Musique ••• Chanson ••• Eva Marchal, 88
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Papa, mon amour
Déjà six album, mais connaît-on vraiment Brisa Roché ? Bla Bla Blog avoue honnêtement que non, du moins jusqu’à la sortie de son dernier album, Father.
Brisa Roché, avec ce prénom et ce patronyme qui fleure bon la France, nous vient de Californie. En fait, l’Américaine connaît bien notre pays. Elle a même écrit une partie de Father à Paris. Un album du reste produit par John Parish, producteur notamment de l’emblématique To Bring You my Love de PJ Harvey.
Brisa Roché est un oiseau rare à mi-chemin entre Alanis Morissette... et PJ Harvey justement. Sa voix est un mélange d’hypersensibilité et d’âpreté, servie par une orchestration essentiellement acoustique.
Comme le nom de l’album l’indique, dans Father il est beaucoup question de paternité. Brisa Roché nous parle, dans le titre Folk 48, de l’amour quasi incestueux pour son père, dealer et mort lorsqu’elle avait seize ans. Il est encore question de lui et de ses relations avec la cocaïne dans Holy Badness, ainsi que dans le dernier morceau atypique de l’album, Trout Fishing Again, sur lequel résonne la voix de son père, écrivain et professeur de littérature. La figure de la mère n’est pas pour autant absente : Brisa Roché consacre un titre tout en délicatesse à la sienne dans Patience.
Alanis Morissette et PJ Harvey
Il y a un feu ardent à la Bukowski qui brûle dans cet album dominé par des guitares et la voix au cordeau de la chanteuse américaine. Cypress a cette simplicité rugueuse et naturelle, comme si la chanteuse nous proposait un bœuf au milieu des séquoias.
Brisa Roché c’est du son pop-folk comme venu des grands espaces, dans l’Amérique hippie des années 70, non sans une touche de clavier et d’électro (Engine Off). Le choix pop de la plus parisienne des Californiennes sait se faire délicat et sombre avec Blue Night, poignant et lo-fi avec Can’t Control ou plus rude et sophistiqué avec Carnation.
Délicate, poignante, sombre, à fleur de peau, sophistiquée et rude : autant de qualificatifs pour la plus française des californiennes.
Brisa Roché, Father, Wagram / BlackAsh, sortie le 25 mai 2018
Brisa Roché, en concert à la Boule Noire (Paris),
le mercredi 20 juin 2019 à 19 heures 30
www.brisaroche.com© Jean-Baptiste Mondino
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Les pétasses magnifiques
Dans sa préface des Précieuses Ridicules, qui lui avait sans doute coûté, Molière considérait que "le succès [d’une] représentation était assez beau pour en rester là." Il est vrai que même si elle fut un succès de librairie lors de sa sortie en 1659, c’est sur scène que les Précieuses Ridicules sont à voir et à vivre.
La compagnie des Gavroches Chapeautés s’est attelée à cette comédie en un acte d’abord à la Comédie Saint-Michel en juin puis au festival Off d’Avignon du 6 au 29 juillet, la transposant à notre époque, sans pour autant lui ôter son caractère de farce. Mais comment parler de la préciosité en 2018 ? Il est vrai que le télescopage entre ces stéréotypes féminins de la commedia dell'arte et le mouvement du féminisme était de nature à piéger la mise en scène de Malu Monroe. Elle s’en sort cependant très bien, sans trahir l’essence de la pièce, une farce autour de deux jeunes femmes prétentieuses et méchamment remises à leur place.
Parlons justement des deux personnages principaux, Cathos (Manon Nobili) et Marotte (Lara Pichet), venues tout droit de Province pour suivre à Paris leur père et oncle Gorgibus (Bruno Noury). Le respectable bourgeois est bien décidé à les marier et à se débarrasser d’elles par la même occasion. Mais les jeunes femmes trouvent dans la capitale de quoi nourrir leur soif de galanterie, d’élégance et de "pommade pour les lèvres." Deux amants parisiens, La Grange (Adrien Wadih) et Du Croizy (Charles Vasner), éconduits lors d’une visite, décident de se venger d’elles en utilisant un de leur valet Mascarille (Jean-Baptise Sintès), "un extravagant qui s'est mis dans la tête de vouloir faire l'homme de condition."
Les Gavroches Chapeautés proposent des Précieuses Ridicules à l’époque de Tinder, de la carte bleue et du smartphone. La pièce de Molière ne perd rien de sa férocité et la jeune troupe ose dépoussiérer une comédie inscrite dans son époque, tout en parvenant à bluffer le public contemporain : expressions modernes ("What’s the fuck!"), musiques allant d’un prélude de Bach à Ma Benz en passant par Aïcha, mise en abîme ("Molière n’aurait jamais écrit ça"), sans oublier quelques entorses volontaires au texte original que l’auteur pardonnera certainement.
Interprètes des personnages phares de ce premier énorme succès de Molière, Manon Nobili et Lara Pichet sont comme sous ecstasy. Elles jouent à merveille les pétasses exubérantes et magnifiques, plongées dans le grand bain de la Capitale, au grand désespoir d’un Gorgibus complètement dépassé. Le bourgeois provincial est interprété par un solide et convaincant Bruno Noury.
Des Précieuses Ridicules à l’époque de Tinder, de la carte bleue et du smartphone
Ce qui était en jeu au XVIIe siècle, et qui l’est toujours au XXIe siècle, est la peinture burlesque du "m’as-tu vu" – qu’il soit homme ou femme. La vanité essaime aussi bien dans le soirées mondaines de l’Ancien Régime, dans les salons feutrés des bobos parisiens... ou sur les réseaux sociaux, avec ou sans filtres Instagram. Nos deux précieuses ridicules deviennent grâce à la mise en scène burlesque de Malu Monroe deux adolescentes éprises de liberté, aveuglées par l’illusion comique de l’esbroufe et tombant dans le piège de la flagornerie.
Cette flagornerie est endossée avec talent par Jean-Baptise Sintès. Le jeune acteur est parfait en Mascarille, devenu marquis de l’esbroufe, bonimenteur autant que donneur de leçons, puis lui-même bluffé par ses maîtres La Grange et Du Croisy. La scène de l’impromptu est un moment précieux (sic) du spectacle qui n’a rien perdu de sa force comique. Force comique mais aussi dimension sombre d’une pièce toujours aussi mordante : " Ô fortune ! quelle est ton inconstance !" s’exclame Mascarille avant d’être dépouillé de tout par ses maîtres. C’est Gorgibus qui a le dernier mot, envoyant au diable autant ces précieuses qui l’ont humilié que ce qui est "cause de leur folie."
Il ne reste que quelques représentations à Paris pour découvrir cette pièce mordante et drôle, avant des séances de rattrapage au festival d’Avignon cet été.
Molière, Les Précieuses Ridicules, mise en scène de Malu Monroe, Compagnie des Gavroches Chapeautés, avec Manon Nobili, Bruno Noury, Lara Pichet, Jean-Baptiste Sintès, Alexis Vandendaelen, Charles Vasner et Adrien Wadih
Comédie Saint-Michel, en juin, tous les samedis à 21h30, 95 Boulevard Saint-Michel, Paris
Au Festival Off 2018, Avignon, 6 au 29 juillet 2018 (relâche les 10, 17 et 24), 14 heures au Théâtre La Tache d'Encre, 1 rue de la Tarasque, Avignon
http://lesgavrocheschapeautes.fr -
Breizh’n roll
Promettez-moi une chose : si cet été, ou plus tard, vous allez en Bretagne, pensez à mettre dans vos bagages l’album éponyme des Odylane. Pour une plongée dans la culture breizh, c’est l’idéal, avec en plus ce je ne sais quoi de punch et d’énergie.
Odyssée et Gauloise c’est la tradition celtique "très rock’n roll" comme le dirait notre inénarrable Philippe Manœuvre. En parlant de tradition, on en est en plein dedans, avec l’envoûtant titre Le Diable. Cette chanson nous plonge dans le folklore breton, plus précisément dans un bar interlope de la Rue de la Soif : "Ce soir j’ai vu le diable / Aux ruses impeccables / Je suis tombé dans le panneau / On a pris l’apéro."
Dans un bar interlope de la Rue de la Soif
Du bon breizh’n roll donc, avec des sonorités celtes, rock mais aussi méditerranéennes (Un Italien en Irlande), pour un album autoproduit par un groupe... de la région de Strasbourg. Guillaume Levy et Quentin Bangert, accompagnés de leurs deux autres comparses Valentin Descourvières et Piel Benoit utilisent pour leur album une guitare classique, un bouzouki irlandais, un violon et d’un cajón, une sorte de caisse venue tout droit du Pérou.
Dépaysement assuré donc pour ce groupe qui assume à 100 % ses influences traditionnelles (Polka du Cerf), pop rock (Soleil Levant) world et ethnique (La Prisonnière du Désert), même si c’est bien la musique celte qui domine dans leur album Odrylane, à l’exemple de Faune Sauvage et surtout de Galv an Dans, offrant une reprise mixée de Tri martelod et de La Jument de Michao.
L’autre chanson à texte de cet album, Sous les Étoiles, est un titre hip hop qui n’est pas sans rappeler Manau et sa Tribu de Dana, avec le sens de l’engagement en plus : "Je vis à une époque / Où tout semble en toc / Il n’y a que des images / Où sont passés les sages."
Du Breizh’n roll, d’accord. Mais aussi de l’exigence et de la chaleur (Un Italien en Irlande) dans un très bel album à mettre dans vos bagages pour cet été.
Odrylane, Odrylane, 2018
http://odrylane.fr -
La liberté a-t-elle un prix ?
Le café philosophique de Montargis fixera son prochain rendez-vous le vendredi 22 juin 2018 à 19 heures, au café Le Belman. Le sujet du débat portera sur cette question : "La liberté a-t-elle un prix ?"
La liberté a été un sujet souvent traité par le café philo. Il a régulièrement été question de choix personnels, de contraintes à la liberté, de libre-arbitre ou de détermination. Il sera cette fois question du prix que l’on pourrait donner à cette liberté. Mais de quel prix parlons-nous au juste ? Est-ce à dire que la liberté peut se monnayer voire se négocier ? La liberté serait-elle alors un don ? Puis-je renoncer volontairement à ma liberté ? Peut-on dire comme Jean-Jacques Rousseau que "renoncer à sa liberté c’est renoncer à sa qualité d’homme, aux droits de l’humanité, même à ses devoirs" ? Quel prix suis-je prêt à mettre pour me libérer ?
Ce sont autant de points qui pourront être débattues lors de la séance du vendredi 22 juin 2018, à partir de 19 heures au café Le Belman, boulevard des Belles Manières, à Montargis. La participation sera libre et gratuite.
Il s’agira de l’avant-dernier rendez-vous de la saison, puisque le lendemain, samedi 23 juin à 14H30, l’équipe du café philo organisera un dernier-rendez-vous aux Tanneries d’Amilly, "La philo sous les arbres", autour de l’exposition "Formes d’Histoires."
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La philo sous les arbres
Le café philosophique de Montargis fixe un rendez-vous exceptionnel, le dernier de cette saison, aux Tanneries d’Amilly, le samedi 23 juin 2018 à partir de 14 heures 30.
Cette "Philo sous les Arbres" sera une rencontre conviviale autour de l’exposition "Formes d’Histoires" et dans le cadre des (f)estivales prévues le samedi 23 et dimanche 24 juin par les Tanneries d’Amilly.
Après une visite libre de l’exposition "Formes d’Histoires", les participants du café philo échangeront autour des thématiques de cette exposition : l’univers des contes, l’imaginaire ou le visible et l’invisible. Ils se poseront notamment cette question : "Qu’est-ce que les contes ont à nous raconter ?"
Ce dernier rendez-vous de l’année sera une occasion atypique et conviviale de faire de la philosophie autrement et dans un cadre exceptionnel.
La participation sera libre et gratuite.
http://cafephilosophique-montargis.hautetfort.com
"Formes d’histoires", de gauche à droite : Amandine Guruceaga, Julien Salaud, Ghyslain Bertholon
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La brodeuse masquée a encore frappé
La Brodeuse Masquée sévit sur Internet, via ses comptes Facebook et Instagram, et elle mérite que l’on s’y intéresse.
Qui est cette mystérieuse femme, œuvrant dans l’ombre avec un sens de l’humour décalé dans un créneau jusque-là has-been, celui de la broderie ?
Pour se présenter, notre Brodeuse Masquée use d’une phrase pompée avec malice dans le jargon complotiste : "Qui est-elle ? Quels sont ses réseaux ? Seuls ceux qui savent savent…" Quelques indices sur ses créations – un hommage au club de football de l’AS Nancy Lorraine et un autre au régional de l’étape, Michel Platini – laissent à penser que c’est en Meurthe-et-Moselle qu’il faut chercher la trace de cette artiste d’un autre genre.
L'affaire Gregory au point de croix
Mais au fait, que propose-t-elle exactement ? Ni plus ni moins que des broderies à l’ancienne, kitsch à souhait avec cadres à l’avenant. Oubliez par contre les thèmes classiques chères à nos grands-mères : chez elle, il n’y ni compositions florales, ni paysages minimalistes, ni bestiaires dignes des calendriers de La Poste, ni arabesques plus ou moins baroques, mais des phrases, des citations ou de simples mots claquant comme des slogans, des provocations ou des références à une actualité récente, avec un corbeau noir en guise de signature.
Avec un humour noir certain, la Brodeuse Masquée se sert de faits divers, que ce soit l’affaire Gregory et son mystérieux corbeau, celle d'Omar Raddad ou encore les crimes de Francis Heaulme, en reprenant au point de croix des phrases emblématiques, fautes d’orthographe et de syntaxe incluses : "Je suis jamais allée à Lépanges," "Bernard, il est innocent", "Omar m’a tuer" ou "Montigny, c’est pas moi." Tout récemment, c’est Pierre Belmare, le regretté "chroniqueur judiciaire à moustaches," qui a eu les honneurs de notre artiste, avec cette épitaphe : "R.I.P. petit ange parti trop tôt."
Des phrases devenues légendaires sont recyclées au profit d’objets détournés et appelés à devenir uniques, sinon cultes. Maintenant, rien ne vous empêche d’installer ses broderies sur votre guéridon ou bien au-dessus de votre commode de salon, juste à côté du napperon défraîchi de tante Janine : effet garanti et, n’en doutons pas, propre à susciter la jalousie de vos voisins et – pourquoi pas – futurs corbeaux.
Sublime, forcément sublime.
https://www.facebook.com/labrodeusemasquee
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Les victoires en bleu et les bleus des défaites
À quelques jours du début de la coupe du monde de football, voilà un documentaire que Didier Deschamps a vu ou verra. À moins qu’il ne fasse le choix de zapper Sélectionneurs, un documentaire de Renaud Saint-Cricq, tant ce film a de quoi donner des sueurs froides à ces hommes en charge du coaching des hommes en bleu.
Pour ce film proposé par Canal+, Renaud Saint-Cricq a interrogé quelques sélectionneurs marquants de qui ont mouillé leur maillot sur le banc de touche : Michel Hidalgo, Gérard Houiller, Michel Platini, Henri Michel (décédé il y a quelques mois et à qui est dédié ce film) et l’inimitable Raymond Domenech. Il manque toutefois le témoignage d’Aymé Jacquet, l’un des forgerons de la victoire de 1998. Ces figures marquantes du football français racontent de l’intérieur ce job à haut risque, hors du commun, passionnant, exaltant mais aussi plein d’ingratitudes.
Ils parlent de la découverte de ce métier si particulier, des relations compliquées avec les médias, des victoires, des défaites puis de la fin souvent brutale de leur mission. Le sélectionneur est souvent le fusible qui saute, puisqu’on ne peut pas virer onze joueurs d’une équipe qui a failli, comme le fait remarquer Raymond Domenech.
Le chef-d’œuvre de Zidane
Les grands matchs, gagnés ou perdus, sont évoqués : la demi-finale France-Allemagne lors du mondial de 1982, le quart de finale contre le Brésil eu Mexique en 1986, le match qualificatif contre la Bulgarie en 1993, le "chef-d’œuvre de Zidane" lors du France-Brésil de 2006 et la finale perdue contre l’Italie lors de cette même coupe du monde. Raymond Domenech revient également longuement sur l’affaire de Knysna en 2010.
Chacun des sélectionneurs revient avec franchise et souvent émotion ces sur ces compétitions, sur leur passion, sur leurs relations avec les joueurs et sur les difficultés qu’ils ont dû affronter. Les bonheurs comme les blessures de ces hommes en bleu ne sont pas cachées. Des blessures qu’ils acceptent, tout en déplorant que dans leur profession si particulière, ce soient les proches et les enfants qui souffrent le plus. Gageons que, pour cette coupe du monde sur le point de commencer, Didier Deschamps ne connaîtra que les très grands bonheurs d’une victoire et pas les bleus des défaites.
Sélectionneurs, de Renaud Saint-Cricq, France, 2018, 82 mn,
en ce moment sur Canal+