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Histoire - Page 12

  • Montargis la Chinoise [2] : Deng Xiaoping et d'autres jeunes gens ambitieux

    Il existe une photographie historique des années 20 illustrant ce qu'a pu être la naissance du parti communiste chinois à Montargis. Ici, la grande histoire rejoint la petite histoire, comme il a été dit dans l'article précédent.

    Sur ce cliché, une vingtaine de jeunes Chinois posent dans un jardin. On trouve parmi eux Cai Hesen et son amie Xiang Jingyu. Il y a aussi Li Fuchun, Cai Chang et Ge Jianhao, la propre mère de Cai, en fuite de son pays pour avoir refusé la tradition des pieds bandés. Des commentaires ont situé cette photo au sud de Paris, voire à Fontainebleau. En réalité, c'est bien à Montargis que ce cliché a immortalisé la scène, et plus précisément au Jardin Durzy, toujours visitable. 

    C'est là, au coeur de ce modeste parc, que le théoricien historique Cai Hesen ainsi que son amie Xiang Jingyu, font part à Montargis de leurs thèses "pour sauver la Chine et le monde". Nous somme dans les journées des 6 au 10 juillet 1920. Ceux qui étaient jusqu'alors de paisibles étudiants expatriés se révèlent des idéalistes passionnés, près à changer le monde. Révolutionnaire, le Mouvement Travail-Etudes l'est à plus d'un titre. Non contents de se former à des techniques modernes destinées à développer leur pays, de jeunes hommes et de jeunes femmes (la mixité étant là aussi nouvelle) découvrent aussi, dans le pays qui les accueille quelques temps, la liberté, l'expression politique mais aussi les idées marxistes qu'ils vont assimiler et chercher à développer dans leur pays : "Sans la France, je ne sais pas dans quelle obscurité nous serions" affirmait ainsi le théoricien Chen Duxiu

    Le 13 août 1920, soit un mois après les discours de Durzy, Cai Hesen fait part à Mao Zedong, de sa proposition de créer un parti communiste ambitieux, révolutionnaire, uni et organisé (cette lettre est consultable sur ce lien). "Mon vœux c'est que tu prépares notre Révolution d'Octobre", écrit-il à son ami : dictature du prolétariat, appui de la Russie léniniste et "aspect internationaliste" sont les jalons de ce programme politique. Il est à noter que cette idée intervient six mois avant le congrès de Tours qui voit la scission de la SFIO française et la naissance du parti communiste français. A la demande de son ami Cai, Mao, qui n'a jamais quitté la Chine, lui adresse une carte postale. Sur celle-ci, visible dans le Musée de la Chine de Montargis, le futur Grand Timonier indique son accord pour la création d'un parti communiste chinois. Un an plus tard, en juin 1921, se réunit à Shanghai le premier congrès du PCC. 

    Mais un autre personnage fait son apparition dans cette histoire. 

    Deng Xiaoping a tout juste 16 ans lorsqu'il vient lui aussi se former à Montargis. Jeune homme issu de la petite bourgeoisie de son pays, il est recruté en 1922 puis en 1923 dans l'usine Hutchinson qui retrouvera trace de son passage des décennies plus tard, sous le nom de "Teng Hi Hien". L'ouvrier est fiché comme un employé jugé peu fiable : "A refusé de travailler. Ne pas reprendre" ! (voir la photo ci-joint)

    Le voyage en France du futur dignitaire marque profondément ce jeune homme gai et agréable, qui est passé par la Normandie avant de découvrir la misère des ouvriers du Creusot. Au cours de ses études à Montargis, il fait une autre rencontre décisive : celle de Zhou Enlai, conquis lui aussi par les idées marxistes... mais aussi grand amateur de tennis.   

    Pendant le séjour de Deng,  Cai Hesen et Xiang Jingyu sont retournés en Chine afin de se lancer dans la lutte de leurs idées. Mais ils sont arrêtés, torturés et exécutés en 1928 et 1931.

    La suite de l'aventure communiste chinoise appartient à quelques-uns de ces jeunes Chinois ambitieux et profondément marqués par leur séjour dans cette petite ville du Loiret : Deng Xiaoping, le futur dirigeant de la Chine moderne, Chen Yi, ministre des affaire étrangères sous le Général de Gaulle ou Li Fuchun, qui deviendra vice-premier ministre et théoricien de la Chine moderne. 

    Des décennies plus tard, on se souviendra du passage de ces hommes et de ces femmes à Montargis...

    Suite et fin ici...

  • Montargis la Chinoise [1] : Naissance d'une idée

    Pourquoi Montargis est-elle la plus chinoise des villes françaises, au point d'être reconnue jusqu'à Pékin ?

    Un visiteur qui débarque dans cette modeste sous-préfecture du Loiret pourrait être étonné par des plaques touristiques en français et en mandarin, disséminés dans différents endroits de la ville, balisant un parcours touristique consacré à ce pays lointain. D'autres traces d'une influence chinoises existent : une place Deng Xiaping en face de la gare SNCF de la ville, la statue en bronze de Li Xiao Chao représentant  "L'enseignant, dit Monsieur le Maître" sur la place du Patis, le petit musée de la Chine inauguré en septembre dernier par Liu Yandong, vice-présidente de la République populaire de Chine et numéro trois du régime, sans compter le nouvel an chinois, qui est fêté ce week-end en grande pompe. Dans son édition du 16 au 22 octobre 2015, L'Humanité Dimanche soulignait, de son côté, la tradition déjà ancienne de l'apprentissage du mandarin à Montargis, plaçant cette ville en tête dans la Région Centre  pour l'apprentissage de cette langue. L'association locale "Amitié Chine-Montargis" est une preuve supplémentaire de liens hors du commun qui relient Montargis et un pays de plus de 1,3 milliards d'habitants. Mais, au fait, pourquoi cet engouement pour ce pays lointain, dans une ville où les communautés asiatiques se montrent plutôt discrètes ?

    L'histoire de cette relation est si exceptionnelle que le bloggeur – lui-même montargois – ne pouvait pas ne pas y consacrer plusieurs articles.

    Nous sommes au début du XXe siècle. À l'époque, dans la Chine impériale, pauvre et aux structures sociales archaïques ("médiévales", diraient certains), Li Shizeng, issu de la grande bourgeoisie chinoise, se rend en France afin d'y étudier l'agronomie. Paris est son premier port d'attache mais le jeune homme, de santé fragile, décide de s'en éloigner et de s'installer à la campagne.

    Il choisit Montargis, peu éloignée de la capitale en raison du chemin de fer et qui offre en plus l'avantage d'abriter l'École Pratique d'Agriculture du Chesnoy (l'actuel Lycée agricole du Chesnoy). C'est dans cet environnement propice que Li Shizeng créé à partir de 1912, grâce à la municipalité locale, mais aussi avec le soutien de son ami Sun Yat-sen, premier Président élu en 1912, un système révolutionnaire, le Mouvement Travail-Etudes.

    Novateur et avant-gardiste, le philanthrope voit dans cette organisation le moyen de former et d'éduquer de jeunes intellectuels de son pays. La France est en pointe dans l'agronomie, raison pour laquelle plusieurs centaines de Chinois rejoignent ce pays et la petite ville du Loiret. Tout est organisé pour favoriser l'intégration de ces jeunes gens, hommes et femmes (cette mixité est déjà en soi une vraie révolution !) : accueils dans les écoles de la région, hébergements chez l'habitant, recrutements dans des entreprises et des usines locales (dont Hutchinson). Certains ne repartiront d'ailleurs jamais.

    Mais ce qui n'aurait pu être qu'une histoire locale rejoint la grande Histoire. Une grande Histoire dont les protagonistes se nomment Cai Hesen, Xiang Jingyu, Chen Yi, Li Weihan, Li Fuchun, Zhou Enlai ou Deng Xiaoping et dont l'objet est la naissance du parti communiste chinois à Montargis...

    La suite ici...

  • Père Noël, levez-vous !

    montargis,noël,café philo,loiretEn ce 25 décembre, je vous adresse un joyeux Noël. 

    C'est aussi pour moi l'occasion de revenir sur un sujet qui avait débattu en 2011 dans le cadre du café philosophique de Montargis : "Le père Noël est-il un imposteur ?"

    La figure sage et consensuelle du Père Noël est sans aucun doute plus complexe que l'on ne le pense. D'ailleurs, pour évoquer la figure légendaire de ce qui reste l'un des grands mythes de notre époque, Claude Lévi-Strauss nous donne un éclairage sociologique passionnant. Je vous invite à vous reporter à ce site Internet qui propose de revenir sur un texte de Lévi-Strauss "Ils ont brûlé le Père Noël". Sur un simple fait divers survenu en 1951 (un mannequin du Père Noël avait été brûlé sur le parvis de la cathédrale de Dijon), l'ethnologue s'intéresse à cette créature rituelle, à l'histoire complexe.

    Je parlais de Montargis : ses habitants se souviennent d'une vive polémique au sujet d'un père Noël : le "consensuel" personnage aimé des enfants avait été interdit dans l'enceinte d'une école (Le Père Noël passera bien à Montargis). Le buzz avait été si important que cette rumeur est revenue en force cette année, notamment sur les réseaux sociaux. Rumeur infondée : le Père Noël semble avoir été blanchi des accusations portées contre lui !

    Le père Noël est-il un imposteur ?
    Ils ont brûlé le Père Noël !
    Le Père Noël passera bien à Montargis
    Le retour de la rumeur sur le père Noël de Montargis

  • Toute une histoire pour ça !

    dieu.jpgIl y a quelques semaines, je faisais un coup de projecteur sur le blog Raconte-moi l’HistoireVoir mon article ici à ce sujet.

    Ce site irrévérencieux, mais non moins sérieux, rassemble mille et un sujets et événements de la grande et de la petite Histoire. Il est l’œuvre d’une jeune bloggeuse, Marine, qui affirme aimer "beaucoup l'histoire et encore plus dire des gros-mots" (sic). Raconte-moi l’Histoire permet de rendre des sujets comme la classe ouvrière au XIXe siècle, le procès des templiers ou l’histoire de la psychiatrie beaucoup moins ennuyeux que beaucoup de cours scolaires.

    Ce blog ne semble pas faire que des adeptes car, au détour d’une publication Facebook, j’apprends que des militants catholiques intégristes ont "attaqué" ce site, l’accusant de jeter l’opprobre sur les dérives peu "chrétiennes" du clergé. Dit autrement, et de manière plus fleurie, par l’auteur : "On veut que j'arrête de parler de bite, de curés, de putes et d'Église catholique dans une même phrase."

    Autant dire que face à de tels dénigrements, mon blog apporte tout son soutien à Raconte-moi l’Histoire.  Le dernier post paru, "Le curé, La putain, et le vœu de chasteté", n’aurait-il pas mis le feu aux poudres en dénonçant l’hypocrisie religieuse ? La jeune bloggeuse fait mouche lorsqu’elle présente son article ainsi : "C’est beau l’éthique sexuelle chez les curés, d’ailleurs les moines bouddhistes aussi sont chastes, enfin, en théorie. Un petit coït rapide avec une pénitente, une religieuse, ou une fille publique, ça ne fait de mal à personne, hein. Si personne le sait, ça ne compte pas, si ? Dieu est pardon". Comme ça, c’est dit !

    Conclusion de ces attaques, voulant jeter un voile pudique sur des pratiques peu catholiques : allez, Marine, ne te décourage pas et continue ton blog avec la même irrévérence, la même liberté et le même sérieux !

    Raconte-moi L’Histoire

  • Gen d'Hiroshima, gens d'Hiroshima

    Gen d'Hiroshima, chef d'œuvre de la bande dessinée, fait partie de ces livres que l'on n'oublie pas.

    Cette série d'une dizaine de tomes, célèbre et adulée au Japon dès sa sortie en 1973, a connu une existence plus tardive en Occident ; cependant, son influence est certaine : Art Spiegelmann, l'auteur de Mauss, bande dessinée majeure sur la Shoah, explique dans la préface de Gens d'Hiroshima toute l'importance de ce manga. Un manga qui, comme son titre l'indique, aborde une autre des grandes tueries de la seconde guerre mondiale : le bombardement nucléaire d'Hiroshima.

    Le premier tome de cette bande dessinée autobiographique déroule sur plus de 250 pages la survie d'une modeste famille de cette région du Japon, relativement préservée jusqu'en 1945 par les bombardements. Dans ce pays en guerre où la dévotion à l'Empereur et à à la grandeur de la nation, la population souffre mais doute également. La famille de du jeune Gen survit difficilement aux privations et aux obligations martiales, d'autant plus que le père, homme courageux et au caractère bien trempé, s'avère un pacifiste convaincu. La majeure partie de ce premier volume suit les petits et les grands faits de cette famille soudée : un père se battant pour ses idées dans un Japon rigoriste et militariste, une mère enceinte et épuisée par les privations et les enfants - Gen et ses frères et sœurs. Au milieu de la petite histoire, des focus sur la grande histoire – la guerre du Pacifique et les préparatifs des bombardements nucléaires – nous rappellent qu'un terrible drame va se jouer.

    Les vingt dernières pages de ce tome sont proprement hallucinantes. Le lecteur entre au cœur du bombardement nucléaire tel qu'il a été vécu par les victimes. L'auteur, qui a vécu lui-même cet événement (Keiji Nakazawa, est mort d'un cancer fin 2012), dévoile la réalité crue des ravages de l'arme nucléaire, transformant la ville paisible d'Hiroshima en une zone digne des pires films d'horreur. Les dernières pages de ce livre n'assènent aucun message : ils giflent le lecteur en montrant la réalité crue et insoutenable de la bombe A sur des victimes prises au piège.

    Terrible chef d'œuvre ! Inoubliable.

    Keiji Nakazawa, Gen d'Hiroshima, Ed. Vertige Graphique, 2003, 274 p.

     
    Gen d'hiroshima par cinemasian

  • Une histoire, une histoire, une histoire...

    Raconte_moi_ l'histoire.jpgL'Histoire n'est pas forcément cette matière ennuyeuse, bourrée de dates, de tableaux généalogiques, de cartes incompréhensibles ou de batailles en veux-tu en voilà ! La preuve ? Le blog Raconte-moi l'histoire, intelligent et impertinent, qui nous propose de visiter les périodes de notre Histoire, de l'Antiquité au XIXème siècle. 

    Ce site est l'oeuvre d'une jeune blogueuse, Marine, qui affirme aimer "beaucoup l'histoire et encore plus dire des gros-mots" (sic). Depuis 2013, elle choisit de nous parler de personnages, de faits de civilisations et d'événements aussi variés que le roi Dagobert, la peine de mort, Frédégonde (la serial killer mérovingienne), le procès de Fouquet ou encore la vie ouvrière au XIXe siècle. 

    Ici, pas de chroniques longues comme le bras et ennuyeuses mais des articles virevoltants aux sujets souvent légers, truffés de bons mots, de digressions et surtout documentés et illustrés avec soin (un certain nombre d'illustrations sont l'oeuvre de l'auteur elle-même).

    L'internaute, tutoyé tout au long de ces chroniques, a la sensation de ne pas être dans un cours mais plutôt d'écouter une amie lui parler simplement de la grande Histoire et des petites histoires. Le tout dans un style moderne qui ne lésine pas sur les expressions populaires - et djeuns. 

    Voici un petit extrait représentatif pour vous mettre l'eau à la bouche (billet "On rigole pas chez les Romains : peine de mort et autres châtiments qui font mal") :

    "Le culeus, imagine, t’as tué ton père, ou ta mère, ou les deux. Déjà, c’est pas bien malin, t’avais qu’à te barrer de la maison s’ils te gonflaient. Mais c’est trop tard, et en plus tu te fais pécho. On va te punir. Dans un premier temps tu es fouetté jusqu’au sang sur la place publique, t’en ressors bien amoché mais t’es encore en vie, c’était plutôt pour le spectacle. Le sang qui jaillit de ton corps à chaque coup de fouet, moi perso, j’adore..." 

    C'est ton blog que l'on adore, Marine !

    http://www.racontemoilhistoire.com