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Cinéma - Page 16

  • Cinq jours en novembre 2015

    Aux mauvaises langues qui accusaient le cinéma français de faire de bons films d’action intelligents, il va falloir répondre par une simple phrase : "Et Cédric Jimenez ?"

    Après l’excellent Bac Nord, une plongée plus vraie que nature dans la criminalité marseillaise, le réalisateur français s’est lancé, avec Novembre, dans un projet plus coriace encore : raconter l’enquête policière qui a conduit à l’arrestation des responsables des attentats du 13 novembre 2015. Projet ambitieux et délicat, tant le traumatisme est encore présent. Mais projet réussi.

    Le film commence par une scène incroyable : les sonneries simultanées de centaines de téléphone dans les bureaux de l’antiterrorisme, à Paris. Des attaques viennent d’avoir lieu au Bataclan, au Stade de France et sur plusieurs terrasses de cafés parisiens. L’enquête peut commencer. Il y a urgence, avant que les terroristes s’évanouissent dans la nature pour rejoindre d’autres pays, dont l’État islamique. 

    Nerveux et passionnant

    Novembre réuni une belle brochette d’acteurs et d’actrices, avec Jean Dujardin, en chef pugnace et méticuleux et la toujours excellente d’Anaïs Demoustier en jeune recrue investie jusqu’à s’affranchir des règles. À noter aussi la présence de Sandrine Kimberlain en haute-fonctionnaire travaillant entre son équipe sur le terrain et les hautes sphères de l’État.

    Les terroristes sont au cœur évidemment de cette enquête policière qui a la particularité de s’asseoir sur un fait entré dans l’Histoire. La recherche des hommes les plus recherchés de France permet de se plonger dans un pays traumatisé et attaqué par l’État Islamique, via des musulmans paumés, comme le dit un imam dans le film.

    Nerveux et passionnant, Novembre montre comment la traque contre Abaaoud et ses tristes sbires a pu empêcher de nouveaux attentats en France. On le doit aussi à une courageuse jeune femme, "Sonia" qui a permis, dit un bandeau à la fin du film, une loi pour garantir la protection des témoins.

    En ce moment, sur Canal+.

    Novembre, drame et policier français de Cédric Jimenez, avec Jean Dujardin, Anaïs Demoustier, Sandrine Kiberlain, Jérémie Renier et Lyna Khoudri, 100 mn, 2022, Canal+
    https://www.unifrance.org/film/53161/novembre#
    https://www.canalplus.com/cinema/novembre/h/20604271_40099

    Voir aussi : "Marseille, côté nord, côté sombre"
    "La bête doit mourir"

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  • Le Barrage

    Les Cramés de la  Bobine présentent à l'Alticiné de Montargis leur film de la semaine, Le Barrage. Il sera visible du du 1er au 6 juin 2023. La séance du mardi 6 juin à 20h30 sera suivie d'un débat.

    Ce drame soudanais a été sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs du Festival de Cannes 2022

    Soudan, près du barrage de Merowe. Maher travaille dans une briqueterie traditionnelle alimentée par les eaux du Nil. Chaque soir, il s’aventure en secret dans le désert, pour bâtir une mystérieuse construction faite de boue. Alors que les soudanais se soulèvent pour réclamer leur liberté, sa création semble prendre vie.

    Le Barrage, drame soudanais de Ali Cherri
    avec Maher El Khair, Mudathir Musa et Santino Aguer Ding

    Scénario Ali Cherri et Geoffroy Grison, 2023, 81 mn
    Séances le jeudi à 18H, le dimanche à 18H, le lundi à 14H
    et le mardi à 20H30 avec débat

    https://www.cramesdelabobine.org/spip.php?rubrique1342

    Voir aussi : "Eo sur les pas de Balthazar"

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  • Touché coulé

    Alors que le Festival de Cannes bat son plein, il est sans doute temps de s’arrêter sur le Président du Jury de cette édition 2023, Ruben Östlund. Le cinéaste suédois a quand même réussi l’exploit d’avoir décroché deux Palmes d’Or à Cannes avec… ses deux derniers films, The Square en 2017 et Sans filtre l'an dernier.

    Triangle of Sadness, le titre original de Sans Filtre, tire son nom de la première scène se déroulant au cours d’un casting de mannequins. Une scène mémorable, drôle et caustique, et qui annonce la couleur : faire un sort à notre société de l’apparence, de la consommation et du libéralisme.

    Le spectateur suit un jeune couple gâté par la vie : l'influenceuse Yaya et son petit ami Carl, dont la romance est pour le moins parasitée par l’argent, les apparences et les idées reçues. Les deux tourtereaux embarquent sur un yacht pour une croisière idyllique tout frais payée. Ils côtoient d’autres VIP – riches héritiers, hommes d’affaires, héritiers fortunés et autres femmes entretenues. Ils croisent aussi ces autres passagers issus de la classe prolétaire : personnel d’équipage, cuisiniers et serveuses à leur service pendant la durée du voyage, dans un décor de carte postale.

    Après qu’une tempête transforme un dîner somptuaire en cauchemar digne de La Grande Bouffe, des pirates font couler le bateau. Les quelques survivants se retrouvent seuls sur une île. Et, cette fois, les rôles sont inversés. 

    Charlbi Dean

    Les festivaliers de 2022 ont fait preuve d’un grand sens de l’humour en octroyant une Palme d’Or pour cette comédie scandinave s’attaquant aux nouvelles élites – dont Cannes n’est pas privée.    

    Dans Square, Ruben Östlund s’était pris à l’art contemporain. Ici, c’est le libéralisme dans son ensemble qui sert de cible. Le cinéaste a la bonne idée, au passage, de s’en prendre au monde des influenceurs et influenceuses, à travers les personnages tête-à-claque de Carl et Yaya. Avec une scène hilarante au cours de laquelle cette dernière "ose" dire bonjour à un simple membre d’équipage. La lutte des classes est au centre du propos de Ruben Östlund, mais c’est une lutte des classes en huis-clos, bardée de faux bons sentiments (la séquence de baignade accordée à la piétaille) et d’insultes à la décence (le couple de marchands d’armes).

    Le grand dîner se terminant en débandade digestive est sans doute ce qui a le plus marqué les festivaliers de Cannes. Et il est vrai que le metteur en scène a fait preuve à, la fois d’audace, de maestria et d’humour acerbe pour dépeindre la riche clientèle en déshérence.

    La dernière partie du film, au cœur de l’enjeu du film, n’est pas moins cruel. Cette fois, les rôles sont inversés : aux pauvres et aux femmes la domination sur l’île.

    Au moment de conclure cette chronique, il faut souligner que Charlbi Dean, l’actrice principale et mannequin sud-africaine, en photo sur l’affiche, est décédée accidentellement trois mois après la sortie à Cannes. Voilà qui rend le film encore si particulier. 

    Sans filtre, comédie satirique suédoise de Ruben Östlund, avec Harris Dickinson, Charlbi Dean,
    Dolly de Leon, Zlatko Burić et Woody Harrelson, 2022, 149 mn, Canal+

    http://www.new.bacfilms.com/distribution/fr/films/triangle-of-sadness
    https://www.canalplus.com/cinema/sans-filtre/h/20438760_40099

    Voir aussi : "Ennio Morricone, une vie filmée et en musique"

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  • Ennio Morricone, une vie filmée et en musique

    Impressionnant, exemplaire, passionnant : les qualificatifs élogieux seraient bien plus nombreux pour qualifier Ennio, le documentaire de  Giuseppe Tornatore consacré à Ennio Morricone, décédé en 2020. Sorti un an plus tard, Ennio fazit figure autant de film testamentaire que d’hommage à l’un des plus grands compositeurs des XXe et XXIe siècle. Mais aussi celui qui a su donner ses lettres de noblesse à la musique de film.

    Il fallait bien deux heures trente pour retracer une carrière impressionnante : 60 ans de créations, 500 musiques de films pour le ciné ma et la télévision, des dizaines de millions de disques vendus, des récompenses par centaine mais – seulement – deux Oscars, dont un pour l’ensemble de sa carrière et un autre pour la BO du film Les Huit Salopards de Quentin Tarantino.

    Le cinéaste américain fait d’ailleurs parti des nombreux témoins du documentaire de Giuseppe Tornatore, pour qui Ennio Morricone a d’ailleurs composé plusieurs BO, dont Cinema Paradisio.

    Il est impossible de nommer tous les grands artistes venus témoigner leur admiration pour le génie italien : l’acteur puis réalisateur Clint Eastwood, le compatriote Bernardo Bertolucci, John Williams, une autre des grandes figures de la musique de films, sans compter Dario Argento (car on oublie que les collaborations entre le cinéaste et le compositeur ont été riches et fructueuses). Singulièrement, la France qui a tant aimé Ennio Morricone, est assez peu représentée, si l’on omet un passage passionnant consacré à la musique du Clan des Siciliens. 

    Le maestro italien a réussi à réconcilier musique contemporaine et concrète, musique classique et musique populaire

    Impossible – sauf à être hermétique, indifférent et insensible – de ne pas être scotché devant ce documentaire récompensé par plusieurs prix au David di Donatello 2022. La caméra suit Morricone chez lui, dans son bureau, au travail devant ses partitions (car le musicien composait "à l’ancienne", en silence, grâce à son oreille absolue) et surtout assis face à l’objectif pour témoigner, avec sincérité et non sans émotion.

    Ennio est aussi un film parcourant plusieurs dizaines d’années de la vie culturelle italienne : cinéma, télévision, musique. Quelque part, Morricone est un acteur (sans jeu de mot) et un témoin essentiel de cette période, avec quelques figures incontournables de cette période, dont Pasolini, le compositeur contemporain Goffredo Petrassi ou la chanteuse populaire Milva.

    Évidemment, une large partie du documentaire est consacré aux apports exceptionnels de Morricone dans la musique de films. Et l’on découvre comment le bruit d’une échelle, le son d’un coyote ou les martellements de tambours lors d’une manifestation ont influencé le maestro pour tel ou tel thème. Les musiques des films de Sergio Leone (Pour une poignée de dollars, Le Bon, la Brute et le Truand, Il était une fois dans l’Ouest, Il était une fois en Amérique) sont traités avec enthousiasme, tout comme ces autres BO tout aussi passionnantes que sont Mission, Les Incorruptibles, Sacco et Vanzetti ou Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon, dont la composition a impressionné jusqu’à Kubrick qui a essayé, lui aussi, de travailler avec Morricone, en vain.

    Ennio est remarquable à plus d’un titre. Exemplaire aussi, dans le sens où Ennio Morricone, longtemps critiqué et rejeté par ses pairs (des compositeurs de musique dite "savante") a finalement été reconnu par un des plus grands créateurs de ce siècle et du siècle d’avant. Mais ce qui marque aussi et surtout c’est à quel point le maestro italien a réussi à réconcilier musique contemporaine et concrète, musique classique et musique populaire. 

    Ennio, documentaire italien, allemand, belge chinois, japonais et néerlandais de Giuseppe Tornatore,
    avec Ennio Morricone, Giuseppe Tornatore, Bernardo Bertolucci,
    Dario Argento, Quentin Tarantino, Hans Zimmer, John Williams, Oliver Stone,
    Clint Eastwood, Terrence Malick, Wong Kar-wai, Quincy Jones,
    Roland Joffé et Marco Bellocchio, 2021, 156 mn, Canal+

    https://le-pacte.com/france/film/ennio
    https://www.canalplus.com/cinema/ennio/h/19876949_40099

    Voir aussi : "Western ou northern ?"
    "Retenez-moi ou je fais un malheur"

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  • Fantasy à lire et à rire

    Non, vous ne rêvez pas. Ce sont bien les très sérieuses éditions Larousse qui proposent la version roman du film Donjons & Dragons, actuellement dans les salles. Évidemment, le livre est, lui, disponible, dans toutes les bonnes librairies.

    C’est le public adolescent (ou "young adult" pour reprendre la terminologie anglo-saxonne) que vise les éditions Larousse, qui proposent d’ailleurs trois autres déclinaisons en livres de Donjons & Dragons – La voie des druides, le préquel du film, le roman graphique L'Appel du Jeu (tome 1) et La Légende de Drizzt, le guide officiel des royaumes oubliés.  

    Donjons & Dragons est au départ un jeu de rôle imaginé dans les années 70. Jeu interactif avec des règles précises, des cartes à jouer, des plateaux illustrant des décors moyenâgeux, des dés et des personnages bien caractéristiques (un magicien, un voleur, un druide ou un guerrier), que l’on retrouve dans le film de Jonathan Goldstein et John Francis Daley. Un maître du jeu est chargé de mener la partie, tout en faisant office de conteur. 

    Le livre de David Lewman pourrait se caractériser comme un produit dérivé du film dérivé du jeu

    Directement inspiré du jeu d’origine – re-popularisé par la série Stranger ThingsDonjons & Dragons : L’honneur des Voleurs joue la carte de l’heroic fantasy autant que de l’humour. Chris Pine, Michelle Rodriguez ou Hugh Grant dans un rôle à contre-emploi, prennent un grand plaisir à jouer dans ce film de Fantasy malin et plutôt drôle pour un film américain.

    Le livre de David Lewman pourrait se caractériser comme un produit dérivé du film dérivé du jeu. Le spectateur pourra y retrouver sur papier le récit du film, jusqu’à la scène de la Mer des Épées, après que la communauté autour d’Edgin et d’Holga ait récupéré le Heaume de Disjonction.

    On retrouvera dans ce roman qui se lit avec plaisir tout ce qui fait l’attrait d’un roman de Fantasy : des héros que rien n’arrête en dépit de leurs faiblesses, une quête, un univers fantastique, sans oublier des elfes, des magiciens (bons ou mauvais), des guerriers et des dragons.

    Un bon moment de lecture pour les passionnés de Donjons & Dragons mais aussi pour le jeune public. En ouvrant son catalogue à cette littérature dite "facile", les éditions Larousse prouvent leur ouverture à un genre – la Fantasy – qui a été trop souvent considérée de haut.

    David Lewman, Donjons & Dragons : L’honneur des Voleurs, le roman du film, éd. Larousse, 2023, 152 p.
    Donjons & Dragons : L’honneur des Voleurs, heroic fantasy de Jonathan Goldstein et John Francis Daley,
    avec Chris Pine, Michelle Rodriguez, Justice Smith,
    Regé-Jean Page, Hugh Grant et Sophia Lillis, 136 mn, 2023

    https://www.editions-larousse.fr/livre/donjons-dragons-lhonneur-des-voleurs-le-roman-du-film-9782036040656

    Voir aussi : "Pop dans les tuyaux"

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  • Pop dans les tuyaux

    Il est rare qu’un animé suscite des avis positifs autant parmi le grand public que chez pas mal de critiques dites "sérieuses". Bon, on ne se cachera pas qu’avec Super Mario Bros. Le film, on n’est ni dans un film digne de la Quinzaine des Réalisateurs ni dans une œuvre cataloguée comme chef d’œuvre.

    Cela étant dit, Super Mario Bros. Le film est en soi une gageure, en ayant réussi le pari d’une adaptation d’un jeu vidéo (le précédent Super Mario Bros, sorti en 1993, avait été un four artistique et commercial retentissant).

    Voilà donc, dans un animé des plus réjouissants Mario et son frère Luigi transportés, par la grâce d’étranges tuyaux (rappelons qu’ils sont tous les deux plombiers), dans un univers – disons "métaverse", histoire de rester dans l’air du temps – menacé par l’ignoble Browser, rêvant de conquérir le monde, mais aussi de se marier avec la Princesse Peach.

    Mario va se démener comme un beau diable pour aider la courageuse Princesse Peach à sauver son royaume et délivrer Luigi. Pour cela, ils auront bien besoin de l’aide de l’armée des singes, Donkey Kong en tête. 

    Authentique œuvre de pop culture et hommage aux années 80 et 90

    Les amateurs de jeux-vidéos, et en particulier de la saga Mario, seront enchantés par l’adaptation sur grand écran des aventures du plus célèbre des plombiers italiens.  

    Malins, les scénaristes multiplient les références aux jeux de plateforme : courses, y compris en karting, chasse aux bonus, omniprésence des champignons – y compris dans une sauce aux spaghettis – et la musique mythique de la saga Nintendo.
    Les spectateurs retrouveront bien entendu les personnages emblématiques : Mario, Luigi, la Princesse Peach, le champignon Toad, le gorille Donkey Kong et le méchant Browser.

    Les enfants, petits et grands, se réjouiront dans cette adaptation d’une très grande réussite et portée par d’authentiques doubleurs et doubleuses –  Pierre Tessier, Audrey Sourdive, Benoît Du Pac et Jérémie Covillault. Voilà qui donnera à réfléchir aux futures productions d’animés, souvent prompts à faire appel à des comédiens et comédiennes célèbres, mais dont le doublage n’est pas la spécialité !

    Super Mario Bros. Le film, réjouissant et enlevé, devient en plus une authentique œuvre de pop culture et un hommage aux années 80 et 90. Voilà qui devrait d’autant plus réjouir les parents accompagnant leur progéniture à cette folle histoire de plomberies.  

    Super Mario Bros. Le film, comédie animée américano-japonais d’Aaron Horvath et Michael Jelenic,
    avec les voix françaises de Pierre Tessier, Audrey Sourdive,
    Benoît Du Pac et Jérémie Covillault, 92 mn, 2023

    https://www.thesupermariobros.movie/home
    https://www.universalpictures.fr/micro/super-mario-bros

    Voir aussi : "Une pièce de plus dans la saga One Piece"

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  • La vieille femme et la mort

    Lorsque le Japon se pique de cinéma SF et d’anticipation, cela peut donner ça : Plan 75, un terrible et subtil drame d’anticipation qui donne le frisson autant qu’il interroge sur notre avenir.

    Dans un avenir proche, le Japon doit faire face au vieillissement de sa population, comme d’ailleurs beaucoup de pays occidentaux. Une solution officielle est trouvée : permettre aux personnes de plus de 75 ans de se faire euthanasier, moyennant finance et un accompagnement sur mesure.

    Michi, une vieille dame dont la vie est devenue absurde et sans intérêt depuis qu’elle a perdu son travail, prend contact pour abréger ses jours.  Pendant ce temps, Hiromu, un jeune fonctionnaire affecté à ce "Plan "75" commence à avoir des doutes lorsque réapparaît un lointain oncle perdu de vue qui cherche lui-même à mourir. Il y a aussi Maria, cette jeune recrue chargée d’accompagner les personnes âgées pour leur dernier voyage. Toutes ces personnes vont finir par se croiser et s’interroger sur ce programme, comme sur leur propre existence. 

    Voilà un film de SF à la fois d’une grande subtilité et d’une grande force 

    Les passionnés de cinéma et cinéphiles verront sans doute a priori dans cet étonnant film de SF japonais, mais coproduit en France, en Philippine et au Qatari, une lointaine influence du côté du désormais classique Soleil Vert. Un problème démographique insoluble, une solution radicale pour y résoudre et des personnages pris au piège de leur environnement. La comparaison s’arrête pourtant là.

    La réalisatrice Chie Hayakawa choisit une voie moins spectaculaire qu’intimiste pour aborder ce sujet. Dans Plan 75, la caméra suit les personnages au plus près, sans misérabilisme mais avec une puissance incroyable. Le spectateur français verra dans les premières scènes avec Michi, au travail dans un hôtel malgré son âge, un clin d’oeil involontaire à l’actualité récente sur les retraites. La mort plane sur tous ces personnages, sans qu’elle soit réellement montrée – à l’exception des vingt dernières minutes.

    Et l’humanité derrière tout ça ? Elle prend forme grâce aux regards de la vieille dame, aux hésitations du jeune fonctionnaire, aux non-dits avec son oncle qu’il accompagnera jusqu’au bout et à ces moments brefs mais essentiels : la scène bouleversante du bowling, la préparation du repas de Hiromu avec son oncle ou la chanson interprétée par les amies de Michi.

    Voilà un film de SF à la fois d’une grande subtilité et d’une grande force qui ne peut que nous interroger sur les problèmes éthiques de l’euthanasie comme de son utilisation.

    Plan 75 sera proposé par les Cramés de la Bobine, à l'Alticiné de Montargis le 14 mai 2023 à 14 heures, dans le cadre du Week-End japonais (les 13 et 14 mai 2023).

    Plan 75, drame SF japonais, philippin, français et qatari de Chie Hayakawa, avec Chieko Baishō, Hayato Isomura, Stefanie Arianne, Taka Takao et Yūmi Kawai, 2022, 112 mn
    https://www.unifrance.org/film/54896/plan-75
    https://www.cramesdelabobine.org/spip.php?rubrique1329

    Voir aussi : "Retenez-moi ou je fais un malheur"
    "Ennio Morricone, une vie filmée et en musique"  

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  • Retenez-moi ou je fais un malheur

    C’est un voyage à la fois rafraîchissant, touchant et émouvant que je vous propose. Un  voyage qui nous mène tout droit au Japon – non  sans un détour par Rome. Le film Tempura, de la réalisatrice Akiko Ōku se présente comme une comédie romantique japonaise – ou plutôt comédie dramatique – ce qui, en soi, ne pouvait que susciter notre curiosité. Et qu’importe si le film est sorti il y a déjà trois ans. Il mérite d’être découvert (sur Canal+ en ce moment).

    Disons-le tout de suite : le titre culinaire français n’était pas la meilleure des adaptations pout ce long-métrage nippon (Hold Me Back). Certes, la cuisine tient un rôle de catalyseur dans l’histoire d’amour entre Mitsouka et Tada, mais elle est rapidement mise entre parenthèses pour suivre les destinées d’une jeune femme solitaire, facétieuse, lunaire, hypersensible et un poil névrosée.

    Voilà qui nous renvoie a priori vers une des célibataires les plus légendaires du cinéma, Bridget Jones. Pourtant, là s’arrête la comparaison, tant Temura prend son temps pour aborder des sujets plus graves : l’amour souvent insaisissable, les relations compliquées avec les hommes, l’amitié frustrante, la séparation, les blessures à cicatriser, le déracinement, le tout dans un langage cinématographique où les trouvailles et la poésie (l’étonnant voyage en avion, par exemple) ne manquent pas.

    Voilà qui nous renvoie a priori vers une des célibataires les plus légendaires du cinéma, Bridget Jones. Pourtant, là s’arrête la comparaison

    Mitsuko vit seule à Tokyo dans un minuscule appartement. Très bonne cuisinière (notamment ces fameux tempuras), elle travaille dans un bureau et a pour collègue et amie l’irrésistible Satsuki. Mais un garçon entre dans la vie de Mitsuko par hasard. Le timide Tada a du mal à aborder la jeune femme, à lui parler franchement, à lui déclarer ses sentiments - et la réciproque est vraie. Pour ne rien arranger, Mitsuko doit gérer ses démons intérieurs - et antérieures -, et notamment un ami imaginaire nommé A. Il entretient des dialogues avec la jeune femme, faits de confidences, de questionnements mais aussi de conseils. Un séjour en spa, la jeune perd les pédales. Plus tard, un périple à Rome permet à Mitsuko d’y voir plus clair puis de se dévoiler. Mais ce n'est pas gagné.

    On préférera le titre original Hold me Back ("Retenez-moi") pour ce récit autour d’une romance (et même d’une double romance, si l’on compte la pétillante Satsuki (la craquante Ai Hashimoto). Dans le rôle principal de Mitsuko, la star japonaise Non fait merveille. Elle endosse avec un mélange de grâce, de poésie mais aussi de souffrances cette célibataire naïve, faussement enjouée et finalement malheureuse. Avec, sous le regard de la réalisatrice Akiko Ōku un discours féministe peu tapageur mais bien présent.   

    Tempura, comédie dramatique japonaise de Akiko Ōku,
    avec Rena Nōnen (Non), Kento Hayashi et Ai Hashimoto, 2020, 133 mn, Canal+

    https://www.canalplus.com/cinema/tempura/h/19969453_50047

    Voir aussi : "Heureux comme un enfant au Bhoutan"
    "Ce que l’on fait et ce que l’on est

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