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Musiques - Page 46

  • Les plus grands sous le plus petit chapiteau du monde

    Imaginez deux minutes un concert qui réunirait les Rolling Stones au complet, les Who, John Lennon et sa compagne Yoko Ono alors que les Beatles sont encore formés. Il y aurait aussi Marianne Faithfull, Eric Clapton, le guitariste Taj Mahal, le violoniste classique Ivry Gitlis, mais encore des trapézistes, des cracheurs de feu et des acrobates . Tout ce petit monde se réunirait sous la tente d’un chapiteau de cirque éphémère, avec Mick Jagger en Monsieur Loyal. Et puisqu’un show de ce genre n’existerait pas sans un public, des spectateurs serait également là, installés dans des gradins, des "spectateurs tirés sur le volet [qui] ignorent qu’ils seront très longtemps les seuls à pouvoir s’en repasser mentalement les images."

    Improbable, non ? Et pourtant, ce projet musical, The Rock and Roll Circus, a bien eu lieu en décembre 1968, a été enregistré par la télé anglaise – mais jamais diffusé à l’époque – et a constitué un virage dans la carrière des Rolling Stones. Le public n’a pu découvrir ce concert étonnant que 28 ans plus tard, en 1996 au cinéma puis en DVD et Blu-ray.

    C’est ce grand foutraque que nous raconte Édouard Graham dans son essai The Rolling Stones Rock And Roll Circus (éd. Le mot et le reste). L’auteur nous raconte, dans son ouvrage dense et précis, les origines, le déroulé et les aléas de ce projet musical resté à la fois unique et copié (le Rock’n’Roll Circus des Strawbs en 1970 ou le Johnny Hallyday Circus deux ans plus tard). Si les Rolling Stones ont l’idée de créer un concert unique autour du cirque (une thématique déjà utilisée parle chanteur Donovan, les Beatles et même les Stones pour Between The Buttons, un titre de 1966), c’est avant tout pour une raison commerciale : leur dernier album Beggars Banquet vient de sortir et il s’agit d’utiliser la télé à des fins promotionnelles.

    Mick Jagger porte ce projet : "Ce ne sont pas les spectateurs qui viendront aux Rolling Stones, ce sont les Stones qui s’inviteront chez eux par le biais de la télévision… L’idée [du cirque] sera (…) centrale". Le mercredi 11 décembre 1968, les studios d’Intertel Television, à Wembley accueillent dont les artistes transformés en forains d’un soir et un public de fans trié sur le volet pour le film The Rock and Roll Circus, réalisé par Michael Lindsay-Hogg.

    Édouard Graham consacre bien évidemment l’essentiel de son livre au show, au cours duquel se succèdent des figures majeures de la pop : le groupe britannique Jethro Tull, Marianne Faithfull, les Who, qui réalisèrent ce soir, d’après des témoins, la meilleure prestation ou encore le bluesman Taj Mahal, qui réalise lui aussi un show remarqué ("L’un des meilleurs moments de ma vie", reconnaît le musicien qui commence en 1968 sa longue carrière.

    Ivri Gitlis qui semble se demander ce qu’il est venu faire dans cette galère 

    De longues pages sont consacrées à la participation de John Lennon, de son groupe éphémère... et de sa nouvelle compagne Yoko Ono. On connaît la vraie fausse rivalité des Stones et des Beatles. Or, pour le Rolling Stones Rock And Roll Circus, le moins que l’on puisse dire est que le co-leader des Beatles joue complètement le jeu de son ami Mick Jagger : il se prête à une fausse interview potache, présentant le groupe Dirty Mac, créé de toute pièce avec les Stones, Lennon et aussi Eric Clapton, tout juste parti des Cream. Au cours de ce concert,  unique dans tous les sens du terme, Édouard Graham ne manque pas d’évoquer la prestation improbable de Yoko Ono dans une performance artistique et "politico-philosophique", parvenant à faire de l’ombre au violoniste Ivri Gitlis qui semble se demander ce qu’il est venu faire dans cette galère. 

    Puisque Mick Jagger et son groupe sont à l’origine du Rolling Stones Rock And Roll Circus, les Stones se taillent la part du lion avec une prestation qui entend être le clou du spectacle. Les interprétations de "Jumpin’ Jack Flash", "Parachute Woman", "No Expectations" ou "Sympathy For The Devil" sont l’occasion pour l’auteur de revenir sur les tensions au sein du groupe, avec un Brian Jones de plus en plus mis à l’écart, quelques mois avant son décès tragique. Édouard Grahams ausculte les relations devenues complexes entre le véritable créateur des Stones et ses comparses devenus des leaders charismatiques et qui finiront d’autant plus par faire plonger Brian Jones que des rivalités amoureuses – Anita Pallenberg, Marianne Faithfull – viennent s’immiscer entre les membres des Stones. "Vers la fin, c’était le genre de gars qu’on redoutait d’avoir au téléphone", a confié crûment John Lennon.

    Concert unique, faussement enfantin et coloré,  The Rolling Stones Rock And Roll Circus est un moment à part dans l’histoire du rock, avec sa part d’ombres, de légendes et de mystères. Peut-être existe-t-il aussi une malédiction dans ce spectacle charnière se déroulant en 1968, année révolutionnaire s’il en est : Brian Jones est retrouvé mort dans sa piscine quelques mois plus tard, les Beatles n’ont plus qu’un an d’existence, Eric Clapton commence une nouvelle carrière après celle au sein des Cream et cette année 68 marque l’arrivée fracassante de Taj Mahal sur la scène blues.

    Resté dans l’ombre, le concert forain des Stones va mettre 28 ans avant d’être diffusé, après des tractations juridiques et des coupes dans les montages. Maintenant qu’une nouvelle édition vient de sortir, l’histoire est-elle finie ? "D’autres fragments inédits émergeront-ils un jour, à la faveur d’une nouvelle action de marketing ? Ce n’est pas impossible", conclue l’auteur. 

    Édouard Graham, The Rolling Stones Rock And Roll Circus, éd. Le mot et le reste, 2021, 180 p.
    https://lemotetlereste.com/musiques/therollingstonesrockandrollcircus
    https://www.imdb.com/title/tt0122689/reference
    https://rollingstones.com

    Voir aussi : "Clatpton, toujours debout"
    "Faites que ça se termine vite"

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  • Le club des cinq sous acide 

    LTTH propose avec leur album Empty Spaces un retour régressif vers le rock progressif, mais aussi teinté de métal, ce qui pose déjà les influences de ces cinq artistes. Ce sont Effie M (chant), Alexandre Castioni (guitare/chant), Thibault Bertin (guitare), Théophile Mahieux (basse) et enfin Gabriel Bertin (batterie).

    Preuve que le groupe normand n’a peur de rien,  "So long", qui clôture l'album, est un morceau de plus de 10 minutes, commençant par des riffs de guitare avant de se déployer amplement et de se reposer sur la voix féminine de la chanteuse Effie M. Elle parvient à se faire de la place au milieu des guitares rutilantes, à l’exemple de "Behind The Mirror". Ce qui dénote déjà un caractère bien trempé.  

    Mais LTTH, sans renier ses influences seventies, sait se faire plus aérien. Que l’on pense au titre "Flyin' World" mais aussi et surtout à "Birdsong" qui commence singulièrement avec un son plus folk. Voilà qui démontre l’étendue du registre du groupe français qui s’est visiblement nourri de sources de l’autre côté de l’Amérique, plus côté Pacifique. Dans "Birdsong, les guitares se font mélodieuses, envoûtantes, entêtantes et joueuses.  

    Comme dans les plus belles heures des concepts albums

    Avec un "Interlude – Imaginary", enregistré comme dans les plus belles heures des concepts albums, le groupe reste dans la même veine seventies, avec un morceau commençant par une phase planante avant de s’engager dans un rock nerveux et rugueux autant qu’engagé ("Terror is not a New Weapon").

    "Far Away" et "Never Enough" s’engagent sur les chemins d’une pop sortie tout droit des nineties : mélodie impeccable, riffs de guitares, voix féminine impeccablement placée. Là encore, Effie M fait des étincelles.

    Voilà au final une production soignée et éclatante, dans laquelle les 5 de LTTH se positionnent dans du rock de bon aloi, sans mégoter sur la virtuosité propre à décorner un bœuf , à l’instar de "Rebirth".

    Ébouriffant ! 

    LTTH, Empty Spaces, 2020
    https://www.facebook.com/linktotheheadwayofficial
    @LTTHofficiel

    Voir aussi : "Sans voies parle et chante"

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  • Pas bugle, le jazz chanté de Christophe Gendron

    Il est question de jazz et de chansons avec cet étonnant EP de Christophe Gendron (Standart, vol. I). Il se livre avec son trio dans des reprises jazz de Jean-Louis Aubert ("N.Y Avec Toi"), Jean-Jacques Goldman ("Au Bout De Mes Rêves"), Jacques Dutronc ("Les cactus") et le moins connu "Docteur" de Claude Nougaro.

    L’artiste dit se réapproprier les grands titres de Claude Nougaro

    Le musicien bugliste parle d'un style "à la mode Chet Baker", avec une formule assumée : contrebasse, guitare, chant et bien sûr trompette, "se prêtant parfaitement au genre".

    Une sacrée découverte, et qui annonce très certainement une suite. 

    Christophe Gendron, Standard, vol. I, 2020
    https://www.facebook.com/christophegendrontrio/
    https://www.youtube.com/channel

    Voir aussi : "Ex-pop"

    Photographe Emoi

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  • Dépaysante saga électro

    Étrange saga que cette compilation que propose le label russe d’électro  Scent Air Records… Ils ont choisi de rassembler dans l’album The Lighthouse Saga 14 titres hétéroclites et voyageurs. Le titre ("Le phare") laisse à voir que le dépaysement ("Mal De Mer" de Cendre Froide), l’aventure ("Sirens Sing for Love") et la fraîcheur toute maritime ("Winter's Course") sont les dénominateurs communs de cet opus.

    L’auditeur sera certainement interpelé par le premier morceau, "Sirens Sing for Love" d’Elisabeth Engarde. Cette étrangeté sonore peut s’écouter comme un chant de sirène nous renvoyant dans l’épopée homérique. Une création audacieuse balançant entre classicisme, contemporain, pop et électronique. Il est question de chant de sirènes, que l’on reverra dans la dernière piste de cet album collectif The Lighthouse Saga.

    Après cette entrée en matière, nous voilà avec Silentport ("The Lighthouse Dream", en featuring avec Lory Fayer), dans une pop à la facture lo-fi. Le groupe propose un deuxième morceau apaisé et rêveur, "My Little Siren", qui vient d’ailleurs clore l’album en douceur.

    L’océan n’est pas absent de ce voyage musical au long cours ("Al Di Là Del Mare" de Deus Faust ou "Winter's Course" de Lost Sailor avec  Francesca Nicoli), à telle enseigne que l’on ne sait pas dans quelle mer ou océan naviguer – la Méditerranée italienne ou l’Atlantique.    

    L’océan n’est pas absent de ce voyage musical au long cours

    Le moins que l’on puisse dire c’est que les créateurs de l’album collectif font preuve d’une solide audace dans cette proposition musicale ("Awakening" de Eirene). Car même si l’électro est de mise ("From Our Prison" d’Afterglow), le rock n’est pas absent, à l’instar du rugueux "Mal De Mer" de Cendre Froide, pas plus que la new wave de Nouvelle Culture (le séduisant et passionnant "Tomorrow Became Never", en featuring avec Carissa Denee). C’est dans la même veine eighties que le groupe au nom imprononçable SAÐÆMØN propose le nom moins mystérieux "Until The End Of The Years", dont les influences de Depeche Mode paraissent tomber sous le sens.

    Condemnatus propose de son côté une halte à terre avec "A Promise Left Behind", balade étrange, dépaysante et mélancolique comme un jour de mer d’encre sans fin.  

    Tout aussi mystérieux, "Dangerous Game" de The Dreams Never End est un morceau planant, mêlant des nappes synthétiques, le minimalisme et la voix éthérée de Sandra Pereia, dans un voyage intergalactique, sur une planète lointaine… et dangereuse.

    Avec le titre suivant, "The Ghosts Of The Lighthouse" du groupe Vestfalia's Peace, nous voilà dans un terrain plus électro-pop et familier. Un morceau qui colle parfaitement bien avec le concept de l’album.

    Eirene est de retour, cette fois en featuring avec Eirene etParis Alexander, dans l’extrait d’Antidote, "Play A Serenade To The Moon". Dans une même facture eighties, la voix d’Eirene se fait lunaire et mystérieuse avec cette ode à la lune que les Cure de Robert Smith n’auraient pas reniée.

    Collectif, The Lighthouse Saga, Scent Air Records, 2020
    https://open.spotify.com/album
    http://www.scent-air.com
    https://www.facebook.com/ScentairRecords

    Voir aussi : "Électros nuits de Noël"

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  • Une chance pour Guard

    Guard est de retour avec son nouveau single et un clip, "Une chance".

    Il y a cinq ans, Guard s'imposait avec le tube "Give it Up". L’artiste lyonnais a ensuite enchaîné les compositions et l’écriture pour d’autres artistes et fondé la Team Creativ.

    Sur une électro-pop rythmée, et de sa voix inimitable, Guard chante la course à la vie et le besoin de rester debout. "Une chance" se veut un véritable hymne à la fête, à la vie et à la jeunesse :"Je défie l’insomnie / Dépourvue de sens / Quitte à payer le prix / Nos vies avancent."

    Pour la création visuelle du clip, Guard s’est entouré des creative designers Impossible Brief, qui ont notamment collaboré avec The Chainsmokers et Coldplay.

    Guard a promis qu'il repartirait sur la route pour une tournée nationale dès que ce sera possible. 

    Guard, Une Chance, Kuroneko, 2021
    https://www.facebook.com/GuardOfficiel

    Voir aussi : "Sans voies parle et chante"

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  • L’amour, c'est mieux à deux

    C’est avec des invités de qualité qu’Andréel a conçu son septième album, Tu m’apprends : Amandine Bourgeois, Natacha Régnier, Judith Chemla ou Lucile Chriqui. Il y a aussi Isild Le Besco qui apparaît sur l'album en tant qu’auteure de "Mon manque" et de "Pourquoi je te veux".

    Pour son nouvel opus sorti en début d’année, Andréel s’inscrit dans la veine des auteurs-compositeurs-interprètes classiques, avec une orchestration traditionnelle, ramassée et élégante.

    Le titre éponyme de l’opus est une chanson délicate comme une caresse voluptueuse, adaptée des Nourritures terrestres d’André Gide. Le musicien se laisse porter par des vers oniriques, qui célèbrent l’amour, la sensualité et la liberté : "Je me dresse nu sur la terre vierge, devant le ciel à repeupler / Apporte à ma chair l’ardeur, l’éblouissement de mon cœur / Nourritures, je m’attends à vous. Satisfaction, je vous cherche / J’ai donné tout ce que j’étais, plus rien ne me possède".

    L’amour : voilà le fil conducteur de cet album aussi sensuel qu’introspectif, à l’instar de "Pourquoi je te veux", le récit d’une passion non sans légèreté et qui parle également de l’imprévisibilité de l’amour. Sur son opus, Andréel vient faire le mélange des couleurs et des sons ("Les gens qui chantent"). Il se révèle en artiste à la fois pointu et à fleur de peau, doté d’une sensibilité sans esbroufe, ce dont nous lui en sommes gréé.

    "Je m’oublie" avec Amandine Bourgeois, l’ex "Nouvelle Star" qui s’était montrée plutôt discrète ces derniers temps, est un duo parlant de rabibochage et de perte de soi. C’est avec une écriture fine qu’Andréel parle de dualité (bien sûr), de complicité et d’harmonie, dans un morceau justement très harmonieux. Plus lumineux, "Mon manque", un autre duo, cette fois avec Judith Chemla, est une salsa amoureuse.

    L’amour : voilà le fil conducteur de cet album aussi sensuel qu’introspectif

    L’amour encore : sur un slow-rock jazzy, Andréel chante en duo avec Natacha Régnier "Une femme épanouie", qui est l’histoire d’une renaissance faite d’altruisme et de simplicité : "Je veux te voir comme tu es, te donner ce que tu veux, / Ne pas tenter de prendre en toi ce que je cherche et qui n’y est pas." L’amour n’est ici pas aliénant mais, au contraire, une fontaine de jouvence autant qu’une source de renaissance.

    Il est également en duo, cette fois avec Lucile Chriqui, dans un titre jazz célébrant à la fois la passion et Paris dans "Boulevard Magenta", comme si l’une n’allait pas sans l’autre : "Qu’il est bon le boulevard Magenta, / Quand les ombres s’enfuient, l’aube pointe son doigt / Accusant le marcheur de n’être pas bigot / Des us et des mœurs des fiers Parigots."

    Un glissement de l’album a lieu dans les quatre dernières pistes, avec cette noirceur qui s’installe inexorablement, comme si une brisure avait lieu. Il est d’ailleurs symptomatique que dans cette seconde partie de l’opus il n’y ait plus de duos.

    Andréel chante seul, plus introspectif, mais aussi plus sombre. Bien entendu, il y a un "Un autre que soi" qui chante le goût du voyage et "le plaisir de voler sans attache". Mais la solitude peut aussi être  une prison intérieure ("Le désert m’appelle"), et dans ce cas, l’être aimé est sans doute la "solution" : "Enlaçons-nous ce soir. Rejoignons nos regard. / C’est un moment perdu. C’est un moment d’espoir").

    Dans cet "endroit inconnu" qu’interprète le musicien, l’être aimé a "disparu". Une course a lieu pour partir à sa recherche. Les lieux deviennent vides et sans saveur sans lui ou elle. "Que penser de ces histoires ?" se demande Andréel, qui refuse cependant de perdre tout espoir dans "le sourire des hommes… et la bonté des femmes… et l’art qui nous embellit."

    L’album se termine avec le "Je suis jaloux" dans une ballade jazzy qui vient cueillir et surprendre en douceur un homme amoureux, encore et toujours : "Je suis jaloux, dis-moi, par quel sortilège / Un dieu t’a-t-il offert une telle aura."

    L’amour aura toujours le dernier mot.

    Andréel, Tu m'apprends, Inouïe Distribution, 2021
    https://www.andreel.com
    https://www.facebook.com/andreelvirtuel

    Voir aussi : "Premier extrait du futur album d’Andréel, bien accompagné"

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  • Sans voies parle et chante

    Sans Voies : il faut une bonne dose d’humour pour oser un tel calembours pour un groupe de pop-rock, qui est du reste tout sauf ridicule.

    Sans Voies c’est d’abord cinq hommes, dont les deux frères, Théo et Baptiste Souque, véritables piliers de cette formation rock, à la musique et au texte. Après 3 ans de maturation, ils se lancent dans leur premier EP de quatre titres, Rien qu’un peu.

    On se doit d’insister d’ailleurs sur les textes de ce mini-album. Dans le premier morceau , "Le Courage d'exister", il se déplie, ample et poétique, avec une admirable interprétation parlée-chantée servie par une orchestration rock, comme si les Téléphone s’étaient prêtés au slam avec leur rage, leur ardeur juvénile et leur fougue légendaire. "Le Courage d'exister" est un cri à la vie à la jeunesse, dans un combat perpétuel face au temps qui passe : "Demain qui s'invente au galop / la raison parfois ferme les yeux / l'amour le cœur à demi clos / et le rêve trop grand, d'être heureux").

    Écriture exemplaire et dont beaucoup de musiciens devraient s’inspirer

    Sans Voies c’est du rock emballé et emballant résolument tourné vers le plaisir, le combat, l’optimisme mais aussi le courage ("tant qu'il restera, des prières sans devin, / Nous regarderons, demain à petit feu / nous réinventerons, de l'amour rien qu'un peu / Rien qu'un peu plus de rage / Se donner du courage", "Rien qu’un peu").

    Le groupe venu de Haute-Loire reste rageur dans sa manière d’aborder rythmes, constructions harmoniques, riffs de guitare et bien sûr textes. Que Sans Voies choisisse de reprendre "Les anarchistes" de Léo Ferré, démontre que les cinq musiciens connaissent également leurs classiques et entendent aussi imposer un message d’insoumission et de liberté.

    Généreux, humanistes engagés et révoltés, les garçons de Sans Voies le démontrent dans le formidable et morrisonien "Les crues", à l’écriture exemplaire et dont beaucoup de musiciens devraient s’inspirer : "Dans la nuit noire de nos lubies / j'irai brûler jusqu'à mon âme / Et l'envenimer à l'envie / A la sueur de nos flammes / sSus la moiteur des claquements d'aile / et l'humidité de nos corps / Pour réinventer encore / La folie liant nos réels."

    Rien qu’un peu de Sans Voies est une formidable découverte, et l’on a déjà hâte d’écouter la suite de leur travail. 

    Sans Voies, Rien qu’un peu, 2020
    https://www.facebook.com/SansVoies
    https://www.youtube.com/sansvoies

    Voir aussi : "Fanelly dans le Metro"

    Photo : Sans Voies

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  • Fanelly dans le Metro

    C’est peut-être un détail pour vous, mais l’album de Fanelly, Metro Stories, ne commence pas par le bref "Prelude" éthéré aux voix presque religieuses, mais avec le "It’s Gonna Make A Little Difference", un titre dédié aux victimes des attentas de 2015. Nous avions parlé déjà de ce morceau, à la sensibilité indéniable et sans pour autant que la chanteuse italienne tombe dans la sensiblerie.

    Mais arrêtons-nous quelques instants sur la piste 2 et ce fameux "Prélude", à la langue mystérieuse : "Og ot tog ev’I / Ni erom yna eb ob tnaw t’nob I tub…" Voilà qui mérite une explication. Suite à une manipulation hasardeuse sur son téléphone (la fonction "reverse"), la musicienne a joué la piste suivante, "One Step Behind" – mais à l’envers ("But I don’t want to be any more in / I’ve got to go"). Fanelly commente ainsi sa découverte : "J'ai bien aimé l'esthétique et la langue un peu mystérieuse qui se dégageait...une fois en studio j'ai donc décidé de le reproduire et de garder cette petite trace  dans l'album en prélude du morceau suivant."

    Ce court "Prelude" illustre ce qu’est Metro Stories : un album hybride, avançant sur un fil entre pop, jazz et folk ("One Step Behind"), parlant aussi bien de l’insouciance de l’enfance ("Koria", "The Bubble Man") que de sujets plus sombres ("Burnout", "It’s Gonna Make A Little Difference").

    La chanteuse est servie par une orchestration réduite mais d’une belle homogénéité, avec les guitares d’Elio di Menza, Mathieu Barjolin et Andrea Cianca et la flûte traversière de Marjolaine Ott.

    La voix pleine d’assurance de Fanelly sait se faire grave et mélancolique dans "Over". Dans ce séduisant titre pop-jazz, la voix de la chanteuse et les guitares se mêlent avec grâce et parlent de désillusion, de la fuite du temps mais aussi d’espoirs : "Over / experctations getting lower / But still dreaming of a life that / … That will maybe come."

    Une langue mystérieuse

    Tout aussi mélancolique, "Superhero" frappe par sa singulière simplicité pour un tel thème : décidément ce n’est pas facile d’être un super-héros et de sauver l’humanité, de New-York à Katmandou.  

    Fanelly nous offre avec "Koria" un très joli morceau intimiste, mêlant l’italien et le français. La chanteuse explique qu’il s’agit de la première chanson qu’elle a écrite pour cet album. Elle explique ceci : "J'étais en train d’étudier « Blackbird » de Paul McCartney. Ma fille de trois ans était avec moi. On a commencé à faire un jeu : donner un nouveau sens aux paroles, ou inventer de nouveaux mots. C’est comme ça que le mot « Koria » est né, un mot qui, en soi – au moins en italien et en français –  ne veut rien dire. Mais on peut attribuer à ce mot la signification que l'on souhaite, de façon « opportuniste ». C'est pour cela que le morceau dit : « Koria vuol dire sogno...se ne ho bisogno », c’est-à-dire : « Koria veut dire rêve… si j'en ai besoin »".

    Nous parlions de pop et de jazz. Mais le rock-folk fait aussi son apparition dans le formidable "Into The Woods". La chanson revisite le conte du Petit Chaperon Rouge perdu dans les bois et à la merci du grand méchant loup :  "What big mouth you are / To better eat youn with / The morning, will fall and save us / A mother, father childen… Are we alive or dead ? Don’t go through the woods / Said the hunter".

    Plus folk, "The Bubble Man" parle d’un "homme à bulles" qui tente de lier la terre et le ciel grâce à ses seules bulles ("He links the earth with the sky / Trying to deliver high"). Fanelly fait ici référence à un de ces nombreux artistes de rue capable. "J'en ai croisé un dans le métro de Paris à la fin de sa journée. Il m'a rappelé tout de suite un « bubble man » que j'avais rencontré auparavant à Praça do Comércio à Lisbonne…  Il enchantait tous les enfants qui étaient autour de lui avec ses grandes bulles de savon, qui montaient jusqu'au ciel, puis s'éloignaient vers l'océan pour disparaître. C'était un moment suspendu. J'ai pensé  que cet homme avait trouvé le sens de sa vie en faisant ces bulles.  Il livrait des messages de beauté au monde."

    "Inner Magic" vient terminer l’album avec la légèreté de bulles de savons, et avec toujours ce timbre jazzy et la délicatesse de l’interprétation. Une touche à la fois romantique et impressionniste, comme si Fanelly s’installait face à un paysage des Pouilles, et se laissait aller à savourer des plaisirs simples, avec la personne que l’on aime – et sans masque ("No mask required") ! 

    Fanelly, Metro Stories, 2021
    http://www.fanellymusic.com

    Voir aussi : "Je ne suis pas un héros "

    Photo : Fanelly

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