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• • Articles et blablas - Page 10

  • Des bâtards, des dragons et des reines

    Alors que la deuxième saison de House of the Dragon est maintenant disponible dans son intégralité sur Max, il est sans doute temps de faire le point sur le célèbre préquel de Game of Thrones.

    L’adaptation télé de la saga de fantasy de George R.R. Martin avait été un choc, pour ne pas dire un événement culturel et artistique qui a fait date. En dépit du dernière saison qui a pu laisser beaucoup de fans sur leur faim, il a été beaucoup pardonné au créateur du monde de Westeros et de son fameux Trône de Fer. Un tel succès rendait quasi obligatoire une suite, sinon une déclinaison de Game of Thrones. C’est donc chose faite avec les deux premières saisons de House of the Dragon.

    Oublions les personnages légendaires que sont Tyrion Lannister, l’inquiétante Cersei, son frère Jaime, Arya Stark, le bâtard Jon Snow, l’inquiétant Theon Greyjoy, sans oublier la reine des dragons, Daenerys Targaryen.

    C’est du reste la famille des Targaryen qui est au cœur de la série House of the Dragon. L’histoire se passe 170 ans avant les événements de GOT. Lorsque le roi Viserys s’assoit sur le Trône de Fer, après une succession qui ne se passe sans rancœur, il a une fille unique, Rhaenyra. Faute de garçon, c’est elle qu'il proclame comme son héritière. Tourne autour du roi et de la dauphine Daemon, le frère de Viserys, un homme aussi imprévisible et violent qu’audacieux et attiré par la jeune femme. Mais il faut aussi compter sur l’aristocratie de Westeros où les ambitieux et ambitieuses ne manquent pas. Viserys tente de contenir les animosités. Mais jusqu’à quand ?

    Les dragons, autant animaux fabuleux qu’armes de destruction massive

    Les fans de Game of Thrones seront à la fois en terrain connu et dépaysés par cette histoire de pouvoirs, de guerres et de coups tordus. Le rythme est plus lent et les précautions d’usage lorsqu’il est question de violences, de sexe et de tortures.

    La vague Meetoo est passée par là, ce qui est visible lorsque les créateurs font des femmes de grandes héroïnes – ou anti-héroïnes. C’est Rhaenyra que l’on suit jeune (la formidable et envoûtante Milly Alcock) et plus âgée (la non moins extraordinaire Emma D'Arcy). C’est la reine Lady Alicent Hightower (Olivia Cooke) ou encore Mysaria, dite Le Ver Blanc (Sonoya Mizuno). La guerre qui ne va pas manquer d’éclater pour le Trône de Fer s’avère être un conflit d’héritage dans lequel les femmes et les enfants ont un rôle central. Stratèges, coups fourrés et trahisons ne manquent pas dans cette excellente série, pas plus que les dragons, autant animaux fabuleux qu’armes de destruction massive. Évidemment un clin d’œil à notre époque, ce qui rend cette production HBO particulièrement maligne.    

    House of the Dragon, série de fantasy américaine de George R.R. Martin, avec Paddy Considine, Matt Smith, Olivia Cooke, Emma D'Arcy, Rhys Ifans, Steve Toussaint, Eve Best, Fabien Frankel, Sonoya Mizuno, Milly Alcock, Emily Carey et Graham McTavish, HBO, Max, depuis 2022
    https://play.max.com/show/c68e69d7-9317-428a-a615-cdf8fe5a2e06
    https://gameofthrones.fandom.com/fr/wiki/House_of_the_Dragon

    Voir aussi : "Game of Thrones, saison 8 et fin, normalement"  

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  • Un coupable parfait et un crime qui ne l’est pas moins

    Dans la bibliographie de Joël Dicker, L'affaire Alaska Sanders reste un ouvrage à part pour deux raisons. La première est qu’il suit directement La Vérité sur l’Affaire Harry Quebert, le premier gros best-seller de l’écrivain suisse – le même narrateur, Marcus Goldman, raconte les mois qui ont suivi le récit de sa première investigation. La deuxième raison est éditoriale. Pour L'affaire Alaska Sanders, sortie en 2022, Joël Dicker a en effet choisi de voler de ses propres ailes en fondant sa propre maison d’édition, Rosie & Wolfe. Une auto-édition, en quelque sorte, mais XXL et avec les moyens que l’on devine.

    Nous sommes en 2010, soit quelques mois après l’affaire Harry Quebert. Marcus Goldman, auréolée du succès de son livre, doit gérer son succès : rapports compliqués avec son éditeur, propositions d’adaptation ciné, sollicitations du public, avec une vie privée et familiale des plus compliquée. Harry Quebert, son mentor et ami, a disparu de la circulation, ce qui n’est pas la moindre des contrariétés de Marcus Goldman. Le sergent Perry Gahalowwod, lui, est bien de retour. Une vraie belle amitié – certes, vache – avec lui comme avec sa famille, est le point de départ d’une nouvelle enquête. Ou plutôt d’une ancienne enquête qui a vu un coupable arrêté puis condamné pour le meurtre d’une jeune Miss, en avril 1999, trouvée morte sur les plages d’un lac du New Hampshire. Or, onze ans plus tard, des doutes surgissent sur les conclusions d’une affaire incroyablement tragique et compliquée. 

    Mise en abîme

    Vous prenez une reine de beauté et future talent du cinéma assassinée et à moitié dévorée par un ours. Vous ajoutez un petit ami beau gosse, gentil mais aussi jaloux et impulsif. Vous n’oubliez pas son meilleur ami, un ancien étudiant parti s’enterrer dans la bourgade de ses parents et dont les relations avec la victime Alaska Sanders ne sont pas si claires que cela. Vous mélangez le tout avec un policier bourru et son ami, écrivain célèbre qui voit dans cette affaire un superbe moyen de mettre à profit ses talents d’investigateur. Vous saupoudrez le tout avec des secrets de famille, des secrets d’adolescents peu avouables, sans oublier une jeune femme disparue, une station-service, un magasin de chasse et pêche, un cabinet d’avocat se démenant comme un beau diable pour faire rouvrir l’enquête et une policière obstinée impliquée dans l’affaire Alaska Sanders à tout point de vue. Vous terminez par des fausses pistes en pagaïe, des morts surprenant les enquêteurs et enquêtrices, des intuitions géniales et un dénouement inattendu.

    Pour ce premier roman publié en indépendant, les critiques ont fait la fine bouche, regrettant des imperfections. Cela dit, il fait être honnête : bien des auteurs de polars rêveraient de pouvoir trousser un roman aussi bien foutu que celui-ci. Le lecteur se laissera forcément happé par cette histoire sordide et cruelle. Crime passionnel, crime mu par la jalousie ou crime parfait ? Impossible de répondre ici.

    Quant à Harry Quebert, il apparaîtra bien entendu dans ce roman. C’est l’occasion pour l’auteur de revenir à ce qui est sans doute le cœur de son œuvre : l’écriture, l’art et la mise en abîme que constituent autant La Vérité sur l’Affaire Harry Quebert que L’Affaire Alaska Sanders. Gageons que ce ne sera pas le dernier coup de maître de Joël Dicker… pardon, de Marcus Goldman.

    Joël Dicker, L'affaire Alaska Sanders, éd. Rosie & Wolf, 2022, 576 p.
    https://www.rosiewolfe.com/catalogue/joel-dicker/laffaire-alaska-sanders
    https://www.joeldicker.com

    Voir aussi : "Les secrets de Nola Kellergan"

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  • Septembre sans attendre

    Les Cramés de la  Bobine présentent à l'Alticiné de Montargis le film Septembre sans attendre. Il sera visible du 28 août au 3 septembre 2024. Soirée débat à l’Alticiné le mardi 3 septembre 2024 à 20h30.

    Après 15 ans de vie commune, Ale et Alex ont une idée un peu folle : organiser une fête pour célébrer leur séparation. Si cette annonce laisse leurs proches perplexes, le couple semble certain de sa décision. Mais l’est-il vraiment ?

    Septembre sans attendre, comédie espagnole de Jonás Trueba 
    avec Itsao Arana, Vitoz Sanz
    Scénaristes : Jonás Trueba, Itsao Arana et Vitoz Sanz
    Titre original : Volveréis
    https://www.cramesdelabobine.org/spip.php?rubrique1472
    https://www.facebook.com/arizonadistribution

    Voir aussi : "Le Veil homme et l’enfant"

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  • Mort et vies d’Eric Kherson

    Comme souvent chez David Foenkinos, ses personnages sont des êtres perdus dans notre époque ultramoderne. Disons aussi qu’il y a une part de mal-être autant et des questionnements existentialistes derrière ces romans a priori légers et qui se lisent avec un plaisir presque coupable.

    La Vie heureuse (éd. Gallimard),Le dernier cru de l’un de nos plus célèbres et plus brillants écrivains français part d’une idée géniale et méconnu en nos latitudes.  

    Eric Kherson, brillant exemple de réussite professionnelle après un passage réussi chez Decathlon, se voit proposer un poste à responsabilité auprès d’un cabinet stratégique dirigé par une ancienne camarade de lycée d’Eric. Amélie Mortiers est aussi brillante qu’exigeante. Elle a les oreilles des grands responsables publics, jusque à L’Élysée. Voilà le duo complémentaire en charge de chercher des investisseurs à l’étranger. Un voyage professionnel les amène en Corée du Sud. Contre toute attente, Eric est atteint d’un malaise, a priori peu grave, avant de découvrir un commerce de service peu commun. Sa vie s’en trouve transportée.

    Faux enterrements

    Comme souvent chez Foenikinos, on se laisse emballer par un récit d’héros du quotidien paumés par leur vie et souvent à l’étroit dans un destin tout tracé. Cette fois, nous sommes face à un cadre brillant, ambitieux et qui a trouvé dans l’entreprise d’une ancienne copine d’école le moyen de s’élever socialement.

    Mais, comme souvent, il y a ces fêlures : la mort d’un père dont Eric se sent coupable, les relations difficiles avec une mère et un divorce qui a éloigné notre anti-héros de ses enfants. Voilà qui fait d’Eric "un être absent au monde".

    Rien que du classique. Sauf que cette fois, l’auteur nous déniche une tradition peu connue en France et qui est le déclencheur de la révolution "khersonienne" : un centre organisant de faux enterrements. Notre Français s’aperçoit que, loin d’être glauque, cette boutique propose un vrai service de développement personnel. Enthousiasmé, la question se pose : et s’il importait en France ces faux enterrements ?

    David Foenkinos, La Vie heureuse, éd. Gallimard, 2024
    https://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Blanche/La-vie-heureuse
    https://www.facebook.com/david.foenkinos

    Voir aussi : "Je hais Harry Potter"
    "David Foenkinos, son œuvre"

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  • À nous deux Paris

    jean-paul nishi,jp nishi,manga,bd,bande dessinée,paris,témoignage,japonaisCe manga savoureux est un ensemble de tranches de vie.

    L'auteur, Jean-Paul Nishi, mangaka japonais, rejoint Paris afin de se perfectionner - c'est d'ailleurs l'occasion de découvrir la situation envieuse de la bande dessinée française par rapport à ce qui se passe au Japon.

    JP Nishi décrit avec humour, et sans nous égratigner, nos us et coutumes : le stress de la vie parisienne, la mauvaise humeur légendaire des Français, les contrôles de police, la drague ou... la curieuse coutume des bisous !

    Un manga qui se lit et se relit avec plaisir et qui est aussi le coup de cœur d'un Japonais pour la France. A l'image de la passion réciproque, nous dit-il, que les Français portent pour le Japon.

    Jean-Paul Nishi, À nous deux, Paris !, éd. Philippe Picquier, 191 p.
    http://confrerie2010.canalblog.com/archives/2013/01/13/26131268.html

    https://www.editions-picquier.com/produit/a-nous-deux-paris
    https://www.facebook.com/profile.php?id=100003881948183

    Voir aussi : "Ward Ier-IIe siècle"

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  • Noir comme la mort

    Et si l’on parlait de l’avant-dernier roman de Franck Thilliez ? Sorti en 2023 aux éditions Fleuve Noire, son thriller La Faille figure parmi les bons crus de l’un des écrivains français les plus célèbres à l’étranger. Parmi les qualités de Franck Thilliez, des intrigues complexes, des fausses-pistes destinées à dérouter le lecteur ou la lectrice et une ambiance  noire, pour ne pas dire poisseuse.

    Celui-ci ne déroge pas à la règle, loin de là. L’auteur ayant choisi de placer au centre de l’intrigue ni plus ni moins que la mort, omniprésente. Là, vous allez me dire : rien d’étonnant pour un thriller et pour une enquête policière autour d’un corps mystérieux découvert enterré au fond d’un bois. Un psychopathe est d’ailleurs très vite pourchassé mais ce n’est que le début d’une histoire traumatisante à plus d’un égard. 

    De quoi aussi vous donner envie de ne jamais vouloir mourir

    La mort parcourt les 74 chapitres du roman, d’abord en s’en prenant à l’un des membres de l’équipe de Sharko suite à l’opération dans une forêt des Yvelines qui tourne au fiasco.

    La découverte d’un os singulier amène le commandant de la police criminelle sur les traces d’une Emma Dorty, survivante d’un accident et qui, depuis, a voué une fascination pour la mort, pour les miraculés et pour les EMI (Expériences de Mort Imminente). Est-elle vivante ? Pourquoi s’est-elle intéressée à d’autres rescapés comme elle, parfois devenus fous et marginaux ?

    L’enquête, menée d’abord en dehors des règles officielles, devient dangereuse pour Sharko et son équipe. Elle les mène des catacombes de Paris à une cabane isolée au sud de la région parisienne, en passant par un monastère bourguignon ou un sanatorium désaffecté.

    Dans cette intrigue où les personnages apparaissent, disparaissent, s’invisibilisent ou montrent leur plus odieux visage, Franck Thilliez s’attache à montrer, derrière cette mystérieuse Faille, combien la frontière entre vie et mort est fragile. De quoi aussi vous donner envie de ne jamais vouloir mourir.  

    Franck Thilliez, La Faille, éd. Fleuve Noir, 2023, 504 p.
    https://www.lisez.com
    https://www.facebook.com/Franck.Thilliez.Officiel/?locale=fr_FR

    Voir aussi : "Sombres Pyrénées"

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  • Magic Jazz

    Des reprises de jazz par Magic Malik à la flûte dans un album public passionnant enregistré au Baiser Salé parisien fin janvier 2024.

    C’est d’abord l’"Oriental Song" de Wayne Shorter dans une lecture bien entendu orientale, avec, soulignons-le, un Maxime Sanchez impérial au piano et la trompette éclatante d’Olivier Lasney. Damien Varaillon à la basse et Stefano Lucchini aux percussions viennent compléter le quintette de Magic Malik.

    Après cette entrée en matière planante et dépaysante, place à un jazz plus classique, toujours de Wayne Shorter. Cette fois, il s’agit du luxuriant "The Big Push". La recherche rythmique est au cœur de cette nouvelle version de Magic Malik. On sent la joie dans cette manière de se réapproprier ces standards du jazz. Parlons de l’osmose de ce quintette comme venu de nulle part.

    Ajoutons que Magic Malik signe "Joyeux printemps", une de ses créations en forme d’hommage et de preuve que le jazz est décidément vivante et bien vivant.

    Il y a du plaisir dans cet autre morceau, "Bu Delight" de Curtis Fuller. La virtuosité, le rythme endiablé et la densité sonore caractérisent un morceau que la flûte de Magic Malik vient transfigurer, comme si nous ne parlions pas de jazz, pas même de sons traditionnels mais de musique universelle, tout simplement. 

    Jazz transfiguré et dépaysant

    "Goodbye" de Gordon Jenkins entraîne l’auditeur vers un le plus beau des ailleurs, entre Occident et Orient, avec le jazz en compagnon de voyage. Mais c’est un jazz transfiguré et dépaysant grâce à Magic Malik et ses amis dont les recherches sonores font merveille.  

    Place ensuite à John Coltrane et à deux de ses standards, avec pour commencer un "Moment’s Notice" culotté et franchement ébouriffant. On reconnaîtra au bout d’une demie trente la trame mélodique de Coltrane. C’est également l’autre classique "Giant Steps" dans une version moins surprenante mais tout aussi magnétique.  

    Pour conclure cette programmation, le quintette de Magic Malik a inclus une reprise de "Gazzeloni" du jazzman Eric Dolphy. Voilà un jazz dont la modernité frappe aux oreilles, tout comme les sensations que proposent les cinq musiciens, partis ce soir de janvier 2024 au Baiser Salé dans un concert mémorable.

    Magic Malik, Jazz Association, b•records, 2024
    https://magicmalik.fr
    https://www.facebook.com/magicmalikmagic

    Voir aussi : "Marie Ythier, sans l’ombre d’un doute"

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  • Qui êtes-vous, Nicolas Réal ?

    Après le court prélude "Laisse le vent", prélude aérien et romantique Nicolas Réal se lance véritablement dans son deuxième album, Saint Romain, franchement épatant avec sa facture électro-pop. "Strip tease sur Mars" (qui est repris dans une deuxième version à la fin de l’album)  annonce la couleur. L’album accroche grâce à sa belle densité, à la fois eighties, dandy, sexy et résolument moderne. L’auditeur sera capté par la production impeccable et un chanteur à l’univers attachant.

    "Saint Romain", le morceau qui donne son titre à l’opus propose une déambulation noctambule. Nicolas Réal utilise le talk-over pour parler de nostalgie. "Le bonheur c’était magique", déplore-t-il. Faut-il revenir sur le passé ou regarder devant soi, se demande-t-il ? "Est-ce qu’on repart pour un tour / Qu’est-ce que j ‘fous là ? / Est-ce qu’on repart pour un tour / Surtout ne pas lâcher ton bras". Finalement la réponse est dans les derniers mots de cet extrait bien plus mélancolique qu’il n’y paraît. 
    L’auditeur sera sans doute frappé par "Pandy box", récit doux amer d’une histoire d’amour éphémère d’une belle densité, sans parler de l’orchestration et de la prise de son impeccables.

    Pour le formidable "Statistype", l’un des meilleurs morceaux de l’album, Nicolas Réal trousse à coups de statistiques un autoportrait à la fois émouvant, drôle et pertinent sur un artiste autant qu’un Français de 2024 : "Je suis le statistype / Quidam algorithmique / Partenaire idéal / Je suis le plus que normal". 

    Craquant, envoûtant et pertinent

    Chroniqueur fin et ironique de la société, Nicolas Réal le prouve encore avec "Masqué", consacré à la période du Covid-19 et au confinement.    

    Sur une pop irrésistible, "Suggestion d’amie" croque avec tendresse et ironie un célèbre réseau social mais aussi le récit d’un chagrin d’amour et d’une séparation que l’on essaie – bien mal – de réparer : "J’ai retrouvé sur net / Une fille qui porte ton nom / Elle a le même visage / Et elle habite Arcachon". Et si la solution était dans la fuite ? "On nous suggère d’être amis / J’ai un avis / Je préfère qu’on reste ennemis / C’est bien plus beau, chère Émilie". Cela a le mérite d’être dit – et chanté.

    Dans l’album de Nicolas Réal, on retrouve une très belle version du tube "Tous les cris les SOS" de Daniel Balavoine. L’esprit des eighties est là mais avec quelques touches électro-rock et l’apport du supplément d’âme qu’est le featuring de Lucie Valentine.

    Dans le formidable opus qu’est Saint Romain, il ne faut pas passer à côté de l’incroyable et poétique "Paranormal". Paroles tranchantes et mélancoliques, rythmes obsédants, mélodies travaillées et chœurs envoûtants. Un formidable titre qui ne laisse pas insensible. La part sombre de Nicolas réal   se révèle dans la deuxième partie de "Laisse le vent". Il s’agit d’un live live capté à Lanzarote concluant une séparation douloureuse : "Oublie ces paroles envolées / Les aveux de mon cœur déchiré… Je garderai les amertumes / Des regrets qu’on assume". Mon chemin s’arrête ici ("Le chemin s’arrête ici" semble-t-il conclure avec fatalisme).

    Plus sombre, le sobre et délicat piano-voix "Le petit chemin" fait le choix de la douleur autant que de la nostalgie. C’est le récit d’une rencontre autant que d’un amour d’enfance qui est immortalisé par un vélo. Est-ce vraiment une fin et les souvenirs ne sont-ils pas immortels ? "Qu’importe les chemins / Pourvu qu’ils se rejoignent / Et ce petit chemin / Sera notre jardin".

    "Où est je ?" vinent conclure de la plus délicieuse des manières. En duo avec la jeune Inès, sa fille, Nicolas Réal parle d’une manière légère et enlevée de l’identité et de ces moments où l’on peut se sentir perdu. À grands coups de références à la psychanalyse, aux lapsus, aux impostures, Nicolas et Inès chantent nos fragilités et la manière de s’en sortir : "Si je pouvais j’me trouverais / Mais je sais pas où me chercher / Je pose une main courante / Disparition inquiétante / Dans les couloirs du labyrinthe / Est-ce que je dois porter plainte / Où est moi, où est je ?" Craquant, envoûtant et pertinent. Très pertinent pour un album qui ne l’est pas moins.  

    Nicolas Réal, Saint Romain, dEPOT214 Records, 2024
    www.nicolasreal-musique.com
    https://www.facebook.com/nicolas.realm
    https://www.instagram.com/nicolas_realmusique

    Voir aussi : "Dynah, entre acide et acidulé"
    "Clara Luciani, La Femme libérée"

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