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Sortie en 2001, La Vie sexuelle de Catherine M, avait connu un succès international. Jour de Souffrance est la continuité de cette "autobiographie sexuelle" (l'expression est de l'auteur) ainsi q'un éclairage nouveau sur cette oeuvre scandaleuse.
Catherine Millet raconte cette fois avec pudeur et justesse (l'antithèse de son premier récit !) comment, malgré sa vie sexuelle tumultueuse et à la liberté assumée, elle a dû affronter un sentiment qu'elle pensait jusqu'alors impossible : la jalousie.
Ce récit est une introspection particulièrement sensible et qui vaut aussi par le dernier chapitre qui revient sur le grand succès de Catherine Millet, La Vie sexuelle de Catherine M.
Il faut bien sûr commencer par parler du livret et du texte de cette incroyable œuvre de Samuel Beckett, Words and Music. L’auteur irlando-français l’a écrit en 1962 pour une œuvre radiophonique de la BBC. Une création contemporaine dédiée donc d’abord à l’écoute et pas forcément à la scène. C’est John Stewart Beckett, dramaturge et cousin de l’écrivain, qui est chargé de la partition. Vingt ans plus tard, Beckett demande à Morton Feldman une nouvelle partition pour ce texte singulier. Très récemment, le compositeur Pedro García Velásquez vient proposer au texte sa propre version musicale, en livrant une nouvelle partition. Alphonse Cemin est à la direction musicale pour cette nouvelle revisite.
Samuel Beckett est une figure majeure de la littérature française, enseigné à l’école, joué des milliers de fois, aimé également, et même beaucoup en France. Le groupe Le Balcon propose ici une de ses œuvres où, comme le nom Words and Music l’indique, les mots ont toute leur importance. Bien qu’il ait écrit cet opus vocal en anglais, les éditions B.records proposent une traduction en français. Voilà qui est parfait pour un auditeur non-anglophone de découvrir ce dialogue.
Dans un étrange pays, très Shakespearien et que le Roi Lear aurait pu habiter, un vieil homme, Croak, s’adresse à deux interlocuteurs qu’il nomme Jo et Bob. Jo personnifie les paroles et Bob la musique. Les Paroles, la Musique et le vieil homme évoquent ensemble le temps qui passe, son absurdité, mais aussi l’amour. "L’amour est de toutes les passions la passion la plus puissante et à vrai dire il n’est nulle passion plus puissante que la passion de l’amour".
Jo personnifie les paroles et Bob la musique
Des personnages non identifiés dans un monde à la fois familier et irréel. Des dialogues a priori décousus. Des interrogations sur le sens de la vie et sur la souffrance. Mais également ici une plongée dans les questions sur la création. L’auditeur retrouve dans Words and Music l’essence même de l’œuvre de Samuel Beckett, un phare essentiel de la littérature du XXe siècle.
Pour appuyer les mots de l’écrivain, il fallait une musique à sa hauteur, qui vienne appuyer sans trahir ni recouvrir les mots de l’auteur. Le jeune compositeur franco-colombien Pedro García-Velásquez s’est attelé à cette tâche avec enthousiasme, y apportant son sens de la modernité.
Comment revisiter en musique une pièce vieille de plus de 60 ans, écrite par un écrivain majeur ? Pedro García-Velásquez choisit la veine résolument contemporaine, utilisant autant un orchestre de chambre traditionnel que de la musique électronique. Cela donne au final une expressivité et un expressionnisme d’autant plus fort que le texte est servi par les récitatifs graves, puissants et dramatiques de Jean-Claude Frissung et Johann Leysen.
L’album est d’ailleurs dédié à l’acteur belge, décédé le 30 mars 2023.
A noter enfin que cette création de Pedro García-Velásquez a remporté le Prix de la Création musicale du Syndicat de la Critique.
Ce grand roman de Marguerite Duras de 1964 débute par un abandon : Une nuit de bal, Lola Valérie Stein voit son fiancé Michael Richardon danser puis partir avec une autre femme (Anne-Marie Stretter, personnage récurrent dans l'œuvre de Duras). Suite à ce "ravissement", Lol V. Stein sombre dans une grande déprime que 10 ans de mariage ne parviennent pas à effacer. Mais Lola revient un jour sur les lieux de ce drame intime. Elle retrouve Tatiana, une amie d'enfance qui avait été témoin du ravissement ainsi qu'un homme, Jacques (le narrateur).
Grâce à eux (que ce soit volontairement ou non), Lola Valérie Stein écrit la dernière page de son drame amoureux. Il paraît que ce livre est lu et commenté par beaucoup de psychanalystes (dont Jacques Lacan) qui voient dans Le Ravissement de Lol V. Stein un admirable livre sur la souffrance intérieure et les multiples nœuds pour en guérir.
De nombreuses études et commentaires ont été faits sur ce roman (tapez le titre de ce livre dans un moteur de recherche et vous verrez...) qui ne peut pas laisser insensible : il peut agacer, ennuyer ou au contraire passionner. Pour ma part, j'ai vraiment adhéré à ce livre malgré la difficulté de certains passages.
A noter que Marguerite Duras a participé puis s'est désolidarisée du Nouveau Roman, ce mouvement littéraire qui, à partir des années 1940, a contesté le roman traditionnel. En tout cas, on retrouve la voix et le style inimitables de Marguerite Duras : phrases courtes et sèches, rythme lancinant, mots répétés et comme ressassés, passages elliptiques. Un très grand chef-d'œuvre.
Cette aventure de Son Altesse Sérénissime Malko Linge date de 2010. Pourquoi ne pas y goutter.
Cette fois, l'espion de la CIA court après les assassins de Rafic Hariri, le premier ministre libanais mort en 2005.
Bon, évidemment, ce n'est pas de la grande littérature ! Seulement, cette fois, la célèbre collection de Gérard de Villiers a touché une corde sensible puisque ce modeste roman d'espionnage a été interdit au Liban et en Syrie, pays qui est ouvertement mis en cause. Pas moins.
Pour le reste, rien ne manque dans ce livre : une histoire plutôt bien documentée, des crimes, du suspense et des femmes fatales très, très peu farouches. Bref, tous les ingrédients pour un bon SAS.
La Poste émet à partir du 12 juin un timbre à l’effigie de Pierre Loti, né le 14 janvier 1850 à Rochefort. L’écrivain, auteur de Pêcheur d’Islande, mais aussi dessinateur, photographe et officier de marine français est mis à l’honneur cette année à l’occasion du centenaire de sa disparition.
Marin, cet homme petit et athlétique est aussi l’arpenteur des lointains : ses récits de voyage, ses recueils de souvenirs n’ont rien à envier à ses romans. Polynésie, Japon, Chine, Cambodge, Inde, Perse, Empire ottoman, Égypte, Maroc ou encore Sénégal : Loti va et vient comme peu l’ont fait avant lui. C’est l’une des premières célébrités mondiales, à l’instar de son amie Sarah Bernhardt.
Il faut souligner à quel point cet homme du XIXe et du début du XXe siècle a été en avance sur son époque. Alors que la France se gargarise de ses conquêtes en Afrique ou en Asie, ll dénonce les guerres d’agression, critique la colonisation, protège l’environnement, défend les identités ethniques ou régionales. Moderne et conservateur, il personnifie assurément les contradictions de la Belle Époque. Pierre Loti s’éteint le 10 juin 1923 à Hendaye, au Pays basque, sa terre d’élection.
Par sa demande de création d’un timbre commémorant le centenaire de son décès en 2023, L'association internationale des Amis de Pierre Loti a souhaité assurer un rayonnement contemporain à cet auteur intemporel.
Voilà un petit livre plutôt bien fait pour entrer dans la philosophie en douceur. Ce petit manuel ne rentre pas dans des grands concepts philosophiques mais, avec pas mal de fraîcheur et beaucoup de clins d'œil, il donne quelques outils pour nous faire cogiter.
Au passage, de grands penseurs sont appelés à la rescousse ainsi que quelques-unes des plus célèbres citations philosophiques : "Je pense donc je suis" de Descartes, "Connais-toi toi-même" de Socrate (concept plus complexe qu'on ne le croit), "Dieu est mort" de Nietzsche, etc.
Le moins que l’on puisse dire est que Noé Margolis sait accrocher le lecteur et parler à sa corde sensible. Le premier chapitre de son roman Ça fera des souvenirs (éditions Michalon) interpelle le lecteur directement tout autant qu’il l’interroge : "Ce n’est pas seulement l’histoire de ce livre que vous découvrez. C’est votre propre histoire. Vous nagez dans le temps, vous replongez en vous-même pour vous rappeler ce qui a eu lieu, ce qui n’a pas eu lieu, ce qui aurait pu avoir lieu".
Mais de quelle histoire parlons-nous au juste ? Il s’agit de celle de Darius, un adolescent de dix-sept ans, un peu dégingandé du haut de son mètre quatre-vingt deux, pas forcément bien dans sa vie ("Grandir à la bonne place"), sans être forcément paumé, un peu en manque de reconnaissance dans sa famille, et avec les filles, ce n’est pas forcément très simple.
Lorsque le roman commence, Darius assiste, avec sa famille, aux funérailles d’Alain, un ami de son père qui a compté pour l’adolescent. Un soutien mais aussi un jalon important dans sa jeune vie. Alors que la cérémonie se déroule au cimetière du Père-Lachaise, avec son lot de discours et de musique (l’auteure en fait d’ailleurs le métronome de son roman), Darius se replonge dans son passé, au sujet duquel Alain disait : "Au moins, ça te fera des souvenirs".
Ce ne sont pas les parents ni même le frère de Darius qui forment le cœur de ses réflexions, mais trois personnes qu’il a connues, trois adultes, à la fois exemplaires, édifiants et bouleversants. Ils forment l’armature des souvenirs du jeune homme, appelé à grandir et vieillir.
Ça fera des souvenirs est un des plus beaux livres écrits sur la manière d’être adulte dans notre société moderne
Ça fera des souvenirs est une très jolie surprise littéraire de ce printemps. En dépit de ce que pourrait penser de ce récit plein de mélancolie, on en sort bizarrement ragaillardi, après avoir parcouru les quelques dizaines d’années du personnage principal, de l’adolescence jusqu’au mitan de sa vie.
La compassion que le lecteur a pour Darius vient paradoxalement de sa simplicité, de ses failles et de ses défauts. Les premières idylles, les amours déçus ("Désir ou amour, tu le sauras un jour", cite l'auteure qui reprend les paroles d'une chanson d'Axelle Red), la rencontre avec un lycéen venu d’une famille huppée – où l’on découvre que les concerts des Enfoirés peuvent prendre une tournure métaphysique ! –, les rêves déçus (la danse) ou au contraire en construction (une librairie) ou la rencontre avec la femme de sa vie deviennent des aventures en soi.
Mais là où Noé Margolis se montre sans doute la plus clairvoyante est dans sa manière de mettre la mort au centre du récit – car trois enterrements ponctuent le récit – et surtout de faire de trois adultes, en âges plus ou moins avancés, à la fois des références (Alain), des exemples bouleversants (Charline) et des personnages mystérieux aux lourds secrets (Gilbert).
La vie, l’amitié, les rêves, le temps passé qui ne reviendra plus et, finalement, les souvenirs. Il faut ajouter à cela l’amour, le désir, les histoires jamais abouties (Charline et Alain) ou les souvenirs que l’on ne racontera jamais. Tels sont les thèmes du roman de Noé Margolis. Mine de rien, Ça fera des souvenirs est un des plus beaux livres écrits sur la manière d’être adulte dans notre société moderne (car le roman se déroule des années 80 à notre ère technologique), avec, comme observateur et acteur, un Darius grandissant, observant, expérimentant et vivant. Non sans mélancolie et nostalgie, car, comme le dit l’auteure : "Vieillir, c’est s’éloigner de soin époque, comme on s’éloigne du rivage".
Fatherland est une uchronie, c'est-à-dire une fiction inventant des événements historiques passés.
Dans ce roman du célèbre auteur de thriller britannique, nous sommes à Berlin en 1964. L'Allemagne a gagné la seconde guerre mondiale et les Etats-Unis, gouvernés par un Kennedy (Joseph !), cherchent un modus vivendi avec Adolf Hitler qui s'apprête à fêter ses 75 ans. L'Europe est unifiée, mais sous l'égide de l'Allemagne hitlérienne. Voilà pour le décor très impressionnant de ce roman.
Dans un Berlin méconnaissable (reconstruit par l'architecte nazi Speer), un policier est chargé d'identifier le cadavre d'un homme. Son enquête le mène rapidement vers des révélations fracassantes. Les masques tombent les uns après les autres.
Un excellent thriller qui se lit d'une traite. Et qui n’est pas sans rappeler Le Maître du Haut-Château.