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• • Articles et blablas - Page 208

  • La petite musique de l'amour selon Kuy Delair

    Kuy Delair propose dans son roman La petite Musique de la Pierre (éd. Évidence) l'histoire d’une quête amoureuse qui est aussi le récit d'un parcours identitaire et une réflexion sur la liberté et le féminisme.

    Quynh est sculptrice, d’origine franco-vietnamienne, une "Eurasienne" comme elle le revendique. Cette artiste, qui a le sentiment d’appartenir non pas à deux cultures mais à un seul continent – l’Eurasie – propose dans les premières pages de son récit un singulier message sur le métissage, : "Le métissage était pour elle l’absence… Le vide vertigineux de l’inconcevable… Elle exécrait l’association des quidams qui mêlaient cuisine fusion et Eurasie… C’était à la mode d’être métisse, mais inconnu d’être eurasien… Les médias parlaient des mélanges, ce qui revenait à n’en parler d’aucuns…"

    Lorsque Quynh rencontre le saxophoniste Stéphane, elle sait d’emblée que leur couple sera placé sous le signe du yin et du yang : "Ils étaient le rouge et le noir, l’aube et le crépuscule du désir, un Ying et un yang débridés, lancés au galop dans l’étendue des affres brûlantes de la nuit." Les deux forment un couple hors-norme fait de peur de l’engagement, de fascination, d’attirance mais aussi de ratages, "une histoire de rencontre, une histoire de synchronicité ratée, une histoire ordinaire au final". Amour ou amitié passionnée ? "Ils bâtissaient l’édifice d’une amitié solide, un couple traditionnellement hors-norme, une impossibilité qui se construisait."

    Kuy Delair déroule son récit à la manière d’un torrent sauvage ("Ses désirs étaient aussi énigmatiques qu’une eau trouble, pure autrefois"). La pierre contre l’eau, la sculptrice contre le jazzman, la solidité et l’immobilité de la pierre que travaille la sculptrice contre l’aspect fuyant et le fluide de la passion amoureuse : le yin et le yang sont en jeu dans ce roman sur l’amour mais aussi sur la création : "Elle pouvait tailler la pierre, créer des ronds de bosse, polir sans relâche… La tyrannie de la matière ne lui permettait aucune indulgence… Le matériau savait, il dictait sa loi. La passionnée sculptrice se soumettait à ces aspérités contingentes, elle se faisait l’esclave de cet art ingrat…. La fluidité du chant lui semblait plus aérienne, plus inspirée."

    Quynh trouve dans le paganisme des réponses pour arriver à des rapports hommes-femmes apaisés

    Kuy Delair, d’une langue riche, subtile et sensuelle, et non sans ellipses, décline les mille et unes variations de la passion : l’attirance, la sidération de la rencontre, l’addiction, le vertige des étreintes (L’auteure sait décrire avec finesse ces moments : "Pris dans le trébuchement vertigineux de sa chute, il plongeait dans l’orgasme… Il embrassait la plénitude de l’extase… Il bandait de joie… Son érection ruisselait de bonheur"), les hésitations entre le désir de partir et celui de s’engager, mais aussi la jalousie. Son roman est un long et beau chant sur l’amour dont elle ne cesse de suivre les circonvolutions : "Elle aimait sans doute ces hommes non pas pour l’amour qu’ils auraient pu lui porter, mais pour l’amour qu’elle le leur portait… Amoureuse de l’amour, elle recherchait ses passions déchirantes, ces impossibles sentiments."

    Aux va-et-vient physiques viennent faire écho ceux de Stéphane puis de Quynh elle-même, incapables de d'engager mutuellement. Après avoir laissé son premier amant s’aventurer avec une autre femme, Amélia, l’Eurasienne est envoûtée par un autre homme, Glenn, un autre jazzman. Avec lui, la passion va être plus forte encore, plus profonde, mais pas moins compliquée. La confusion amoureuse – quand elle n’est pas sexuelle – guide le récit de Kuy Delair, tiraillée entre deux hommes et prise dans des courants contraires : "L’eurasiatique aux cheveux noir corbeau aurait aimé qu’ils soient là, tous les deux… Et elle ne les avait là, aucun des deux."

    L’histoire avec Glenn marque finalement le début d’une reconstruction sentimentale, même si elle passera par de nouveaux départs vers d’autres hommes, d’autres déceptions et d’autres engagements tenus ou non-tenus. La jeune femme veut devenir le pilote de son propre bateau : "Quynh vivait la vie comme un roman dans lequel tout était possible… Elle était la narratrice de son avenir et elle fluctuait au grès des événements tel un roseau qui fléchit, mais ne se rompt pas." Il est écrit plus loin : "Elle avait pris sa décision à contrecœur… Un matin, en se levant… Il fallait que cela cesse… que chacun reprenne le cours de sa vie. Elle ne pouvait plus osciller entre ces hommes comme tanguerait un navire fou sur les eaux."

    En remettant en perspective amour et passion ("Il y avait une tradition de la passion comme il y avait une tradition de la famille… L’amour était peut-être la possibilité de repenser les règles de la passion"), Kuy Delair parle aussi et surtout de liberté. Elle discourt sur le féminisme dans cette histoire sentimentale mais aussi sociale et engagée. Simone de Beauvoir est citée lors d’une scène au Parc Manceau ("La femme n’est victime d’aucune mystérieuse fatalité : il ne faut pas conclure que ses ovaires la condamnent à vivre éternellement à genoux"), mais l’auteure fait également référence aux traditions mésopotamiennes. À l’instar de son personnage, l’auteure engagée et "néo-féministe" (l’expression est de Patrick Lesage, en préface) trouve dans le paganisme des réponses pour arriver à des rapports hommes-femmes apaisés, des organisations humaines et humanistes solides et des sociétés où la sexualité ne serait plus un problème : "Quynh rêvait de sociétés néo-matriarcales dans lesquelles hommes et femmes seraient des féministes et des humanistes convaincus… La sculptrice ne croyait pas au règne d’un sexe sur l’autre, d’une génération sur l’autre, d’une race sur l’autre… Son credo était la différence sans hiérarchie." Qui n’adhérerait pas à ce credo ?

    Kuy Delair, La petite Musique de la Pierre, Évidence Éditions, 2018, 152 p.
    http://www.kuydelair.com
    https://www.facebook.com/KuyDelairKDL
    www.evidence-editions.com

    Voir aussi : "Païenne à Paris"

    © Hubert Bourgeois 2009

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  • "Ce ne sont pas des lys mais des alstromères" : le mea culpa des Cahiers du Cinéma

    Le printemps, la nature en éveil, les floraisons éclatantes, les bourgeons en fleurs : non, je ne vais pas me faire poète ou vous parler dans cette chronique de Rustica, du Festival des Jardins De Chaumont-sur-Loire ou d’Hortus Focus. Pour cette chronique, c'est le dernier numéro des Cahiers du Cinéma qui m'intéresse.

    Voilà que le plus intello sans doute des magazines spécialisé dans le septième art fait un mea culpa au sujet de la place modeste des fleurs et des arbres dans ses critiques ciné (comme chez ses confrères), alors que ces végétaux peuvent être une clé de lecture d’une scène ou d’une œuvre : "Même sur Internet, refuge des fanas des listes, les énumérations tournent court et s’arrêtent vite aux titres des films où il n’est question en rien de fleurs : Le Dahlia noir, L’Orchidée blanche, l’Orchidée noire, etc." Et l’éditorialiste Stéphane Delorme de renchérir : "Il y a une impuissance à nommer, qui révèle un désintérêt profond pour la nature et une expérience appauvrie."

    La réponse du magazine est cet herbier proposé dans son numéro d’avril. Un herbier qui s’ouvre sur un courrier daté du 24 février dernier envoyé par une lectrice des Cahiers du Cinéma. Marie-Claire Lévy fait remarquer à la revue spécialisée que les chroniqueurs se sont trompés au sujet des fleurs que cultive le personnage joué par Clint Eastwood dans son dernier film, La Mule : ce ne sont pas des lys mais des alstromères, dit-elle, "des fleurs particulièrement périssables (elles se fanent dans la journée)", avant de donner des boutons qui s’épanouissent ensuite, "un phénomène pas commun dans les fleurs coupées." Une précision qui n’a rien d’anecdotique car elle fait sens pour un artiste comme Clint Eastwood.

    50 pages à ces fleurs et à ces arbres qui apparaissant dans des films, connus ou moins connus

    Voilà donc comment le numéro d’avril de ces Cahiers s’essaie à la botanique, sans perdre de vue le cinéma. La revue consacre 50 pages à ces fleurs et à ces arbres qui apparaissant dans des films, connus ou moins connus.

    Cet herbier est classé en trois sections : "Fleurs", "Plantes" et "Arbres". Et l’on découvre une autre manière de lire et comprendre un film, grâce à ces végétaux, souvent discrets mais jamais anodins. Que l’on pense à ces fleurs : le cyclamen dans Le Couvent de la Bête sacrée de Norifumi Suzuki (1974), le glaïeul dans Marnie d’Alfred Hitchcock (1964), l’hibiscus dans Furyo de Nagisa Oshima (1983), la jacinthe des bois dans Bright Star de Jane Campion (2009) ou le pavot dans Le Magicien d’Oz de Victor Fleming (1939). À noter que le cinéma japonais a toujours su, mieux que n’importe quel autre, donner sa place aux fleurs.

    Les plantes ont souvent une dimension métaphysique, symbolique et pour ne pas dire hypnotique à l’exemple des fougères d’Antichrist de Lars von Trier (2009), des Herbes folles d’Alain Resnais (2009) ou de Providence chez le même metteur en scène (1977).

    La dernière section, sur les arbres, offre un éventail plus riche encore : le baobab dans Le Vent de Souleymane Cissé (1982), le bouleau dans L’Enfance d’Ivan d’Andreï Tarkovski, le cocotier dans The Master de Paul Thomas Anderson (2012), l’érable du Japon dans Miss Oyu de Kenji Mizoguchi (1951), le saule blanc dans l'Arbre, le maire et la médiathèque d'Eric Rohmer ou encore les fameux palmiers de Mulholland Drive chez David Lynch (2001).

    Les Cahiers du Cinéma offrent dans ce numéro d'avril 2019 un des reportages les plus pertinents qui soit. Il nous encourage à ne plus regarder nos films préférés de la même façon, mais aussi à mieux observer la tête en l’air ou la tête baissée ces végétaux qui savent parler de nous, à leur manière.

    À acheter et à lire de toute urgence avant la fin du mois.

    Les Cahiers du Cinéma, Herbier, Arbres Plantes Fleurs, avril 2019, en kiosque
    https://www.cahiersducinema.com

    Voir aussi : "À quand un cinéma éco-friendly ?"

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  • Un bon artiste est-il un artiste mort?

    café philo,philosophie,art,artiste,postéritéDe nouveau cette année, le café philosophique de Montargis sera invité par la médiathèque de Montargis pour une séance le vendredi 26 avril 2019 à 18 heures (attention également à cet horaire, spécial lui aussi). L’équipe du café philo proposera pour cette soirée spéciale un débat portant sur ce sujet: "Un bon artiste est-il un artiste mort ?"

    Cette question provocatrice est bien entendu un clin d’œil aux clichés du western. Dans un monde de l’art impitoyable et souvent régi par l’argent et le mercantilisme, l’artiste est souvent le parent pauvre – du moins lorsqu’il est vivant…

    Des œuvres ont tendance à s’apprécier à la mort de son auteur. Les participants du café philo seront invités à discuter de la relativité du jugement esthétique dans l’art, souvent étroitement lié dans des structures économiques et sociales. Il sera également question de cette notion de "bon artiste". Que signifie-t-elle ? Un "bon artiste" est-il celui sachant se mouler dans les institutions, la société, voire un certain académisme ? Toute une série de représentations parlent au contraire d’artistes novateurs, révolutionnaires, maudits mais incompris et dont le génie n’apparaît qu’après la mort. Qu'est-ce qu'être incompris d'ailleurs et qu’entend-on par génie ?

    Ce sont autant de questions qui pourront être débattues. Les participants du café philosophique de Montargis seront invités à en débattre au cours de cette séance spéciale à la médiathèque de Montargis le vendredi 26 avril 2019 à 18 heures.

    La participation sera libre et gratuite.

    http://cafephilosophique-montargis.hautetfort.com

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  • À quand un cinéma éco-friendly ?

    Cette chronique est celle de Robin Risoute, rédacteur pour Fournisseur-energie.com. A priori rien ne destinait Bla Bla Blog à s'intéresser à ce site d'information spécialisé dans l'énergie, sauf qu'un article a attiré notre attention. Robin Risoute s'est intéressé au prochain James Bond, qui verra Daniel Craig incarner une dernière fois l'agent 007. Mais ce qui intéresse notre journaliste n'est pas les dernières informations croustillantes de ce nouvel opus, ni le scénario, ni même le casting mais l'empreinte écologique de ce blockbuster, un blockbuster qui est déjà au centre des critiques en Norvège, son lieu de tournage. Plus généralement, c'est l'empreinte carbone du cinéma qui intéresse Robin Risoute. Saviez-vous que cette industrie est l'une des plus polluantes du monde? Shocking ! 

    Le prochain James Bond devrait sortir en avril 2020 et verra Daniel Craig incarner pour la dernière fois le personnage créé par Ian Fleming. En attendant, il connaît une production mouvementée : initialement prévu pour être réalisé par Danny Boyle (Trainspotting28 jours plus tard), qui a quitté le projet à l’été 2018 en raison de "différends créatifs", il est finalement dirigé par Cary Joji Fukunaga (Sin nombre, True Detective).

    Le film, qui pourrait s’appeler Eclipse, agite désormais les écologistes norvégiens. C’est en effet en Scandinavie, dans le comté d’Akershus, qu’est actuellement tourné ce vingt-cinquième volet cinématographique des aventures de James Bond. C’est au nord d’Oslo, à Trehørningen, que la production du film a posé ses valises… non sans créer de nouveaux remous.

    Le tournage a en effet lieu dans les forêts de Nordmarka, une région tranquille normalement soumise à d’importantes régulations sur la circulation automobile et les constructions. Non contente de fermer des zones normalement réservées aux skieurs, la production y construit des bâtiments, dont l’un est conçu pour exploser durant le tournage.

    Il n’en fallait pas plus pour outrer les associations de défense de l’environnement, qui ont notamment protesté contre la construction de ces bâtiments dans une région naturelle. Il faut dire qu’on fait plus écologique qu’un tournage, et certainement plus tranquille pour la faune et la flore que les explosions qui ne manquent pas de caractériser les films de James Bond.

    Suite de cet article ici...

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  • Chères rouquines

    Voilà un livre qui tombe à pic : alors qu’a lieu jusqu’au 13 mai prochain l’exposition "Roux" au Musée Jean-Jacques Henner (Paris 17e), Édith Pauly propose son essai Rousses ! Les flamboyantes à travers l’histoire Aux éditions Quai des Brunes (sic).

    C’est un euphémisme de dire que les femmes rousses ont inspiré esthétiquement les artistes autant qu’elles ont suscité toutes les passions mais aussi les idées reçues. L’auteure écrit ceci dans sa préface: "Le rouge, première couleur du prisme, est perçu de manière ambivalente selon les époques et les cultures. Il peut représenter le pouvoir, la vie, la chaleur, mais tout autant basculer de l’autre côté du miroir avec l’enfer, la traîtrise, la cruauté… Parfois même les deux représentations coexistent !"

    Les préjugés tout autant que les fantasmes alimentent l’iconographie pléthorique de ces femmes qui ont pu être reines, guerrières, modèles, artistes, actrices, mannequins ou simplement des figures anonymes. La relative rareté de leur caractéristique physique (1,5 % de la population mondiale), qui est le résultat de la mutation d’un gène il y a plusieurs milliers d’années seulement, expliquent en grande partie pourquoi les rousses ont pu susciter tour à tour fascination, méfiance, admiration ou adoration.

    Édith Pauly retrace, grâce à un ouvrage passionnant et richement documenté, l’histoire de ces chères rouquines, une histoire qui commence d’abord par ces figures légendaires, mythologiques ou sacrées qui ont fascinées les hommes en raison précisément de la couleur rouge de leur chevelure. La journaliste précise d’emblée que l’ambivalence est présente dès l’époque romaine avec le terme latin de rufus qui désigne aussi une injure courante qui signifie "grotesque", "risible" et difforme", au point que les roux ont pu être chassés de Rome pour expier les fautes de la Cité.

    Le roux et la rousse deviennent mal aimés, au point de servir de modèles pour des personnages abhorrés : Ève, Caïn, Lilith, Judith, Dalila et jusqu’aux sorcières à l’époque de l’Inquisition. Pour illustrer ces figures mythiques, Édith Pauly puise dans des sources de tous horizons, les rousses ayant inspiré de nombreux artistes, que ce soit Rubens (Samson et Dalila, 1610), Cranach L’Ancien (Salomé avec la tête de Jean-Baptiste, 1530), ou John Collier (Lilith, 1887).

    Fausses rousses

    En dehors de ces personnages légendaires, les femmes rousses ont marqué toutes les époques et frappé l’imagination de leur contemporain, nourrissant même malgré elles les préjugés sur cette fameuse couleur. Édith Paul s’intéresse à quelques figures historiques : Elizabeth Ier et Marie Stuart – la première ayant fait décapiter la seconde –, les guerrières berbères Kahena et Fatma Tazouguerth ou encore Roxelane, la concubine de Soliman le Magnifique. Ces rousses légendaires frappent par leur caractère de feu, à l’image de leur chevelure, mais aussi, pour certaines, par leur indépendance : "Souvent violentes, guerrières, sans scrupule, à tout le moins de fort tempérament, leur destin s’achève fréquemment en tragédie" : la reine bretonne Boadicée (ou Boudicca), la pirate Anne Bonny, Marion du Faouët ou, bien plus près de chez nous, l’espionne russe Anna Kushkenko.

    Édith Pauly consacre près de la moitié de son essai à l’influence de la rousseur sur l’esthétique. Et l’on découvre à quel point la caractéristique physique d’une chevelure a pu marquer l’histoire de l’art... La Vénus sortant des eaux de Botticelli était une rouquine. Au XIXe siècle, Manet demande à Victorine Meurent de poser pour elle pour Le déjeuner sur l’herbe puis pour Olympia. Autre maîtresse, autre rousse : Tulla Larsen pour qui Klimt aura une passion folle. L’inspiration pour ces femmes est telle que des mouvements picturaux entiers s’appuient sur cette couleur flamboyante : le préraphaélisme, le symbolisme ou l’art nouveau. Modigliani et sa compagne Jeanne Hébuterne, sa muse rouquine, vont révolutionner l’art pictural grâce à ces portraits reconnaissables entre tous et ces fameux cheveux.

    Le livre ne passe pas sous silence l’utilisation que la publicité, la bande dessine, le cinéma ou la télévision ont faites des rousses, avec là encore quelques figures devenues cultes : Maureen O’Hara, Marlène Jobert, Isabelle Huppert, Agnès Moorehead, Fifi Brindacier, Barbarella ou Sophie Dahl, la mannequin ayant posé pour le parfum Opium®.

    Aujourd’hui, ces fascinantes et chères rouquines sont plus présentes que jamais. Autrefois méprisées ou moquées, elles seraient presque jalousées, voire enviées. Les fausses rousses ne manquent pas, écrit Édith Pauly, que ce soit Mylène Farmer, Kylie Minogue, Rachel McAdams ou… Axelle Red. La danseuse de stars Fauve Hautot, elle-même, s’est colorée les cheveux dès l’âge de 12 ans. La mode mais aussi les préjugés sont passés par là, est-il dit en conclusion : "Certaines ont envie de faire évoluer leurs rôles, comme peuvent l’être les blondes lassées des stéréotypes attachés à leur couleur. Pour d’autres, se teindre en rousse leur aurait donné un culot, une prestance qu’elles n’avaient pas auparavant. Du moins le pensaient-elles."

    Édith Pauly, Rousses ! Les flamboyantes à travers l’histoire,
    éd. Quai des Brunes, 2018, 128 p.

    Exposition "Roux ! De Jean-Jacques Henner à Sonia Rykiel"
    du 30 janvier au 13 mai 2019 au musée Jean-Jacques Henner, Paris 17e

    https://edithpauly.wixsite.com/edith-pauly
    https://www.editionsquaidesbrunes.fr/en/product/rousses

    Voir aussi : "Baigneuse sortant des eaux"

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  • Le ravissement d’Adèle pour les Enfants du Vietnam

    Le théâtre de l’ASIEM (Paris 7e) et la compagnie des 7 de la Cité proposent la pièce de théâtre Le Ravissement d’Adèle de Rémi De Vos, du 28 mars au 12 avril 2019. Cette enquête policière, qui est aussi une satire sociale où l’humour est présent, est produite en faveur de l’association des Enfants du Vietnam.

    Dans un petit village de France, Adèle Bertolet, 15 ans, a disparu. Nouvelle fugue ? Kidnapping L’inspecteur Corentin Fallière est chargé de l’enquête. À travers cette histoire où l’intrigue passe très vite au second plan, Rémi De Vos dresse un portrait au vitriol des habitants du village : les commerçants, représentés par un couple de bouchers, l’institutrice et sa fille adolescente, deux ménages en crise, un pilier de bar, un jeune dans la précarité, etc… La boucherie, lieu de circulation des cancans du village, côtoie les intérieurs où se révèle l’intimité des protagonistes. Petit à petit, les accusations succèdent aux soupçons et ce petit monde pittoresque bascule dans la folie. L’enquête n’est pas facile, d‘autant plus que l‘inspecteur n’est pas épargné par cette contagion.

    Cette pièce proposée a un but humanitaire autant qu’artistique puisqu’elle est est montée en faveur des Enfants du Vietnam.

    L’association Enfants du Vietnam scolarise et apporte une aide alimentaire et médicale aux « Enfants du Vietnam » issus des familles les plus démunies. Elle leur donne une chance de grandir et d’étudier comme des enfants et d’assurer une fois adultes l’autonomie de leur famille.

    Un but humanitaire autant qu’artistique

    Depuis sa création en 1999 à aujourd’hui l’association a construit soixante écoles et scolarisé plus de deux mille enfants grâce à des programmes de parrainages individuels et collectifs. Actuellement, d’autres projets – écoles sont en cours de réalisation (voir la page Nos Programmes).

    Avec 28 € par mois, les parrains et marraines apportent le complément financier nécessaire à une famille pour assurer son minimum vital et payer les frais de scolarité. Les parents peuvent ainsi laisser leurs enfants aller à l’école au lieu de leur demander de travailler dans les champs, dans les rues ou dans les usines. Les enfants mangent à leur faim, vont à l’école et apprennent un métier.

    Ce sont les dons et les profits réalisés lors des ventes et diverses manifestations caritatives qui permettent de construire les écoles. La bonne marche de l’association est assurée par un C.A. de 15 personnes et des membres actifs, tous bénévoles.

    Assister à une pièce de théâtre et faire une bonne action : une soirée idéale. Alors, réservez votre place !*

    Le Ravissement d’Adèle de Rémi De Vos, au Théâtre de l’ASIEM
    Avec la Compagnie des 7 de la Cité
    Mise en scène d'Alexis Rocamora, assisté de Jean-Nicolas Gaitte
    Avec : Thonin Kaas, Nicolas Besnard, Caroline Bourguignat,
    Sophie le Mouellic, Nicolas Sauvaige,
    Thomas Roquet Montegon,
    Sylviane Faust, Fabien Guigonnet, Antoine Landon, Frank Roiena,
    Alyette Mathelin Moreaux, Orane de Chauveron, Louise Loeb,
    Elisabeth David, Pierre-Olivier Cointe et Hortense Calenge

    Au Théâtre de l’ASIEM, du 28 mars au 12 avril 2019, représentation à 20H30
    6 rue Albert de Lapparent, Paris 7ème
    Métro : Station Ségur (Ligne 10)
    http://asiem.fr
    http://les7delacite.com
    http://www.enfantsduvietnam.org

    * Important : Si vous réservez par le site, bien préciser sur le menu déroulant
    que vous venez de la part de Thomas Roquet Montegon

    Voir aussi : "Brigitte Bellac, toujours debout"

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  • Kalune se bouge

    Kakune sort ce printemps son album sobrement intitulé Amour. Pour l’heure, intéressons-nous à son premier EP, Kalune, qui donnera l’avant-goût de la production et de l’univers de cet artiste singulier. Singulier et engagé, et c’est bien là tout l’intérêt de son travail.

    "La maison brûle et nous regardons ailleurs" : face au constat fait il y a une vingtaine d’années par un ancien Président de la République, Kalune se retrousse les manches et fait de la musique une arme pour faire bouger les choses : l’environnement, la défense de la planète ou la solidarité.

    Un vrai résistant alternatif comme il le proclame lui-même dans le slam musclé Les fleurs de la résistance, un authentique hymne à l’altermondialisme : "On se bouge / On se lance / On vise l’autosuffisance / Et on ose / On propose / Un profond changement des choses."

    Le militant musicien sait se faire poétique dans le bel hommage à l’ours Canelle : "Elle était reine de nos montagnes/ Mais le monde n’a plus besoin d’elle / Entre la France et l’Espagne/ Était le royaume de Cannelle" (Canelle). Oui, Kalune est bien engagé, mais il reste un artiste méticuleux dans sa manière d’allier ses textes, son flow et une orchestration enrichie par le violon d’Anaïs Laffon.

    Kalune se fait aussi penseur autant que poète dans le métaphysique. On se bouge est un titre en forme d’interrogations sur les grands mystères de la vie. 

    Kalune est un artiste pluriel, vibrant d’énergie qui a mille choses à dire sur lui comme sur le monde. Il est aussi, à sa manière, un vrai épicurien dans le sens philosophique du terme : pour preuve, le titre Lâcher prise (car la paix dit l’âme), référence explicite au fameux "carpe diem" d’Horace. Nous aurions envie de dire que cet épicurisme se teinte de ce cynisme immortalisé par Diogène : "J’ai le mal de terre / Comme un vague à l’âme / Tous dans la même galère / Il va falloir qu’on rame."

    Kalune, Kalune, EP, Zamora Prod, 2018
    https://www.facebook.com/kalune.musique

    Voir aussi : "Féloche, l’alchimiste musical"

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  • Sarah et Julia en BD

    Il y avait le roman Il s’appelait Sarah, puis la version ciné : voici maintenant, sorti depuis quelques mois, l’adaptation en bande dessinées du best-seller de Tatiana de Rosnay. Pascal Bresson au scénario et Horne au dessin proposent une nouvelle lecture de l’histoire de cette petite juive prise dans les tourments de l’Occupation allemande et de l’État autoritaire de Vichy.

    Lorsque la police française vient arrêter sa famille, Sarah, 10 ans, choisit d’enfermer son petit frère Michel dans le placard de leur appartement. Elle lui fait la promesse qu’elle viendra le chercher plus tard. 60 ans plus tard, une journaliste américaine s’apprête à aménager dans l’appartement parisien qu’occupait sa belle-famille.

    Il y avait un piège dans pour une telle adaptation : celle de trop s’inspirer du film de Gilles Paquet-Brenner, avec Kristin Scott Thomas dans le rôle principal. Contre cet écueil, Pascal Bresson et Horne ont choisi de proposer une œuvre graphique austère, portée le noir et blanc et des gris lavis omniprésents et oppressants – y compris pour les scènes se passant entre 2002 et 2005. Quelques touches de couleurs jaunes ou orangées viennent éclairer les quelque 200 planches de la BD, mettant en valeur la petite victime innocente. Et l’on en vient à penser à la fillette en robe rouge de La Liste de Schindler.

    Des "Mangemorts" tout droit sortis de l’armée de Voldemort

    Pascal Bresson et Horne choisissent d’allier des paysages et des descriptions réalistes – notamment le Paris de la journaliste américaine Julia Jarmond – à des scènes expressionnistes. Les policiers français, les soldats allemands ou les geôliers du camp de Beaune-la-Rolande ne sont que des masses sombres. Ces "Mangemorts", comme tout droit sortis de l’armée de Voldemort, ouvrent des bouches monstrueuses, prêtes à dévorer leur victime – le plus souvent des enfants. Lors d’une scène capitale dans un restaurant, Julia Jarmond elle-même se trouve face à une bouche semblable : et il s’agit singulièrement celle de son propre mari...

    Plus sans doute que la version filmée, cette BD fusionne parfaitement bien l’époque des années 40 et la nôtre. Le passé vient surgir et se fracasser contre le présent. Tel un tsunami, il met à nu les liens familiaux, bouscule les certitudes et oblige les personnages à se révéler. Il est impossible de ne pas parler des lieux, que ce soit l’appartement de Sarah ou le camp de Beaune-la-Rolande agissant comme des marqueurs indélébiles, des dizaines d’années après un drame indicible. À la faveur d’un déménagement ordinaire, voilà une journaliste américaine et une petit fille juive indéfectiblement liées.

    Tatiana de Rosnay, Pascal Bresson et Horne, Elle s’appelait Sarah
    éd. Marabulles, 2018, 207 p.

    http://www.tatianaderosnay.com
    https://pascalbressonbd.weebly.com

    Voir aussi : "Tatiana de Rosnay, son œuvre" 
    "Je viendrai te chercher"

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