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Charly 9 c'est Charles IX, roi de France de 1561 jusqu'à sa mort en 1574, à l'âge de 24 ans. Ce roman de Jean Teulé retrace les deux dernières années de sa vie, marquées par le massacre de la Saint-Barthélemy (24 août 1772) que Charles IX a plus accepté et subi que réellement voulu. Cet épisode traumatisant, et encore aujourd'hui discuté et débattu par les historiens, va porter un coup fatal à sa santé déjà fragile. Jean Teulé nous livre un roman rythmé, inspiré, audacieux et mêlant style archaïque du XVIIème siècle et langue moderne.
En suivant Charly 9 dans les deux dernières années de sa vie, une vie rongée par la culpabilité jusqu'à la folie puis la mort, Teulé nous permet de vivre au plus près d'une cour royale en ébullition. Par contre, le lecteur peut être troublé voire circonspect s'agissant de l'aspect purement historique.
Les approximations et les raccourcis ne manquent pas : Catherine de Medicis est ainsi décrite comme une femme manipulatrice et à l'origine du massacre de la Saint-Barthélemy, ce que beaucoup d'historiens contestent ; les futurs Henri III et Henri IV ou bien encore Ronsard apparaissent comme des personnages caricaturaux. Au passage, pourquoi faire de Charles IX l'inspirateur du poème épique (inachevé) de Ronsard La Franciade alors qu'il avait été demandé par son père Henri II ?) Un roman en tout cas plaisant, qui se lit avec grand plaisir et qui donne envie de mieux connaître cette période troublée.
Sacrée gageure que Toccare, l'album imaginé par la pianiste sino-canadienne Claudia Chan. Il est vrai que la musicienne est reconnue comme une spécialiste mondiale dans la création contemporaine. Pour cet enregistrement public au Bad Godesberg de Bonn et proposé aujourd’hui en disque par les éditions b.records, elle s’attaque au répertoire italien.
Au menu, Gian Francesco Malpiero (1882-1973), le doyen, Sylvano Bussotti (1931-2021), Salvatore Sciarrino (né en 1947), Giulia Lorruso (née en 1990), Simone Cardini et Francesco Fildei (né en 1973), ce dernier étant présent dans plusieurs créations.
La musique contemporaine est un univers fascinant et aux multiples dimensions, ce que montre bien ce passionnant opus, intelligemment nommé Toccare – "Toccare", comme "toucher" en italien, celui précisément d’une interprète archi-douée, envoûtante, curieuse et à la virtuosité indispensable pour aborder ces pièces singulières et bien différentes les unes des autres.
Dans le livret de présentation, à la conception originale, soignée et si caractéristique chez b.records, Claudia Chan souligne la singularité du premier compositeur de son programme, Gian Francesco Malpiero, influencé autant par la Renaissance que par la musique du début du XXe siècle : "Il est difficile à situer historiquement lorsqu’on l’entend", précise-t-elle dans son interview. L’auditeur ne sera pourtant pas totalement perdu dans les deux mouvements de Bianchi e neri (1964), alliant légèreté, gravité (Lento, non troppo) et sombres présages (en particulier le Non troppo lento).
Parlons ensuite de la deuxième Sonate pour piano de Salvatore Sciarrino datant de 1983, "une des pièces les plus difficiles que j’ai jamais jouées", confie la pianiste. Il est vrai que la technicité et la virtuosité sont indispensables pour venir à bout de cet opus de plus de neuf minutes (et un seul mouvement). Nous voilà sans au cœur d’une musique contemporaine défiant la tonalité et le rythme, près à décontenancer grâce à ses décrochages incessants et ses vagues s’étirant dans une confusion qui n’est qu’apparente.
Une audace sonore que Claudia Chan assume avec cran
Après un passage par Sylvano Bussotti et sa pièce Musica per amici, très influencée par "les traditions sérielles austro-germaniques", Claudia Chan s’attaque au cœur de son programme, à savoir Francesco Fildei, présent dans trois œuvres, un Preludio (1999), une Suite en trois mouvements et une création de 2023 dédiée à la pianiste, naturellement intitulée For Claudia. Disons tout de suite que l’auditeur sera déconcerté par l’utilisation singulière des sons du piano, transformé pour l’occasion en instrument de percussion. Les sonorités inédites font du Preludio un vibrant hommage à cette musique contemporaine revigorée après 1945 grâce à des compositeurs comme John Cage. Pour Suite (1997), jamais sans doute personne n’a composé de Toccata ou de Notturno avec une telle liberté, en se démarquant complètement du jeu pianistique.
Oubliez Bach, Chopin ou Fauré. Ce qui se joue ici est une certaine notion de la liberté et de la création pure que la pianiste juge unique dans le monde. Voilà qui donne la mesure de cette audace sonore que Claudia Chan assume avec cran. La Suite se termine avec le tout aussi étonnant Garibaldi’s little rock, dans lequel quelques notes de clavier résonnent, bousculés par les chuintements et percussions… de piano. Pour terminer sur Francesco Filidei, le For Claudia, composé pour la pianiste, obéit à la même grammaire, avec une liberté poussant l’interprète jusqu’à ses derniers retranchements, ce que Claudia Chan assume là encore non sans enthousiasme.
L’auditeur ne sera sans doute pas insensible à la benjamine de cet enregistrement, à savoir la compositrice Giulia Lorusso. Avec la fascinante pièce Kemò-vad, créée en 2021, elle nous entraîne dans un voyage musical zen et orientalisant. Claudia Chan caresse littéralement les touches de son piano avec une économie de moyens, au point que le silence est roi dans cette méditation sonore.
Simone Cardini vient compléter ce programme italien. Sa composition de 2020, Restare non ha luogo, un long mouvement fait de pauses, de saccades interrogatives et de touches pianistiques tour à tour inquiétantes et mystérieuses, prouve là encore la vitalité de jeunes compositeurs transalpins. Claudia Chan les chouchoute avec amour et en leur donnant une visibilité – et une audition – unique. Grazie mille, Claudia !
Que veux dire "petit film d’horreur" ? Voilà une expression mal venue et pour le moins dédaigneuse. Parlons donc simplement de film d’horreur pour évoquer Barbare, arrivé il y a peu sur Netflix et que beaucoup vont certainement découvrir.
Tess débarque à Détroit pour un rendez-vous d’embauche. Elle a choisi une location AirnB dans un quartier défavorisé de la ville. Las, elle découvre un occupant, Keith, a priori de bonne foi. En attendant de régler la situation, les deux locataires décident de se partager la maison. Mais Tess, méfiante, découvre durant la nuit, que des choses anormales se passent.
Quelques temps plus tard, à l’autre bout des États-Unis, un acteur bien côté, AJ Gilbride, se trouve aux prises avec une accusation d’agressions sexuelles. Pour payer ses avocats, il décide de vendre la maison de Détroit. Il s’y rend pour régler les dernières affaires. Et lui aussi tombe dans le piège dans cette demeure qu’il connaissait visiblement très mal.
Une héroïne damant le pion aux deux acteurs du film
Une maison inquiétante (hantée?), une jeune femme terrorisée, un inconnu inquiétant (Bill Skarsgård, le clown du dernier Ça) et des monstres que l’on découvre au bout d’une heure après une lente et classique montée en tension. A priori, rien de remarquable dans ce Barbare, au titre aussi choc que la première mort brutale dans les tréfonds de la location AirnB – de quoi vous faire réfléchir avant d’organiser vos prochaines vacances.
La grande particularité de ce film est de surfer sur la vague #MeToo. Oui, Tess obéit aux canons de l’héroïne en danger – et ses cordes vocales sont mises à contribution. Mais, justement, il s’agit d’une héroïne damant le pion aux deux acteurs du film. Le second volet du film, avec l’insupportable AJ Gilbride, appuie le message féministe, d’autant plus lorsque le spectateur découvre les secrets de la maison. Au passage, on aura fait un flash-back dans le Détroit des années Reagan à travers sans doute la meilleure séquence du film.
Film d’horreur certes, diablement efficace et ne dédaignant pas les scènes gores et franchement peu ragoûtantes, Barbare parvient en plus à instiller quelques messages sur l’Amérique d’aujourd’hui. À découvrir.