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• • Articles et blablas - Page 291

  • Ceux qui aiment lire ont une raison supplémentaire de prendre le train

    Je parlais il y a plusieurs mois de cela d'une expérimentation de la SNCF de bibliothèque numérique disponible dans les trains de Lorraine et de Languedoc-Roussillon.

    Fort du succès de ce service E-LIVRE, l'entreprise publique de transport généralise cette fois à toute la France cette initiative bienvenue pour les amateurs de lecture.

    Le principe de ce service gratuit est simple : grâce à une application et un site, chaque voyageur peut s'inscrire à E-LIVRE avec une adresse mail. Gratuitement pendant 45 jours, il pourra bénéficier de plusieurs milliers de livres téléchargeables sur son téléphone ou sa tablette. Le service devient payant après ces 45 jours (9,90 euros par mois) mais peut être résilié à tout moment.

    Transporteur ferroviaire, la SNCF semble soucieux de développer quelques services aux voyageurs. Espérons que cela ne soit pas qu'un simple mirage.

    SNCF e-LIVRE
    "Ceux qui lisent prendront le train"


    La SNCF met en place une bibliothèque digitale... par ITELE

  • Les super prouesses de SuperFeat

    tumblr_mqiqkxPXoq1s5dmlco1_400.gifQuelque part, entre Pierre de la Police et Topor, vit SuperFeat, une jeune illustratrice, graphiste et animatrice qui se serait nourrie de films de David Lynch, de poèmes dadaïstes et de bandes dessinées de Joann Sfar pour créer un univers surréaliste, poétique, déjanté, sexy et bourré d'humour noir (voir aussi ce texte de Superfeat publié sur ce blog, avec l'aimable autorisation de l'auteur). 

    Comment reconnaît-on la marque d'un véritable artiste ? Sans doute à ceci : qu'il puisse être immédiatement reconnaissable par le public et qu'il ait la capacité de nous aimanter.

    Entrez quelques instants sur le Tumblr de Superfeat : il est difficile de ne pas être fasciné par les tranches de vie croqués au format PNG ou JPEG parfois taggés de quelques mots, les planches de bande-dessinée, les GIF animés, les scénettes absurdes rehaussées de couleurs criardes, les personnages naïfs englués dans des situations absurdes et souvent violentes – les mutilations et autres bains sanglants sont monnaie courante.

    La galerie de personnages est à l'avenant : gangsters tatoués, jolies filles martyrisées, danseurs de bootyshake détournés, bad boys gays et romantiques, couples enlacés semblant attendre un désastre, parties de jambes en l'air (dans les deux sens du terme), femmes criminelles ou pleurant des ruisseaux de sang 

    Tout cet univers fascinant navigue entre humour noir et poétique : "J’aime imaginer une image non pas comme un trait sur un morceau de papier mais comme une accumulation de dimensions différentes" affirme l'auteure. 

    Sans conteste, SuperFeat est à suivre avec le plus grand intérêt, sur le web et ailleurs.

    http://superfeat.tumblr.com
    http://www.xviiip.com/superfeat.html
    https://twitter.com/superfeat
    JesuisThéo, "C'est Noël"


  • Random : que personne ne sorte

    Une fois n'est pas coutume, TF1 se distingue dans sa programmation en proposant Random, l'une des séries françaises les plus originales du moment.

    Ne cherchez cependant pas cette fiction sur la TNT. Cette production originale a eu l'exclusivité de Mytf1.fr. C'est mieux que rien, me direz-vous, la chaîne commerciale n'étant sans doute pas prête à troquer quelques épisodes de Joséphine Ange Gardien contre une production ambitieuse ou innovante.

    Random révèle que dans le monde des séries télévisées françaises les mentalités évoluent doucement et que les chaînes ont tout intérêt à répondre à l'engouement croissant du public pour des créations originales et de qualité. Random, apparue sur le web après quatre années de travail (elle est aussi disponible sur Wat.tv et Xtra), financée via Ulule (76 contributeurs Internet), a rapidement fait le buzz. Preuve de ses qualités indiscutables, elle a été primée à plusieurs reprises : Coupe du Monde des webséries de Montréal, prix et nominations dans les festivals internationaux de WebFest à Berlin, Rome, Bilbao et, dernièrement, Rio (Rio Web Fest, prix du "Meilleur casting", début novembre 2015). Au Sicily Web Fest, Random a été nommé dans trois prestigieuses catégories et est repartie avec le prix de la meilleure websérie dramatique et le prix ''Special Mention Rockzeline''. Plus récemment, le Dub Web Fest de Dublin a récompensé Random avec deux prix : la meilleure web série drame/thriller/mystère et la meilleure actrice pour Lola Coipeau. Pas mal pour une série au format atypique (12 épisodes de 5 à 9 minutes) ayant coûté, selon les réalisateurs, 2 575 euros !

    Parlons maintenant de l'intrigue. Random a pour point de départ une bande d'amis qui, après une fête bien arrosée, se retrouvent le lendemain matin enfermés dans un appartement. Ils se retrouvent dans l'impossibilité de sortir à cause d'un phénomène surnaturel. Sans vouloir dévoiler l'intrigue, durant cette première saison il est question d'espace-temps capricieux, de rencontres surnaturelles, de doubles, de cohabitations compliquées mais aussi d'un crime qui va compliquer la situation.

    Audacieusement, cette série tournée en huis-clos (à l’exception de l'ultime scène du dernier épisode) s'approprie les codes de la science-fiction, sans oublier de faire la part belle aux ressorts dramatiques et à l'épaisseur des personnages : "On voulait que le côté scientifique soit une sorte de contexte/prétexte pour s’intéresser aux personnages et au format dramatique de la série. C’est vrai que la SF n’est pas si présente que ça, hormis le huis-clos paranormal", dit le co-réalisateur Sullivan Le Corvic dans une interview pour Les Plumes Asthmatiques.

    Le spectateur pourra aisément deviner les influences des auteurs, à chercher essentiellement du côté des séries américaines (Lost, Breaking Bad, X-Files ou Sliders). Plus anecdotique, on pourra trouver un clin d’œil à Agnès Varda au cours de cette première saison : rien d'étonnant pour une production tournée à Nantes ! Côté réalisation et interprétation, on saluera le soin et le professionnalisme de cette création qui ringardise pas mal de séries françaises. Qu'une chaîne comme TF1 la propose dans ses programmes en replay est en soi le signe qu'il se passe quelque chose d'important. La jeunesse et la créativité de Random pourrait bien faire bousculer les lignes, ici comme ailleurs.

    Une saison 2 est déjà en préparation (le tournage est prévu à partir de mars 2016) et les auteurs en projettent déjà deux autres.

    Random, la série
    Random, série française, saison 1, 12 épisodes,
    de Rémi Noëll & Sullivan Le Corvic, avec Valentin Naulin, Lola Coipeau,
    Fleur Monharoul, Arnaud Ménard, Pierre Bedouet et Enora Marcelli
    Random - Page Facebook

    "Random une webserie nantaise nominée deux fois à Montréal ce week-end",
    Presse Ocean, 14 mai 2015

    Websérie : long entretien avec l’équipe de Random,
    Les Plume Asthmatique, 31 octobre 2015

  • Le Diable est à vendre

    radiguet,enchères,roman,le diable au corpsCe 2 décembre, le monde littéraire aura les yeux braqués sur la maison parisienne de Christie's. Il sera en effet mis en vente l'un des manuscrits français les plus emblématiques du XXe siècle : celui du roman Le Diable au Corps de Raymond Radiguet, décédé prématurément du typhus en 1923, précisément l'année de la parution. Les cahiers de cette oeuvre de jeunesse – 161 feuillets au total – sont mis en vente et qui devraient dépasser les 500.000 euros.

    Le Diable au Corps a fait scandale lors de sa parution, cinq ans seulement après la fin de la première guerre mondiale. Le roman sulfureux raconte l'histoire d'amour passionnée entre un adolescent, François, et Marthe, la femme d'un soldat parti se battre sur le front.

    Le Diable au Corps – roman en partie autobiographique malgré les dénégations de l'auteur – est le récit, sur fond d'ennui, d'une relation adultère vouée à l'échec en raison du jeune âge de François autant que la mise à mal de la figure héroïque et sacrée du soldat de la Grande Guerre. En 1947, l'adaptation cinématographique de Claude Autant-Lara avec Gérard Philippe et Micheline Presle suscitera la même controverse, deux années après la fin de la seconde guerre mondiale.

    En 2015, le Diable au Corps a perdu de son parfum de soufre mais conserve sa vigueur et sa modernité. La vente exceptionnelle du manuscrit devrait prouver que l'engouement pour Raymond Radiguet est toujours vivace.

    "Raymond Radiguet : le Diable au corps, sur 13 cahiers d'écolier",
    Actualitté.com, 24 novembre 2015

  • Eurydice ou Opération Orphée

    orphée,eurydice,shorteditionLe bloggeur parle de l'auteur. Puisque l'on n'est jamais si bien servi que par soi-même, cet article entend s'arrêter sur une récente publication chez ShortEdition, le spécialiste web des textes courts. Une de mes nouvelles, Opération Orphée, est maintenant disponible sur ce lien et accessible gratuitement.

    Opération Orphée concourt également pour le prix de la nouvelle de décembre 2015.

    J'ai envie de m'arrêter sur l'histoire de ce texte, écrit en 2009, et qui s'inscrivait dans un projet plus important de recueil de nouvelles sur la mythologie (De Charybde en Scylla). Revisiter des mythes aussi présents qu'Orphée, les Danaïdes, les Furies ou Sisyphe est-il encore possible ? Telle était la démarche et le pari qui a fait l'objet d'un challenge lancé en couple. Un jeu initié par ma femme : "Tu m'écriras un texte sur Orphée et Eurydice, qui se passera en Islande, aux pieds du volcan Hekla. Bonne chance".

    Merci, ma chérie... Me voilà bien.

    Comment allais-je revisiter ce mythe, sans doute l'un des plus connus et des plus appréciés à travers le temps ? A priori, identifier à un volcan les enfers où Orphée part rechercher son amour paraissait facile. Trop facile. Le lecteur de Jules Verne que j'avais été trouvait en outre dans ce choix une certaine jouissance. Mais il y avait un piège dans cet handicap car l'aller-retour d'Orphée devait, dans mon état d'esprit, s'inscrire dans une revisite complète du mythe. Pour le dire autrement, l'histoire devait être contemporaine, résolument moderne, audacieuse et devant ménager un coup d'éclat dans les dernières lignes. Plusieurs questions se posaient ? Comment (re)traiter - sans maltraiter - ce mythe ? Quel pouvait être la place de la technologie et des sciences ? Comment traiter de l'amour au cœur d'un volcan ? Quel visage pouvaient prendre Orphée et Eurydice ? L'aspect divin méritait-il d'être occulté ? Et comment parler d'amour aujourd'hui, d'une manière inédite ?

    Je n'en dis pas plus : ce sera au lecteur de découvrir comment je me suis sorti de ce mauvais pas.

    Bruno Chiron, Opération Orphée, éd. ShortEdition, 2015

  • Les Eagles Of Death Metal témoignent et promettent de revenir (si possible au Bataclan)

    Je publiais hier un article sur le groupe Eagles Of Death Metal qui a été au cœur de l'actualité, avec l'attentat au Bataclan au cours d'un de leur concert.

    Cette semaine, les EODM, survivants de la tuerie dans la salle de spectacles où ils se produisaient, témoignent pour Vice presque deux semaines après les événements du 13 novembre. 

    L'effroi, le choc et le chagrin n'empêchent pas les artistes de se projeter vers ce qu'ils font de mieux : la musique. Ils promettent déjà de revenir jouer à Paris et même d'être les premiers à rejouer au Bataclan lorsque la salle rouvrira.

    "Eagles of Death Metal Discuss Paris Terror Attacks", Vice, 25 novembre 2015
    "Eagles Of Death Metal, contre le pire et pour le meilleur"

  • Eagles Of Death Metal, contre le pire et pour le meilleur

    Qui sont les Eagles Of Death Metal ? Le 13 novembre 2015, ce groupe de rock californien devenait – hélas ! – mondialement connu, suite à l'attentat au Bataclan, lors d'un de leur concert. Plusieurs terroristes de Daesh y faisaient un carnage, provoquant la mort de 90 spectateurs – jeunes voire très jeunes – et des centaines de blessés. En l'espace de quelques heures, ce groupe, jusque-là d'abord connu seulement des amateurs de rock, accédait à une tragique notoriété, au point sans doute d'entrer bientôt dans les livres d'histoire.

    Les Eagles Of Death Metal méritent de s'arrêter sur ce qu'il y ait de meilleur chez eux : leur musique et leurs choix artistiques.

    Aux premières heures du drame, nombreux auront été ceux qui les ont identifié comme appartenant à un courant de death metal. Cette confusion a longtemps été assumée par les membres fondateurs d'EODM, Jesse Hughes et Josh Homme, l'ancien leader de Queens of the Stone Age. Jesse Hugues se plaît à raconter que ce nom d'Eagles Of Death Metal est venu après une soirée arrosée au cours de laquelle a été évoqué un croisement musical inédit entre le groupe de country-rock Eagles et le death metal. La notoriété du groupe tient du reste à un perpétuel jeu de fausses pistes, de détournements assumés et de seconds degrés.

    Si Eagles Of Death Metal est bien un groupe de rock, caractéristique pour ses guitares saturées, ses batteries testostéronées et ses voix puissantes, c'est pour mieux se jouer et se moquer des archétypes viriles du rock : sexe, drogue et alcool. Les fans des Rolling Stones apprécieront. Les Eagles Of Death Metal symbolisent “le droit naturel de l’homme de se moquer de tout. Des opinions. Des religions. Même de sa propre existence de rocker” comme l'écrit le Süddeutsche Magazin au lendemain des attentats de Paris.

    EODM s'est fait connaître du grand public grâce à deux titres tirés de leur premier album  Peace, Love, Death Metal et utilisés pour deux publicités : "Don't speak" pour Nike et "I Only Want You" pour Microsoft.

    Sorti en octobre, Zipper Down s'avère un excellent disque de rock, susceptible de séduire un large public, en plus de devenir emblématique pour la pire des raisons – l'un des plus terribles attentats que l'Europe ait connu dans son histoire. L'équipe de Jesse Hugues et Josh Homme se livre complètement avec "Complexity", punchy et brut, semblant avoir été enregistré par une bande de potes au fin fond d'un garage, et sans prise de tête : "That it's easier without complexity". Tout aussi rythmé, "Got A Woman" séduit par sa ligne mélodique facilement mémorisable, tout comme l'est d'ailleurs "Oh Girl", plus posé, plus sombre aussi. "Skin-Tight Boogie", revendiquant ses influences hard-rock, est tout en guitares lourdes, complexes et séduisant en diable. Mais impossible de ne pas parler de Zipper Down sans citer leur morceau devenu le plus célèbre : "Save A Prayer". Cette reprise plus que réussie d'un tube de Duran Duran est un savant mélange de rock (bien sûr), d'électro et de new-wave. Les réseaux sociaux et la presse ont largement favorisé l'engouement pour cette chanson, appelée à devenir l'hymne des victimes du Bataclan : "Don't save a prayer for me now, save it till the morning after". Des fans appellent, symboliquement, à hisser ce titre au sommet des charts anglais. La mission est presque remplie et les droits d'auteur de cette chanson devraient être reversés par Duran Duran aux victimes des attentats de Paris.

    Eagles Of Death Metal va-t-il continuer après cette épreuve ? Ou bien faire un doigt d'honneur aux soldats de Daesh et choisir de continuer, comme des milliers de ses admirateurs le réclament, avec sa joie de vivre, son exubérance communicative, sa créativité et son humour potache, si caractéristique de ce groupe azimuté ?

    Un humour qui était encore présent au soir du 13 novembre. En plein carnage du Bataclan, alors que, terrifiés, ils se trouvaient enfermés dans une loge en attendant le pire, un fan s'adressait ainsi au bassiste du groupe afin de baisser la tension insupportable à ce moment : "Mec, franchement j'ai préféré ton concert de juin à celui-ci".

    Eagles Of Death Metal, Zipper Down, Universal Int. Music, 2015
    Eagles Of Death Metal : la page Facebook

  • Une partie de football contre le djihadisme

    Le cinéma français consacrait cette année le film Timbuktu d'Abderrahmane Sissako, bouleversant tableau d'un village malien écrasé par l'Islam radical.

    Pour traiter du djihadisme international avec une telle puissance et une telle justesse, il fallait une musique à la hauteur. Celle d'Amine Bouhafa parvient à relever le défi haut-la-main. C'est l'ambition qui frappe d'emblée l'auditeur : instruments traditionnels, la voix bouleversante de Fatoumata Diawara, un orchestre à cordes "sublimant" (le mot est du compositeur lui-même) les scènes du film.

    L'extrait sans doute le plus inoubliable de Timbuktu est celle de la partie de football, sans ballon, qui mérite de figurer parmi les scènes d'anthologie du cinéma. Le compositeur tunisien a composé et orchestré pour l'occasion un des plus morceaux de sa bande originale. Bouleversant et lyrique, cette partie de foot – et la bande-son qui l'accompagne – est la plus belle réponse aux fondamentalistes interdisant toute forme de distractions – musiques, jeux, sports...

    Le 13 novembre, ce sont justement des endroits dédiés aux loisirs, au sport et à la culture auxquels qui ont été pris pour cible par des terroristes islamiques.

    Amine Bouhafa, Timbuktu, 2014
    Timbuktu, film franco-mauritanien de Abderrahmane Sissako
    avec Ibrahim Ahmed dit Pino, Toulou Kiki, 2014, 1H48