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De Fondation à Foundation

C’est avec l’adaptation de Fondation, la saga d’Isaac Asimov, qu’Apple+ a fait son entrée dans la production de séries. Et, pour le moins, ce projet ne manquait pas d’ambition. Comment les scénaristes allaient-ils se sortir d’une histoire de hard SF se situant au XIIIe millénaire, avec des technologies scientifiques avancées, des vaisseaux spatiaux en veux-tu en voilà, des planètes colonisées aux confins de l’univers que l’on atteint à la vitesse de la lumière et des cultures imaginées grâce au cerveau fertile d’un écrivain génial ? Apple+ avait mis la barre très haut. Pour quel résultat ? 

Plus de vingt mille ans dans le futur, un empire galactique règne sur des millions de planètes peuplées par des milliards d’humains qui ont oublié jusqu’à l’existence de la Terre, reléguée à une lointaine légende que personne n’a pu ou su vérifier.

Le premier volume écrit de Fondation, en 1951 (Prélude à Fondation et L'Aube de Fondation ont été écrits sur le tard, entre 1988 et 1993), est constitué de cinq nouvelles s’étalant sur plusieurs siècles. Sur Trantor, la capitale de l’Empire, Hari Seldon, brillant psychohistorien – la psychohistoire est une science mêlant histoire, sociologie, statistiques et mathématiques –, prévoit que l’Empire doit bientôt s’écrouler, une décadence qui sera suivie de près de 30 000 ans de barbarie, avant la naissance d’un nouvel Empire. Le savant a cependant un plan pour réduire les temps sombres à quelques centaines d’années.

Affolées par ces prédictions, les autorités impériales l’exilent, lui et son équipe, dont une brillante tête en mathématiques, Gaal Dornick, sur la planète Terminus. C’est ce qu’avait prévu Hari Seldon. La colonisation de Terminus, planète de savants et de psychohistoriens, peut commencer, avec des voisins pour le moins turbulent. 

Au fur et à mesure que la série se déploie, le bon et le moins bon se succèdent

La première saison de Foundation, la série d’Apple+, reprend dans les grandes lignes les cinq premières nouvelles de Fondation. Les moyens financiers de cette adaptation sont évidents. La planète Trantor a été imaginée avec soin. De ce point de vue, les lecteurs d’Asimov ne seront pas trahis.

Ils le seront sans doute un peu plus avec les deux personnages principaux, Gaal Dornick et Salvor Hardin. Deux actrices (dans le roman, ce sont des hommes - mais pourquoi pas ?) endossent, pour l’une le rôle du mathématicien rejoignant Hari Seldon, pour l’autre le Maire de Terminus des décennies plus tard. En réalité, dans la série, Salvor Hardin devient la "Gardienne" de la planète colonisée et elle a plus le profil d’une tête brûlée que d’une stratège ou d’une politicienne. Quant à Jared Harris, il incarne le savant génial avec conviction – au point que les scénaristes se sont refusés de le voir disparaître trop vite. Ce qui est paradoxalement dommage.

La modernisation de Fondation pour le petit écran pose sans aucun doute quelques problèmes. L’aspect politique et scientifique laisse la place à des scènes d’action sur Terminus, assez classiques mais qui ternissent l’aspect novateur d’Asimov.

Au fur et à mesure que la série se déploie, le bon (les manœuvres du trio impérial) et le moins bon (les pérégrinations peu crédibles de Gaal Dornick dans l’espace-temps) se succèdent. En voulant raccrocher les wagons des premières nouvelles de Fondation, Foundation perd beaucoup de la saga originelle, jusqu’aux dernières minutes de la saison, où l’on assiste à une rencontre tirée par les cheveux et pas du tout convaincante.

Certes, on peut saluer l’adaptation risquée et ambitieuse de l’une des plus grandes sagas de la SF. Mais pour pleinement goûter à Fondation, il faut sans aucun doute préférer les livres à la série. Cependant, si la version filmée donne envie de lire les livres, pourquoi pas ?

Une deuxième de saison de Foundation est de toute manière déjà en chantier, preuve que l’adaptation a, au final, su convaincre beaucoup et trouver son public.   

Isaac Asimov, Fondation, éd. Folio, 1951, 256 p.
Foundation, série de science-fiction américaine de David S. Goyer,
avec Jared Harris, Lee Pace, Lou Llobell, Leah Harvey, Laura Birn,
Terrence Mann et Cassian Bilton, saison 1, 10 épisodes, 2021

http://www.asimovonline.com/asimov_home_page.html
https://tv.apple.com/fr

Voir aussi : "Sans modération"

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