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La violoncelliste franco-belge Camille Thomas met à l’honneur la musique en même temps que Paris, en se mettant en scène lors de concerts solos qui ont fait le tour du monde depuis le premier confinement.
Ces vidéos entendent aussi rappeler le sort de ces artistes privés de salles de représentation. Quoi de mieux qu’Internet pour offrir quelques minutes de Ravel, de Donizetti ou d’Edith Piaf ?
Après le Musée des Arts Décoratifs, la violoncelliste prévoit de jouer à Versailles, à Orsay, au Musée Rodin, au Jardin des Plantes ou au Palais Garnier.
Camille Thomas, concerts lives à Paris Camille Thomas, Voice Of Hope, Deutsche Grammophon, 2020 https://www.camillethomas.com
Aujourd’hui, c’est d’une plateforme dont il sera question. Une plateforme qui devrait interpeller pas mal de musiciens et musiciennes professionnels ou amateurs.
Jellynotes, créé il y a un peu moins de deux ans, peut déjà se vanter d’attirer un demi-million d’utilisateurs dans le monde et 500 créateurs actifs. Le site est accessible pour l’instant en 5 langues : français, anglais, espagnol, russe et portugais. Le créneau de cette jeune entreprise ? La partition de musique.
Les créateurs et associés de Jellynotes, Flore Wang et Sylvain Streiff, se félicitent d'avoir fondé une coopérative de musiciens créateurs de partitions leur permettant de les diffuser à un public mondial - et, au passage, de générer des revenus.
Flore Wang explique que dans les conservatoires ou dans leurs cours privés, les professeurs distribuent souvent leurs partitions gratuitement à leurs élèves, mais qu’ils ne les diffusent pas pour des raisons pratiques et juridiques. Il est aussi plus compliqué que l’on croit pour un instrumentiste amateur ou professionnel de trouver une partition jouable au piano ou à la guitare. Par ailleurs, il arrive très souvent que ce type de partition n’existe même pas, y compris pour les plus grands tubes. Se pose en plus la question ardue des droits d’auteur.
Hotel California des Eagles, version accordéon !
Jellynotes se charge d’héberger et de proposer près de 400 000 partitions, des partitions de tout genre, d’une BO de James Bond au Canon de Pachelbel, en passant par Hotel California des Eagles, - version accordéon ! - ou le dernier tube de Billie Eilish.
C’est une communauté de près de 500 créateurs, qu’ils soient musiciens de scène, professeurs de musique, copistes, arrangeurs ou tout simplement compositeurs connus ou non, qui se regroupent dans une communauté partageant une ou plusieurs partitions. Flore Wang précise que Jellynotes s’assure de la qualité et de la pertinence de telle et telle partition, avant de s’occuper du reste : la licence, la technique, la mise en ligne et le visibilité.
Au final, l’utilisateur a en main un choix pléthorique de partitions qui sont d’autant plus utiles que Jellynotes propose en plus des outils d’apprentissage intégrés. En effet, les partitions s’adaptent à la taille d’écran de l’ordinateur, du téléphone ou de la tablette. Les notes peuvent être jouées avec du son MIDI. On peut transposer dans une autre tonalité et on peut même jouer accompagné d’autres instruments avec le "Mode Ensemble".
La plateforme se charge aussi de rémunérer les créateurs de ces partitions et repaie la plus grande partie du prix de vente aux compositeurs, paroliers des chansons originales ainsi qu’aux créateurs des partitions.
Flore Wang et Sylvain Streiff présentent leur startup comme "une coopérative équitable de musiciens pour les musiciens". Ils ajourent ceci : "En plus de représenter une nouvelle source de revenus, la plateforme Jellynote sera un lieu de rencontre et de visibilité pour ces musiciens professionnels, une source de mentoring envers les apprentis musiciens, une source de collaboration entre musiciens pros, et une source de promotion pour leur marque personnelle".
Nous avions dit en début de chronique que Jellynotes pouvait intéresser les musiciens et musiciennes amateurs ou professionnels. Gageons aussi que la découverte de partitions de Lady Gaga, Francis Cabrel ou Vivaldi pourrait bien donner quelques idées à bien d’autres : et si moi aussi je me mettais à la musique ?
Camille Esteban était passée par The Voice en 2017. Elle est de retour en cette fin d’année avec un nouveau single, Chico.
Dans une pop urbaine et métissée et rythmée de couleurs, la jeune chanteuse d'origine espagnole parle de rêves, de projets et d’espoirs : "Tu voudrais faire le tour du monde / Mais t’as pas le choix / Mais qu’est-ce que t’attends ?"
Ce single est le premier extrait de son futur album, assurément très personnel : "Ce disque me ressemble parce que j’y ai signé 90 % des textes. Parfois tristes, parfois joyeux, ils parlent de mon histoire avec un style assez reggae et latino", explique celle qui s’est entourée de plusieurs plumes telles Taïro, qui a travaillé pour Maître Gims, Maska, membre de Sexion d’Assaut, ou encore Boulevard des Airs, groupe pour lequel elle a assuré les premières parties.
Comme ce "Chico" à qui s’adresse Camille Esteban, aucun doute : rien ne l’arrêtera.
Connaissez-vous ce film de Ridely Scott, intitulé Les Associés ? Non ? L’Œil du frigo propose de vous le faire découvrir, avec une chronique frigoristique autant que cinématographique.
Voici un film de Ridley Scott avec Nicolas Cage. Une vaste arnaque dont je ne révélerai rien, pas même le début de l'histoire pour ne pas vous gâcher le film.
Ce que je peux dire c'est que Nicolas retrouve sa fille illégitime et qu'elle vient perturber sa vie. A tel point qu'elle le fait sortir de sa zone de confort, entendons nous bien : sa zone de frigo. En effet Nicolas ne mange que des boites de thon . A gauche ce que mange la jeune adolescente (affiché avec un post it "Her") et à droite ce que s'enfile son père illégitime (avec un post it "His"). Ça laisse pantois !
Une belle bouteille de la marque DaSani trône en haut du frigo, juste au dessus du thon : il faut bien se désaltérer. On a bien deux façons de ranger le frigo : l'une verticale, l'autre horizontale. Est-ce à voir avec la suite du film ? Franchement, je ne peux pas vous le dire. On peut noter quand même que la peau de banane posée comme ça négligemment à l'intérieur du frigo nous donne une indication... Sinon, franchement, pourquoi laisser une peau de banane à cet endroit ? Si j'étais ODF, je me poserais la question ! Nous avons droit aussi à une belle porte, bien achalandée et du Lait Skim Plus qui trône sur la porte. En bref, il faut manger du thon et boire du lait pour être en forme. Ooù sont donc passés nos cinq fruits et légumes?
Mais la partie la plus belle, c'est la fascination de Nicolas pour la loupiote du frigo. Sa fille vient de partir chez sa mère et elle lui manque. Alors, il regarde comment elle a rangé le frigo. Comme elle est rentrée dans sa vie par effraction, et forcément son frigo l'a ressenti. Cela lui fait tellement de bien qu'en plus du frigo, il met le son. La voix et le frigo et son petit cœur de père est soulagé. On ne parlera jamais assez de l'effet thérapeutique du frigo sur les pères en détresse. "Un seul être vous manque et le frigo est dépeuplé."
Un bon petit film à voir sur l'effet placebo et sur les priorités de la vie.
ODF
Les Associés, policier américain de Ridley Scott avec Nicolas Cage, Sam Rockwell et Alison Lohman 2003, 116 mn
L’ouvrage collectif #Balance ta Bulle (éd. Massot) est d’abord paru aux États-Unis sous le titre complet : Drawing Power: Women's Stories of Sexual Violence, Harassment, and Survival. Il s’agit d’un livre engagé et de combat contre les violences faites aux femmes, avec une caractéristique fondamentale : les dessinatrices, qu’elles soient célèbres (Emil Ferris ou Aline Kominsky-Crumb) ou non, témoignent de leur propre vécu avec sincérité et douleur, à telle enseigne que plusieurs dessinatrices se représentent dans leur propre case ("Sur la roue" de Hila Noah).
Depuis le mouvement #Meetoo, la réalité du harcèlement sexuel, des agressions banalisées et des viols souvent commis dans le cercle privé, qu’il soit familial, professionnel ou amical, s’est dévoilé au grand jour. Une réalité qui est loin de l’histoire ancienne : dans sa préface Diane Noomin, elle-même auteure de la première planche de l’ouvrage ("Chope-les par la chatte"), raconte que depuis la conception de cette BD collective "une collaboratrice a été violée et une autre a abandonné le projet parce que l’auteur présumé de son viol l’a poursuivie en justice". Voilà qui fait de ce livre collectif une arme militante. Minnie Phan le résume à sa manière en expliquant que #MeToo ne se résume pas à la condamnation, "c’est aussi résister et être solidaire" ("Deux mots").
Grâce à des récits d’une à huit pages maximum, 62 dessinatrices – dont une seule Française, hélas, Soizick Jaffre ("Les chiens sont lâchés") –, ont participé à ce projet qui met en image de manière tour à tour dramatique ("Choucroute" de Marcela Trujillo), réaliste ("Un genou à terre" d’Avy Jetter), faussement naïf ("Toujours là" de Nicola Streeten ou "Dessins" de Liana Finck) ), caustiques ("Au Marriott Marquis" d’Ariel Schrag) ou poétique ("Verdict" de Marian Henley) de faits survenus à leurs auteures.
Harcèlements de rue ("Omniprésent" de Miss Lasko-Gross, "L’odeur de tes cheveux" de Cathrin Peterslund) ou en entreprise ("M. Stevenson" d’Ebony Flowers, "La fête de la saucisse" de Sarah Firth), agressions dans les lieux publics ("Alibi" de Bridget Meyne), viols ("Baulanta" de Powerpaola, "Viol consenti" de Mary Fleener), relations toxiques et malsaines ("Asian girkls" de Meg O’Shea) : ce sont autant de thèmes racontées, qui ont tous en commun ces violences sexuelles dont #MeToo a jeté un éclairage cru depuis 2017.
62 dessinatrices, dont une seule Française, Soizick Jaffre
Des sujets lourds sont évoqués : le viol homosexuel ("Blâmer" de Sarah Allen Reed ou "Prêt à péter" de Carta Monir), les violences au sein des communautés musulmanes, en l’occurrence pakistanaise pour Sabba Khan ("Frontières brisées"), sans oublier les agressions faites aux enfants ("Superglue" de Joamette Gil, "Elle se laisse pas faire" de Tyler Cohen ou "Instantanés de bêtes sauvages" de Kaylee Rowena). Il y a aussi ces zones grises, comme les manipulations mentales venues d’un être que l’on aime ("Tout détruire" de Rachel Ang) ou de relations voulues et dérapant subitement ("Toutes ces années" de Trinidad Escobar ou "Prends-moi tout de suite" d’Aline Kominsky-Crumb).
Certaines BD sont plus explicatives, à l’exemple d’"Illusions de sécurité" d’Ajuan Mance ou "Bourbiers" de Caitlin Cass.
Des trouées lumineuses apparaissent aussi, que ce soit dans ces histoires vraies à la conclusion étonnante ("Viol accidentel" de Joyce Farmer) ou dans les messages de résilience : "On gère les traumatismes différemment. Mais du moment que ça marche, hein ?" dit J. Gonzalez-Blitz dans Jouer du "« Blackie »". Le dessin sert alors pour beaucoup de ces auteures à avoir "le dernier mot" ("Non conforme" de Jennifer Camper). La soif d’en sortir ("Rage Queen" de Lenora Yerkes) passe très souvent donc par le dessin, comme thérapie, si bien que, comme le dit Una, "au bout du précipice, la lumière m’est apparue" ("Les mots me manquent").
Soulignons aussi la qualité des travaux graphiques, avec les formidables planches de Roberta Gregory ("BD pour adultes"), de Kelly Phillips ("Feu intérieur"), de Cathrin Peterslund ("L’odeur de tes cheveux"), d’Avy Jetter ("Un genou à terre" ), de Lee Marrs ("Passée à autre chose") ou de Carol Tyler ("Tous ces Tommy"), pour n’en choisir que quelques-unes. Emil Ferris clôt ce recueil avec un magnifique récit qui retrace son parcours d’artistes sous le prisme d’un traumatisme, qui explique son travail sur les monstres.
Pour terminer cette chronique, citons au moins la liste exhaustive des contributrices : Rachel Ang, Zoe Belsinger, Jennifer Camper, Caitlin Cass, Tyler Cohen, Marguerite Dabaie, Soumya Dhulekar, Wallis Eates, Trinidad Escobar, Kat Fajardo, Joyce Farmer, Emil Ferris,Liana Finck, Sarah Firth, Mary Fleener, Ebony Flowers, Claire Folkman, Noël Franklin,Katie Fricas, Siobhán Gallagher, Joamette Gil, J. Gonzalez-Blitz, Georgiana Goodwin,Roberta Gregory, Marian Henley, Soizick Jaffre, Avy Jetter, Sabba Khan, Kendra Josie Kirkpatrick, Aline Kominsky-Crumb, Nina Laden, Mlle Lasko-Gross, Carol Lay, Miriam Libicki, Sarah Lightman, LubaDalu, Ajuan Mance, MariNaomi, Lee Marrs, Liz Mayorga,Lena Merhej, Bridget Meyne, Carta Monir, Hila Noam, Diane Noomin, Breena Nuñez, MegO’Shea, Corinne Pearlman, Cathrin Peterslund, Minnie Phan, Kelly Phillips, Powerpaola, Sarah Allen Reed, Kaylee Rowena, Ariel Schrag, Louise Stanley, Maria Stoian, NicolaStreeten, Marcela Trujillo, Carol Tyler, Una, Lenora Yerkes et Ilana Zeffren.
Preuve que cet ouvrage s'avère exemplaire et indispensable, il figure dans la liste des meilleures BD du New York Times.
Dans son essai Vingt intellectuels sous l’Occupation (éd. du Rocher), Laurent Wetzel cite le Général de Gaulle qui dit ceci dans ses Mémoires de Guerre : "Les écrivains, du fait de leur vocation de connaître et exprimer l’homme, s’étaient trouvés au premier chef sollicités par cette guerre où se heurtaient doctrines et passions. Il faut dire que la plupart et, souvent, les plus grands d’entre eux avaient pris le parti de la France, parfois d’une manière magnifique. Mais d’autres s’étaient, hélas ! Rangés dans le campo opposé avec toute la puissance de leurs idées et de leur style." Cet extrait se trouve dans le chapitre consacré à Robert Brasillach, le plus célèbre de ces intellos engagés dans le camp de Pétain, et aussi la seule de ces figures à avoir été exécutée après la Libération.
De Gaulle et Pétain : voilà bien la ligne de fracture fondamentale entre les deux camps dont parle Laurent Wetzel, bien qu’elle ne soit pas la seule. Car, outre les désaccords au sujet d’une paix signée avec l’Allemagne, c’est aussi l’antisémitisme qui distinct Résistants et Collaborationnistes.
Laurent Wetzel a fait le choix de portraits synthétiques pour retracer cette grande histoire qu’a été la vie intellectuelle en France pendant la seconde guerre mondiale. Une grande histoire avec ces héros, ces lâches, ces salauds mais aussi ces figures équivoques. Pour cela, l’auteur, intellectuel lui-même (normalien, maître de conférence d’histoire contemporaine à Sciences Po et professeur d’histoire politiques à Sup de Co), a divisé son livre en trois parties : les deux premières, "Figures d’intellectuels résistants" et "Figures d’intellectuels collabos", retracent chacune le parcours de huit personnalités. La dernière, "Figures d’intellectuels ambivalents", est singulièrement la moins développée, bien qu’elle reste passionnante puisque les quatre célébrités évoquées sont ni plus ni moins que Raymond Aron, Jean-Paul Sartre, Georges Pompidou et François Mitterrand. Que du gros calibre.
Laurent Wetzel s’attache à décrire des parcours hors du commun dans une France déchirée et en guerre. Quelques figures parlerons très certainement au lecteur.
Parmi les Résistants, il y a, pour commencer, Marc Bloch et Pierre Brossolette, tous deux tués en 1944. On retiendra aussi René Cassin, en raison des conséquences qu’eurent son engagement. L’auteur rappelle que ce dernier, condamné à mort par contumace du fait de ses responsabilités dans la France Libre, a vu 27 membres de sa famille disparus en déportation, dont sa mère, sa sœur et son beau-frère. Laurent Wetzel relate également ses distensions avec le Général de Gaulle pendant et après la guerre, comme les engagements français et internationaux de René Cassin : création de l’Unesco, élaboration de la déclaration des droits de l’Homme et Prix Nobel de la Paix. Le fascinant Jean Prévost, l’homme d’Eglise Jules Saliège et Jacques Soustelle font l’objet eux aussi de portraits passionnants, avec parfois, comme pour l’archevêque de Toulouse, des positions réservées au sujet du Général De Gaulle. Jacques Soustelle, lui aussi, se détournera du chef de la France Libre. Il regretta, par exemple, "l’épuration… ratée". Deux figures féminines, les seules de cet ouvrage, complètent ce tableau de la Résistance intellectuelle : il s’agit de Germaine Tillion et de l’exceptionnelle Simone Weil (à ne pas confondre avec la femme politique et ancienne déportée Simone Veil).
Les angles morts de l’épuration
De l’autre côté de la barrière, il y a ces écrivains, philosophes, essayistes et professeurs d’université qui ont choisi le camp de Vichy. À ce sujet, Laurent Wetzel n’hésite pas à parler dans le chapitre consacré à Claude Jamet (le père d’Alain Jamet, vice-président du Front National et Dominique Jamet, journaliste et Président de la BnF), de ce qu’il appelle un "paradoxe" de cette époque : "L’alliance des pacifistes les plus ardents avec les soldats d’une société guerrière."
Il y a ces figures proprement sulfureuses : Robert Brasillach, nous l’avons dit, qui a payé de sa vie des engagements qu’il n’a jamais reniés. Marcel Déat, "un ami de la Waffen SS", fait lui aussi partie de cette inconditionnels de la Collaboration, "avec d’autant plus de désintéressement qu’il croyait que sa réussite personnelle serait bienfaisante pour son pays" (cette citation est extraite de la biographie que lui a consacrée Georges Albertini). Laurent Wetzel n’oublie par Pierre Drieu La Rochelle, homme de lettres souvent cité et décrié, antisémite convaincu mais aussi "hitlérien déçu" qui, nous apprend l’auteur, "se convertit sur le tard au communisme et au stalinisme". Le cardinal Alfred Baudrillart a eu lui aussi des positions antinomiques : antinazi proclamé avant la guerre, adversaire de Hitler, le cardinal et membre de l’Académie française fait un virage à 180 degrés après le déclenchement de la guerre et l'Exode, montrant son aversion pour "le traître de Gaule", son accord pour la paix signée par Pétain, son adhésion à l’ordre vichyste et même sa fascination pour "la personnalité et l’éloquence d’Hitler". Autant d’attitudes qui lui vaudront bien des inimitiés.
Parmi les portraits consacrés à ces figures noires de la vie intellectuelle française, il y a ceux qui sont singulièrement passés à côté de l’épuration, dont Jacques Benoist-Méchin, Claude Jamet ("J’espère l’avenir sous le visage nazi") ou Georges Soulès ("fanatiquement collaborationniste"). Un autre de ces intellos fourvoyés se détache, et pas forcément le plus connu : Jean-Paul Hüter, un "intellectuel parmi les plus remarquables de sa génération" comme l’écrit Laurent Wetzel. Cet hitlérien convaincu meurt en 1944 en Lituanie, sous l’uniforme de la Wehrmacht.
En consacrant la dernière partie de son essai à deux Présidents de la République, Pompidou et Mitterrand, Laurent Wetzel montre aussi en filigrane les échecs de l’épuration, ou du moins ses angles morts. Raymond Aron, qui s’est mis à distance et du Général de Gaulle et du Maréchal Pétain, disait d’ailleurs ceci : "Si l’épuration avait été mieux conduite, si les principaux responsables avaient été rapidement et solennellement châtiés, il eût été plus facile de se désintéresser des lampistes…" Peu touché par la Libération, Jean-Paul Sartre n’en reste pas moins un intellectuel – et pas des moindres ! – dont les positions sont encore très discutées et critiquées.
Voir Georges Pompidou présent dans cette dernière partie peut surprendre. Le futur gaulliste, "attentiste" pendant l’Occupation, n’a jamais nié que ses engagements dans la Résistance ont été très limitées. Pour autant, il fit circuler quelques tracts : des "actions isolées et sans portée". Il montra également une certaine indulgence envers d’autres intellectuels aux positions critiquables, comme Jean Guitton.
Plus troublante est la carrière du jeune François Mitterrand pendant cette période noire : proche de l’extrême-droite dans l’entre-deux-guerres, puis prisonnier en 1940 et évadé d’un stalag avant de devenir haut-fonctionnaire pétainiste, il a été décoré de la Francisque. Le futur Président socialiste "entretenait de bons rapports avec l’entourage du maréchal Pétain et approuvait les principes de la Révolution nationale". Mais il bascule en 1943 dans la Résistance, non sans un certain courage. Il créa même son propre réseau. S’il y a un homme controversée qui a bien sa place dans cette partie, c’est bien lui.
En s’arrêtant sur ces personnalités du monde intellectuel au milieu de la seconde guerre mondiale, Laurent Wetzel montre bien la manière dont les têtes les mieux faites peuvent se fourvoyer dangereusement, et souvent avec la meilleure foi du monde. Pierre Drieu La Rochelle l’exprime à sa manière : "Si l’intellectuel garde son iondépendance et sa pureté de pensée, il est considéré par les politiciens comme un homme de paille d’autant plus utilisable à l’égard des foules aveugles qu’il est lui-même aveugle."
Impossible de ne pas être chamboulé par le Manureva de Marc Fichel, le classique d’Alain Chamfort aux paroles écrites par Serge Gainsbourg (il faut aussi citer Jean-Noël Chaléat, co-auteur de la musique).
Marc Fichel, que nous continuons de suivre sur Bla Bla Blog, prouve son attachement à la chanson française avec plusieurs revisites de notre patrimoine. L’une des plus mémorables est ce Manureva, qui ouvre son dernier EP, Mes années cover, consacré à quelques standards des années 80.
Pour ce titre, Marc Fichel a choisi le piano et la voix afin de mettre en valeur le texte exceptionnel de Gainsbourg : "Où es-tu, Manu Manuréva ? / Bateau fantôme toi qui rêvas / Des îles et qui jamais n'arriva."
Pour illustrer ce titre déchirant, racontant l’histoire de la disparition en 1978 du navigateur Alain Colas et de son bateau, le Manureva, le chanteur est accompagné dans le clip par la danseuse Marie Gaudillière.
Kim Chi Pho sort en ce moment son dernier roman, À Jamais à Nous (éd. Lemart). L’occasion était trop belle pour lui poser quelques questions. À raison d’un roman par an, Kim Chi Pho est en train de se construire une œuvre littéraire passionnante.
Bla Bla Blog – Bonjour, Kim. Tu sors en ce moment ton dernier roman, À Jamais à Nous. Peux-tu nous le présenter en quelques mots ? Kim Chi Pho – Bonjour. C’est l’histoire de deux amoureux, séparés par la mort et qui se sont jurés de se retrouver dans une prochaine vie. Cette quête placée sous le signe de la réincarnation se déroule au fil d’un récit où les espaces temps s’entremêlent.
BBB – Après Sista, qui était beaucoup plus sombre, tu as choisi ici de parler d’amour. Du grand amour, même. Est-ce que c’était une respiration nécessaire pour toi ? KCP –Sista se déroulait dans la poussière et le sang d’Afrique, cependant cette violence ne m’a pas marqué ni laissé de trace. En fait, j’ai une bibliothèque à écrire dans la tête, je laisse des histoires sortir au fur et à mesure l’une après l’autre. C’est donc un hasard que Sista soit sortie avant À Jamais à Nous. À cet instant précis où je réponds à tes questions, j’ai le sixième roman qui bouillonne et veut sortir de ma tête, alors que l’écriture du cinquième roman n’est pas encore terminée.
BBB – Te souviens-tu du moment où tu as t’es dit : "Ça y est ! J’ai mon sujet !" Qu’est-ce qui a été l’élément déclencheur ? KCP – Non, malheureusement car il suffit que je surprenne une conversation pour qu’une histoire germe. Et il arrive que plusieurs me tombent sur la tête le même jour. Il me semble impossible de tracer par l’ordre chronologique, quel élément déclencheur m’est venu en premier lieu.
BBB – Tu parles d’amour et d’un coup de foudre déclencheur de ton récit. Mais, au fait : tu y crois, toi, au coup de foudre ? KCP – Bien sûr, parce que j’y crois ! Et je continue à chercher ! Depuis la nuit des temps, je suis à la recherche de l’homme de ma vie, je sais qu’il m’attend quelque part, il attend que je vienne le chercher. Si je ne le trouve pas dans cette vie, je le trouverai dans la prochaine.
"Le confinement a anéanti toute ma créativité"
BBB – Tu t’es mise, je crois, dans la tête d’un homme pour écrire ton récit. Pourquoi avoir fait ce choix ? J’image aussi que cela doit être particulièrement intéressant pour une femme écrivain. KCP – Tu as raison. Dans mes trois précédents romans, Mademoiselle Numéro 11, Le Clos des Diablotins et Sista, le personnage principal est toujours une femme. Pour À Jamais à Nous, c’est un homme ! Comme je l’ai expliqué plus haut, depuis longtemps je cherche l’amour, mais sans succès. Alors, en attendent cette retrouvaille, j’ai décidé de l’inventer, avec ma plume.
BBB – Comment travailles-tu tes livres ? Fais-tu partie de ces auteures qui font un plan, qui savent où elles vont, ou bien te laisses-tu porter par ton récit ? KCP – Avant de commencer l’écriture, j’ai déjà l’histoire dans la tête, du commencement jusqu’au dénouement. Je m’installe devant mon laptop et je laisse les mots coucher sur les pages. Quand mon ordinateur est à court batterie, j’écris à la main. Il m’arrive d’écrire pendant des jours sans jamais m’arrêter. J’oublie même de manger, de boire. Ma vie est en transit tant que je ne termine pas mon roman.
BBB – J’imagine que le confinement a dû quelque peu changé tes habitudes, y compris dans ton travail d’écriture. KCP – Le confinement a anéanti toute ma créativité. En moyenne, il me faut deux à trois mois pour écrire un livre, depuis avril 2020, je n’ai écrit aucun.
BBB – Quels sont tes prochains projets ? Un autre roman peut-être ? Ou une série de romans ? KCP – Mon cinquième roman est en cours d’écriture, un thriller, une vengeance sanguinaire. Et puis après, j’aimerais vraiment passer à la réalisation, porter mes romans à l’écran.
BBB – Pour terminer notre blabla, peux-tu nous parler de ta dernière lecture, du dernier film et de la dernière série que tu as vu et du dernier album que tu as écouté ? KCP – Ma dernière lecture : la biographie du plus grand peintre indien S.H. Raza de Soufiane Bensabra. L’art est mon refuge contre les impacts psychologiques néfastes du confinement. Les œuvres des grands peintres m’aident à m’évader en dehors des quatre murs. Côté cinématographique, j’ai visionné toutes les séries sur Netflix.
BBB – Merci, Kim. Et on rappelle que ton roman À Jamais à Nous, aux éditions Lemart, sort en ce moment, à quelques semaines des fêtes de Noël.