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Avec ces faux-airs de Catherine du duo Catherine et Liliane, ne nous y trompons pas : Julien de Bomérani est un artiste à ne pas prendre à la légère.
Fort d’une solide réputation de DJ dans le sud de la France (il peut se vanter d’avoir sa propre soirée, "Folle de rage"), l’artiste sort son nouveau titre, Proud & Loud. Parfait pour ces soirées estivales et chaudes.
Pour ce single, Julien de Bonérami s’est offert la collaboration de Maggie (saison 11 de The Voice), impeccable et envoûtante grâce à sa voix veloutée et puissante. Ils interprètent, avec Proud & Loud, un vrai hymne à la célébration et à l'acceptation de soi. À découvrir absolument.
Coffees & Cigarettes est de retour avec son troisième album Roller Coaster, un opus autant urbain, pop-rock qu’électro, à l’image du premier morceau en forme d’introduction, "Intropode". Pour ce titre, MC Jesse - Renaud Druel, dans le civil – lorgne du côté de Kraftwerk pour un court voyage dans les années 70. La suite de l’album – pas moins de 16 titres – est à l’avenant, aventureux tout en se voulant plus urbain.
Le rap domine en effet Roller Coaster, à commencer par le morceau "Coffees alchimie, un flow qui est en forme d’autoréférence : "Pour créer la potion magique et vénère que tu vénérerais / Si je composais mes chansons en tubes à essais".
Dans une facture plus courante au rap contemporain, "J’flippe", avec ce son hip-hop se mêlant à l’électro, a des accents sombres, sinon désespérés sur le thème de la perdition sociale : "Je flippe / Je prends chaque choix comme un deuil / Je flippe / Que la musique ne soit qu'un tombeau qu'un linceul / J'flippe / Que je finisse un jour par dépit, ras-le-bol / Par lâcher prise et par fermer ma gueule".
Moins neurasthénique, "Colline de jeux" surprend par sa composition mêlant la world music et électro, dans un instrumental presque onirique. Ce titre annonce le suivant, "Le syndrome de Peter Pan", résolument urbain, avec cette touche poétique et lumineuse placée sous les auspices de la fin de l’enfance et du temps qui passe. À partir de souvenirs de gosses, il y est question de cette envie de de pas devenir adulte et de garder son âme innocente : "Je veux pas vieillir, je veux garder mon âme d'enfant / Je me suis perdu dans le Labyrinthe de Pan / Nostalgie qui fait mal et du bien en même temps". Et si la solution venait du dernier morceau de l’album, "Coffees Resistance" ?
Hop'n'roll
Après l’extrait "Y’a quelqu’un", un court morceau électro et "hop'n'roll", il est de nouveau question d’enfance dans l’étonnant "Croquemitaine" dans lequel Coffee & Cigarettes parle des peurs de l’enfance et des cauchemars : "C'est moi le Père Fouettard sorti tout droit de tes cauchemars / Moi c'est MC Jesse et je rappe comme le croquemitaine / L'ambiance est cauchemardesque".
Roller Coaster devient à partir de là un concept album mêlant peurs, tourments de l’artiste, monstres et affres de la création – ou "affreux de la création", aurait dit Serge Gainsbourg. Le titre "C’Koa", mêle charleston et rap dans une fantaisie assez incroyable sur le mystère de la création : "Comment qu'il compose ? / Comment qu'il écrit ? / C'est quoi ces vidéos ? / C'est qui MC Jesse ? Mais Coffees, c'est quoi ? / Coffees c'est quoi ? / C'est qui Douce, c'est qui Jesse Juice ?"
Suit "Coselofo", ce monstre invisible porteur de nos cauchemars des obsessions mais aussi des inspirations de l’artiste – qui pourrait être les drogues sous toutes leurs formes : "Le monstre suprême, le boss, l'ultime cauchemar / Viens gangrener mes mots et toutes les notes de ma guitare". Cette présence aliénante et dangereuse peut mener l’artiste à sa perte : "[Il] Dévore l'imagination envoie l'art à l'échafaud". Le vaincre devient vital.
"Arthropode" continue cette plongée cauchemardesque et aliénante : "L'Arthropode est là, il scanne ton esprit, entre en toi / Il te prive de tes cinq sens". Mais qui est cette bête digne de l’ennemi de Sigourney Weaver ? La dépression ? Les drogues ? Et "comment venir à bout de cette putain de bestiole / Le diagnostic est sévère, l'espoir de vaincre est minime / Et je sens bien que rien ne s'arrange, que tout s'envenime / Dans la lutte, on garde toujours la hargne et le sourire aux lèvres / On se souvient de nous et nos souvenirs sont des trêves".
"Journal de bord" vient conclure ce titre qui semble, sinon autobiographique, du moins personnel : "Tôt ou tard la Coffees tribu le savait sans l’accepter / L’arthroprode finirait par gagner / Ce n’était qu’une question de temps / il fallait en profiter de ce temps qui nous était confié / Et un matin il gagna il nous l’enleva il l’emporta / Alors Jesse Juice disparut à jamais avec elle aussi / Laissant désormais place sombre à MC Jesse".
Roller Coaster s’avère bien plus intime qu’il n’y paraît, comme le montre encore "Emmène-moi", un morceau de slam à la première personne en forme de confidence, osant l’optimisme dans ces dernières paroles. Il y a encore de l’autobiographie avec "Full HD", une histoire d’amour qui transportera aisément l’auditeur.
Plus joyeux, le titre "Roller Coaster", qui donne son titre à l’album, se pique d’inspirations balkaniques pour un morceau coloré se déroulant dans un parc d’attraction, celui de la vie à en croire MC Jesse, et avec toujours l’enfance en filigrane : "Embarqués tous les deux dans le train fantôme / Face à ton sourire je redeviens un môme".
Voilà un opus aventureux à coup sûr, à l’instar du "Journal de bord", puisant son inspiration dans la SF et les souvenirs de space-operas, ou encore l’étonnant "02/01/19", mixant musique de chambre et hip-hop, audace une audace rarement entendue. Audace : le mot est lâché, définitivement.
Derrière MPL, se cachent cinq bonhommes : Julien Abitbol, Cédric Bouteiller, Arthur Dagallier, Andreas Radwan et Manuel Rouzier.
Dans un clip bourré d’humour de Jacques Pinault, le groupe propose un de ces petits trésors mêlant l’impertinence, l’innocence et beaucoup d’esprit. Sur une musique enlevée, MPL propose son dernier single, "Bonhommes", parlant aussi bien d’enfance, des rêves de gamins mais aussi d’éducation stéréotypée : "On serait des bonhommes / On serait des durs / On en ferait des tonnes / Pour être bien sûrs".
Mais où est la tendresse, bordel, se demandent en substance les cinq garçons ? "Nos idoles de jeunesse ne nous font plus rêver", constatent-ils. Avec ce titre, nul doute que les musiciens ont un peu retrouvé de leur naïveté et leur fragilité de gamin. Non, vraiment, leur clip est à regarder autant qu’à écouter.
On avait déjà parlé du groupe Edgär à l’occasion de leur tout premier EP, Persona. C’était il y a cinq ans, déjà. Revoilà le duo amiénois dans leur album long, Secret. Nous avions parlé de Persona comme un EP proposant de "l’électro à visage humain". Son nouvel opus a un parfum eighties, comme le montre le premier titre "Nuit" qui fleure bon la new-wave : boîte à rythme, nappes de synthés et univers noctambule ("Nuit", "Réveille-moi"), sans pour autant renier l’électro qui leur va tout aussi bien.
Sortez les Perfectos et les maquillages gothiques : voilà un gros coup de voyage dans le temps avec un album, mêlant le français et l’anglais, qui ne goûte pas son plaisir !
Pour "Réveille-moi", le groupe se fait onirique et romantique – mais d’un romantisme noir. Plutôt que mentionner le groupe Cure, avançons-nous en considérant que le "paradis" mentionné dans ce morceau peut être vu comme un clin d’œil à Michel Berger.
Sortez les Perfectos et les maquillages gothiques
"Me voudras-tu ?", tout autant inspiré par le regretté chanteur de "Seras-tu là ?" a et esprit très pop à la Partenaire Particulier. Les courbes enflammés, la nuit à deux, les draps, la fièvre : il est question d’une histoire d’amour ("Moi aussi je te veux"), avec son lot de questions ("Me voudras-tu encore de moi ?") mais aussi de certitudes ("Les erreurs de la nuit n’existent pas"). Tout aussi mélancolique, "Secret" propose une pop plus traditionnelle, ballade mélancolique, "Laisse ton chagrin voguer / Vers les rivages brûlés / Avant de devenir fou" Une séparation.
Outre la délicate ballade folk "Dead end", il faut s’arrêter sur "Incendies", un extrait qui se veut romantique dans le joli portrait d’une femme aimée : "Elle se nourrit de mes peines / Quand je la serre contre moi / Elle délie toutes mes haines / Me délivre même de toi". L’amour est un incendie autant qu’une "harmonie", qui reste malgré tout fragile : "J’ai rompu le lien à jamais". On peut tout autant être séduit par "The lights", lumineux comme l’indique le titre qui est un formidable appel à la fête et à la vie.
Retour à la new-wave avec "Sable blanc". Ce morceau est digne de devenir un vrai hit pour cet été : "Viens explorer ce t autre monde et animons nos ondes de songes cachés", interprète le duo, dans une chanson qui est une invite à l’insouciance et à la joie de vivre.
Outre une reprise du classique de Simon & Garfunkel, "The Sound Of Silence", l’auditeur s’arrêtera sur le titre "Dictators", derrière lequel on pourra voir en écho les pitreries dégueulasses de Poutine en Ukraine. Aussi noir que de la new-wave et aux propos engagés et bienvenus : "I’m on another side of the moon / While dictators die".
Andréel est un musicien à suivre, aussi bizarre soit-il. Son univers immédiatement attachant est enveloppé par un style et une orchestration a priori traditionnel : instruments acoustiques, facture jazzy. Bref, une chanson française qui revendique ses origines, tout autant qu’elle affirme une singularité et une forte personnalité. La preuve avec Mr Bizarre, son dernier opus, sorti un an aprèsTu m’apprends.
Pour autant, le "Monsieur Bizarre" dont il est question est avant tout une autre personne qu’Andréel lui-même : le titre éponyme entend faire le portrait d’un homme singulier, silencieux mais qui sait fait rire les enfants. M. Bizarre est un clown autant qu’un poète facétieux sachant "parler la langue des oiseaux".
À côté de ce portrait plein de mélancolie, Andréel se fait plus incisif dans "Marianne" qui se veut le constat d’une histoire d’amour remplie d’incompréhensions, et finalement vaine : "Laisse-moi te montrer comment tu es belle / Quand tu ne laisses pas couler le sang de la haine".
Si Andréel se présente sur la pochette de l’album tel un clown triste. Il est vrai que la sensibilité de l’artiste est patente, lorsque, par exemple, dans le morceau "Sans toi", le chanteur évoque sa maman sur un air de tango. Le chanteur capte avec émotion l’auditeur lorsque, jeune papa, il regarde avec amour en direction de sa mère, comme un modèle autant qu’un soutien et un amour qu’il voudrait retrouver. "Je gravirai la montagne qui me sépare du monde / Je retrouverai qui je suis… / Nous nous aimerons plus fort".
Influences jazz qui nous renvoie aux premiers albums de Gainsbourg, période "Black trombone"
Andréel touche énormément avec cet album intime, pour ne pas dire introspectif. La preuve encore avec "Jeune et ivre", un titre plus pop : Andréel se fait sombre dans ce portrait d’un homme à la dérive, abandonné et seul. Il faut y lire un regret de l’enfance et de l’insouciance lorsqu’il chante ainsi : "Je voudrais encore vivre dans ce pays de jeux / Où j’étais jeune et ivre / Où j’étais heureux". En d’autres termes, l’artiste se sent "étranger" dans un monde violent, obscur et hypocrite qui n’est pas fait pour lui.
Dans Tu m'apprends, son précédent album, Andréel s’était entouré de chanteuses et souvent comédiennes - Natacha Régnier, Amandine Bourgeois, Lucile Chriqui et Judith Chemla. Le voici cette fois avec Agathe Bonitzer dans "Quelle magie de vivre", une jolie ballade jazzy en duo dans un talk-over amoureux et romantique : "Donne-moi tes mots / un sourire, une phrase, un regard… Pour vider ta douleur, il faut que tu sois vrai. Les formules empruntées me sont insupportables".
Et si derrière Andréel ne se cachait pas l’influence du Serge Gainsbourg des premières années ? La résonance de l’"homme à tête de chou" apparaît évidente dans "La saxophoniste", avec ses influences jazz qui nous renvoie aux premiers albums de Gainsbourg, période "Black trombone".
La sensibilité, la sensualité et la fausse légèreté sont tout autant des marqueurs pour cet autre titre, "Où l’on s’est rencontrés", une ballade écrite par Isild Le Besco dans laquelle l’attente se fait désir, en attendant de se revoir en tête-à-tête.
Dans la même veine, "Ce n’est pas grave", peut s’écouter comme une chanson sur un départ et une séparation, aux sons joliment succédanés ("Ce n’est pas grave de partir / Mais c’est dommage sans rien dire"). C’est aussi le joli portrait d’une femme que l’on imagine irrésistible : "Votre rire traversait Paris", dit-il avec émotion. Andréel s’avère doué dans sa manière de faire de la souffrance des mélodies légères et faussement insouciantes.
Après le plus rock et plus incisif "Têtes de cons", "Votre bouche » vient conclure en couleur l’album d’un clown blanc, sur des rythmiques et des sons world music. Andréel y parle d’une femme, d’une histoire d’amour avec elle, et conclut par un constat amer : "C’était cuit / Je pris ma liberté".
But de couple propose avec "Première fois" un titre qui va ravir, enthousiasmer et faire fondre des milliers de couples, jeunes et moins jeunes.
Pour son dernier single, But de couple (740 000 abonnés sur Instagram et 100 000 vues par story en moyenne) a décidé de s’entourer d’autres artistes pour une compilation autour de l’amour.
Pour le titre "Première fois", il s’est entouré de Guard et Jovan pour un morceau à la fois délicat et sensuel : "Ce soir on va le faire pour la première fois / Ce soir tu veux le faire pour la première fois".
Quatre œuvres, enregistrées entre 2014 et 2021, composent Rites, l’album d’Olivier Calmel. L’opus est dominé par Rite Of Peace, une symphonie concertante créée par le chef d’orchestre Aurélien Azan Ziélinski à la Salle Pleyel.
Dire qu’Olivier Calmel se nourrit de nombre d’influences est un doux euphémisme, si l’on regarde son pedigree : jeune compositeur contemporain, Grand prix Sacem de la musique symphonique jeune compositeur, Grand Prix International Académie Charles Cros, Prix de composition au Concours national de jazz de la Défense ou Premier Prix Festival Jazz à Vannes. On peut être sûr que Rites est en soi une vraie expérience sonore, complexe, passionnante et déconcertante.
La première œuvre, Rite Of Peace est dominée par le violoncelle inspiré de Xavier Phillips auquel répond un orchestre dynamique et très cinématographique. Contemporaine, cette œuvre l’est assurément, grâce à l’ensemble Les Siècles. Cette formation unique au monde réunit des musiciens d’une nouvelle génération jouant chaque répertoire sur les instruments historiques appropriés. Dans le premier mouvement, "Atomic Peace", il y a du rythme, du mouvement et de la couleur, ce qui peut nous renvoyer au répertoire de Louis Aubert ? Il y a une sorte de puissance primaire jusqu'à une descente vers l'apaisement comme si le rite en question avait joué pleinement son rôle.
"Pieces of Human Right", plus lent et plus "ample", mahlérien en quelque sorte, est bercé par un chant orientalisant, dans un souffle romanesque pour ne pas dire romantique indéniable. Dans le troisième mouvement, intitulé "Cadence", le violoncelle de Xavier Phillips se fait obsédant. Cette partie, la plus contemporaine sans doute, est jouée avec un dynamisme tel qu’elle fait penser à une danse de sabbat.
La partie suivante, "Rite of Education", fait souffler de nouveau un vent oriental dans un mouvement qui nous entraîne dans un pays méditerranéen aux mille couleurs et parfums épicés, peut-être dans un mariage ou un souk. En tout cas la vie y palpite, non sans de sourds dangers, comme si le compositeur y mettait en musique une femme fatale.
Les sons orientaux – "égyptiens", précise le compositeur – se font plus apaisés dans "September 21". L’auditeur se trouve embarqué dans un désert tout aussi mystérieux, à telle enseigne que ces "Rites" qui peuvent être entendus comme une invitation au lâcher-prise, au voyage et à la méditation.
Qui a dit que la pop culture était incompatible avec la musique contemporaine ?
Un double concerto suit Rites Of Peace : les Rhapsodie fantasmagorique sur Docteur Jekyll et M. Hyde, pour saxophone alto, piano et orchestres à cordes. Olivier Calmel propose un opus des plus cinématographique sur les thèmes du double, de l’altérité mais aussi du mystère. Le Duo Portejoie-Lagarde et l’orchestre à cordes de la Garde républicaine, dirigé par Sébastien Billard, s’emparent avec passion et gourmandise de cet opus en quatre mouvements.
Les Rhapsodie fantasmagorique sur Docteur Jekyll et M. Hyde revêtent une facture plus classique et plus occidentale que les "Rites Of Peace". Plus pop aussi, dans le traitement d’un thème de science fiction. Le classique et le contemporain rejoignent le jazz pour ce qui pourrait bien avoir la facture d'une bande originale d'un film hollywoodien des années 50 ou 60 ("Récit").
Comme son nom l’indique, "Duel", la deuxième partie, se veut plus inquiétante en non sans suspense. On est bien là dans une démarche cinématographique, avec un orchestre symphonique des plus vivifiants. "Doute" frappe par sa sombre mélancolie. On sent l'influence de Ravel dans ce mouvement qui est le chant d'un désespoir et d’une plainte. Cette partie est contrebalancée par "Réconciliation", mêlant éclats lumineux, rythmes de jazz mais aussi de sourdes menaces.
Nous parlions de science-fiction. Elle est bien entendu présente dans la troisième œuvre de l’album, Call of Cthulhu. Rares sont les artistes à s’être mesurés à ce monument littéraire de Lovecraft. En trois parties ("Présence", "Emprise" et "Rédemption") et 6 mouvements, Olivier Calmel propose une relecture musicale de sa saga Cthulhu grâce au Quatuor A Tours de cors et à l’Orchestre de Musique des Gardiens de la Paix dirigé par Gildas Harnois.
Qui a dit que la pop culture était incompatible avec la musique contemporaine ? L’œuvre nous est présentée ainsi : "Call of Cthulhu est un concerto fantastique pour cors et orchestre qui propose de parcourir le mythe des Grands Anciens et d'approcher cette divinité plongée dans une léthargie profonde et capable d'entrer en contact avec les humains au travers de leurs rêves". Il y a un souffle primaire dans cette œuvre, jusque dans les titres des parties : "Dunwich", "Necronomicon", "R’lyeh" ou "Yog-Sothotheries".
Le premier mouvement commence par un récitatif, avant la mise en branle d'un orchestre aux couleurs chaudes, avec une densité sonore incomparable. Les forces telluriques se déchaînent dans une joyeuse et singulière sarabande ("Profonds, Shoggoths et autres Grands Anciens") avant que, dans "Necronomicon", le jazz ne rencontre des sons tribaux et le souffle contemporain dans cet étonnant morceau brassant des influences diverses.
La quatrième parie, "La démence qui vient de la mer", est une cavalcade donnant aux Cthulhu une âme en même temps que des élans menaçants. "Nul ne saurait décrire le monstre", prononce la récitante, Élise Cailloux-Lamorinière. La musique semble s'en charger à sa manière. "R’lyeh", plus calme, mais aussi plus naturaliste, donne vie aux créatures monstrueuses de Lovecraft "Dans sa demeure de Riley le défunt Cthulhu attend en rêvant". "Yog-Sothotheries" vient conclure cette œuvre unique, grâce à un mouvement plus joyeux et dansant. La SF fait place au conte naïf, dans lequel Darius Milhaud semble rencontrer le Carl Orff des Carmina Burana.
Rites se conclue avec Wood Music, un concerto pour quintette à vent et orchestre, avec le quintette ArteCombo et le Scoring Orchestra dirigé par Aurélien Azan Zielinski. Ce concerto grosso en trois mouvements, aux vagues symphoniques néoclassiques éclatantes est idéale pour conclure un album d'une grande cohésion.
Le temps, il en est question dans le nouvel EP de LAïUS – Luc Gaignard dans le civil –, sorti ce printemps, après un premier album intitulé Avant-matin. Prémices d’avant midi est le nom assez mystérieux, mais somme toute logique, de son dernier opus. C’est un temps qui n’en finit pas de se prolonger, de s’étirer et de lancer ses échos.
Prenez le morceau "L’arrière-pays". LAïUS y fait le portrait d’une région de notre pays dans le grand vide français. Il parle sans esbroufe des "platanes alignés", des parkings peuplés de camions en transit, des grands chapiteaux, des patrouilles de louveteaux, des soirées loto – "mais aucun pouce levé". Tel un troubadour de notre époque, LAïUS chante les "haut-fourneaux à l’arrêt", les "bail à céder", les villages silencieux et les "âmes qui s’isolent" : "Peu à peu les feuilles se fanent sur le sol et au loin s’envolent les rires des écoles". Le constat est cruel mais il dépeint avec sensibilité une réalité socio-économique : celle de la Province et des pays ruraux.
Le constat est cruel mais il dépeint avec sensibilité une réalité socio-économique
Le temps c’est aussi ces souvenirs qui tardent à s’éteindre. Et lorsque finalement une histoire finit par se conclure, cela donne "Il m’en a fallu du temps". LAïUS revient sur une relation qui s’achève définitivement avec un oubli bienfaiteur et libérateur, ouvrant la porte à autre chose : "Mais aujourd’hui je marche / Et demain on verra / Hier est maintenant derrière moi".
Oui, le temps peut guérir. C’est ce que l’artiste semble dire, sur un rythme rock, à cette femme "sous emprise" pour qui partir semble impossible ("Car s’en est trop").
Parmi les six titres de Prémices d’avant midi, se lit clairement l’influence d’une chanson française parlant de "romances du quotidien" et de choses vues, dans la veine de Francis Cabrel, avec instruments acoustiques et orchestration ramassée. Que l’on pense au morceau "Un moment comme ça", sur la vie à deux ou au très beau et contemplatif "Un flocon d’hiver", avec le froid comme une première fois, "comme un rêve d’hier".
Parlons encore des influences de LAïUS avec le titre qui vient conclure son album. Pour "La vie est là", c’est avec une facture pop-folk, qui semble faire la jonction entre Cabrel et Bashung, que le chanteur parle, de nouveau de pays et de campagne. Il évoque une maison ancienne qui, en dépit de ses défauts, est devenue un havre de paix : "La vie est là en filigrane / Cette maison là deviendra chamane".
Et si nous faisions confiance au temps qui passe ?