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• • Articles et blablas - Page 88

  • Duo Jatekok : "Nous sommes nous-mêmes déstabilisées"

    Duo Jatekok sort en ce moment un étonnant album de reprises pour deux pianos du groupe de metal Rammstein. Duo Jatekok plays Rammstein c’est un mariage inattendu entre le classique et le rock. Sur ce projet musical, nous avons interrogé Nairi Badal et Adélaïde Panaget, les deux membres de Duo Jatekok. 

    Bla Bla Blog – Bonjour Naïri et Adélaïde. Vous formez le Duo Jatekok. D’abord, comment est née votre collaboration et pourquoi ce nom « Duo Jatekok »

    Duo Jatekok – Bonjour ! Nous avons commencé à jouer ensemble dès l'âge de 11 ans. Nous étions dans la même classe de piano et le piano à quatre mains et le deux pianos était une source de joie et de complicité musicale très ludique.  Plus tard, lors de nos études supérieures, nous avons décidé de nous perfectionner dans cette discipline exigeante et originale et de préparer des concours internationaux. Le piano étant un instrument assez solitaire, nous avons d'emblée adhéré à cette carrière à deux. Le répertoire étant très différent du répertoire de piano solo, cela nous a ouvert de nouveaux horizons musicaux et nous a offert la possibilité de collaborations variées. Les Jatekok sont un recueil de pièces du compositeur hongrois Kurtág. Ce sont des miniatures inspirées de la manière dont les enfants approchent un clavier de piano. On y joue avec les coudes, la paume des mains, on glisse d'un bout à l'autre, on explore des registres. C'est un répertoire magnifique et le mot hongrois "Jatekok" signifie "les jeux". Nous avons aimé cette sonorité étrange et rythmique et la musique qu'elle représentait.

    Bla Bla Blog – Vos deux premiers enregistrements laissaient déjà apercevoir votre appétence pour le répertoire contemporain et la musique du XXe siècle (Barber, Ravel, Trotignon), non sans passer par le jazz (Dave Brubeck). Maintenant c’est le groupe de métal Rammstein qui est au cœur de votre dernier album. N’avez-vous pas peur de déstabiliser le public avec ce mélange des genres – classique et rock métal ? 

    Duo Jatekok – Nous sommes nous-mêmes déstabilisées ! Mais la vie nous a offert des possibilités d'élargissement de répertoire et ça aurait été dommage de ne pas s'y engouffrer sous prétexte de rester dans des cases stylistiques. Au contraire, nous avons l'impression d'un enrichissement qui nous permet de construire des passerelles entre les genres. Nous avons beaucoup travaillé le répertoire du XXe siècle et le décloisonnement des genres nous a permis de rencontrer des musiciens fantastiques qui nous donnent des impulsions nouvelles dans notre art. Nous aimons sortir de notre zone de confort !

    Bla Bla Blog – Comment s’est faite la rencontre avec Rammstein ? Est-ce que ce sont eux qui sont venus vers vous ou bien l’inverse ? Avant votre collaboration, connaissiez-vous le groupe ? 

    Duo Jatekok – C'est leur producteur français Olivier Darbois qui a eu l'idée de mettre une femme au piano en première partie pour créer un contraste. De plus, Rammstein a édité une partition piano-chant de certaines de leurs chansons. Il trouvait ce concept original et intéressant. C'était en 2017 pour leurs trois dates aux arènes de Nîmes. Lorsqu'il nous a proposé de le faire, nous avons trouvé l'idée intéressante et avons voulu relever ce challenge ! Nous ne connaissions pas du tout Rammstein et ça a été une sacrée aventure de s'imbiber de leur musique et de la retranscrire au mieux pour notre formation instrumentale.

    Bla Bla Blog – Depuis 2017, vous faites les premières parties de Rammstein. Racontez-nous le souvenir de votre tout premier concert au milieu d’un public de fans, et dans une ambiance que j’imagine bien différente d’une salle de concert classique. 

    Duo Jatekok – C'était assez fou pour nous. Nous ne savions pas du tout comment le public allait réagir face à deux femmes sur un piano à queue. Une anecdote rigolote : on nous avait conseillé de faire le signe du diable en arrivant sur scène pour stimuler le public. C'était un code que nous ne connaissions pas du tout. On s'était dit qu'on garderait ça pour la fin de notre prestation. Or, en arrivant sur scène, le public nous a accueilli avec des cris et ce signe. Nous avons donc timidement répondu par le même signe et là, magie, les gens ont encore plus hurlé ! C'était incroyable. Je crois que nous avons par la suite utilisé un peu trop ce signe du diable tellement c'était une sensation incroyable ! Autre chose qui nous a surpris, c'est que les fans chantaient par-dessus nous pendant le set et c'était super de se connecter de cette manière.

    Bla Bla Blog – Quel est le rapport de Rammstein avec le classique et le contemporain ? Si je les imagine mélomanes en dépit de leur style musical très rock de leurs légendaires guitares lance-flamme, suis-je dans le vrai ? 

    Duo Jatekok – Nous n'avons pas vraiment pu échanger avec eux à ce sujet malheureusement. Nous leur avons offert nos CD. On espère que cela leur a plu. Nous avons pu échanger avec Till [Till Lindemann, le chanteur de Rammstein] à propos de sa formation de chanteur. Il nous a donc confié que la professeure de chant qui l'avait formé était de formation classique. Cela lui a permis d'avoir une technique vocale plus large et une puissance qui est sa marque de fabrique.

    "On nous avait conseillé de faire le signe du diable en arrivant sur scène pour stimuler le public"

    Bla Bla Blog – Pour votre album Duo Jatekok plays Rammstein, qui sort en ce moment chez Vertigo, vous avez choisi de balayer toute la carrière de Rammstein, depuis ses débuts jusqu’à leur album éponyme sorti en 2019. Comment s’est fait le choix des titres ? 

    Duo Jatekok – Nous avons choisi avant tout des morceaux mélodiques qui nous plaisaient ! Les ballades comme Diamant, Fruhling in Paris ou encore Ohne Dich se prêtent particulièrement bien à la transcription. C'est moins le cas de morceaux plus rythmiques comme Du Hast ou Ich Will qui ne rendent pas très bien sur des pianos acoustiques. On a donc préféré les écarter.

    Bla Bla Blog – L’auditeur de Rammstein pourra être frappé par l’écriture musicale des morceaux, une écriture très fine, parfois cachée par des interprétations rugueuses et des sons de guitare saturés.  J’imagine que les adaptations au piano n’ont pas été simples.

    Duo Jatekok – C'est vrai. Nous avons essayé d'être créatives et de retranscrire au mieux ces effets métal-rock. Pour cela, nous avons exploré les différentes manières de produire des sons sur nos pianos et avons utilisé la technique du piano "préparé". Cela consiste à rajouter des éléments dans les cordes du piano pour les faire sonner autrement : pâte à fixe, scotch, doigts, clusters…

    Bla Bla Blog – En tant que musiciennes plus habituées au répertoire classique et contemporain, comment avez-vous procéder pour adapter aux pianos ces morceaux sans les dénaturer ?

    Duo Jatekok – Nous avons gardé la spécificité de chaque morceau et avons apporté à partir de cette base notre touche classique. Par exemple, pour Seeman, nous sommes parties de l'accompagnement de Rammstein qui imite la mer et on s'est permises de s'inspirer de Debussy, maître de l'impressionnisme musical sur le plan aquatique ! De même pour Puppe, nous voulions retranscrire l'idée de la folie. Nous avons donc utilisé des clusters, de la pâte à fixe pour créer une ambiance malaisante. Et nous nous sommes inspirées de Prokoviev avec des célèbres toccatas : rythme rapide et répétitif en crescendo qui permet de créer un sentiment d'angoisse et de folie.

    Bla Bla Blog – Une nouvelle tournée est-elle prévue avec les Rammstein ?

    Duo Jatekok – Nous savons qu'une nouvelle tournée de prépare pour l'année prochaine mais pour le moment, nous nous préparons à la tournée 2022 qui a été reportée deux fois déjà : Europe et Amérique du Nord ! Un bel été à l'horizon.

    Bla Bla Blog – J’ai envie de vous poser cette autre question : pouvons-nous rêver d’une première partie des Rammstein lors de vos prochains concerts ? 

    Duo Jatekok – On peut toujours se permettre de rêver ! Cependant, la technique nécessaire à Rammstein paraît compromettre cette idée !

    Bla Bla Blog – Dernière question : d’autres enregistrements ou d’autres projets musicaux sont-ils prévus ? 

    Duo Jatekok – Nous avons un projet d'enregistrement à deux pianos autour du répertoire évoquant le diable, les sorcières. C'est un thème qui a inspiré un grand nombre de compositeurs. Nous avons également la volonté de passer des commandes auprès de compositeurs classiques et jazz.

    Bla Bla Blog – Merci, Naïri et Adélaïde.

    Duo Jatekok – Merci Bla Bla Blog !

    Duo Jatekok plays Rammstein, Vertigo, 2022, 2022
    https://duojatekok.com
    https://www.facebook.com/DuoJatekokOfficiel
    https://www.instagram.com/duojatekok
    http://www.rammstein.com
    https://www.rammsteinworld.com

    Voir aussi : "Rammstein en version classique par le Duo Jatekok"

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  • Encore un mot d’Alba

    Parlons aujourd’hui d’Alba. Rien à voir avec le célèbre groupe de pop international suédois. Alba est une musicienne franco-mexicaine qui propose son nouvel album Les Mots, après un premier EP sorti en 2015. Artiste protéiforme, rien ne fait peur à Alba : artiste NFT, elle s’est illustrée dans la composition, l’écriture, la sculpture et bien sûr la musique. 

    Avec son exubérance, son insouciance et sa poésie, disons aussi qu’Alba pourrait être une lointaine descendante de Brigitte Fontaine. Pour le moins, Alba montre un univers déjà bien installé et un caractère bien trempé où le combat féministe n’est pas un vain mot.

    Prenez par exemple le premier morceau qui donne son nom à l’album : "Encore un mot / Plus haut que l’autre", chante l’artiste. Le choix des armes revient visiblement aux mots dans cette histoire commençant par une dispute et une scène de ménage. "Les mots sont des salauds / Ils blessent et tuent jamais solo… Les mots sont forts / Les mots sont des pistolets chargés".

    Dans "Range-toi", c'est la voix de Serge Gainsbourg qui est convoquée pour une critique sans concession des personnes trop bien installées et faussement libres : "Tu crois que tu es une bombe mais / T’es une météorite / Sans conscience / Tu te sers de la liberté pour / Masquer ton insolence / Sans patron / Tu crois que t’es libre mais / Tu es toujours aussi con.

    L’hypersensibilité d’Alba saute aux yeux et aux oreilles

    Le titre "Préface", placé singulièrement vers le milieu de l’album, fait le tableau d’un quotidien solitaire, sur un son mêlant accordéon et électro, auquel vient répondre "Mirador", le récit d’un amour naissant avec son lot d’angoisses et d’interrogations après "une dernière tasse érotique" ("J’ai toujours cru savoir aimer / Qu’un jour je saurais m’adapter / Mais au fond du compte je suis seule / Entourée de mon tilleul"). De solitude et de retrait du monde, il en est également question dans "J’y vais pas", un morceau à la facture nineties et lo-fi.

    L’hypersensibilité d’Alba saute aux yeux et aux oreilles. On pensera au titre plein de nostalgie "Quimey Neuquen", mêlant sons et rythmique latinos et électro. La voix de la chanteuse franco-mexicaine se fait sensuelle, mystérieuse et envoûtante.

    L’auditeur s’arrêtera avec plaisir la très belle ballade, "Quand le bateau coulera", l’un des plus beaux titres de l’album. Alba y parle avec grâce et une fausse indolence du départ, des tourments de la vie, du destin et de la fin : "Quand le bateau coulera / Et que le vent trop soufflera / Je sais bien que ça ira / Car tu seras encore là". Qu’y a-t-il de mieux que d’être bien à deux ? "Et si l’amour est ainsi / Je préfère être sur ton dos / Que devoir en rester là / Toute seule à contempler le sable".

    Alba, Les mots, Sound And Vision Music, 2022
    https://www.facebook.com/bonjouralba
    @albalala
    https://www.instagram.com/accounts/login/?next=/albalala

    Voir aussi : "Le petit monde de Yohann Le Ferrand"

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  • Alex Lutz remet le service

    En cette période consacrée à Roland Garros, et si l’on parlait tennis, avec ce film, Cinquième Set, sorti il y a deux ans, porté par Alex Lutz, le Catherine de la série Catherine et Liliane, devenu un acteur et scénariste césarisé avec Guy ?

    Pour Cinquième Set, c’est Quentin Reynaud qui le dirige, dans le rôle de Thomas Edison, un ex-prodige du tennis français qui décide à quarante ans de sortir sa raquette et de se mesurer aux cadors bien plus jeunes qu’eux. Il s’inscrit au tournoi de qualification de Roland Garros, bien décidé à montrer qu’il n’est pas fini.

    Un travail introspectif 

    On peut imaginer comment le cinéma américain tournerait cette histoire de come-back : un sportif fini se challenge en partant se mesurer avec de jeunes sportifs aux dents longues qui pourraient être ses enfants. Cela donnerait une épopée démonstrative aux obstacles innombrables, avec un happy-end très classique.

    Ici, Quentin Reynaud choisit de faire un travail introspectif sur un homme marié et jeune papa, ayant l’intime conviction de n’avoir pas réalisé son destin. La frustration pèse sur ses épaules, ce qu’Alex Lutz interprète avec justesse. D’autres réflexions sont évoquées : la pression des parents sur les jeunes sportifs, les échecs que l’on assume pas et le poids de la retraite.

    Le film se termine avec une dernière balle, dont la course finale ouvre plusieurs fins, avec une certitude : le parcours brillant du "vieux" tennisman à Roland Garros a finalement été son plus grand triomphe.

    Cinquième Set, drame français de Quentin Reynaud,
    avec Alex Lutz, Ana Girardot et Kristin Scott Thomas, 2020, 105 mn

    https://www.canalplus.com/cinema/5-eme-set/h/16336852_40099

    Voir aussi : "Solaris et son double"

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  • Aimons-nous vivants

    Le nom de l’auteure de Time Space Love est marqué en tout petit sur la couverture de l’album : Émilie Pello, écrite de la main de l’auteure lorsqu’elle était enfant. Dans ce qui est un opus introspectif, son quatrième, l’artiste a choisi d’utiliser des photos souvenirs pour ce qui ressemblerait à un montage de scrapbooking. Voilà pour l’aspect marketing d’une production soignée de bout en bout.

    11 titres dont 3 en français : c’est l’anglais qui a été choisi, pour un opus pop puisant son inspiration dans les 70's, les 90's et les musiques de film. Dans des morceaux patiemment écrits : "Du temps, de l'espace, de l'amour, Ce mantra a guidé toute l’écriture de l’album. Cette chanson s’adresse à mon fils, à qui j’enseigne cette philosophie, et le soin du lien qui nous lie" explique Emily Pello. Ce disque signe le retour d'une artiste aux multiples talents ayant déjà fait ses preuves en premières partie de Liza Minelli à l’Olympia ou d’Amy Winehouse à Londres.

    De sa voix veloutée, Emilie Pello propose une pop sans esbroufe à écouter à deux, dans un opus plein de mélancolie ("Is There Anything", "Windy Day"), consacré principalement à la recherche de l’amour  ("Time Space Love"). Le bonheur affleure dans un opus parfaitement abouti. Que l’on pense à "You Will Find Me" au son nineties, à la fois enlevé, plus rock et plein d’espoir ("But I know that someday you will find me"). "Another Millenium" peut être présenté comme une ballade mélancolique et nostalgique" ("The suns will burn your wings too hard / So help me plant a brand new forest").

    L’artiste se portraitise elle-même dans "Fourty" : ce morceau se veut autobiographique. Émily Pello se présente comme une artiste qui a déjà bourlingué, mais aussi comme une mère et une femme de quarante ans qui révèle ses failles et ses doutes : "Give me just a little chance / To rise above that fear / Of me older, weaker, uglier, but me!" Ce titre soul et attachant vibre de sincérité.  Et si derrière cette musicienne discrète se cachait une "herbe folle" qui chante ainsi en anglais et en français : "Comme elle est dure, dure à entretenir, cette herbe folle" ?

    Et si derrière cette musicienne discrète se cachait une "herbe folle" ?

    Parlons aussi de ces morceaux tout aussi intimes : le joli portrait de deux artistes, "Jean et Jo", le pop-folk "Ghosts In My Songs" sur un être aimé, arrivé, comme le dit Emily Pello, tel un guerrier et parti comme un fantôme, non sans laisser des blessures que la chanteuse exprime ainsi : "Without you, I see ghosts in my songs".

    On pourra tout aussi être sensible à "Windy Day", un morceau comme susurré au texte mélancolique : "I feel like Dcarlett O’Hara in love / waiting alone in Tara". L’auditeur ou l’auditrice aura sans doute plaisir à l’écouter un plaid sur les genoux et une tasse de thé à la main, par un jour venteux, en pensant à celui qui est parti et ne reviendra pas : "Should I stay here without your love, without your heat".

    Mais l’amour serait-il tout de même possible, comme l’évoque "Steel Feel Love" ? Emily Pello a écrit là une très belle ballade sur l’attente et l’espoir : "I wish you could tell me how angry you are / I wish you could tell me how sad you feel / I wish I could hear it".

    "Ramène-nous vivants" vient clore en français ce séduisant quatrième album d’Emily Pello, une vraie déclaration d'amour pour la musique : "Regarde les noires et les croches / Des vagues qui s’en fichent".

    Emily Pello, Time Space Love, 2022
    https://emilypello.fr
    https://www.facebook.com/EmilyPelloOfficiel
    https://www.instagram.com/emilypelloofficiel

    Voir aussi : "Encore un mot d’Alba"

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  • Puis-je… vous parler d’Arvo Pärt ?

    Tabula Rosa est une composition par une figure imposante de la musique contemporaine, l’estonien Arvo Pärt avec sa musique mélodique, harmonique et aux influences religieuses (le compositeur revendique sa croyance et ses origines orthodoxes). "La musique d’Arvo Pärt nous conduit des ténèbres à la lumière… cette musique n’est pas seulement relaxante – elle véhicule drame et profondeur", dit d’ailleurs Renaud Capuçon, soliste et chef d'orchestre de cet opus.

    Le "Ludus" est un long cheminement de près de 11 minutes ponctué de sons de cloches, comme un chemin initiatique, avec des litanies et des leitmotivs se répétant, portés par le violon habité de Renaud Capuçon et un Orchestre de Chambre de Lausanne qu’il dirige.

    Les 3 dernières minutes ont cet aspect sombre pour ne pas dire funeste Un e sorte de mater dolorosa, rappelant l’importance de la musique sacrée dans l’œuvre d’Arvo Pärt. Jusqu’à s’éteindre dans une profonde gravité

    D’autres œuvres de Pärt composent l’album de Renaud Capuçon. Il y a Fratres, présenté ici dans une version pour orchestre et violon. Dès l’ouverture, Arvo Pärt se distingue par une exubérance et une fantaisie peu habituelle, avant d’aller vers un halo inquiétant où lumières et ténèbres semblent se jauger. Une dialectique musicale a lieu dans ce morceau passionnant, tout autant qu’il séduit par son harmonie et sa puissance symphonique. L’auditeur pourra voir derrière ce morceau d’un peu plus de 10 minutes un chant humaniste pour tous nos frères et sœurs humains.  

    Summa, un titre plus lumineux et apaisé, est servi par un orchestre majestueux dans un morceau symphonique célébrant la magnificence et la dignité. 

    Idéal pour entrer dans le répertoire contemporain

    Silouan’s song est un bouleversant chant aux silences et pauses éloquents. L’orchestre de chambre entonne un chant pathétique avec une ligne mélodique qui n’est pas sans renvoyer à la Symphonie n°3 de Henryk Górecki.

    Darf ich que l’on pourrait traduire par "Puis-je…" est l’un des morceaux les plus subtils et les plus minimalistes de l’album. Il peut s’écouter comme une délicate attention amoureuse, faite sur la pointe des pieds, mais non sans les sombres échos du violon magnétique de Renaud Capuçon.

    Spiegel im Spiegel, énigmatique par essence ("Expliquer j’explique"), séduit par sa mélancolie et sa facture instrumentale (violon et piano). Ce titre peut s’écouter comme une lente déambulation.  Renaud Capuçon fait taire l’orchestre symphonique pour une parenthèse plus intimiste, avec ces respirations rendant l’œuvre d’autant plus vivante.

    Für Lennart in memoriam conclut ce séduisant album, idéal pour entrer dans le répertoire contemporain, avec un morceau aux élans tout aussi pathétiques que le "Silouan’s song". L’Orchestre de Chambre de Lausanne ponctue les envolées de cordes de retenues et de pauses. Il est vrai que, là encore, pour reprendre une célèbre citation de Sacha Guitry sur Mozart, "Le silence qui suit Arvo Pärt c’est encore du Arvo Pärt". Et Renaud Capuçon, justement, vient rendre un hommage appuyé au compositeur estonien avec cet album qui fera certainement date. 

    Arvo Pärt, Tabula Rasa, Orchestre de Chambre de Lausanne, Renaud Capuçon, Warner Classics, 2021
    https://www.arvopart.ee/en
    https://www.renaudcapucon.com/fr
    https://www.ocl.ch
    https://www.warnerclassics.com/fr/release/part-tabula-rasa-capucon

    Voir aussi : "No Dames, no drames"
    "Histoires de tangos par Lucienne Renaudin Vary"

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  • La guerre est-elle contraire à la nature humaine ?

    Le café philosophique de Montargis fait son grand retour le vendredi 20 mai 2022 au Belman, à 19 heures, Après plus de deux ans de silence en raison de la crise sanitaire, l’animation philosophique de Montargis fixe un rendez-vous pour une soirée-débat autour d’un sujet – hélas ! – d’actualité : "La guerre est-elle contraire à la nature humaine ?"

    Le thème choisi par l’équipe du café philo tombait sous le sens, après le déclenchement d’une guerre en Europe. Il ne s’agira pas pour autant de débattre sur les événements qui se passent en Ukraine, mais plutôt de s’interroger sur un thème qui semblait, pour beaucoup ici, appartenir au passé.

    Qu’est-ce que la philosophie a à nous dire au sujet de la guerre ? Et d’abord, que recouvre la guerre ? Il est vrai que ce terme a dépassé le cadre du champ de bataille meurtrier pour recouvrir d’autres aspects : guerre économique, guerre contre le terrorisme, et même guerre contre le Covid… N’y a-t-il pas là une série de contresens ? Qu’entend-on aujourd’hui lorsque l’on parle des guerres ? Sont-elles inéluctables ? Sont-elles du ressort de la nature ou bien peuvent-elles être canalisées ? Peut-on parler de culture guerrière ? Les organisateurs du Café Philo proposeront aussi aux participants de s’interroger sur la nature humaine. L’homme est-il naturellement bon ? Et, dans ce cas, pourquoi la guerre ?

    Ce sont autant de questions qui seront débattues au cours de cette soirée philosophique qui promet d’être riche en surprises.  

    Rendez-vous donc au Belman à Montargis (entrée par l’Hôtel de France), le vendredi 20 mai à 19 heures.

    Café philosophique de Montargis, "La guerre est-elle contraire à la nature humaine ?"
    Le Belman, Montargis, entrée par L'Hôtel de France, le vendredi 20 mai à 19H
    http://cafephilosophique-montargis.hautetfort.com

    Photo : Pexels - Cottonbro

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  • À bouche que veux-tu 

    À l’écoute de Rovski, c’est un autre duo féminin qui vient en tête : celui de Brigitte. Tout aussi pop, sensuel, fusionnel et enlevé, Sonia Nemirovsky et Olive Perrusson proposent, avec La Proie est reine, un album plein d’humour, de poésie et de sensualité, en commençant par un titre à la thématique rarement abordée : "Catch".

    Le moins que l’on puisse dire est que les chanteuses de Rovski savent étonner avec leur opus brassant de nombreuses influences : latines (l’envoûtant "Miedo" et son mantra : "No tengo miedo"), celtes ("Crache" : "Crache crache le vent / Les corbeaux les cormorans / Qui s’écrasent sur tes chants / Crache nous le venin par les dents") et ses sons urbains ("Sous l’eau", "La pieuvre").

    L’amour et la séduction forment le corps de "La proie est reine", un titre mystérieux qui invite au lâcher prise en amour mais aussi au combat pour que l’amour ne soit pas un abandon aveugle ce que les chanteuses évoquent dans Amoureuse", un formidable et spectaculaire morceau : "Amoureuse / C’est pas vraiment le mot / Elle l’a cherché longtemps / Et posé son stylo / Amoureuse / C’est pas vraiment beau, / Elle l’a cru longtemps / Et puis finalement / Amoureuse / C’est peut être un peu tôt".

    La vie palpite dans ce très joli album

    La vie palpite dans ce très joli album, à l’image de cet hommage à une danseuse, sur un rythme de halètements : "Tu vacilles des hanches et tes cheveux touchent tes fesses / Tu marches comme tu danses et tu transpires l'ivresse / Tes bracelets t'accompagnent en chantant".

    Tout aussi ensoleillé, "Trinidad" est le récit d’un voyage libre ("Rien avant vous / Je vous le jure / N’avait le goût de l’aventure") qui peut aussi s’écouter comme un récit amoureux et sensuel : "Nos souvenirs à deux / Sur le papier mon rendez-vous / A l’abri des arcades / Sur le papier mon rendez-vous / Je n’ai rien pris pour Trinidad".

    De sensualité, il en est plus que jamais question dans le séduisant et un rien désinvolte "L’aventure" : "Dans la chambre enfumée / Hier au soir / C’était l’aventure / Tout juste sorti de l’origine du monde". Le duo Rovski s’attache à un homme qu’elles observent avec tendresse : "Tu remontes le col de ta veste / Précis dans l’allure dans le geste".

    L’album se termine en douceur, avec "Comme tu es beau", un hommage amoureux qui est aussi un chant de départ plein de mélancolie : "Je pars mon amoureux / Je décline je faillite / Je n’entends plus les jeux / Je t’aime comme on se quitte".  

    Rovski, La Proie est reine, 2022
    https://www.facebook.com/Rovskiofficiel
    https://www.instagram.com/rovskimusique

    Voir aussi : "Encore un mot d’Alba"

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  • Le bon dieu sans confession

    Après deux ans d’absence, Dieu habite Düsseldorf revient au Théâtre Lucernaire à Paris, du 11 mai au 3 juillet 2022, du mercredi au samedi à 21h et les dimanches à 17H30.

    Les personnages, Monsieur 1 et Monsieur 2 reprennent du service, dans  une pièce stigmatisant une "société de contrôle loufoque, implacable et un peu foireuse", comme le disent les créateurs.

    Telle une représentation de La Divine Comédie – mais en plus moderne et en plus drôle – Dieu habite Düsseldorf » met en scène deux hommes, Monsieur 1 et Monsieur 2. Des êtres sans nom de famille, numérotés, purs produits d’un monde qui couve, trie et contrôle des inadaptés, des handicapés, des incompétents. Impuissants et lâches, ils déclinent le rapport dominant-dominé en saynètes burlesques. L’ensemble compose un catalogue d’incapacités en sept étapes poussées à leur paroxysme.

    Les influences sont à chercher du côté du cinéma ou des séries d’anticipation, à l’instar d’Orange mécanique ou de Black Mirror. Le cauchemar est omniprésent, tout comme l’humour noir, dans une série d’univers où le kitsch côtoie le clinique : un médecin vous handicape, le sexe n’est plus un organe génital mais un accessoire ménager ou on peut être empaillé vivant… Ambiance, ambiance…

    Cette farce étonnante est à découvrir au Lucernaire jusqu’au 3 juillet 2022 au Lucernaire.

    Dieu habitude Düsseldorf de Sébastien Thiéry, par Renaud Danner et Eric Verdun
    avec en alternance Manuel Durand

    Théâtre Lucernaire, Paris
    Du 11 mai au 3 juillet 2022, du mercredi au samedi à 21h et les dimanches à 17H30
    http://www.lucernaire.fr/theatre/3266-dieu-habite-dusseldorf.html

    Voir aussi : "Les Lettres de mon Moulin de Philippe Caubère"

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