo).
Dans ces conditions comment l’art numérique peut-il aborder le portrait ? À leur époque, les impressionnistes ont été novateurs dans leur manière de représenter ce sujet : "Les impressionnistes ont tiré une force vitale de la révolution industrielle, de la vitesse des transports, des évolutions technologiques de leur temps" dit à juste titre Fleur Helluin, artiste exposante et à l’origine de la manifestation à la galerie Duchamp, "L’empreinte directe du vécu sur le temps", du 2 mai au 30 juin 2016.
À Yvetot, cet événement interrogera la représentation de la figure à l'heure de la révolution numérique, à travers une approche pluridisciplinaire : des peintures de Fleur Helluin (Bear et Shooting, 2013), des installations de Sébastien Hilldebrand (Figures de style, 2014), un rapport de faux souvenirs d’Aurore Gosalbo (Rapport 1984, 2015) et une vidéo de Bill Viola, Reverse Television (Reverse Television - Portraits of Viewers, 1984).
Bill Viola est une figure majeure de l’art vidéo qu'il utilise au travers d'installations parfois monumentales. Ses œuvres lui permettent d'aborder des thèmes fondamentaux comme la vie, la mort, le sommeil ou la naissance. Reverse Television consiste en une série de "portraits de téléspectateurs", de brefs plans fixes dans laquelle Viola inverse la position et le regard des téléspectateurs. Filmés dans leur salon, ils fixent la caméra comme s'il s'agissait de leur poste de télévision. Comme les impressionnistes, Bill Viola se concentre sur la lumière et ses qualités changeantes pour représenter les sujets, réalistes et montrés sous des angles inhabituels.
Même si l'approche contemporaines pourra décontenancer voire rebuter une partie du public, saluons cette initiative d'ouvrir Normandie Impressionniste à l'art conceptuel. En un sens, Bill Viola, comme du reste les autres artistes de cette manifestation de la Galerie Duchamp, se place dans la lignée des modernistes du XIXe siècle.
Fleur Helluin fait cet autre commentaire au sujet de l'exposition qu'elle a imaginée : "En animaux mimétiques, nous nous adaptons avec vivacité à notre environnement. Quand nous voyons plus du monde à travers un écran qu’à travers une expérience directe, c’est la représentation de la figure qui doit être questionnée et mise en mouvement."
"L’empreinte directe du vécu sur le temps", du 2 mai au 30 juin 2016, Galerie Duchamp, 7, rue Percée, 76190 Yvetot Du lundi au vendredi de 9h00 à 12h00 et de 13h30 à 17h30 et le samedi de 14h00 à 17h30 sur rendez-vous. http://www.galerie-duchamp.com
En 1976 sortait sur les écrans français Les Dents de la Mer de Steven Spielberg, salué d’un Oscar pour sa bande originale : les spectateurs du monde entier tremblaient à l'écoute des deux notes de musique les plus terrifiantes de l'histoire du cinéma.
Depuis, John Williams n’a eu de cesse de construire sa carrière de compositeur exceptionnel au service de monuments du cinéma : outre Les Dents de la Mer, citons Star Wars, ET l'Extra-terrestre, La Liste de Schindler, Jurrasic Park, Harry Potter ou Les Aventures de Tintin.
En avril, il sera possible de revivre au Grand Rex les plus belles partitions de John Williams durant quatre décennies au cours desquelles John Williams a marqué son empreinte durable sur la musique et le cinéma. Interprété par le Sinfonia Pop Orchestra dirigé par Constantin Rouits, Tribute to John Williams promet d'être un rendez-vous des cinéphiles et mélomanes.
Lors de cet événement unique, Jonathan Ke Quan, "Data" dans les Goonies et Demi-Lune dans Indiana Jones, sera présent pour rencontrer les fans de l’univers Spielberg.
Tribute To John Williams, Music from the films of Steven Spielberg Invité d'honneur : Jonathan Ke Quan Samedi 30 avril 2016 à 15h et 20h au Grand Rex, Paris
L'un des événements phares de Normandie Impressionniste, "Scènes de la vie impressionniste", au Musée des Beaux-Arts de Rouen (16 avril-26 septembre 2016), donne le la d'un festival placé cette année sous le signe du portrait. Cette exposition temporaire propose un parcours passionnant au cœur de la planète impressionniste, découpé en 12 sections thématiques. Il est question tour à tour de la caricature, de la vie quotidienne et familiale, des artistes et de leurs modèles, de l'intérêt pour l'enfance et l'adolescence, des représentations sociales et des portraits de groupes ou d'artistes s'admirant, s'influençant et se rendant hommage mutuellement.
D'emblée, l'impressionnisme est identifié au travail de plein-air et à la peinture de paysages, champs d'expérimentation infinis pour des artistes passionnés par la représentation des jeux d'ombre et de lumière comme par les le travail sur l'eau et le ciel. Mais les impressionnistes vont aussi consacrer une partie de leur énergie à des sujets neufs pour l'époque, des thèmes considérés au XIXe siècle comme triviaux : intérieurs d'appartements modernes, scènes de la vie quotidienne (bains, déjeuners, lectures), types sociaux ignorés par l'académisme pictural (ouvriers, prostituées, comédiens ou saltimbanques), villes et nouveaux lieux de sociabilité (troquets, théâtres, usines). Des individus ou groupes d'individus sont représentés d'une manière inédite : enfants, adolescents ou artistes eux-mêmes. Les portraits étaient jusque-là réservées aux personnalités importantes de la société ou aux représentations mythologiques. Avec le courant impressionniste, les modernes plongent dans la vie quotidienne et s'intéressent à leurs contemporains, souvent avec acuité et sensibilité.
Au cours de son voyage au pays des portraits,le visiteur sera sas doute surpris de découvrir que les premières créations de Claude Monet, immédiatement associé aux paysages, ont été des caricatures (section "Monet et la caricature"). À l'âge de 15 ans, celui-ci suit les traces de brillants prédécesseurs, Nadar ou Honoré Daumier. Le jeune Monet excelle dans le dessin mordant de ses contemporains comme celui du notaire haverais Léon Manchon (Léon Manchon, ca. 1858). Il excelle également dans des caricatures pittoresques de types sociaux (le touriste anglais, la jeune Normande, le marin), qui sont les plus anciennes œuvres de l'auteur des Nymphéas.
La section "Identités artistiques : portraits croisés, autoportraits, cercles" propose des portraits ou des autoportraits d'artistes, se mettant en scène mutuellement. Marcelin Desboutin représente Degas concentré sur une lecture. Pierre-Auguste Renoir immortalise son ami Claude Monet (1872). Gauguin, de son côté, est autoportraitisé en 1885 dans une pose terrible. On sent le peintre déprimé et en plein doute, alors que l'homme s'apprête à abandonner femme et foyer pour se lancer dans son aventure picturale. La pièce maîtresse de cette salle, mais aussi de l'exposition, est le célèbre portrait de Berthe Morisot par Edouard Manet (Berthe Morisot au bouquet de violettes, 1872). Cette "Joconde du XIXe siècle", chef d'œuvre pictural et icône du Musée d'Orsay depuis son acquisition en 1998, immortalise Berthe Morisot, figure majeure de l'impressionnisme dont la rencontre a marqué Édouard Manet (Le Balcon, 1869).
Le musée consacre un espace à un type de personnage à l'importance inédite : celui du modèle (section "Muses et modèles"). Avec la révolution impressionniste, les modèles sont très clairement identifiés, contrairement à des artistes académiques comme Jean-Baptiste Corot. Ces portraits prennent une résonance particulière en raison des liens intimes entre les artistes et leur modèle. Quelques grandes figures se détachent. Outre Berthe Morisot, muse, artiste et amie de Manet, citons Lise Tréhot, la maîtresse de Renoir, sa femme Aline Renoir ou Camille Doncieux la jeune épouse de Monet. Dans une salle qui est à ne surtout pas manquer, le musée de Rouen propose de découvrir ou redécouvrir le magnifique portrait en pied de Prospérie Bartholomé, peint quelques mois avant son décès. Ce tableau d'Albert Bartholomé, Dans la serre (1881), est présenté dans une mise en scène poignante avec le vêtement du modèle. Après la disparition de sa femme et muse, désespéré et déboussolé, Albert Bartholomé troquera ses pinceaux contre des ciseaux, se faisant "le sculpteur de la mort."
En plongeant dans l'intimité des peintres impressionnistes, le spectateur entre au cœur de la vie des artistes : familles, épouses, enfants et amis (section "Portraits de famille"). Les scènes familiales sont bien présentes dans l'exposition du Musée des Beaux-Arts : Le Déjeuner dans la Serre de Louise Abbéma (Musée de Pau, 1877) représentant entre autres l'actrice Sarah Bernhardt ou La Famille Dubourg de Henri Fantin-Latour (1878), un portrait familial à la facture terne et sombre.
Parmi ces portraits, figurent en bonne place ces délicates figures d'adolescentes, ces "jeunes filles en fleur" aux visages retenus (section "Jeunes et Julie"). Les impressionnistes n'en font plus des archétypes peu identifiables – lorsqu'il ne s'agit pas de représentations de déesses mythologiques – mais des personnes proches. Lorsque Renoir peint Julie Manet dans le portrait de 1894 (Mademoiselle Julie Manet), il immortalise la nièce de son amie Édouard Manet, fille de Jules Manet et de Berthe Morisot.
Les enfants ne sont pas oubliés (section "L'enfance : de Renoir à Cassatt, un thème impressionniste"). Qu'ils soient représentés en portraits ou en groupes, ils prennent une place particulière dans le mouvement impressionniste. Au XIXe siècle, l'enfant acquiert un statut nouveau. L'émancipation, l'affection parentale, les premiers droits sociaux qui leur sont accordés (travail, enseignement), en font des personnes à part entière. Les enfants sont largement représentés : dans leur berceau chez Berthe Morisot (Le berceau, 1872), endormis chez Gauguin (La Petite rêve, 1881), à vélo chez Monet (Jean Monet on his Hobby Horse, 1872), en plein travail scolaire chez Renoir (Coco écrivant, 1906) ou posant simplement comme chez Pissarro (La Fille de l'Artiste, 1872). Ces portraits baignent dans une sérénité artificielle. Les enfants ne jouent pas, ne bougent pas et sont mis en scène jusque dans leur apparence : joues rouges, rubans dans les cheveux, pose appuyée (Auguste Renoir, Portrait de Jean, 1899). Jean Monet avait avoué que les longues poses que lui imposaient son père étaient exténuantes.
Où s'arrête la sphère privée ? Où commence la sphère publique ? Lorsqu'il est question de représenter les cafés (que ce soit au Guerbois ou à la Nouvelle Athènes), ce sont autant des espaces intimes qui sont immortalisés que des représentations de lieux de sociabilité (section "En société : extérieurs et émancipation"). Les peintres impressionnistes raffolent de ces lieux de vie : troquets (Gustave Caillebotte, Au Café, 1880), théâtres (Mary Cassatt, Woman in a Peal Neckplace in a Lodge, 1879), parcs ou scènes de lectures publiques (Pierre-Auguste Renoir, La Lecture du Rôle, 1874-1876). Ces scènes permettent aux impressionnistes d'expérimenter de nouvelles techniques, que ce soit le cadrage chez Mary Cassatt ou les effets de miroirs chez Caillebotte.
Le Musée des Beaux-Arts de Rouen permet aussi au spectateur de se plonger dans le quotidien des Impressionnistes à travers la restitution d'un intérieur (section "Intimités"). Il est évoqué, grâce à la reproduction par les Ateliers d'Offard (Tours), d'un papier peint issu du Musée des Arts Décoratifs. Là encore ce sont des scènes quotidiennes qui s'offrent au spectateur : une femme s'éveillant (Federico Zandomeneghi, In Bed, 1878) , un petit déjeuner (Édouard Vuillard, Le déjeuner du Matin, 1903), une scène de thé (Mary Cassatt, The Cup of Tea, 1880-1881), une autre de couture (Édouard Vuillard, Madame Vuillard cousant, vers 1902) et des femmes à la toilette (Edgar Degas, Femme se lavant la jambe gauche ou Femme se coiffant, posth. 1919-1921). Cette salle permet de prolonger l'exposition impressionniste vers le mouvement des Nabis.
Dans la section "Portraits de groupes : portraits et hommages", le spectateur est saisi par l'aménagement symbolique d'une salle. D'une part, est installé un monumental tableau de Jules Alexandre Grün, Un vendredi au Salon des artistes français (1911). Ce tableau conforme à l'académisme, met en scène une pléthore d'artistes et de mondains au milieu de sculptures classiques diaphanes, dont une de Raoul Larche à la gloire de Jean-Baptiste Corot. D'autre part, est accrochée une peinture de Maurice Denis, Hommage à Cézanne (1900), à la facture plus sombre, qui voit se réunir un groupe d'artistes autour d'une nature morte. Le groupe d'artistes immortalise les liens intimes plutôt que l'agitation mondaine présente chez Grün. Et au centre de cet espace, tels des dieux admirés, sont rassemblés des bustes d'Edgar Degas, de Claude Monet, d'Auguste Rodin, de Maurice Denis et de Federico Zandomeneghi.
Les liens solides entre les artistes impressionnistes, où transparaissent les influences mutuelles, l'admiration voire l'affection, sont également présents dans les échanges épistolaires ("Correspondances, lettres et liseuses") et dans les photographies inédites (section "Les photos d'artistes"). Bien plus qu'une exposition picturale (les sculptures sont peu présentes), "Scènes de la vie impressionniste" remplit le contrat auprès du visiteur en lui proposant d'entrer de plain-pied dans l'univers intime des géants de l'Impressionnisme les rendant d'autant plus proches.
Vous pouvez maintenant retrouver en ligne le court-métrage Une presque bonne Idée, grand vainqueur du palmarès de cette année.
Cette comédie de Sébastien Deschamps a obtenu le Chien d'or ainsi qu'un double prix d'interprétation féminine pour ses deux actrices principales, Mélanie Poiget et Audrey Baudoin.
Une presque bonne idée a été écrit, tourné et joué à l'occasion du Triathlon vidéo de "42 heures pour un court". L'équipe de Rapace Prod avait choisi pour contrainte le thème de l'économie de partage et pour lieu la place Victor Hugo à Montargis (Loiret).
Le résultat final est en maintenant en ligne.
Une presque bonne Idée de Sébastien Deschamps, avec Victor Angenault, Mélanie Poiget, Audrey Baudoin et Mélinda Poiget, 9 mn 42
La 3e édition de Normandie impressionniste revient à partir de ce week-end, et jusqu’à la fin 2016. Comme en 2011 et 2013, la Normandie rend hommage et célèbre l’impressionnisme à travers 800 manifestations réparties sur autant de sites. Signalons que pour la première fois, l’essaimage territorial de Normandie Impressionniste se calque sur la nouvelle grande région Normandie.
Le thème choisi par le festival est celui du portrait qui est décliné autour d’expositions, de spectacles vivants, de créations contemporaines, de danses, de concerts, de pièces de théâtre, d’opéras, de colloques ou de guinguettes. L’impressionnisme a été un mouvement pictural révolutionnaire, admiré autant que décrié au XIXe siècle, et dont les apports dans le monde de l’art ont été incommensurables. Erick Orsenna, président du Conseil Scientifique du festival Normandie Impressionniste, rappelle que les peintres impressionnistes ont eu à cœur le goût de l’innovation (le travail sur les couleurs, sur lumière, sur le travail en plein-air plutôt qu’en atelier…), au cours d’une période foisonnante et tournée vers les révolutions (politiques, sociales, culturelles, artistiques ou industrielles. "Ils ont révolutionné la peinture et ouvert la voie à toutes les audaces. Quel encouragement pour les artistes d’aujourd’hui, pour tous les artistes !" dit Erik Orsenna.
Le portrait est le thème choisi par Normandie Impressionniste. Jérôme Clément, Commissaire Général du festival, souligne que l'impressionnisme ne se limite pas à la peinture de la nature ou de la flore. Des artistes comme Gustave Caillebotte (avec une rétrospective exceptionnelle, "Caillebotte, peintre et jardinier", au Musée des Impressionnismes de Giverny du 25 mars au 3 juillet 2016), Edgar Degas, Auguste Renoir ou Edouard Manet ont été des portraitistes exceptionnels.
L’impressionnisme est aussi une affaire d’hommes, de rencontres, d’influences, d’admirations et d’émulations. Par ailleurs, ces artistes ont voulu s’intéresser à des sujets neufs, à leur environnement, dans un monde en plein bouleversement. Ce sont leurs contemporains en tant qu’individus, qui les intéressaient. Le Musée des Beaux-arts de Rouen présente dans son exposition "Scènes de la vie impressionniste" (du 16 avril au 26 septembre 2016) cet aspect d’un mouvement pictural profondément humaniste. "Qu’est-ce qu’un portrait ? Une leçon d’attention à une personne, la quête de son secret, le respect et la célébration de sa différence. Un portrait, c’est de l’humain concentré", dit Jérôme Clément.
Le bloggeur reviendra sur plusieurs des événements organisés dans le cadre de Normandie Impressionniste. Outre l’exposition "Scènes de la vie impressionniste" au Musée des Beaux-arts de Rouen, il sera question de deux rétrospectives majeures : celle d’Eugène Boudin au Muma ("Eugène Boudin, L'Atelier de la lumière" Musée d’Art Moderne André Malraux) au Havre du 16 avril au 26 septembre 2016 et celle sur Fritz Thaulow (1847-1906), "Paysagiste par nature". Ce peintre norvégien, peu connu en France mais pourtant fondamental, sera mis à l’honneur au Musée des Beaux-arts de Caen, du 16 avril au 26 septembre 2016. Il sera également question sur ce blog d’art contemporain et de musique.
La cuvée 2013 de Normandie Impressionniste avait attiré 1,8 millions de spectateurs. Pour 2016, les organisateurs parient sur le même succès, "en plaçant l’humain au cœur du festival" grâce au thème du portrait (avec notamment une de ses variantes contemporaines, le selfie).
"Tous Impressionnistes" : tel est le slogan de cette troisième édition de Normandie Impressionniste.
Jerzy Skolimowski serait-il de retour après plusieurs années de discrétion ? Le réalisateur polonais était l’invité du Festival d’Alès du 18 au 28 mars dernier pour présenter son dernier opus 11 Minutes qu’il présentait en exclusivité.
Jerzy Skolimowski, qui a toujours affiché son amitié avec Roman Polanski, est le pilier de la Nouvelle Vague polonaise, avec Le Départ (1967, Ours d’Or à Berlin), Haut les Mains (1967) ou Travail au Noir (1982). Quatre Nuits avec Anna avait permis de voir le cinéaste polonais influent sortir d'un long silence. Quatre Nuits avec Anna, est sorti en 2008 dans une relative confidentialité. Son réalisateur avait mis du temps avant de proposer cette œuvre originale (sa création précédente datait de 1991).
Dans une petite ville en Pologne, Léon Okrasa, est employé dans un hôpital. Il a, dans le passé, été témoin d’un viol brutal. La victime, Anna, est une jeune infirmière qui travaille dans le même hôpital. Léon passe son temps à espionner Anna, à la guetter de jour comme de nuit. Cela en devient une véritable obsession. Un soir, il finit par s’introduire dans l’appartement d’Anna par la fenêtre qu’elle laisse entrouverte. Alors, Léon s’installe sur son lit, l’observe dans son sommeil, s’imprègne de son univers. Où s’arrêtera t-il ?
Ce film, inspiré d’un fait divers, raconte quatre nuits hors du commun passées par Léon, le personnage principal interprété par Artur Steranko, en compagnie d’Anna, sa voisine, une troublante et lumineuse infirmière jouée par Kinga Preis. Jerzy Skolimowski sait comme personne mener le spectateur là où il le souhaite, grâce à un savant sens du montage. Il sait également se servir de la trame de Quatre Nuits avec Anna pour sonder le cœur et l’âme de Léon et d’Anna, deux êtres cabossés par la vie, ayant plus de points communs qu’il n’y paraît à première vue.
Il serait injuste de limiter ce film à un drame sur l’obsession amoureuse et sur le voyeurisme, ce qu’il est par ailleurs (le spectateur lui-même ne l’est-il pas ?). En réalité, Jerzy Skolimowski donne à ses personnages des pulsions sauvages et une sorte d’animalité qui sont mises au service de l’humanité, de l’amour et de la bonté : car Anna et Léon, êtres malheureux dans un environnement pour le moins triste et étriqué, semblent être l’un comme l’autre à la recherche d’une forme de sérénité et de résilience.
C'est un voyage dans une culture que nous connaissons si mal que nous propose Chantal Portillo: celui des tziganes. Son roman, Tsigane-Oiseau, commence par un combat de coqs, une lutte à mort symbolisant les relations conflictuelles entre trois frères, le Zébré, le Rouquin – des jumeaux aux dissemblances qui finiront par se faire jour – et le narrateur, l'Oiseau. Après son refus de devenir oiseleur comme ses frères, son oncle Tchirklo prend sous ses ailes le garçon de 10 ans. Il le charge de s'occuper d'un chardonneret, un tzigane-oiseau, Danseuse, et de la dresser à chanter.
C'est une autre voie qu'ont choisie les jumeaux : coqueleurs et duettistes via des bêtes de combats réputées, les Géants des Flandres. Chantal Portillo propose d'intéressantes pages sur cette tradition aussi fascinante que cruelle et machiste: "Le monde des coqs c’est le monde des mecs, et c’est un monde de vrai. Le vrai monde. Tu dois accepter que tu vas faire mourir un coq que t’aimes et que t’aimes si fort, parce que c’est comme ça la vie, y’a toujours un gagnant et un perdant. Et qu’on ne peut pas faire autrement que de vouloir être le plus fort. C’est l’épreuve du sang qui fait devenir un homme."
Un combat de coq entre ces deux frères va faire de l'Oiseau l'épicentre d'un conflit cruel entre les deux frères, jusqu'à la tragédie finale qui cueille à froid le lecteur mais qui, à bien y réfléchir, était inéluctable : "Le destin va bientôt nous frapper Qu’il vienne / Cela n’a pas d’importance / Qui peut nous empêcher d’aller sur les chemins."
Tsigane-Oiseau est un hymne mélancolique à la liberté autant qu'un roman tragique à la sourde tension. Il s'agit également d'un véritable chant d'amour, sans dialogue, pour un peuple mal aimé : "Nous étions Sintis ou Manouches, Gitans, Roms, peu importait nous étions Tsiganes et nous étions La Musique..." L'esprit tzigane est partout dans ce roman : dans les traditions, dans la religion (avec le Père Yoska, alias André Barthélémy à qui est dédié ce livre), dans les voyages, dans la mauvaise réputation des "voleurs de poules", dans la vie difficile des camps tziganes, dans la culture, la musique et les danses, dans la solidarité de clan tzigane, dans la fierté des hommes et dans l'effacement des femmes.
Un effacement tout relatif avec ces deux personnages féminins centraux que sont la figure tutélaire de Chaga la Pithie ainsi que la Mariée, femme fatale que l'on croirait sortie d'une tragédie grecque.
Tsigane-Oiseau séduit par ses tableaux picaresques : les combats de coqs, bien sûr, mais aussi le mariage aux Saintes-Marie-de-la-Mer, le dressage et les chants de Danseuse, les jeux d'enfants dans l'église Saint-Jean-le-Vieux de Perpignan, la vie autour des décharges ou les errances imposées : "Nous pouvions laisser humiliations, cris, menaces, et partir sur le chemin. Étions-nous Gitans, Yéniches, Manouches ou Sintis, nous étions Voyageurs. Nos pères avaient été marchands, brocanteurs, saisonniers, peintres ou maçons, artistes. Mais avant tout ils étaient Voyageurs."
Il s'agit d'un roman sur les vaincus de la terre, les oubliés, les rejetés, que ce soit L'Oiseau le narrateur, le chardonneret Danseuse ou le coq Dark Vador : "Le chemin miroite à ceux qui n’ont rien" dit le narrateur.