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Carlin d’écrivain

D’emblée, une question se pose à la lecture de Tous des Spécimens, l’un des romans que propose Plon cet automne : qui est Italique, le mystérieux auteur de ce récit canin - et artistique ?

Puisque nous n’en serons (pour l’instant ?) pas plus, contentons-nous de dire qu’Italique est le nom d’un carlin adopté par un écrivain parisien, tout aussi anonyme. Une vie de chien pas franchement désagréable, entre promenades dans les beaux quartiers, vie mondaine avec petits fours et caresses à gogo, plateaux télé et longues journées passées avec un maître scotché devant son ordinateur.

Mais qu’elle est l’activité étrange de ce maître aimé, se demande le paisible chien en début d'ouvrage ? Quelques semaines après avoir été adopté, la révélation apparaît chez le jeune chiot, cependant dubitatif : "Mon maître est donc romancier. Pourtant, toujours fourré à droite à gauche, il  n’écrit jamais. Il n’a pas écrit depuis mon arrivé. Je l’entends toutefois souvent dire qu’il a un texte à finir, un livre à rendre, mais il préfère passer ses après-midi en ma compagnie."

Drôle de vie de cabot, et surtout drôle de vie d’écrivain. Lorsque son maître commence à écrire, Italique est le témoin du début d’une savoureuse aventure artistique mais aussi une année littéraire. L’écriture du roman de son maître, les sollicitations des médias et des bloggeurs, les discussions avec l’éditeur, la correctrice et l’imprimeur, les soirées VIP, les salons littéraire et les échanges riches avec les lecteurs ("[Mon maître] répond aux questions indiscrètes, conseille, s’épanche, reçoit des histories par dizaines car le temps d’une soirée, il n’est plus un romancier, il est un ami, un infirmier, un psy"). 

Fausse chronique et récit imaginaire d’un chien pas cabot pour deux sous

Inventer des histoires, l’animal en est certes capable, mais il ne peut que constater que l’activité de son maître, tout à son roman et "assigné à domicile" prend le pas sur les gamelles, les caresses et les promenades. Les activités de son maître ne sont pas sans conséquence sur le carlin lui-même et son intelligence, pas peu fier d’écrire : "Vous me direz, parce que je vous vois venir : « Pour un chien, celui-là parle bien. Il parle comme un homme, il s’exprime bien, façon grand conteur ». Et ce n’est pas ma faute. C’est grâce à mon maître qui écrit et que j’écoute avec dévotion comme un disciple".

Le brave cabot regarde avec un mélange d’effarement, d’ironie et de fascination l’étrange activité de son maître qui ne se sépare jamais de son chien. Drôle de spécimen ! Un animal qui assiste aux discussions entre lui et sa libraire comme aux échanges avec ses lecteurs. Aimant ("J’aime mon maître. J’aime mon maître beaucoup, intensément, à la folie…"), Italique sait aussi être lucide, contredisant son physique peu avantageux – ses bourrelets et ses yeux globuleux. Il se montre même sévère lorsque son maître le délaisse pour son travail ou ses rendez-vous, lorsqu’il se montre capricieux avec l’écriture.

Fausse chronique et récit imaginaire d’un chien pas cabot pour deux sous, Tous des Spécimens est aussi une déclaration d’amour pour un métier aussi exigeant que mal payé (on pense à l’épisode de la pièce de deux euros), qu’Italique exprime ainsi : "[Mon maître] fait vivre ses personnages, réinvestit le monde qu’il a construit, monté de toutes pièces, le temps de l’écriture".

Et si, plus qu’un écrivain, ce maître chéri n’était finalement pas un sage ?      

Italique, Tous des Spécimens, éd. Plon, 2023, 256 p.
https://www.lisez.com/livre-grand-format/tous-des-specimens

Voir aussi : "La fatale et bouleversante Belle Kaplan"

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