Musique ••• Contemporain ••• Caroline Leisegang, Comes The Night, A reintroduction of Caroline Leisegang
Herenger, bourlingueur
Dreamers faux rêveurs, c’est d’abord l’album d’un musicien, Herenger, qui s’est enrichi de mille voyages et rencontres (Eeels, Maurice Jarre ou Beck). Le premier titre, "La nostalgie", peut du reste se comprendre comme le message d’un artiste sans cesse en mouvement : "Bourlingueur du temps passé / Souvenirs au fond des poches / Amour en papier délavé / Au creux d’un Jeans / De la musique dans les passions / De la musique en lingerie fine / Amour en papier délavé / Au creux d’un Jeans." Nostalgie aussi jusque dans la facture musicale renvoyant à une pop-rock aux accents à la Bashung.
Je vous fais un aveu : j’ai ouvert un dictionnaire pour comprendre le sens du deuxième titre de l’album de Herenger, "Paréidolie ordinaire". Une paréidolie est un phénomène visuel identifiant une forme à une autre (par exemple un nuage apparaîtra sous la forme d’un mouton et une tâche d’encre ressemblera à un papillon. Sur cette idée, Herenger a écrit un joli morceau convoquant avec délicatesse des rêveries et des souvenirs d’enfance : "Paréidolie dans les yeux de mon père / Regarde, tu vois, là-haut, un corps de lion."
Avec "Le gardien du phare", dans une folk cabrélienne, l’auteur-compositeur-interprète propose le portrait d’un rugueux, taiseux mais sensible homme de la côte en train de faire sa "dernière ronde" : "Ça peut paraître dérisoire / Mais dans mes rêves de gardien de phare / J’avais des voiles et des dérives / J’ai même été un bateau ivre / Aujourd’hui un peu rouillé / Je me réveille du mauvais pied / A terre, saurais-je encore aimer ?"
Herenger sait cacher derrière des titres légers, joueurs et romantiques ("Fais-moi") des morceaux aux accents plus sombres, à l’instar de "Vole" ("Vivre au bout du fil / Vivre comme un chien / A toutes fins utiles / Lui manger dans la main… Tu t’envoles enfin."), du très pop "Limoncello Moon", la seule chanson anglaise de l’opus qui parle de perte d’un être cher ("Bathe us in your beauty / Bathe us in your gold / Bathe us till the blues wears off our souls") ou encore de "Je ne sais pas", un morceau pop-folk au talk-over sensible sur une séparation indigérable ("Rester là si tu me quittes / Et vivre si tu t’en vas / Oui vivre si tu t’en vas / Je ne sais pas").
Herenger se pique également d’engagement avec son titre plus électro-world "Aux étoiles du nord", en featuring avec Kyekyeku. Il s’agit d’un hommage et un message à destination des migrants fuyant leur pays en guerre ("Fuir la ville / Ou mourir au combat / Perdre racine")
Les "Affreux de la création"
Outre ce titre mêlant chanson français et world music, Herenger teinte "Les muses sauvages" de sons jazzy, pour cette interprétation mythologique sur les "affreux de la création" comme le disait Serge Gainsbourg : "Il n’est plus de nuit ni de jour / Que des hordes de mots qui rendent fou / Et courent dans ma tête comme des chevaux sauvages".
Nous parlions d’engagement. Il en est aussi question dans "La banquise". Évidemment, la lutte pour l’environnement est une source intarissable d’inspiration, parfois de manière plus ou moins adroite (les bons sentiments n’ont jamais forcément faits les meilleures créations, n’est-ce pas ?). Herenger, lucide et "faux-rêveur", préfère parler de ce sujet avec minimalisme, finesse et poésie, au plus près de l’être humain que nous sommes : "Dans mon verre tournent les ombres / Monochromes… Hémisphères / A deux doigts menacés / Mais je bois pour oublier le nombre de deux doigts et deux mains / Nos demains menacés."
L’auditeur écoutera avec un plaisir communicatif le morceau qui a inspiré le titre de l’album. "Dreamers faux rêveurs" est un formidable titre folk sur l’enfance et les rêves que Herenger interprète avec Daguerre ("On a connu les doutes, on a connu les peurs / Et la rouille solitaire quand se fanent les fleurs / Dans des verres de partage on a noyé l’ennui / et peut-être pris de l’âge mais n’avons pas grandi / N’avons jamais grandi"). Ce duo pop-rock enlevé parle de rêves, de liberté mais aussi de voyages. De bourlingues, de nouveau. On ne se refait pas.
Herenger, Dreamer faux rêveur, Label Ancre Production / Inouïe Distribution, 2021
https://www.facebook.com/Herenger
https://lebureaudelilith.com/playlist/dreamer-faux-reveur
Voir aussi : "Bande d’Idiots"
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