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  • Accro !

    Léa Grosson cache bien son jeu. Maman d’un garçon, en couple et heureuse avec son compagnon, provinciale et vivant à la campagne entourée d’animaux, celle qui s’est fait connaître sous le nom de Celle qui aimait grâce à son blog et ses réseaux sociaux, nous propose cette année son premier roman Depuis cette nuit (éd. La Musardine). Une vraie réussite en la matière et une entrée fracassante dans la littérature érotique.

    Léna, graphiste free-lance, est une accro au jeu, au poker plus précisément. Cette célibataire bien dans son époque se rend compte qu’elle est prise au piège de cette addiction. Lors d’une soirée qui s’est mal passée – elle s’en est prise à un distributeur automatique – elle est embarquée par les flics. Faute d’avocat, elle choisit d’appeler la seule personne dont elle a le numéro. Il s’appelle Étienne, elle l'a rencontré après une sortie au casino et il tombe à point nommé : avocat, attentionné, il est irrésistible. Mieux, il est un ancien drogué aux jeux. Il lui propose de l’aider à se sortir de cette spirale infernale. La recette ? L'amour ! Car quoi de mieux pour soigner une addiction qu’une autre addiction. En l’occurrence, le sexe. 

    Roman particulièrement moderne et contribuant à secouer le petit monde de l’érotisme littéraire

    Léa Grosson explique dans sa longue section de remerciements – en réalité une postface – que Depuis cette nuit a commencé par une nouvelle qu’elle a publiée sur son blog. Cette nouvelle est précisément le Chapitre 45 (sic) qui ouvre le roman. Et quel chapitre ! L’auteure nous offre une scène sacrément audacieuse autour d’un jeu à plusieurs. Inutile de vous en dire plus pour vous laisser la surprise. Caliente !

    Après ce début, la nouvelle est devenue un projet de roman. Pour le commencer, l'auteure a fait le choix d'interagir avec ses abonné⸱e⸱s : profession d’Étienne (avocat ou professeur ?), lieu de leur premier rendez-vous (Appartement de Léna ? Résidence d'Etienne ? Une maison isolée ?) et choix du cadeau offert par le fringuant lover. La suite, c’est une série de jeux à deux – puis à plusieurs.

    Léa Grosson s’est visiblement beaucoup amusée dans ce roman astucieusement présenté comme "à mi-chemin entre romance et littérature érotique". La love story est bien là, répétée à l’envi par Léna, la narratrice, mais le sexe a la part la plus généreuse. En cette période Meetoo, Léa Grosson se plaît à interroger les interdits, la soumission, la masculinité et le féminisme. Cela rend ce roman particulièrement moderne et contribue à secouer le petit monde de l’érotisme littéraire. Libre, Léa Grosson – et son alter-ego Léna – le sont, assurément.

    Pas de prise de tête, vraiment, mais d’autres prises...

    Léa Grosson, Depuis cette nuit, éd. La Musardine, 2024, 220 p.
    https://www.cellequiaimait.com
    https://www.facebook.com/Celle.qui.aimait
    https://www.lamusardine.com/litterature/18548-9428-depuis-cette-nuit.html

    Voir aussi : "Un salon pas cucul"

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  • Louis Durdek sur la route

    Saluons pour commencer le joli travail de prise de son de cet album qui, contrairement à son titre et à sa facture musicale, vient bien de chez nous. Louis Durdek, songwriter français, chanteur et guitariste, sort son premier opus, avec déjà un univers et une patte bien identifiés : la pop-folk en héritage américain.

    Dès les premières notes à la guitare de The Long Way, hymne à la liberté, au voyage et au départ, nous sommes en terrain conquis. Le goût de l’aventure et du trip, Louis Durdek l’a sans nul doute au cœur… et aux tripes. "Je ne changerai jamais mon mode de vie / Même pour les mines d’or du roi Salomon", chante-t-il dans le titre éponyme de son album ("I wouldn’t change this life of mine / Not even for the gold of Solomon’s mines", Unnamed Road).

    Les routes – inconnues – le baluchon à l’épaule, le premier train du matin, un vieux pick-up. Nous sommes dans un album largement dominé par les grands espaces et le goût de l’aventure, avec l’horizon comme objectif (The Horizon), même si ce fil rouge qu’est le voyage peut avoir son lot de mélancolie et de douleurs (Road Of Sorrow) mais tellement nécessaire pour être libre ("A long way to go / For us to be free / So won’t you take me to all / All of our wild destinations?",  All of Our Wild Destinations).

    Nous sommes dans un album largement dominé par les grands espaces et le goût de l’aventure

    Il y a du Nick Drake dans la délicatesse déchirante d’un morceau comme "M. & Mrs D". Ici, le folk est mâtiné de pop, mais avec toujours le choix de l’acoustique. Acoustique encore avec le joli duo blues Holy Waters.

    L’album se termine avec In My Heart Grows A Tree, singulier et déchirant titre mêlant folk, pop et sons traditionnels indiens. Mélancolique, Louis Durdek y chante la tristesse, la mémoire, les racines mais aussi la recherche d’une terre promise.

    Unnamed Road signe l’arrivée d’un artiste dont il faudra absolument suivre la carrière. Toute la question est de savoir quelle route il prendra. Folk, pop ou autre chose ?  

    Louis Durdek, Unnamed Road, 2024
    https://www.facebook.com/louisdurdekmusic
    https://www.instagram.com/louisdurdek

    Voir aussi : "On ne meurt pas deux fois"
    "Un sacre pour Bobbie"

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  • La Bohême, la Bohême...

    Derrière le titre Deep Forest se cache l’album du Quatuor Akilone consacré à Antonin Dvořák. Les quatre musiciennes ont jeté leur dévolu sur le Quatuor à cordes n°14 en la bémol majeur, B. 193, op. 105 et Les Cyprès B.152, deux œuvres représentatives du compositeur tchèque, en dépit du fait que l’on retienne surtout du compositeur ses célèbres symphonies, dont celle du Nouveau Monde.

    Voilà donc un autre champ de découverte. La patte de Dvořák frappe immédiatement aux oreilles : sens de la mélodie, densité et un  mélange de subtilité et de fougue.  

    Avec Dvořák, on ne s’ennuie jamais, et l’on est d’autant plus séduit par le jeu des quatre concertistes (Magdalena Geka et Élise De-Bendelac au violon, Perrine Guillemot-Munck à l’alto et Lucie Mercat au violoncelle) qui sont allées jusqu’en République tchèque pour s’imprégner de l’atmosphère de ce pays magique.

    C’est toute l’âme du pays qui transparaît dans le Quatuor à cordes n°14, écrit en 1896 aux États-Unis et pensé comme un voyage dépaysant en Bohême (premier mouvement Adagio ma non troppo – Adagio appasionato). Le compositeur a choisi un tempo rapide (Molto vicace) pour le deuxième mouvement. Puisant ses influences dans la tradition musicale tchèque, l’œuvre s’en détache avec bonheur et un certain enthousiasme.

    On ne dira jamais assez que Dvořák a été pour la fin XIXe et le début XXe siècle, un musicien européen phare du classicisme. La preuve avec le troublant et poignant troisième mouvement Lento e molto cantabile, laissant de larges places aux pauses, aux suspensions et aux silences. Le 14e Quatuor se termine par un étrange mouvement, Allegro ma non troppo. Une danse envoûtante, et aussi inquiétante aux entournures (le formidable violoncelle de Lucie Merlat), guide cette dernière partie s’éloignant peu à peu de la nuit pour aller vers l’apaisement, pour ne pas dire la lumière. 

    Une œuvre que le compositeur n’a eu de cesse remaniée tout au long de sa vie

    La deuxième partie du programme est consacrée à une pièce de jeunesse rare de Dvořák. Les Cyprès (Cypřiše) est une œuvre que le compositeur n’a eu de cesse de remanier tout au long de sa vie. Les membres du Quatuor Akilone ne cachent pas leur amour pour cette œuvre peu connue et inspirée de poèmes de Gustav Pfleger Moravský. Ceci explique la présence de ces Cyprès dans leur album, inspirant en outre le titre de l'album et ses forêts profondes. Au passage, impossible de ne pas parler de l’engagement environnemental du quatuor. Sensible à ces questions, il est membre du réseau ARVIVA.

    Dvořák tire 12 mélodies somptueuses pour lesquelles il a toujours eu un attachement singulier. Dans le livret du disque, Tristan Labouret s’interroge d’ailleurs sur cette œuvre tellement aimée du compositeur : "Pourquoi donc cet éternel retour à ce cycle de jeunesse ?" Ce n’est certainement pas l’idée d’un succès commercial puisque Les Cyprès ne seront jamais publiés du vivant du musicien. Pourquoi pas une histoire d’amour – non-réciproque – avec la belle-sœur du compositeur ? Peut-être si l’on en croit les titres de plusieurs mélodies : "Je sais que mon amour pour toi" (Já vím, že v sladké naději), "Quand tes doux regards tombent sur moi" (V té sladké moci očí tvých) ou encore "L'amour ne nous mènera jamais à cette fin heureuse" (Ó, naší lásce nekvete to vytoužené štěstí). Mais la réponse est sans doute est à la fois plus simple et plus personnelle, dit en substance le texte du livret. Dvořák voyait dans Les Cyprès le retour à son enfance, à l’insouciance et à la liberté.

    D’ailleurs, cette légèreté et cette paix est bien transcrite par les quatre musiciennes du quatuor. Le romantisme finissant (Les Cyprès ont été écrits à partir de 1887) donne à ces mélodies une facture immédiatement envoûtante, comme si elles semblaient hors du temps et hors de toute géographie réelle. C’est une forêt transfigurée qui se donne à entendre ("Dans la clairière la plus profonde de la forêt, je me tiens", Zde v lese u potoka). La pureté de ces lignes mélodiques expliquent en même temps qu’elles justifient que Dvořák y ait consacré de longs moments. Le Quatuor Akilone les délivrent avec la même grâce.

    C’est d’autant plus somptueux qu’elles ont été aidées par la superbe prise de son de Ken Yoshida lors de l’enregistrement à l’église de Nanteuil-sur-Marne à l’automne 2023.

    Dvořák, Deep Forest, Quatuor Akilone, Klarthe, 2024 
    https://quatuorakilone.com
    https://www.klarthe.com
    Concerts en France : le 17/12/2024 à Roubaix (59) - Concerts de Poche, le 16/01/2025 à Paris,
    Fondation Singer-Polignac (sur invitation) et le 31/01/2025 à Menetou-Râtel (18)

    Voir aussi : "Hanni Liang et les voix (féminines) du piano"
    "Trio percutant"     
    "Élise Bertrand, ultra moderne romantique"

    Crédit photographique : © Hubert Caldaguès - Photoheart

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  • La Plus précieuse des marchandises

    Les Cramés de la  Bobine présentent à l'Alticiné de Montargis le film La Plus précieuse des marchandises. Il sera visible du 11 au 17 décembre. Soirée débat à l’Alticiné le mardi 17 décembre 2024 à 20H30.

    Il était une fois, dans un grand bois, un pauvre bûcheron et une pauvre bûcheronne.
    Le froid, la faim, la misère, et partout autour d´eux la guerre, leur rendaient la vie bien difficile.
    Un jour, pauvre bûcheronne recueille un bébé. Un bébé jeté d’un des nombreux trains qui traversent sans cesse leur bois.

    Protégée quoi qu’il en coûte, ce bébé, cette petite marchandise va bouleverser la vie de cette femme, de son mari , et de tous ceux qui vont croiser son destin, jusqu’à l’homme qui l’a jeté du train.

    La Plus précieuse des marchandises, film d’animation français de Michel Hazanavicius
    avec les voix de Jean-Louis Trintignant, Dominique Blanc, Denis Podalydès, Gregory Gadebois, 2024, 81 mn
    https://www.cramesdelabobine.org/spip.php?rubrique1505
    https://www.studiocanal.com/title/the-most-precious-of-cargoes-2024
     
    Voir aussi : "Le repli"
    "Hommage aux cinémas"

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  • Le Repli

    Les Cramés de la  Bobine présentent à l'Alticiné de Montargis le film Le Repli. Il sera visible du 11 au 17 décembre. Soirée débat à l’Alticiné le lundi 16 décembre 2024 à 20H30.

    Yasser est militant des droits de l’homme. Joseph est cinéaste. Ils interrogent, des années 80 à aujourd’hui, le phénomène du repli identitaire en France, la montée du racisme et les restrictions des libertés. Ils délivrent la parole qu’on ne veut pas entendre, en décortiquant le discours médiatique et politique, confrontant l’actualité aux archives. Pourquoi nos libertés ne cessent-elles de reculer ?

    Le Repli, documentaire français de de Joseph Paris, 2024, 93 mn
    https://cramesdelabobine.org/spip.php?rubrique1504 
    https://josephparis.fr/le-repli
     
    Voir aussi : "Une part manquante"

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  • Petite bibliothèque et Grande Librairie

    Si vous avez déjà Le Mystère Henri Pick de David Foenkinos, ce n’est pas grave. Sinon, c’est encore mieux. L’adaptation en bande dessinée de l’un de ses livres les plus célèbres, Le Mystère Henri Pick (éd. La Boîte à Bulles) revient sur une de ses intrigues les plus singulières, naviguant entre un coin paumé de Bretagne et le Paris bobo et culturel. Pascal Bresson, au scénario, et Ilaria Tebaldini, au dessin, ont commis le tour de force d’adapter une histoire attachante à plus d’un titre, mêlant histoire d’amour, secret de famille et plongée dans la nomenklatura éditoriale parisienne.  

    L’une de ces intellectuelles, Delphine Despero, jeune éditrice chez Grasset, a le nez fin lors d’un week-end en Bretagne dans sa famille. Elle vient présenter à ses parents Frédéric Koskas, son ami et modeste écrivain. Au cours de son séjour, elle entend parler d’une bibliothèque municipale présentant un rayon de manuscrits refusés et déposés par des auteur⸱e⸱s. Elle s’y rend et tombe sur un roman dont le titre - Les dernières heures d’une histoire d’amour - l’indique. Lecture faite, Delphine sort convaincue qu’elle est tombée sur un best-seller. L’auteur, un certain Henri Pick, est connu dans la région comme un modeste pizzaiolo qui n'a jamais montré aucune âme d'artiste ou d'intellectuel. Il est décédé depuis. Alors que le roman fait le buzz, le mystère reste entier sur cet Henri Pick. Quel secret cachait-il ? Et surtout, est-il l’auteur du fameux roman ?

    Une belle histoire d’amour et d’artiste

    Évidemment, il est impossible d’en dire plus sur cette intrigue devenant vite une enquête menée par un journaliste du Figaro, aux faux-airs de Michel Houellebecq – Michel Houellebecq que l’on croise par ailleurs au début de la bande dessinée. Autre caméo, celui de David Foenkinos, l’auteur du roman, lui-même. Le lecteur attentif le trouvera au milieu du plateau de La Grande Librairie, alors que son animateur François Busnel prépare l’interview de la veuve d’Henri Pick.

    Cette histoire de manuscrit inédit devenu livre à succès s’intéresse aussi et surtout au choc des cultures entre le milieu feutré de l’édition et celui plus simple et sans prise de tête d’une petite ville à la campagne. Toutes ces personnes se croisent mais ont du mal à se comprendre, à l’image de l’interview pour La Grande Librairie.

    Pascal Bresson a réussi une belle adaptation du roman de David Foenkinos. Il a été aidé en cela par le pinceau d’Ilaria Tebaldini, croquant quelques figures réelles du monde des livres. Au réalisme, elle préfère appuyer sur les traits pour accentuer les expressions. Un soin particulier a été apporté aux paysages et décors – la Bretagne, Paris. Le lecteur se laissera prendre par ce qui est finalement une belle histoire d’amour et d’artiste.

    Pour celles et ceux qui avaient tout de même lu le roman de David Foenkinos, ne boudez pas votre plaisir et allez redécouvrir ce qui est sans doute l'uns des meilleures histoires de l'écrivain. 

    Pascal Bresson et Ilaria Tebaldini, Le Mystère Henri Pick, éd. La Boîte à Bulles, 2024, 176 p.
    D’après un roman de David Foenkinos
    https://www.la-boite-a-bulles.com/album/670/content/53
    https://www.facebook.com/people/Pascal-Bresson-BD/100012233622350
    https://www.instagram.com/ilaria.tebaldini.art 
    https://www.facebook.com/david.foenkinos 

    Voir aussi : "La bibliothèque des auteur·e·s inconnu·e·s"
    "David Foenkinos, son œuvre"

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  • In vino veritas

    Soyons sérieux. Ces 50 histoires lunaires sur le vin n’ont pas pour ambition de dresser un tableau de l’œnologie, ni de faire une chronologie de l’histoire de la vigne et du vin, ni surtout de faire preuve d’érudition pour impressionner le lecteur ou la lectrice. Quoique ! En parlant d’érudition, Fabrizio Bucella n’en manque pas. Mais il la manie avec humour et dans un style enlevé. L’OVNI qu’il nous propose (Objet Vinicole Non Identifié, éd. Hachette) se veut avant tout une histoire d’amour sur une boisson vieille de plusieurs millénaires, souvent admirée autant que critiquée. Et aujourd'hui en danger à cause du réchauffement climatique. 

    L’ouvrage, illustré par Théophile Sutter ("L’Immortel"), propose cinquante chroniques sans ordre chronologie. Ces courts textes montrent que le vin a, de tout temps, suscité admiration, rejet, fascination et a réussi à devenir un marqueur de raffinement, de luxe, voire de signe extérieur de richesse. En tout cas, c'est un sujet de passion, pour ne pas dire de fascination pour ses amateurs et amatrices. Loin d’être un ayatollah de la dive bouteille, Fabrizio Bucella a choisi de parler du vin par le petit bout de la lorgnette.

    Chacune de ses chroniques n’aura de cesse d’intriguer : pourquoi Châteauneuf-du-Pape a-t-il interdit de survol de son territoire les soucoupes volantes ? (après tout, l’ouvrage se nomme OVNI…), James, Bond était-il un fieffé alcoolique – en plus d’être espion et tombeur de ces dames ? Napoléon buvait-il du Chambertin ? Comment l’église s’en est-elle prise aux charançons ?

    Rien de très sérieux a priori. Sauf que...

    "Comment parler des vins qu’on n’a pas bus ?"

    Sauf que Fabrizio Bucella propose aussi des chroniques à la fois courtes et pertinentes sur des sujets plus sérieux. Comment les Romains buvaient-ils leurs vins ? Pourquoi le roi Scorpion (roi égyptien vers 3200 av. JC) s’est-il fait enterrer avec 700 jarres de cet alcool princier ? Pourquoi le vin est-il d’abord arrivé en Europe ? Comment Bordeaux est-elle devenu la capitale de l’œnologie ? L’histoire est au cœur de ce livre. La science aussi. Fabrizio Bucella explique l’importance chimique de la levure dans la fabrication du vin. Il parle de l’apport capitale de Roger Dion dans la compréhension de l’œnologie. Plus étonnant encore, un chapitre sur l’umami explique en partie le succès quasi magique d’une boisson dont le succès n’a jamais été démenti.

    Jamais ? C’est là que l’auteur s’interroge. Réchauffement climatique oblige, le vin serait-il un danger ? Sans doute. En tout cas, il est à la croisée des chemins ("Est-ce la fin du vin ?").    

    Outre des planches mêlant considérations sérieuses ("Comment bien accorder les plats et les vins ?") ou pas ("Comment parler des vins qu’on n’a pas bus ?") et illustrations potaches (non sans jeux de mots et calembours), Le livre consacre plusieurs pages sur l’opéra et le vin (Faust, La Traviata ou La Bohême pour les œuvres les plus connues).

    Pas de prise donc de tête pour cet ouvrage savoureux. Les illustrations très pop et bourrées d’humour, elles aussi, font de ce livre une délicieuse en matière à l’approche des fêtes où le champagne coulera à flot, cela va sans dire. 

    Fabrizio Bucella & Théophile Sutter, OVNI Objet Vinicole Non Identifié, 50 histoires lunaires sur le vin,
    éd. Hachette Vins, 2024, 192 p.
    https://www.hachette-pratique.com/livre/ovni-objet-vinicole-non-identifie
    https://www.instagram.com/fabrizio.bucella
    https://www.facebook.com/prof.fabrizio.bucella
    https://www.instagram.com/theophilesutter

    Voir aussi : "Vins et vignobles, des Gaulois à la Ve République"

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  • Trio percutant

    Fascinant, culotté et exceptionnel que l’album Alliages, le premier du Trio Xenakis. Il a été enregistré en public le 15 décembre 2023 au studio de l’Orchestre National d’Île-de-France à Alfortville. Comme son nom l’indique, le Trio Xenakis nous emmène tout droit dans l’univers de la musique contemporaine. Adélaïde Ferrière, Emmanuel Jacquet et Rodolphe Théry, tous trois aux percussions, proposent un programme constitué de pièces représentatives de compositeurs actuels ayant tous en commun d’avoir bousculé l’espace sonore et de faire de la musique un matériau brut se permettant toutes les audaces.

    Prenez la première pièce, 24 Loops de Pierre Jodlowski. Il donne à écouter ici un ensemble de séquences s’empilant (le compositeur français parle "d’écriture cumulative"), donnant à cette pièce de 2007 une série de pulsations singulièrement vivantes – et non-dénuées d’humour.

    Autre compositeur français vivant, Philippe Hurel est présent dans ce programme avec Ritual Trios, datant de 2018, composé de "trois miniatures", comme le dit le musicien. Derrière l’apparent désordre sonore, Philippe Hurel propose trois pièces à l’écriture fine et épurée. À la facture orientalisante du Ritual Trio I succède une élégante ronde semblant rendre hommage à l’enfance (Ritual Trio II). La dernière miniature fait, elle, une large place au silence et à la méditation. Les rythmiques s’effacent, les sons s’éclaircissent et l’apaisement vient (Ritual Trio III).   

    Le Trio Xenakis démontre tout son savoir-faire dans l’art de construire des architectures sonores riches et vibrantes

    Plus connu, Steve Reich est présent dans un de ses exemples de musique répétitive, caractéristique dès les premières secondes. Marimba Phase a été écrit en 1967. Un morceau déjà ancien, donc, mais qui n’a pas pris une ride. Le Maître américain fait se succéder des séquences harmoniques sur plus de 17 minutes. La répétition n’est qu’apparente car, au fur et à mesure de la progression, des déphasages et des changements parfois infimes se produisent dans le rythme, donnant toute sa saveur et son intérêt à cet opus phare du courant minimaliste américain. Plus récent (1994), Nagoya Marimbas utilise des sons japonais (elle a été commandée et créée en 1994 pour l’inauguration d’une salle du conservatoire de musique de Nagoya), au service du même langage répétitif.

    Restons au Japon avec Yoshihisa Taïra (1937-2005), compositeur nippon naturalisé français. Trichromie, composé en 1992, ce sont les percussions au service d’un langage à la fois actuel et ancestral. Le Trio Xenakis, qui ne cache pas son amour pour cette pièce, s’en empare avec une énergie mystique. Yoshihisa Taïra prouve que la création contemporaine n’est surtout pas un genre tournant le dos au passé. Bien au contraire, elle s’y nourrit et y trouve même de nouvelles formes de langages sonores.

    Iannis Xenakis (1922-2001) ne pouvait pas ne pas être présent dans ce premier album d’un trio qui a choisi de se baptiser sous son nom. Précisions aussi que b.records propose avec le livret de l’album la reproduction d’une estampe du compositeur grec. Okho, écrit en 1989, autre œuvre emblématique du trio français, est joué ici sur des djembés. Cela donne à cet opus une puissance tribale incroyable. Là encore, le Trio Xenakis démontre tout son savoir-faire dans l’art de construire des architectures sonores riches et vibrantes.

    Clapping Music : quelle autre œuvre que celle-là pouvait conclure ce programme de musque contemporaine ? Steve Reich, de nouveau présent ici, fait de ce gimmick sonore popularisé dans les stades de football une singulière œuvre reprenant sa grammaire minimaliste. Tout à fait fascinant, d’autant plus que l’album est servi par une prise de son impeccable, en particulier dans les trois œuvres de Steve Reich.

    Alliages, Trio Xenakis, b•records, coll. Trio Xenakis, 2024
    https://www.b-records.fr/alliages
    https://www.facebook.com/trioxenakis/?locale=fr_FR
    https://www.singer-polignac.org/fr

    Voir aussi : "Touchés !"
    "Hanni Liang et les voix (féminines) du piano"

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