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Cinéma - Page 20

  • Retour sur Tolkien et sur la Terre du Milieu

    Tolkien serait-il la grande star de cette fin d’année ? Il faut le croire, avec la sortie de la série Les Anneaux de Pouvoir, considérée comme la création télé la plus chère jamais tournée. Le magazine Première surfe sur le phénomène d’un des auteurs majeurs du XX siècle et dont l’œuvre est devenue culte.

    En moins de 100 pages, le magazine spécialisé revient dans un numéro spécial sur cette saga de fantasy et repart "sur les traces de l’écrivain le plus passionnant du XXe siècle… [fait] l’inventaire de son héritage, et [examine] l’impact de son chef d’œuvre sur la pop culture", comme l’écrit Gaël Golhen dans son éditorial.

    Dans ce hors-série, honneur à l’actualité avec un large dossier consacré aux Anneaux de Pouvoir, la série d’Amazon, résultat aussi, nous explique Sylvestre Picard, d’une bataille juridique autour des droits de l’œuvre de Tolkien.  

    Le journaliste souligne que la somptueuse création télé a été écrite d’après les appendices du Seigneur des Anneaux. D’où la question : pourquoi les créateurs n’ont-ils pas jeté leur dévolu sur le Silmarillion, l’autre œuvre emblématique de Tolkien ? La réponse risque de déconcerter plus d’un et plus d’une. 

    Un adaptation par Kubrick à laquelle auraient collaboré Les Beatles

    Une interview du scénariste J.D. Payne et du réalisateur Juan Antonio Bayona permet au lecteur d’entrer – un peu – dans les arcanes de la création de la série.

    Le magazine a également la bonne idée de revenir sur quelques personnages emblématiques du Seigneur des Anneaux, que la nouvelle création d’Amazon reprend, avec certes de nouveaux visages. Et l’on pense inévitablement à Galadriel, portant fort bien ses 1970 ans.

    Outre une interview de John Howe, artiste incontournable quand on pense à Tolkien, Première s'intéresse à l’écrivain britannique et sur la lente maturation d’une œuvre capitale de la littérature mondiale. La question des droits revient sur le tapis, avec une autre figure, Christopher Tolkien, son fils, décédé il y a quelques années, et farouche défenseur de la mémoire de son père.

    Le lecteur apprendra sans doute que Le Seigneur des Anneaux a suscité dès les années 60 des passions et des soifs d’adaptation. À ce sujet, François Léger détaille le vrai du faux s’agissant d’un projet de film réalisé par Kubrick à laquelle auraient pu collaborer… Les Beatles. Autre adaptation, celle en dessin animé de Ralph Baski en 1978, mais qui, hélas, se contenta d’un seul film contre trois imaginés à l’origine.

    Première consacre évidement une grosse moitié de son numéro spécial à la version légendaire, majestueuse et définitive du Seigneur des Anneaux par Peter Jackson. Comment a travaillé lé réalisateur néo-zélandais ? Comment a été reçu le film ? Pourquoi la communication a joué sur les nouveaux médias de l’Internet pour susciter le buzz ? Des interview, des focus sur les versions DVD et Blu-ray, une analyse croisée des sagas Star Wars et de Tolkien et un regard sur l’influence sur la culture pop achèvent de faire de ce numéro une passionnante visite de La Terre du Milieu. 

    Fans de fantasy, ce numéro spécial est carrément inratable. Il est disponible dans toutes les bonnes librairies et maisons de la presse jusqu'à fin octobre.

    Numéro spécial Première "Retour en Terre du Milieu",
    septembre-octobre 2022, 98 p.

    https://www.premiere.fr

    Voir aussi : "Avant Frodon, Bilbo et Gandalf"

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  • Bien rater sa vie à Paris

    Vite, il est plus que temps de faire une séance de rattrapage avec l’adaptation des Illusions perdues de Balzac, disponible en ce moment sur Canal+ ! Un classique qui a sans doute traumatisé beaucoup de scolaires, impressionnés par ce roman ambitieux, mais qui devient grâce au génie de Xavier Giannoli une fresque passionnante. Oui, vous avez bien lu : "génie"… Car il en fallait pour réussir à condenser dans un long-métrage d’environ deux heures 20 les affres d’un jeune homme ambitieux et surtout très naïf et qui croyait pouvoir devenir un loup au milieu des loups.

    Disons-le aussi : sept Césars reçus en 2022, dont celui du meilleur film, est une preuve de l’excellence d’un long-métrage qui refuse l’académisme, tout en respectant les canons de la reconstitution historique et l’adaptation littéraire. Xavier Giannoli fait preuve d’une modernité étonnante, même pour un récit se déroulant durant la Restauration française.

    Dans les années 1820, le jeune Lucien de Rumbempré, orphelin désargenté travaillant dans une imprimerie en Charentes, rêve de carrière littéraire. Il a sorti un modeste recueil de poésie, remarqué par Louise de Bargeton, une aristocrate de la noblesse provinciale. Elle voue à ce garçon sensible une belle admiration, avant de tomber dans ses bras. Pour éviter le scandale d’un adultère, Julien et Louise partent à Paris, ce qui serait aussi l’occasion pour l’écrivain en herbe de rencontrer des éditeurs. C’est le monde de la presse écrite qui lui ouvre les bras grâce à un rédacteur aussi cynique qu’ambitieux, Étienne Lousteau. Les deux deviennent amis et Lucien de Rubempré commence à se faire un nom. Mais le jeune poète oublie que dans le monde huppé de la bonne société parisienne, tout n’est qu’illusions, hypocrisie, calculs et coups bas.  

    Un superproduction prenant par moment des accents scorcesiens

    Nous avions parlé d’Eugénie Grandet et de l'honorable adaptation qu’en avait fait Marc Dugain en 2021, la même année bizarrement que Les Illusions perdues de Xavier Giannoli. Alors que le premier misait sur le quasi-huis-clos, sur l’austérité et sur des tons grisâtres, le second fait de son film une fresque luxuriante, grinçante, colorée et menée tambour-battant. Il faut dire que l’histoire de Julien de Rubempré, jeune provincial à peine dégrossi mais désireux de se faire un nom à Paris, se prêtait à cette superproduction prenant par moment des accents scorcesiens.  

    Le scénario modernise le roman, avec des clins d’œil à l’actualité contemporaines que le spectateur pourra facilement deviner, alors que le texte de Balzac, certes retravaillé, est mis à l’honneur grâce à la voix off de Xavier Dolan. Benjamin Voisin, avec son visage lumineux, "est" Julien de Rubempré, dans toute sa candeur et son enthousiasme. Ambitieux, oui. Mais un ambitieux devenant vite une proie en raison de choix pour le moins hasardeux.

    Illusions perdues se paie le luxe de seconds rôles prestigieux qui prennent un réel plaisir à être dans cette œuvre balzacienne : Cécile de France en Louise de Bargeton, femme amoureuse blessée et ne sachant plus comment gérer son insaisissable amant ; Jeanne Balibar en marquise et mante religieuse redoutable ; Xavier Dolan en écrivain émergeant et dont l’évolution n’est pas la moins inintéressante ; Gérard Depardieu en éditeur… et "épicier". Le spectateur français découvrira sûrement Salomé Dewaels, parfaite dans le rôle de Coralie, cette comédienne de boulevard, paradoxalement l’une des seules personnes romantiques de ce drame cruel. N’oublions pas enfin le formidable Vincent Lacoste qui a été récompensé par un César pour son interprétation d’un éditeur tour à tour cynique, ambitieux, drôle et impitoyable.

    Grâce au film de Giannoli, les allergiques à Balzac vont trouver dans cet écrivain majeur de la littérature mondiale de nouvelles raisons de se replonger dans sa Comédie humaine

    Illusions perdues, drame de Xavier Giannoli, avec Benjamin Voisin, Cécile de France,
    Vincent Lacoste, Xavier Dolan, Salomé Dewaels, Jeanne Balibar,
    Louis-Do de Lencquesaing et Gérard Depardieu, 2021, 150 mn, Canal+

    Honoré de Balzac, Illusions perdues, éd. Folio Gallimard, 960 p.
    https://www.gaumont.fr/fr/film/Illusions-perdues.html
    https://www.canalplus.com/cinema/illusions-perdues/h/17230453_40099

    Voir aussi : "Eugénie Grandet, classique et moderne"
    "Corpus delicti"

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  • Sur les pas d’Harry Potter, Frodon ou Emily (à Paris)

    C’est une très bonne idée qu’a eu le site Omio.fr qui s’est lancé dans le projet de créer une carte interactive des lieux de tournage les plus importants sur le vieux continent. Le choix a été fait de s’intéresser aux 100 films et 40 séries les plus appréciées en France. Le fan d’Harry Potter, de Tolkien ou même de Tarantino pourra se replonger dans ces fictions mythiques : découvrir les paysages imposants du Seigneur des Anneaux, la salle du banquet de Poudlard ou les scènes d’Inglourious Basterds.

    Qu'il s'agisse de la nouvelle série dérivée House of the Dragons ou de blockbusters populaires comme James Bond, l’aventure de Frodon en Terre du Milieu ou Harry Potter, la carte interactive des lieux de tournage montre tous les lieux de tournage des 1.000 films et séries les plus populaires en Europe. Les studios de cinéma n'ont pas été pris en compte, afin que les fans puissent vraiment voyager à la recherche de lieux réels.

    L'Europe a toujours été un continent très apprécié pour les productions de films et de séries. C’est singulièrement la Suède qui se démarque le plus : 66 films sur plus de 1 000 films et séries les plus populaires sur Internet Movie Data Base (IMDB) ont vu les caméras se poser sur cette terre scandinave. Le pays de Molière s’en sort bien avec 41 films tournés – surtout des films d’action. Le Portugal se révèle être un pays d'horreur surprenant : sur 52 œuvres, 6 sont des films d'horreur. La Norvège, de son côté, ferme la marche avec seulement 2 films tournés en dehors des studios.

    L’exemple de la série Emily in Paris

    Le méta-moteur de recherche Omio, qui est avant tout une plateforme de réservation pour voyageurs à la recherche de bons plans, propose une idée originale de découvrir notre vieux continent pour marcher par exemple sur les pas de James Bond en Arctique. Pour cela, des itinéraires et des des routes virtuelles sont proposées sur le site.

    Pour que le road trip soit le plus varié possible, les destinations choisies sont principalement des lieux de tournage réels - seul l’itinéraire du Seigneur des Anneaux inclut la visite de studios de cinéma. Ce qui est tout de même en soi très alléchant.

    Prenons l’exemple de la série Emily in Paris. La capitale française a une réputation à tenir : celle du romantisme, de la mode, des lumières et de la Tour Eiffel. Une source d’inspiration inestimable qui a vu Emily y poser ses valises, avec sa candeur devenue célèbre. Si on y voit la Seine, les quais et quelques cafés typiques, ce sont principalement deux places qui servent de décors à la série. La Place Valois, tout d’abord, sert de théâtre aux péripéties professionnelles de la personnage principale. La place de l’Estrapade, ensuite, devient le quartier résidentiel de la jeune Américaine. D'autres lieux sont à mentionner. Le restaurant de Gabriel se trouve au 18 rue des Fossées-Saint-Jacques, attenant à la boulangerie classée aux monuments historiques. Des endroits plus classiques comme le jardin du Palais Royal, le Pont des Arts, la rue de l’Abreuvoir à Montmartre ou le Café de Flore ont également servi de lieu de tournage.

    Ce n’est qu’un exemple de ce qui est proposé par le site, qui entend dépoussiérer le concept de voyages touristiques et culturels en s’appuyant sur la télé et le ciné. Très bonne idée. 

    https://www.omio.fr/lieu-de-tournage

    Voir aussi : "Trips new-yorkais sur les traces de Robert de Niro, Superman, Harry et Sally"

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  • Sentinelles

    Je dois absolument vous confier qu’avant de découvrir La troisième guerre, un premier film de Giovanni Aloï, j’étais persuadé que j’allais être plongé dans un film d’anticipation sur fond de discours apocalyptique. Il est vrai que le titre, outre qu’il renvoie à une triste actualité ukrainienne, pourrait se regarder comme un long-métrage lanceur d’alertes, tant l’inquiétude, les questions existentielles et les problèmes environnementaux nous assaillent. Là n’est pourtant pas le propos de La troisième guerre, même si l’on ne peut dire qu’il soit franchement plus gai.

    Giovanni Aloï plante son décor dans une caserne parisienne où vivent des soldats de l’Opération Sentinelle. Cette troupe de militaires est chargée, depuis les attentats de 2015, d’assurer la sécurité, alors que les risques d’attentats persistent. Léo, tout jeune troufion fraîchement débarqué de sa Vendée natale, découvre la vie en caserne, la camaraderie mais aussi le climat lourd de sa mission. L’ennemi semble être partout et nulle part. 

    Un nouveau Désert des tartares

    Il faut souligner l’interprétation des trois interprètes principaux. Il y a d’abord le pioupiou Léo, interprété par l’excellent Anthony Bajon, découvert dans La prière. Il incarne la jeunesse fourvoyée dans un conflit qui n'ose pas dire son nom, cette fameuse "troisième guerre". Son implication mentale et morale, jusqu’à l’aveuglement, transparaît lors de sa permission à la maison familiale de La Roche-sur-Yon, face à une mère admirative transie d’amour (Marie Bunel), un beau-père qu'il juge mou, puis lors d’une scène dans une boîte de nuit.

    Deux autres interprètes explosent de leur talent : Karim Leklou (Bac Nord, la série Hippocrate), dans le rôle du soldat brut de décoffrage et Leïla Bekhti (Tout ce qui brille, Le grand bain), en officier et cheffe de patrouille tiraillée entre son métier, sa vie personnelle et sa condition de femme.

    Cette guerre d’un autre genre va trouver sa conclusion dans un événement que sans doute personne n'attendait, et qui va faire sauter les verrous de ce qui s’annonçait comme un nouveau Désert des tartares, dans lequel l’attente de l’ennemi devient un véritable enfer. Un enfer intérieur. A découvrir en ce moment sur Canal+.

    La Troisième Guerre, drame de Giovanni Aloï, avec Anthony Bajon, Karim Leklou,
    Leïla Bekhti et Marie Bunel, 2020, 92 mn, Canal+
    https://www.canalplus.com/cinema/la-troisieme-guerre/h/16913115_40099
    https://capricci.fr/wordpress/product/la-troisieme-guerre

    Voir aussi : "Corpus delicti"
    "Marseille, côté nord, côté sombre"

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  • Éleveur de championnes

    Will Smith, comme souvent, peut agacer : acteur bankable aux choix cinématographiques parfois discutables, il a autant d’admirateurs que de détracteurs. La méthode Williams, réalisé par Reinaldo Marcus Green – mais où la présence de l’ex Prince de Bel Air est si forte que que l’on peut parler de film "de" Will Smith – est une très jolie surprise et nous rend Will Smith bien plus désirable que l’on imaginait.

    L’ancien homme en noir de Men in Black joue le rôle de Richard Williams. Il est le père d’une famille de cinq enfants, dont deux filles nés de son dernier mariage. Elles se nomment Venus et Serena et montrent un gros potentiel au tennis, sport qu’elles pratiquent avec passion, sous le regard amoureux de leur père, aussi exigeant qu’aimant. Certain de leur talent, il a mis au point un plan pour les hisser au plus haut niveau mondial. Il entend bien suivre à la lettre sa méthode, savamment élaborée sur 78 pages. L’homme se montre intraitable face à des entraîneurs dubitatifs, des sportifs sceptiques et des businessmen aux motivations parfois éloignées du sport.

    Will Smith parvient à montrer tout le charisme d’un père donnant tout pour le succès de ses filles, sans tomber pour autant dans le cabotinage

    La méthode Williams a sans doute plus fait sensation aux États-Unis qu’en France. Pour son rôle du "Roi Richard" (King Richard), Will Smith a été récompensé d’un Oscar et d’un Golden Globes de meilleur acteur. Les nominations (meilleur film, meilleure actrice pour Aunjanue Ellis ou meilleur scénario) ont été nombreuses. C’est dire la qualité de ce biopic.

    Will Smith parvient à montrer tout le charisme d’un père donnant tout pour le succès de ses filles, sans tomber pour autant dans le cabotinage, ce qui était un piège. Sa partenaire Aunjanue Ellis lui donne la réplique dans son rôle de mère discrète mais à l’importance capitale.

    Maintenant, parlons de ces deux actrices secondaires que sont Saniyya Sidney et Demi Singleton dans les rôles respectifs de Venus et Serena Williams. C’est simple : sans en faire trop, elles rendent attachantes les deux futures grandes championnes du tennis mondiale. Nous sommes au début de leur jeune carrière et elles s’affichent en sportives naissantes hyper douées, pugnaces, sérieuses mais aussi humaines et craquantes. Leurs éclats de rire font merveille. Le film s’arrête au moment où Venus entre dans les tournois professionnels. Elle croise, ainsi que sa sœur, ces stars du tennis mondial que sont Pete Sampras, John McEnroe et surtout Arantxa Sánchez.

    Voilà un biopic qui nous cueille par surprise et nous fait découvrir les coulisses du tennis, avec deux des plus grandes sportives du XXIe siècle en guest stars.

    La méthode Williams, biopic de Reinaldo Marcus Green, avec Will Smith,
    Jon Bernthal, Aunjanue Ellis, Saniyya Sidney et Demi Singleton, 2021, 138 mn, Canal+

    https://www.canalplus.com/cinema/la-methode-williams/h/17534960_40099
    https://www.kingrichardfilm.net
    https://www.serenawilliams.com
    https://www.venuswilliams.com

    Voir aussi : "Corpus delicti"
    "Alex Lutz remet le service"

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  • Corpus delicti

    L’Événement d’Audrey Diwan est un très grand, très beau et très puissant film. Basé sur un roman d’Annie Ernaux (L'Événement, éd. Gallimard, 2000), le film relate la tempête et le drame d’une grossesse non-désiré dans les années 60, lorsque la contraception n’existait pas et que l’avortement était un crime. Avoir un enfant non désiré aboutissait pour les femmes – et notamment les jeunes femmes – à l’opprobre générale, au mariage forcé dans le meilleur des cas et la prison au pire.  

    Un poème d’Aragon introduit l’une des scènes du film : "Elsa au miroir", superbe texte de la littérature mais aussi portrait d’une jeune fille évanescente, paisible, soumise mais aussi tourmentée au milieu d’une tragédie.

    Anne, étudiante en lettres brillante à Angoulême, découvre qu’elle est enceinte suite à une brève relation avec un autre étudiant, comme elle. On ne sait que tardivement dans le film l’identité du garçon, mais à vrai dire cette information n’est importante que pour souligner la lâcheté du jeune homme, laissant sa relation d’un soir gérer seule une histoire dont il est coresponsable, pendant qu’il poursuit son cursus et ses relations amicales comme si de rien n’était.  

    Anne se retrouve seule, désemparée, obligée de trouver une solution à sa grossesse non-désirée. Ce drame personnel est aussi un tableau sociologique cruelle de cette France corsetée et hyper moralisante des années 60. L’amour devient vite un problème, ce qu'il ne devrait bien sûr jamais être. Drague, flirts à peine appuyés, séductions, intellectualisation et aussi interrogations sur la vie amoureuse mais aussi le pis-aller de ces jeunes femmes des années 60 : le mariage, les enfants et la soumission aux corvées ménagères, comme l’esquisse le portrait de la mère jouée par Sandrine Bonnaire.

    Les visages en gros plans ce sont aussi ces regards

    La caméra film avec honnêteté au plus près, respect et sans souci de choquer, les corps des jeunes femmes. Les corps mais aussi les visages. Il faut d’ailleurs saluer la performance de l’actrice principale, Anamaria Vartolomei (My Little Princess, La Bonne Épouse), tenant à bout de bras ce film exigeant, égrenant les semaines de grossesse, tel un compte à rebours inéluctable. Les visages en gros plans ce sont aussi ces regards : tour à tour affolés et désorientés (pour Anne), mais aussi méfiants, défiants, arrogants, désapprobateurs et suspicieux (pour son entourage, proche ou non).

    Il faut aussi parler des personnages secondaires, joués par quelques pointures : Sandrine Bonnaire en maman aimante mais enfermée dans son rôle de mère au foyer, Anna Mouglalis en "faiseuse d’ange" ou Pio Marmaï en professeur subtilement campé et moins rigide qu’il n’y paraît. Un coup de canif est au passage adressé au corps médical, avec ces médecins complaisants, résignés, voire contempteur de ces jeunes filles enceintes.

    Sans pathos ni discours lénifiant, Audrey Diwan avance avec délicatesse, parsemant son film de messages néanmoins engagés, sur la place des femmes, l’éducation, la liberté et le droit d’user de son corps. La réalisatrice ne cache pas plus la réalité d’un avortement, avec en particulier deux scènes tournées sans fard.

    Comme un dernier message, le film, qui avait commencé avec une citation  d’Aragon, se termine avec l’extrait d’un poème de Victor Hugo : "Nous garderons l'honneur ; le reste, nous l'offrons. / Et l'on marche..."

    Tout cela fait de L’Événement un très grand film, exceptionnel de qualité et nécessaire au combat féministe. Il a d’ailleurs obtenu le Lion d'or à la 78e édition de la Mostra de Venise.

    L’Événement, drame d’Audrey Diwan, avec Anamaria Vartolomei, Kacey Mottet-Klein, Luàna Bajrami,
    Louise Chevillotte, Pio Marmaï, andrine Bonnaire et Anna Mouglalis, 2021, 100 mn, Canal+

    https://www.unifrance.org/film/51968/l-evenement
    https://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Folio/Folio/L-evenement
    https://www.canalplus.com/cinema/l-evenement/h/17486029_40099

    Voir aussi : "Eugénie Grandet, classique et moderne" 

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  • Droit au but

    Les Marseillais et amoureux de Marseille iront voir ou revoir Stillwater avec plaisir, proposé en ce moment sur Canal+. Et les autres ?

    Lors de la sortie du film en salles en 2021, la communication autour a fait de la cité phocéenne, en réalité  le troisième personnage principal, les deux premiers étant Matt Damon et Camille Cottin.

    L’acteur américain joue le rôle de Bill Baker, un ouvrier de l’Oklahoma, à la fois rude et austère. On apprend rapidement qu’il vivote de petits boulots en petits boulots, est proche de sa mère et vit seul.

    Lorsqu’il prend l’avion pour partir à Marseille c’est pour visiter sa fille Abigail, emprisonné aux Baumettes pour un crime qu’elle jure n’avoir pas commis. Bill essaie de faire ce qu’il peut pour soutenir sa fille mais les relations entre eux deux sont pour le moins fraîches. Cependant, l’ancien foreur est bien décidé à se lancer dans une enquête seul contre tous pour prouver l’innocence de sa fille. Enfin, seul, pas complètement : une Française, Virginie, accompagnée de sa fille Maya, l’aident et le soutiennent dans sa démarche.

    Bill se lance sur les traces d’un suspect en déambulant dans les rues, ruelles et quartiers interlopes d’une ville qu’il découvre.

    La cité phocéenne est filmée avec patience, sous tous les angles, au point d’éclipser par moment l’enquête policière

    Il y a plusieurs manières de regarder ce très bon Stillwater. La première en le voyant comme un honnête thriller sur fond d’injustice et aussi de secrets qui seront dévoilés à la fin. Bill Baker, Américain renfrogné, se révèle en enquêteur pugnace n’ayant peur de rien et prêt à tout pour sauver l’honneur – et la liberté – de sa fille, une jeune rebelle qui avait choisi quelques années plus tôt de couper les points avec son  père.

    La deuxième perspective est justement celle des relations parentales. Il y a bien sûr le couple Virginie-Maya : Camille Cottin est convaincante dans son rôle de mère célibataire, couvant d’amour son adorable fille. Bill, mal aimé de sa fille, débarque de son Oklahoma natale et découvre du même coup qu’il peut être un père aimant, lui aussi, avec une fille de substitution – Maya. Les relations que les deux entretiennent sont d’autant plus touchantes qu’elles étaient improbables.

    Et puis, il y a Marseille. La cité phocéenne est filmée avec patience, sous tous les angles, au point d’éclipser par moment l’enquête policière. Les rues tortueuses, les Baumettes, les quartiers nord, les calanques et bien entendu le Stade Vélodrome et l’OM : le Marseille de Tom McCarthy n’est cependant pas une ville de carte postale même s’il en a bien l’ADN. Le cinéaste a filmé avec justesse, rigueur mais aussi nervosité un match de football – gagné par l’OM –, et qui va contribuer à la résolution de l’enquête.

    Film de genre, enquête policière mais aussi portrait d’un homme qui se révèle et se transforme comme il le dit lui-même à la fin du film, Stillwater renouvelle, mine de rien, le thriller américain en s’ouvrant vers la France et l’Europe. 

    Stillwater, thriller américain de Tom McCarthy, avec Matt Damon, Abigail Breslin et 
    Camille Cottin, 2021, 140 mn, Canal+
    https://www.canalplus.com/cinema/stillwater/h/17028281_50001
    https://www.universalpictures.fr/micro/stillwater

    Voir aussi : "Marseille, côté nord, côté sombre"
    "Pauvre conasse"

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  • Une pièce de plus dans la saga One Piece

    Peut-on regarder le dernier One Piece (Red) sans avoir jamais vu aucun des films précédents ni non plus les quelques cent tomes des mangas éponymes. La réponse est : oui. Pour les non-familiers, One Piece est l'une des plus fameuses saga japonaise shōnen (dans le jargon, un manga destiné aux adolescents, donc bien genré…) qui a été créée en 1997 par Eiichirō Oda.

    Petit rappel pour les non-initiés : le "One Piece" désigne le trésor qu’un pirate légendaire a caché dans le royaume imaginaire de Grand Line. Le héros à chapeau de paille, Luffy, qui a acquis des pouvoirs de super-héros en devenant un adolescent élastique, se lance lui aussi dans la piraterie et suit de picaresques individus – souvent aux pouvoirs extraordinaires – sur les mers. Parmi ses compagnons de voyage, il faut citer le fameux capitaine Shanks le Roux.

    Les mangas sont connus pour leur longueur et pour des séries de plusieurs dizaines de volumes. One Piece ne déroge pas à la règle : après 25 ans d’existence, la série livres compte cette année 101 tomes, la série animé pour la télé pas moins de 1 000 épisodes au bout de 20 ans et 15 films ont été réalisés pour le cinéma. Le dernier en date, One Piece Film: Red vient de sortir, et c’est celui-ci qui va nous intéresser.

    Au moment où commence l’animé, l’île imaginaire d'Élégia voit une star de la pop music, la sémillante Uta, se produire au cours d’un concert retransmis dans le monde entier. La jeune chanteuse, qui est la fille du pirate Shanks, a connu une ascension spectaculaire et est devenue une idole pour un large public, y compris chez nombre de pirates qui sont présents sur Élégia. Luffy, qui a connu Uta lorsqu’elle était enfant, est également là. La chanteuse a cependant un but qui dépasse largement la sphère artistique et musicale. Grâce à ses pouvoirs vocaux, elle entend bien instaurer une nouvelle ère : mettre fin à la piraterie pour commencer, puis envoûter les populations, les endormir et instaurer une paix mondiale, quitte à asservir les corps de ses auditeurs et les rendent dépendants. Ce projet utopique cache une menace plus terrible encore : la libération d’un esprit malfaisant, Tot Musica.

    Un film qui donne la part belle au fantastique, à la fantasy mais aussi à la musique

    Disons-le tout de suite : cette énième création de One Piece est avant tout destinée aux fans, dont certains et certaines se sont particulièrement révélés lors de projections publiques cet été. Mais passons. Les non-initiés parviendront cependant à raccrocher les wagons dans un film qui donne la part belle au fantastique, à la fantasy mais aussi à la musique. Les détracteurs verront dans le nouvel opus de la saga un – très – long clip musical, avec Hoshi en doublure vocale d’Uta, un choix logique au regard de l’univers de l’auteure de "La Marinière", et qui se sort honorablement bien dans cet emploi pour la bande-son de l'animé.

    Les connaisseurs de la saga seront sans doute déconcertés par le scénario. Pas d’explorations en bateaux dans le film ni de recherches de trésor, mais un épisode centré avant tout sur Uta, au destin forcément atypique. L’artiste adulée fait l’objet au cours du film d’un joli conte, une sorte de dessin animé dans le dessin animé, et de loin la séquence la plus réussie du film.

    Pour le reste, dans une facture manga assez classique, non sans quelques piques d’humour, le public assiste à des scènes menées tambour battant : une chanteuse illuminée, un jeune pirate volant au secours de ses amis, le secret d’une jeune enfant douée pour la musique, une force maléfique et surtout beaucoup, beaucoup, beaucoup d’actions.

    Les combats se succèdent aux combats, que ce soit dans le monde réel ou celui des rêves, au point de rendre le film parfois confus. La séquence finale de bataille contre le mal fait le choix du spectaculaire, au risque de devenir abstrait.  

    Il ne reste plus qu’à connaître la suite des aventures de Luffy et consorts, dans la quête du fameux "One Piece", le créateur Eiichirō Oda parlant déjà d’une fin programmée de ses héros pour les prochaines années. Les fans auront donc encore quelques beaux moments de plaisir devant eux. Et, si ce n’est déjà fait, ils se précipiteront sans aucun doute sur ce épisode du jeune pirate super-héros.

    One Piece Film: Red, animé japonais de Gorō Taniguchi, studio Toei Animation, 2022, 115 mn
    https://www.kana.fr/univers/one-piece
    https://onepiece.fandom.com/fr/wiki/Toei_Animation

    Voir aussi : "Complètement baba de bulles"
    "Ce que l’on fait et ce que l’on est"

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