Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Musiques - Page 70

  • Étincelant Thomas Grimmonprez

    Étincelant : voilà le terme qui caractérise sans doute le mieux la dernière production de Thomas Grimmonprez. Pour son dernier album Big Wheel, Le musicien a réuni autour de lui un quartet composé de Manu Codjia à la guitare, Jérôme Regnard à la contrebasse, Benjamin Moussay aux claviers et bien sûr lui-même à la batterie. "Une longue amitié nous lie, cʼest celle-ci qui mʼa poussé à écrire Big Wheel : La grande roue. La roue qui nous rappelle notre rapport au mouvement et au temps. La roue libre du lâché prise , du moment suspendu" dit le jazzman au sujet de son dernier opus.

    Trois ans après Kaléidoscope, nous voilà embarqués dans un jazz à la fois classique dans sa structure cristalline (le titre Big Wheel, qui donne son nom à l’album) et très personnel.

    Thomas Grimmonprez parle de son dernier opus, un vrai hymne à "l’idée de cycle," à la "création perpétuelle" : en un mot à "l’éternel retour." Voilà ce qu’en dit le musicien : "La symbolique de cette grande roue inspire mythes et thèmes sacrés, elle se rapporte à lʼidée de perfection comme le cercle, elle renvoie surtout au mouvement, au devenir et à lʼévolution. Cʼest aussi le recommencement, la création perpétuelle. Cʼest cette idée de cycle et de recommencement qui mʼa donné lʼenvie de composer cet album, un nouveau répertoire avec des compagnons de toujours."

    Comme quoi une guitare électrique aussi peut atteindre des sphères métaphysiques

    Loin de tout dogmatisme esthétique, le quartet fait le lien entre jazz, pop-rock psychédélique (Heavy Soul) ou musiques traditionnelles, à grands coups d’envolées de piano et de guitares électriques (Sweet Cake). Thomas Grimmonprez ne s’éloigne pourtant jamais d’une idée d’un jazz cool – cool, du reste, tels ces space cakes musicaux qu’il nos offre, mais toujours avec délicatesse (Suspended Time).

    Avec Cats And Dogs, le jazz se pare de couleurs mi-américaines mi-orientales dès les premières notes, avant de s’envoler derrière la guitare étincelante de Manu Codjia Manu Codjia.

    Quiet choisit l’apaisement avant une débauche de sons et de rythmes qui se croisent, se touchent, hésitent et se rapprochent dans des valses hésitations sensuelles, mêlant singulièrement chants tibétains et jazz cool. Un choix artistique aussi étonnant que le morceau suivant, Hypnosis, qui dénote par sa facture brute et très expérimentale : percussions, claviers et guitares virevoltent dans des arabesques déconcertantes. Comme quoi une guitare électrique aussi peut atteindre des sphères métaphysiques.

    Avec Spain Time, nous sommes paradoxalement plus du côté de New York que de la Méditerranée. Le jazz du Thomas Grimmonprez Quartet se prélasse, prend son temps et déambule amoureusement, au diapason d’un piano lumineux, joueur, mais aussi volontiers swing.

    L’album Big Wheel se clôture avec Highway, une déambulation apaisante mariant à merveille piano, guitare contrebasses et rythmique. Un étincelant voyage.

    Thomas Grimmonprez Quartet, Big Wheel, Outnote Records, 2019
    https://www.facebook.com/thomasgrimmonprez

    Voir aussi : "Voyages en jazz avec Anne Paceo"

    Tenez-vous informés de nos derniers blablas
    en vous abonnant gratuitement à notre newsletter.

    Likez, partagez, twittez et instagramez les blablas de Bla Bla Blog !

  • Condore passa

    Condore est le projet de Léticia Collet, claviériste de Dan San. À la croisée des chemins entre Agnes Obel, Patrick Watson et Charlotte Gainsbourg, Condore propose un son aérien et mélodique à la mélancolie saisissante à découvrir sur son premier EP, Jaws.

    L'univers de Léticia Collet est intime et harmonieux, basé sur une relation forte et singulière entre elle et son piano.

    Après avoir dévoilé les titres Lootus et Love Zombies, Condore poursuit son échappée belle avec Boring, dont le clip propose un refuge sensible, intime et délicat où la part sombre s’apaise grâce à cet environnement chaleureux.

    Tout au long de Jaws, produit par Yann Arnaud, ela musique de Condore se construit par l’entrelacement du piano et de la voix, dans une succession d’arpèges, de mélodies et d’harmonies vocales. Une beauté rare.

    Et Condore passa, sans doute pour un bout de temps. 

    Condore, Jaws, EP, JauneOrange/Pias, 2019
    https://condore.be
    https://www.facebook.com/CondoreMusic

    Voir aussi : "Clio, la fille en fusion"

    Merci à Xavier Chezleprêtre / Attitude

    Tenez-vous informés de nos derniers blablas
    en vous abonnant gratuitement à notre newsletter.

    Likez, partagez, twittez et instagramez les blablas de Bla Bla Blog !

  • De Bō débuts

    Dès les premières notes d’Everything Begins, le premier EP de Bō, on entre dans une électro singulièrement humaine amorcée par la voix vibrante et presque religieuse de la chanteuse Tiphene sur le titre Ritual.

    Pour ses débuts, Bō a imagine une pochette où se combinent fougères au bleu acier et minéraux légers comme une rosée printanière. Voilà qui est plutôt malin et surtout déconcertant pour un album d’électro. Mais il est vrai qu’Augustin Goupy, dans l’état-civil, est créateur graphique autant que musicien. Un musicien qui ne cache pas ses origines bretonnes et veut allier ses racines fortes à la recherche artistique et musicale.

    L’électro de Bō ne choisit pas le son pour le son, mais le voyage musical et l’introspection, ce qui n’empêche pas un sérieux et très imaginatif travail sur les sonorités mêlant machines, mélodies et voix de soprano éthérées (I’ve Got The Power ou Broken Head, avec la voix de la chanteuse Azzurazi). Avec For you, on est plus du côté de la pop, une pop qui se cherche, à travers les brumes – bretonnes, bien sûr – de l’électro. Bō en profite pour adresser de solides clins d’œil à Petit Biscuit, dont il vient de remixer le titre We Were Young avec JP Cooper.

    On sera sans doute particulièrement sensible au titre What Means The World To You, dans lequel le son électronique se teinte de voix mystérieuse et de rythmes urbains francs et expérimentaux.

    Everything Begins, le dernier morceau, qui donne son titre à l’EP semble rappeler que les débuts de Bō appellent une suite que l’on attendra avec impatience.

    Bō, Everything Begins, 2019
    https://www.facebook.com/boaugustin
    "Bō nous embarque dans son trip avec Ritual ft. Tiphene", in 20 Minutes, 5 juin 2019

    Voir aussi : "Emma Lacour, bourge au bord de la crise de nerf"

    Tenez-vous informés de nos derniers blablas
    en vous abonnant gratuitement à notre newsletter.

    Likez, partagez, twittez et instagramez les blablas de Bla Bla Blog !

  • Clatpton, toujours debout

    Il y a très certainement un mystère Eric Clapton, mystère que le documentaire exemplaire de Lili Fini Zanuck, Eric Clapton : Life in 12 Bars, entend dévoiler. Grâce à des archives riches, inédites et étonnantes (que l’on pense à ces images volées de défonces et de plongées dans l’enfer de la dépression pendant les seventies), ce film propose la découverte passionnante d’un des plus grands musiciens de ces 60 dernières années. Eric Clapton, bluesman et rockeur de légende, et sans doute le plus grand guitariste que la terre ait porté, apporte largement la pierre à cet édifice en revenant sur sa carrière mais aussi sur une enfance et une vie privée qui ont contribué à la légende de l’artiste anglais.

    Les jeunes années de Clapton commencent par un secret de famille qu’il n’a cessé de porter comme un fardeau, et qui peut expliquer sa relation compliquée avec les femmes : fils d’une adolescente trop jeune pour s’occuper de lui, ce sont ses grands-parents qui l’élèvent. Il n’apprendra qu’à l’âge de neuf ans que celle qu’il pensait être sa mère était en réalité sa grand-mère et que celle qu’il prenait pour sa sœur n'était rien d'autre que sa génitrice…

    Sans appuyer sur cette période importante, Lili Fini Zanuck en fait le point de départ d’une carrière à la fois incroyable et chaotique, qui passera par le groupe Cream – le premier et sans doute le plus grand supergroupe de l’histoire du rock. Remarqué par ses dons de guitariste, Clapton est adulé par des artistes majeurs comme BB King, Jimi Hendrix (dont le décès l’affectera durement) et George Harrison.

    "Je ne me suis pas suicidé pour la seule raison qu’un mort ne boit pas"

    L’ex-Beatles va suivre Clapton, l’encourager à travailler sur l’Album Blanc et connaître une vraie amitié, amitié qui va être cependant entachée par une autre relation : celle que Clapton va entretenir avec la propre femme de Harrison, Pattie Boyd. Cette histoire d’un amour interdit va se finir, comme souvent, en chanson : ce sera Layla, une des plus beaux titres sans doute de l’histoire de la pop ("What will you do when you get lonely? / No one waiting by your side / You've been running, hiding much too long / You know it's just your foolish pride"). Lili Fini Zanuck en fait le point de bascule d’une période cruciale et tourmentée, à grands coups de rushs, de vidéos en Super 8 inédites et de sessions d’enregistrements. Eric Clapton traverse des années noires : dépression, liaison difficile avec Pattie Boyd, drogues et alcool. "Je ne me suis pas suicidé pour la seule raison qu’un mort ne boit pas" avoue le musicien.

    Au début des années 90 l'artiste connaît une tragédie personnelle qui va impacter durablement son existence et sa carrière : la mort de Connor, son jeune fils de quatre ans, qu’il a eu avec l’Italienne Lory Del Santo. Son enfant se défenestre accidentellement en mars 1991 du 53e étage d’un immeuble à New York. Eric Clapton, plus robuste qu’on ne le croyait, se raccroche à la musique (le spectateur ne peut être que bouleverser par l’ultime lettre que lui a laissé son fils). La suite ? Le mythique album Unplegged et ce bijou pop-folk qu’est Tears in Heaven, dédié à la mémoire de son fils.

    Eric Clapton, survivant parmi les survivants de cette période passionnante que sont les années 70, poursuit un chemin artistique d’une richesse prodigieuse, alliant à cela un sens aigu de l’altruisme, comme le remarque fustement BB King. Un grand bonhomme que fait revivre le documentaire de Lili Fini Zanuck, Eric Clapton : Life in 12 Bars. À découvrir en ce moment sur Canal+.

    Eric Clapton : Life in 12 Bars, documentaire de Lili Fini Zanuck
    Royaume-Uni, 2017, 135 mn

    En ce moment sur Canal+

    Voir aussi : "Bowie is Outside"

    Tenez-vous informés de nos derniers blablas
    en vous abonnant gratuitement à notre newsletter.

    Likez, partagez, twittez et instagramez les blablas de Bla Bla Blog !

  • Ce que souhaite Tarsius

    Rock, pop, chanson ou world : quelle étiquette mettre sur le premier album des 6 garçons de Tarsius ? Avancer, leur opus, s’avère à la fois à la fois rigoureux, rythmé, engagé et volontiers mutin, mêlant chansons à la Bashung et pop-rock nerveux assumé jusqu’au bout des baguettes (Take the first train), avec je ne sais quoi d’influences latinos ou africaines (Avancer contre le vent, Use It Move It Do It).

    Nous voilà sur la route, comme le suggère la pochette de l’album, justement intitulé Avancer. Et il est vrai que l’on visite des terres bien plus hétéroclites que ne le laisseraient penser un album a priori très rock (Dancing In The Graveyard), mâtiné par moment de rockabilly tribal (Le Vaudou Love) ou de pop-folk à la Midnight oil (Fuel The Rocket).

    Tarsius ne renie pas avoir biberonné aux sons yankees (Take The First Train), sans pour autant renier la chanson française – celle de Brel ou de Bashung (Je ne veux rien d’autre que toi). Dans leur titre Le Rouge au front, nous voilà dans une pop résolument française, aux influences 80’s. Le titre qui nous conte avec un romantisme confondant une histoire d’amour secrète et romanesque : "J’ai voulu voir la vie en rose/ Et tu m’as mis le rouge au front." On reste dans les eighties de Chagrin D’Amour avec Achète du sexe, qui nous plonge dans le Pigalle des années érotiques ("Achète ce que tu souhaites").

    Tarsius a pris le temps de laisser infuser des influences venues du rock anglais, du blues mais aussi de la world music (Fais comme les bonobos, Afrobayous), pour imaginer des chansons reflétant l’air du temps : "Arrête de penser que le temps est assassin… Arrête de courir après le vent." Afrobayous, le titre finalement le plus américain de l’album, est un chant à la gloire des esclaves noirs – sur un air de blues, bien entendu.

    Plus électro pop que disco à vrai dire, Disco 2059 est un vrai cri hargneux et amer, comme si nos enfants et petits-enfants allaient faire claquer leurs talons sur des pistes de danse, dans un monde post-apocalyptique (réseaux sociaux suceurs de cerveaux, armées dans des états de non-droit, montagnes de piles, "à la lanterne les nantis, riches, pauvres, à la bougie"). Voilà, pour le dire autrement, un titre enragé et engagé : "En l’an 2059, / Plus de musiques", pandémies, abstinence, colères, masques à gaz." Mickey 3D l’aurait dit autrement : "On ne va pas mourir de rire."

    Tarsius, Avancer, Fo Feo Productions / Caroline International, 2019
    http://www.tarsiusmusic.com
    https://www.facebook.com/tarsiusmusic

    Voir aussi : "La vie sauvage"

    Tenez-vous informés de nos derniers blablas
    en vous abonnant gratuitement à notre newsletter.

    Likez, partagez, twittez et instagramez les blablas de Bla Bla Blog !

  • Vole, Céline, vole

    Des les premières notes de Still Running on devine que Céline Bonacina va nous proposer dans son cinquième album Fly Fly des paysages musicaux inédits et un jazz largement métissé, à l’instar du leitmotiv du premier titre, une mélodie enjouée portée par un chœur aux teintes latinos. Un vrai concerto pour saxo et voix aux multiples variations y compris orientales (Tack Sa Mycket) ou zen (Caméos Carvings).

    Car les voix sont très présentes dans cet opus où le jazz se fait voyageur (Care Her Gone) : "On y retrouve l’évocation de paysages et de souvenirs, de lieux où nous avons séjourné, de moments forts de nos vies respectives" explique la musicienne. Le saxophone soprano et baryton de l'une des meilleures jazzwoman de sa génération s'avance avec une présence moins tapageuse que joueuse.

    Aux côtés de Céline Bonacina, plus lyrique que jamais (Ivre Sagesse), on retrouve Chris Jennings à la basse (et co-compositeur de l’album), Jean-Luc Di Fraya à la batterie et au chant, et Pierre Durand à la guitare électrique.

    Une des meilleures jazzwoman de sa génération

    On est dans un va-et-vient incessant entre saxo esseulé, et parfois plaintif (Du Haut de là), sinon mélancolique (An Angel's Whisper). La jazzwoman peut révéler des titres métaphysiques (An Angel's Caress, Vide Fertile) ou proposer des titres plus enlevés, voire carrément rock, et tout autant travaillés (High Vibration, Friends & Neighbours Too).

    Céline Bonacina se fait chercheuse, sur la piste d'un jazz ouvert à tous les horizons, à l'instar du titre Borderline, sombre dense et naturaliste, porté par le leitmotiv de Still Running.

    Avec ces envolées qui n'ont peur de rien (Fly Fly To The Sky), l'album de Celine Bonacina n'a jamais aussi bien porté son nom.

    Céline Bonacina, Fly Fly, Cristal Records, 2019
    En concert le 17 janvier 2020 au Théâtre de Sartrouville (78)
    https://www.celine-bonacina.com
    https://www.facebook.com/C%C3%A9line-Bonacina-Official

    Voir aussi : "Une création de Céline Bonacina à La Défense Jazz Festival"

    Soutenez Bla Bla Blog et tenez-vous informés des derniers blablas
    en vous abonnant gratuitement à notre newsletter

    Likez, partagez, twittez et instagramez les blablas de Bla Bla Blog !

  • Kaori, toutes voiles dehors

    Bon, nous sommes d’accord : l’album de Kaori, À Ciel ouvert, est d’abord teinté de couleurs estivales et tropicales, assez loin des grisailles sous nos hémisphères. Le soleil, le ciel lumineux, le farniente, les cocktails sur la plage et la flemme. Mais pourquoi justement ne pas profiter de la grisaille ambiante pour déguster cet opus nonchalant, s’ouvrant d’ailleurs sur À Ciel ouvert, un titre qui donne son nom à l’album ?

    On peut avoir une réelle appétence pour le groupe Kaori et son goût de l’aventure et de la liberté, voguant toutes voiles dehors. Pour reprendre Kaori dans Je largue les amarres, musicalement, le duo "s’en tient à l’essentiel" dans cet un univers musical chamarré : la chanson française est mêlée de couleurs jazzy (Impressions, Café noir), calédoniennes (Cap’tain yo, Les hommes vivent debout), reggae (À Ciel ouvert), pop-rock (Je largue les amarres), blues (Laisse-moi entrer) ou folk (L’île des oubliés).

    Arrivé à ce stade de la chronique, intéressons-nous à Kaori, du nom de cet arbre emblématique calédonien. Le duo, formé d’Alexis Diawari et Thierry Folcher, originaire de Nouvelle Calédonie, propose une production soignée et d’une belle fraîcheur, dans la continuité de leur premier album, Aux Îles Fortunés. Pas mal pour des sexagénaires, ayant fait le choix de l’acoustique pour un album entièrement en français.

    Kaori suit à sa manière les traces d’Antoine dans son appel aux voyages libérateurs comme son appel à l’humanisme et à la fraternité universelle (Les hommes vivent debout). Pourquoi ne pas rappeler justement que la chanson française a la chance d’avoir des artistes qui, à l’instar de Kaori, puisent leur inspiration dans les terres lointaines du Pacifique (Fleur de vanille) ? Et ça, ça fait du bien.

    Kaori, À Ciel ouvert, Socadisc, 2019
    https://www.kaori-officiel.com
    https://www.facebook.com/Kaoriofficiel

    Voir aussi : "Maya Kamaty, la diva du maloya"

    Soutenez Bla Bla Blog et tenez-vous informés des derniers blablas
    en vous abonnant gratuitement à notre newsletter

    Likez, partagez, twittez et instagramez les blablas de Bla Bla Blog !

  • Le S3NS du jazz d’Ibrahim Maalouf

    Après une incursion séduisante d’Ibrahim Maalouf dans la musique classique, avec la Levantine Symphony, boudée par certains ayatollahs du jazz mais réellement séduisante, voici Ibrahim Maalouf de retour avec S3NS. Un onzième album résolument jazz cette fois, qui prouve une fois de plus que le trompettiste franco-libanais est déjà en train de marquer l’histoire de ce genre.

    L’album s’ouvre sur Rosa Blanca qui, après une entrée délicate et mélancolique, se déploie avec générosité et luxuriante, grâce au featuring d’Harold López-Nussa. Un titre auquel vient répondre, plus loin dans l’opus, le tout aussi coloré et fantasque N.E.G.U., avec cette fois Alfredo Rodriguez.

    "Luxuriance" : le mot est trouvé pour qualifier un opus à la fois classique dans sa facture (orchestre de cuivre, rythmes enlevés, couleurs de jazz band, rythmes latinos) et d’une réelle maîtrise – mais on n’en attendait pas moins d’Ibrahim Maalouf. Luxuriance mais aussi audace car, de la même manière que Maalouf était entré dans le classique, en y apportant ses influences jazz et orientales, le trompettiste ne dédaigne pas plus la fusion, à l’exemple du canaille Na Na Na où viennent se rejoindre free jazz, manouche, pop et électro dans un joyeux fatras qui vient narguer les bien-pensants d’un jazz sous naphtaline.

    Un joyeux fatras qui vient narguer les bien-pensants d’un jazz sous naphtaline

    Le trompettiste fait feu de tout bois, ne s’interdisant pas de se nourrir de pop-rock, à l’exemple de l’attendrissant et mutin Happy Face, ou de proposer des architectures musicales faisant se concentrer l’électronique et le cuivre, dans S3NS, le titre qui a donné le nom à l’album. Pour Harlem, en featuring avec Irving Acao, nous voici, bien sûr, au cœur de New York, dans un morceau au funk assumé. La trompette d’Ibrahim Maalouf cavale toute bride apparue dans les quartiers bigarrés et colorés de la Big Apple. Harlem ce n’est pas juste un titre jazz virevoltant : c’est aussi une vraie scène cinématographique, au point qu’on l’imagine bien faire les honneurs d’une bande originale de film.

    Le musicien franco libanais s’offre le luxe de s’allier avec Roberto Fonseca pour Gebrayel, un titre latino à souhait, à la joyeuse exubérance mais non sans des respirations mélancoliques et bouleversantes. Bouleversantes comme le sont les sonorités et la facture de All I Can’t Say, dans lequel la trompette vivante d’Ibrahim Maalouf se déploie, langoureuse, lyrique et romanesque, avec des accents orientaux. Il semble que pour S3NS, Ibrahim Maalouf propose un album bien plus intériorisé qu’il n’y paraisse. Le titre qui termine l’opus, Radio Magallanes, nous parle de solitude et de repli à l’écart des autres, à l’instar de cette terre chilienne proche de l’Antarctique. Après la chaleur méditerranéenne, voilà pour terminer le froid du pôle sud, pour un opus qui nous a fait cavaler aux quatre coins du monde. Un vrai album qui fait S3NS, quoi.

    Ibrahim Maalouf, S3NS, Mister Ibe, 2019
    En concert, le 23 novembre au Zénith de Dijon
    Le 24 novembre au Zénith de Nancy
    Le 30 novembre à l’Opéra Garnier de Monte-Carlo
    Le 1er décembre au Dôme de Marseille
    Le 8 Décembre au Zénith Sud, deMontpellier
    https://www.ibrahimmaalouf.com
    https://www.facebook.com/ibrahim.maalouf

    Voie aussi : "Ibrahim Maalouf, déjà un classique"

    Soutenez Bla Bla Blog et tenez-vous informés des derniers blablas
    en vous abonnant gratuitement à notre newsletter

    Likez, partagez, twittez et instagramez les blablas de Bla Bla Blog !