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• • Articles et blablas - Page 111

  • Lumineuse secte

    Il ne reste que quelques jours pour découvrir sur Canal+ l’étrange et traumatisant Midsommar  d’Ari Aster, avec Florence Pugh dans le rôle de Dani, cette jeune femme catapultée dans un monde faussement utopique.

    Le sujet de ce long-métrage américano-suédois est assez rare pour être souligné : les sectes.

    Le film démarre avec des couleurs et une atmosphère sombre : Dani apprend la mort brutale de ses parents et de sa sœur dans ce qui ressemble à un suicide collectif. La jeune femme est bouleversée et ce n’est pas la présence de Christian, son fiancé qui peut l’apaiser. Entre eux, les relations sont pour le moins fraîches et le jeune homme l’aurait sans doute quittée sans cet événement tragique.

    Histoire de montrer sa bonne volonté, il lui propose, sans y croire vraiment, de l’inviter en Suède pour assister à un festival atypique se déroulant tous les 90 ans. Dani y découvre une petite société accueillante mais aussi inquiétante. 

    La lecture symbolique d’un couple en train de se dissoudre

    Ari Aster imagine une communauté coupée du monde dans une région où le soleil ne se coupe pas, en faisant le choix de la lumière surexposée et des couleurs. C'est la grande idée du film. Il s’agit d’un parti-pris esthétique pertinent puisque ce que vont découvrir Dani, Christian et leurs amis c’est un cauchemar indicible, avec en particulier des scènes marquantes, y compris pour le spectateur.

    C’est patiemment, et avec une sérieuse dose de perversité, que le réalisateur déroule son récit commençant à la manière d'un thriller – la mort d’une famille – et se terminant comme un conte cauchemardesque lumineux et fleuri.

    Non sans humour noir et cynisme, Ari Aster fait de ce cauchemar une revisite des films d’horreur tout autant que la dénonciation des dérives sectaires sur fond de peur apocalyptique et d’un désir de retour à la pureté et à la nature. Et tant pis si cette quête primitive est justifiée par un discours lénifiant et pseudo-philosophique. Ari Aster fait de ses deux personnages principaux, Dani et Christian (deux prénoms bibliques soit dit en passant), les otages, consentants ou non, d’un milieu terrifiant. Le spectateur pourra aussi faire de Midsommar la lecture symbolique d’un couple en train de se dissoudre. Ce qui n'enlève rien au caractère horrible de cette expérience.

    Midsommar, drame horrifique américano suédois d’Ari Aster, avec Florence Pugh, Jack Reynor, William Jackson Harper et Will Poulter, 2019, 147 mn
    https://a24films.com/films/midsommar

    Voir aussi : "Homme fatal"

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  • Aimez-vous les livres pour enfants ?

    Cette question, à vrai dire le narrateur personnage principal de la saga Le Maître des Lives de Umiharu Shinohara (éd. Komikku), ne se l’ai jamais posée. Du moins jusqu’à un certain soir de beuverie. En pleine nuit, après une fête bien arrosée, Miyamoto entre par hasard dans une bibliothèque privée destinée à la jeunesse et joliment nommée La Rose Trémière. L’homme désœuvré, qui ne désire pas rentrer chez lui tout de suite, découvre un univers qui lui est inconnu. L’endroit est tenu par un certain Mikoshiba, un bibliothécaire aussi doué que détestable. Colérique, jaloux de ses compétences et souvent fermé, il fait une très désagréable première impression au visiteur impromptu.

    Pourtant, ce dernier décide d’y revenir. La bibliothèque pour enfants et ses livres lui deviennent familiers et il fit par se lier d’amitié avec ceux qui y travaillent ou ceux qui y viennent. Il y a d’abord les deux employées, Mizuho, la blonde et Itaya, la brune. Il y a aussi Shôta, un jeune garçon insolent qui finit lui aussi par se sentir comme chez lui dans cette bibliothèque. La propriétaire, la mystérieuse et magnétique Kotegawa apparaît à la fin du premier volume. Sans oublier bien entendu Mikoshiba, le véritable maître des lieux.

    Avec sa facture classique de manga venu tout droit du Pays du Soleil Levant, Le Maître des Livres est une saga relativement modeste dans son genre : "seulement" 15 volumes parus de 2011 à 2017. Le tour de force de cette série de BD créée par Umiharu Shinohara est de proposer une histoire simple, attachante et non sans qualités pédagogiques.

    Une histoire passionnante et non sans qualités pédagogiques

    Aux lecteurs que ce dernier terme pourrait faire fuir, précisons que suivre les pas de Miyamoto, ce Tokyoïte découvrant une bibliothèque inconnue et des ouvrages dont il n’avait souvent qu’entendu parlé, donne envie de lire à son tour les classiques de la littérature japonaise ou mondiale évoqués : les contes de Nankichi Niimi, Robinson Crusoé de Daniel Defoe, Le prince heureux d’Oscar Wilde, L’Île au Trésor de Robert-Louis Stevenson ou Le Merveilleux Voyage de Nils Holgersson à travers la Suède de Selma Lagerlöf. Ces histoires, connus ou moins connus de ce côté-ci du monde, viennent en écho au récit des protagonistes qui n’auraient jamais dû se rencontrer.  

    Là est vraiment le grand atout du Maître des Livres : les aventures de Miyamoto et ses amis de la bibliothèque La Rose Trémière comptent finalement autant que la mise en image de contes pour enfants, trouvant pleinement leur sens dans l’histoire de cette petite société littéraire dominée par Mikoshiba, le personnage sans doute le plus romanesque parce que le plus mystérieux. Le premier tome se termine par un marché proposé à Miyamoto par Kotegawa, la véritable maîtresse des livres. On peut s’attendre à des rebondissements pour la suite.    

    La saga de Umiharu Shinohara s’étale sur 15 volumes – une bagatelle pour un manga – et qui a l’avantage de pouvoir capter un large lectorat sans pour autant le lasser. 

    Umiharu Shinohara, Le Maître des Livres, tome 1, éd. Komikku, 2011, 
    https://www.facebook.com/komikku
    https://shukanmanga.jp

    Voir aussi : "Géants de papier et autres yōkai"
    "Marcher pas à pas au gré du vent"

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  • Ma Vivian, mon amour

    Vivian et Johnny, le documentaire de Matt Riddlehoover, est un hommage autant qu’un essai de réhabilitation d’une femme que le public américain a oublié, pour ne pas dire méprisé (comme le prouve par exemple le biopic de 2005 Walk The Line, avec Joaquin Phoenix et Reese Witherspoon dans les rôles principaux).

    Vivian Liberto Distin est plus connue sous le nom de Vivian Cash, la première épouse de la star de country Johnny Cash. Lorsqu’ils se rencontrent et tombent amoureux, le musicien est un obscur soldat américain de l’Air Force. Les deux amoureux n’ont de cesse de s’écrire lorsque Johnny Cash est en garnison en Allemagne de l’Ouest pendant trois ans. Des centaines de lettres témoignent de leur relation passionnée. S’ensuit un mariage en 1954 puis une première enfant. Trois autres filles suivront, et ce sont précisément ces filles qui viennent donner leur version de ce qu’a été l’existence de Vivian Liberto, ex Cash.  

    Après une période de vache maigre – paradoxalement la plus heureuse, de l’avis même des  intéressées – la carrière de Johnny Cash commence. C'est un véritable raz-de-marée fait de concerts, de disques, de tournées à travers le pays, de groupies mais aussi d’excès en tout genre – drogues, alcool, voyages incessants, invitations à des émissions de radio ou de télé mais aussi rencontres et relations extraconjugales. Pendant ce temps, Vivian reste à la maison pour s'occuper de leurs enfants. Surveillée par des fans enthousiastes, Vivian fait son possible pour élever ses quatre filles et attend jour après jour le retour d’une star de plus en plus absente. La fin du couple est déjà écrite, a fortiori lorsqu’une autre femme - June Carter - a déjà trouvé une place dans la vie du joueur de country. 

    Portrait d’une femme magnifique, héroïque et véritable mère-courage

    Mieux que le récit de la dilution d’une relation amoureuse, Vivian et Johnny, la légende de Nashville est le portrait d’une femme magnifique, héroïque, véritable mère-courage en dépit de ses défauts que ses filles ne cachent pas et qui restait prisonnière d’une cage dorée que son mari avait construite.

    Le documentaire de Matt Riddlehoover fait de Johnny Cash un personnage paumé et abandonnant femme et enfants au bénéfice de sa propre carrière et de ses égarements. Que l’on pense à son arrestation en 1965 au Mexique pour possession de drogues. À cela s’ajoutent ces préjugés sexistes et racistes du sud des États-Unis. Le spectateur découvre avec effarement les rumeurs persistantes sur la couleur de peau de Vivian Cash en raison d’une photo de mauvaise qualité. Le Klu Klux Klan va jusqu'à se manifester pour protester contre ce mariage d'un musicien blanc du sud des Etats-Unis avec une femme qu'ils soupçonnent d'être noire. 

    Vivian et Johnny reste cependant le récit d’une relation qui a malgré tout persisté, en dépit d’un divorce et de l’image féroce que le public et les médias américains ont laissé de Vivian. À la mort du musicien en 2003, son existence est même soigneusement effacée jusque dans les hommages à Johnny Cash. En dépit de tout, elle gardera toujours pour lui une bouleversante affection : "Elle est morte en l’aimant toujours de tout son cœur" affirme l’une de ses sœurs, comme le prouvent ces centaines de lettres que Vivian Liberto Distin, ex Madame Cash, gardait précieusement. 

    Ce document rare et inoubliable est disponible en VOD chez UniversCiné, Orange, Canal VOD, Arte VOD, CinéMutins et Microsoft.

    Vivian et Johnny, la légende de Nashville, documentaire américain de Matt Riddlehoover,
    avec Vivian Loberto, Johnny Cash, Rosanne Cash, Kathy Cash Tittle,
    Cindy Cash et Tara Cash Schwoebel, 90 mn, Destiny Films, 2021
    En VOD chez UniversCiné, Orange, Canal VOD, Arte VOD, CinéMutins et Microsoft

    https://www.destinydistribution.com/distribution/vivian-et-johnny-la-legende-de-nashville

    Voir aussi : "Emmanuelle aime les intellectuels (et les manuels)"

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  • Géants de papier et autres yōkai

    Derrière l’Atelier Sentô, se cachent Cécile Brun et Olivier Pichard, les auteurs français du très bel album, Rêves de Japon (éd. Omaké Books). On les avait découverts grâce à leur manga Onibi (éd. Issekinicho), un manga à mi-chemin entre Occident et Orient. On y suivait les pérégrinations de Cécile et Olivier – évidemment les alter-egos de la dessinatrice et du scénariste – au pays du Soleil Levant et des yōkai, ces esprits qui abondent dans la tradition nipponne. Plusieurs pages sont consacrées à ce sujet (cases, crayonnés, études). Pour leur livre Rêves de Japon, le voyage se fait hommage dépaysant, grâce à des illustrations nombreuses et un texte français traduit en anglais et en japonais.

    Les deux acolytes de l’Atelier Sentô parlent de leur fascination pour un pays attachant, riche, complexe et infiniment séduisant. Ce qui intéresse Cécile Brun et Olivier Pichard est ce Japon multimillénaire qui a su conserver et jalousement défendre ses traditions et son folklore en dépit des son attachement à la modernité et aux technologies où il excelle.

    "Ces paysages éphémères, désormais lointains, se glissent dans nos rêves. Les yeux fermés, nous nous préparons à un nouveau voyage" disent les auteurs. La couverture de l’ouvrage ne pouvait pas être mieux trouvée : une jeune femme en kimono, allongée au milieu d’un paysage oriental, regarde un papillon se poser délicatement au bout de ses doigts. Le lecteur a entre les mains un authentique livre poétique qui est aussi un chant d’amour pour le pays de Miyazaki. Le cinéaste, "un monument" fait d’ailleurs l’objet de plusieurs pages. 

    La couverture de l’ouvrage ne pouvait pas être mieux trouvée

    Rêves de Japon se veut aussi une déambulation dans un pays infiniment riche : les ruelles si typiques qu’elles semblent hantées, les jardins zen, les dagashiya, ces boutiques adorés par les enfants, les villages subtropicaux du sud du Japon ou les temples, identifiés par les torii, les emblématiques portails rouges.

    À côté des nombreuses pages consacrés aux yōkai ("Terreurs nocturnes"), ces fameux esprits semblant hanter jusqu’aux cités les plus modernes, les auteurs consacrent de nombreuses pages aux habitants et en particulier et aux enfants croisés au cours de leur pérégrinations, croqués non sans fantaisie – et fantastique : le lecteur s’arrêtera avec plaisir sur les délicates aquarelles, que ce soit la femme aux deux bouches, la renarde ou la lectrice au grand cou.

    Pour compléter sur cet album, le lecteur y trouvera quelques secrets de création de leurs auteurs ainsi que des planches de manga inédites ("Minicomic", "Komura", "Natsuko").

    Sur ce livre personnel à plus d’un égard, ce sont leurs auteurs qui en parlent le mieux : "Entre ombre et lumière, le Japon nous murmure des histoires".

    Atelier Sentô, Rêves de Japon, éd. Omaké Books, 2019, 217 p.
    http://ateliersento.com

    Voir aussi : "Complètement baba de bulles"
    "Aubusson tisse Miyazaki"

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  • La misère serait moins pénible au soleil

    Dee Dee Paradize de Roberto Garcia Saez (éd. Atramenta) est la deuxième partie du roman en deux volets se déroulant dans le milieu des ONG et de l’humanitaire international. Le premier tome, Un Éléphant dans une Chaussette, se déroulait dans les premières années des années 2000 et mettait en scène le fantasque, ambitieux et peu éthique Patrick Roméro.

    Lorsque le roman Dee Dee Paradize commence, nous sommes en 2009 et les choses se sont quelque peu calmées entre ce dernier et Paul Harrisson, le policier anglais qui avait jeté toutes ses forces pour faire tomber l’humanitaire, devenu son meilleur ennemi. Sauf que le scandale autour d’un contrat de traitements médicaux en République Démocratique du Congo n’a pas eu la déflagration qu’espérait le policier, maintenant casé au Foreign Office.

    Près de cinq ans plus tard,  Patrick Roméro s’est refait une virginité en Thaïlande où il œuvre toujours dans l’humanitaire, auprès d’une ONG, dirigée par "une grande dame", Sumalee, spécialisée dans la lutte contre le Sida. Voilà donc notre bouillant humanitaire replongeant dans une autre sombre affaire, ayant à voir avec une étude scientifique et surtout une fondation chrétienne américaine aux objectifs secrets et peu édifiants. 

    Roberto Garcia Saez poursuit son enquête dans le milieu de l’humanitaire international 

    Au même moment, un ancien informateur de Paul Harrisson en République Démocratique du Congo est retrouvé assassiné, après un rendez-vous avec un certain Dee Dee Paradize. Or, cet individu, un travesti haut en couleur, premier suspect dans cette affaire de meurtre que les autorités voudraient bien étouffer, est justement un ami, protégé – et accessoirement amant – de Patrick Roméro. Certain d’avoir une seconde carte en main pour faire tomber ce dernier, Paul Harrisson se lance dans cette affaire.

    Roberto Garcia Saez poursuit son enquête dans le milieu de l’humanitaire international même si ce second tome entre moins dans les arcanes des ONG, des parties diplomatiques et des manigances de l’ONU. La grande et bonne idée de l’auteur est de prendre le prétexte du meurtre d’un journaliste et informateur pour parler des sombres plans d’une église traditionaliste. Le héros de ce roman est là encore Patrick Roméro, toujours aussi complexe, même si l’affaire qui l’a touché des années plus tôt l’a aussi quelque peu humanisé. Voilà qui donne à Dee Dee Paradize un côté crépusculaire.

    Roberto Garcia Saez a construit un récit sur 460 pages – ce qui est finalement assez peu pour une histoire s’étalant sur 20 ans avec de multiples rebondissements et des personnages passionnants. Gageons que les aventures de Patrick Roméro auraient sans problème pu être enrichies de 250 pages supplémentaires sans perdre de leur grand intérêt. En attendant, voici une lecture passionnante pour la fin de cet été, sans oublier bien sûr le premier tome, Un Éléphant dans une Chaussette, toujours aux éditions Atramenta. Je vous en avais parlé ici.

    Roberto Garcia Saez, Dee Dee Paradize, éd. Atramenta, 2021, 230 p.
    https://www.atramenta.net/books/un-elephant-dans-une-chaussette/1054
    https://www.robertogarciasaez.com

    Voir aussi : "Les plus grands sous le plus petit chapiteau du monde"

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  • Comme un ouragan

    Et si l’on refaisait un petit retour en arrière ? Il y a trois ans, sortait le 2e album de Leïla Huissoud, Auguste. Sa découverte récente me donne l’occasion de vous encourager à découvrir un opus d’autant plus sincère qu’il revendique ses influences assumées : le jazz manouche mais aussi…  Georges Brassens.

    Il faut aussi préciser que la chanteuse était en tournée cet été, tournée marquée par son hospitalisation début août. On lui souhaite bien entendu un prompt et heureux rétablissement.  

    Revenons à Auguste, l’album qui la révèle d’ores et déjà comme une artiste au caractère bien trempé et à l’univers singulier. Celui de Leïla Huissoud est celui d’une saltimbanque se moquant des convenances et de l’académisme comme elle le dit dans "La mineure", le morceau qui clôture l’album : "Peut-être que je chanterai pas / La chanson qui vous a fait venir / Et les rappels, quand y'en a pas / C'est qu'j'ai plus rien à dire / Alors si mon art piège, je peux vous l'accorder / J'suis une merde en solfège, et pour la note / J'vous laisse payer."

    L’artiste, passée par The Voice, le résume dans cet autre titre, "La chianteuse" : "Papa, maman, j'me suis trouvé / Si un jour je grandi / Je serai grogneuse amplifiée / Pour gagner ma vie… / Une chieuse en un mot / Je serai chanteuse, applaudissez." La "chianteuse", qui a choisi l’exigeant chemin de l’exigence, le dit autrement dans "Les tours de rond-point" : "J'ai des projets de débutante / Des rêves pas plus hauts que la vie / Parce que les sommets font les pentes / Je préfère quand ils sont petits."

    Comme le titre de l’opus l’indique, les influences de Leïla Huissoud sont à voir d’abord du côté du cirque et de ces saltimbanques qui l’inspirent. C’est "La farce" et surtout "Auguste", qui est un des plus beaux hommages qui soit à ces personnages emblématiques des chapiteaux : "Ce sera Auguste, on choisit pas / De quel côté des rires on va / Moi j'ai pioché les doigts moqueurs / Qui vous pointent le cœur / La rime est simple mais j'hésite pas / Vous savez au bout d'un doigt".

    La "chianteuse" a choisi l’exigeant chemin de l’exigence

    Leïla Huissoud s’est entourée de musiciens pour colorer son album de jazz manouche ("La farce", "Auguste" ou "Écrit d'invention"). La musicienne a fait le choix d’instruments traditionnels et d’une orchestration ramassée (les tangos de "Caracole" et de "La chianteuse"), quand elle ne choisit pas l’option voix-instument solo : ce sont les cordes de "La chianteuse", le piano ("En fermant mes yeux") ou bien la guitare ("Lettre à la Suisse"). En parlant de guitare, il faut absolument mentionner l’hommage à Georges Brassens dans "Le vendeur de paratonnerre", dans un titre revendiquant son affiliation et dans le texte et dans la facture à l'auteur de L'Auvergnat – guitare sèche incluse.

    Voilà qui rend cet album si attachant, a fortiori lorsque Leïla Huissoud évoque ses rêves amoureux et personnels, que ce soit  "Un enfant communiste" en duo avec Mathias Malzieu, le récit d’une liaison éphémère ("En fermant les yeux") ou bien "Écrit d'invention". Le très beau morceau "Lettre à la Suisse" peut aussi bien s’écouter comme un hommage à sa Suisse d’adoption ("Froide comme une fille trop jolie / Qu'a forcément rien d'une battante / Je parle pas d'argent, ça c'est ton histoire / C'est tes finances, c'est tes connard") que comme une chanson d’amour ("C'est sûrement comme ça les étoiles / J'ai jamais pu le remercier / Le monsieur qui m'as fait venir chanter / Un mois de Janvier, à Lausanne / Grâce à lui, je t'ai découverte / Pleine de chansons et d'amitié / Ça fait pas long, l'effet de ma fenêtre".

    Enfin, il ne faut absolument pas passer à côté de ce joyau que sont "Jolies frangines", formidable hommage doux amer aux deux sœurs de Leïla Huissoud. Le titre a été récompensé par un mérité Prix Georges Moustaki en 2019 : "Ça fait longtemps qu’on nous a pas / Appeler en criant / « Les filles » : c’était nous trois / Même que ça semblait évident / Je me dis que j’aurais dû profiter / Quand on confondait nos prénoms / J’étais la petite sœur de mes aînées / La peste, le tourbillon".

    Auguste va bientôt fêter ses trois ans mais il est indubitablement à découvrir ou redécouvrir. Et on attend avec impatience le retour de Leïla Huissoud, en grande forme, bien entendu. 

    Leïla Huissoud, Auguste, Mad, 2018
    https://www.leilahuissoud.com
    https://www.facebook.com/LeilaHuissoudofficiel

     
    Voir aussi : "Leïla Huissoud, la « chianteuse »"

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  • Un aperçu d'Entre les lignes

    Il y a quelques jours, nous avions parlé sur Bla Bla Blog de l’exposition nantaise "Entre les lignes", présentant des œuvres d’Olivier Garraud et de Gianpaolo Pagni.

    Pour aller plus loin, voici un aperçu visuel de cette exposition, visible jusqu’au 27 août à l’atelier d’artistes Collectif Bonus. 

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    Olivier Garraud, L'Office du dessin, n°168B, 2019, papier quadrillé, acrylique, L21 x H29,7 cm

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    Olivier Garraud, L'Office du dessin, n°223, 2020, papier quadrillé, acrylique, L42 x H59,4 cm

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    Gianpaolo Pagni, album Flora & Fauna, ensemble, 2021, 48 dessins, peinture acrylique sur stickers, page d'album Flora & Fauna, édition Edis 1983, L21 x H28 cm / L33 x H26 cm, encadré

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    Gianpaolo Pagni, Fotoromanzo For Me, extrait pour un autoportrait, série 2019-2020, tampon sur papier, L21 x H29,7 cm / L26 x H34,7 cm encadré, à propos d'Alighiero Boetti, 1988

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    Vue de l'exposition "Entre les lignes",  à l'espace d'exposition du Collectif Bonus, 36 mail des chantiers, 44000 Nantes, du 6 au 27 août 2021

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    Olivier Garraud, L'Office du dessin, n° 225B, 2021, papier quadrillé, acrylique, L 21 x H 29,7cm

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    Vue de l'exposition "Entre les lignes",  à l'espace d'exposition du Collectif Bonus, 36 mail des chantiers, 44000 Nantes, du 6 au 27 août 2021

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    Gianpaolo Pagni, Album dessin n°4, 2021, stick oil sur toile imprimée non tissée, L 110 x H 140 cm

    Il ne reste plus que quelques jours pour découvrir cette exposition à Nantes. 

    Exposition "Entre les lignes", Olivier Garraud et Gianpaolo Pagni
    Collectif Bonus, atelier d’artistes, Nantes
    Îlot des Îles, 36 mail des chantiers, 44000 Nantes
    Du 6 au 27 août 2021
    https://www.collectifbonus.fr/exposition-entre-les-lignes
    http://www.gianpaolopagni.com
    https://www.oliviergarraud.com

    Voir aussi : "En première ligne"

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  • Nul n’est prophète en son pays

    Le nom de Riopy dira sans doute moins que la publicité pour une marque automobile dont il a signé la musique. Bliss, l’album qu’il sort cette année, a la même facture néo-classique : mélodies soignées et minimalistes, piano élégant et influence du courant répétitif contemporain ("La Vernatelle").

    Riopy s’est taillée une solide audience grâce à ses compositions alliant classicisme, contemporain, jazz et pop : le musicien français cumule près de 200 millions d’écoutes sur les plateformes de streaming. Pour son dernier opus, les titres sont relativement brefs (aucun ne dépasse les 4 minutes), ce qui permet à l’auditeur de passer naturellement d’un univers à un autre grâce à des vagues de piano harmonieuses ("Epiphany").

    Bliss démontre que la musique actuelle peut revenir à des fondamentaux sans perdre son âme : l’art de la composition, l’interprétation juste, la simplicité ("Joy"), l’apaisement ("Sweet Awakening") et l’émotion distillée par touches impressionnistes ("Noah"). Debussy semble s’être penché au dessus des épaules de Riopy ("Blee", "Lullaby"), avec toujours cette mélancolie ( "Sense Of Hope").

    Celui qui le monde entier écoute reste peu connu dans son propre pays

    Au grand jeu des références, l’auditeur pourra retrouver l’influence du compositeur Michael Nyman ("Blee"). Riopy sait de qui il tient : une culture musicale soignée et un don pour des compositions immédiatement reconnaissables. Ainsi, "Be A Prelude" est un titre aux multiples éclats alliant romantisme et modernité et serait digne de figurer dans une bande originale de film.

    On peut aussi voir dans l’œuvre de Riopy des compositions aux vertus relaxantes, pour ne pas dire thérapeutiques. Mais comme nul n’est prophète en son pays, celui qui le monde entier écoute avec passion, que ce soit aux États-Unis ou en Chine, reste peu connu dans son propre pays. Inutile de dire qu’il est absolument à découvrir.

    Riopy, Bliss, Warner Classics, 2021
    https://www.riopymusic.com
    https://www.facebook.com/riopymusic

    Voir aussi : "Joli grabuge"

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