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chanson - Page 30

  • 10 variations sur le même t’aime

    Il y a comme un parfum de légèreté dans l’album de Noon, Love In Translation. Un joli titre, en passant, hommage bien entendu au chef d’œuvre de Sofia Coppola, le film Lost in Translation.

    L’amour : voilà le leitmotiv de cet album pop, à la légèreté idéale à l’approche de l’été. L’attirance, les liens indéfectibles, le désir, la séduction, l’aliénation ou la joie de la rencontre : Noon parle de la multitude des liens que recouvre l’amour, déclinés sur 10 variations et en 10 titres : "Amour passion, amour fou, amour filial, amour inconditionnel, amour de soi."

    La sincérité baigne dans ce premier album, tout en délicatesse, mais aussi aux multiples influences : chanson, pop, électro ou funk. Noon n’est d’ailleurs jamais aussi bonne lorsqu’elle se pare du costume de la chanteuse soul (Perfume of Euphoria). L’auteure-compositrice-interprète a d’ailleurs fait partie du groupe électro Shenkin en 2011.

    L’auditeur pourra se laisser séduire par les vagues électro d’une chanteuse qui a fait le choix de l’anglais dans la majorité de des titres, à l’exception du Cœur des Hommes ("Ce sont les hommes qui s’abandonnent / Qui sont ces hommes qui s’abandonnent ?" chante-elle avec une désarmante sensibilité) et de Sans Toi.

    Impossible également de ne pas s’attacher à la délicate reprise de The Logical Song des Supertramp. Une interprétation qui a été saluée d’ailleurs par Roger Hodgson lui-même.

    Mine de rien, Noon parvient à nous prendre par la main et par le cœur dans un premier album tout en séduction et en "je t’aime."

    Noon, Love In Translation, PBC / Warner Music, 2018
    https://www.yourlabelmusic.com/noon

    Page Facebook de Noon
    Interview de Noon pour Les Chroniques de Mandor, février 2018

     

  • 2018, année soviétique

    Qu’on se le dise : après l’élection de Poutine et à l’occasion de la coupe du monde de football, l’année 2018 sera russe. À cela, il faut ajouter la sortie du dernier opus du plus "marxien" des duos français : les Soviet Suprem, auteurs de leur deuxième album, Marx Attack (sans "s", s'il vous plaît).

    Voilà donc nos communistes (enfin, sur le papier du moins), partis à l’assaut pour conquérir la planète musicale, et le moins que l’on puisse dire c’est qu’ils ne lésinent pas sur les clichés de la révolution d’Octobre, les références à l’Armée Rouge ou sur un sabir comme venu de l’autre côté de l’Oural.

    Mais Soviet Suprem c’est aussi et surtout l’alliance de l’humour et de la musique slave au service d’un style musical inédit et d’un message humaniste : "Quand la musique mondialisée n’est plus qu’une soupe insipide qui martèle nos esgourdes a base de boom boom et de slogans bling-bling, il est temps de réhabiliter l’Internationale, de libérer la fête et de lâcher les chevaux cosaques dans la sono," annoncent nos deux Parisiens partis à la conquête de l’est et du reste de la planète, même si la superpuissance américaine n’est jamais très loin (Peaux Rouges).

    Marx Attack c’est de l’électro-rock à l’humour noir (Dikator de Dancefloor), pour ne pas dire un album potache (Post Soviet), quand il n'est pas franchement festif (Vladimir). Les Soviet Suprem ont aussi l’art du texte et du calembour,  : "Conquête de planète / Pas de plan sur comète / Attaquer le capital / A capella / Niet niet." On peut penser à Sanseverino dans cet art de recycler et de détourner sans arrières-pensées un répertoire ancien et de mixer rap et valse (Valse Soviet)… L’auditeur retiendra tout autant la reprise hilarante de T’as Le look Coco à la mode cosaque, avec une bonne dose de vodka.

    Moins marxistes-léninistes que trotskistes

    Derrière les propos caustiques, il y a de l’engagement dans Marx Attack (International). Le duo Soviet Suprem"réveille les morts," avec un son aussi festif que... nécrologique (Héros). La révolution russe (1917) est le fil conducteur tracé par le duo de Soviet Suprem, sans doute moins marxistes-léninistes que trotskistes ("On va conquérir la planète"). Cela n’empêche par nos Parisiens soviétiques de faire, avec Couic Couic, une parenthèse sur la révolution française et la guillotine.

    Sur cet album électro-rock au flow enlevé (Tsar Wars) et à l’orchestration travaillée avec soin (Russian Kiss), c’est sans doute Jules-Edouard Moustic qui en parle le mieux : " Il existe 37 mots de base pour désigner la précision du flow de "Soviet Suprem" : chantul, gorgoute, koulikoultouk, takoum et meulmeul en sont un bel exemple. Le renne des dancefloors aizoubanais "Ilastikol Kaklu" le répète dans toutes ses soirées (attention, c'est à lire à voix haute en imitant l’écho de la sono) : "Ouah ouah ouah ouah ouah, Soviet Suprem em em em em, Ok Ok, "Mars Attacktack tack tack tack" Mayor mazik planète nèt nèt nèt nèt. Une fois de plus, ce qui se fait de bien dans notre Pays, ce sont les autres qui en parlent le mieux. Ça me rend dingue."

    Soviet Suprem, Marx Attack, Wagram / Chapter Two Records, mars 2018
    http://www.sovietsuprem.com

  • Anti de Pretto

    Non, ce n’est pas la fête de trop chez Fabian Tharin. Lorsqu’Eddy de Pretto déplore de l’avoir "faite et défaite et ça jusqu’au fiasco", Fabian Tharin invite au contraire à ne rien lâcher et à vivre sans se prendre la tête : "Ce soir on fait comme on peut / Tant qu’il y a encore des chips / On décédera la semaine prochaine / On est jeune et il fait beau" (N’y pense plus).

    Fabian Tharin, musicien suisse singulier propose une électro pop bidouillée mais follement efficace et enjouée, servie par des textes lumineux : "Elle m’a juste dit / On construit tous un peu des châteaux / Que le soleil pourra encore éclairer quand on sera mort / Je lui ai demandé / Ouais pour se prolonger quoi" (L’éternité).

    Des sonorités d'harmonium

    Son premier EP, Fosbury, est un hymne à la vie, à la jeunesse et à la fête. Mais c’est aussi le grand saut d’un artiste hors-norme, comme le suggèrent ses quatre premiers clips à la gloire de Dick Fosbury, le célèbre athlète qui a révolutionné la technique du saut en hauteur.

    Véritable "anti de Pretto" du rap et de la chanson, Fabian Tharin accroche avec ses titres minimalistes et attachants : "Laisse le fond de ta bière couler dans mes cheveux / Ne va pas te faire foutre / On est collés tu vois / Ça viendra bien / T’inquiète / Ça finit toujours comme ça" (Ne va pas te faire foutre).

    Il parvient à complètement désarçonner et subjuguer avec le dernier titre de son EP, le magnétique Y avait de la lumière. Son parti pris musical ? Des sonorités électros, s’approchant de l’harmonium, servent un texte dense et une construction mélodique sophistiquée. Il faut bien s’arrêter sur ce titre au lyrisme indéniable, nostalgique et tendre : "Il faisait beau à Noël / Moi j’empile des souvenirs au fond du lave-vaisselle..."

    Il y a de la lumière et du talent chez Fabian Tharin. On y est entré et on ne veut plus en sortir.

    Fabian Tharin, Fosbury, EP, Musique Sauvage / [PIAS], 2018
    En tournée, le 13 juillet, Fribourg, Les Georges Festival,
    avec General Elektriks & Le Roi Angus, Fribourg
    Le 19 juillet, Chavannes-près-Renens, Zelig, Lausanne

    http://www.fabiantharin.ch

  • Breizh’n roll

    Promettez-moi une chose : si cet été, ou plus tard, vous allez en Bretagne, pensez à mettre dans vos bagages l’album éponyme des Odylane. Pour une plongée dans la culture breizh, c’est l’idéal, avec en plus ce je ne sais quoi de punch et d’énergie.

    Odyssée et Gauloise c’est la tradition celtique "très rock’n roll" comme le dirait notre inénarrable Philippe Manœuvre. En parlant de tradition, on en est en plein dedans, avec l’envoûtant titre Le Diable. Cette chanson nous plonge dans le folklore breton, plus précisément dans un bar interlope de la Rue de la Soif : "Ce soir j’ai vu le diable / Aux ruses impeccables / Je suis tombé dans le panneau / On a pris l’apéro."

    Dans un bar interlope de la Rue de la Soif

    Du bon breizh’n roll donc, avec des sonorités celtes, rock mais aussi méditerranéennes (Un Italien en Irlande), pour un album autoproduit par un groupe... de la région de Strasbourg. Guillaume Levy et Quentin Bangert, accompagnés de leurs deux autres comparses Valentin Descourvières et Piel Benoit utilisent pour leur album une guitare classique, un bouzouki irlandais, un violon et d’un cajón, une sorte de caisse venue tout droit du Pérou.

    Dépaysement assuré donc pour ce groupe qui assume à 100 % ses influences traditionnelles (Polka du Cerf), pop rock (Soleil Levant) world et ethnique (La Prisonnière du Désert), même si c’est bien la musique celte qui domine dans leur album Odrylane, à l’exemple de Faune Sauvage et surtout de Galv an Dans, offrant une reprise mixée de Tri martelod et de La Jument de Michao.

    L’autre chanson à texte de cet album, Sous les Étoiles, est un titre hip hop qui n’est pas sans rappeler Manau et sa Tribu de Dana, avec le sens de l’engagement en plus : "Je vis à une époque / Où tout semble en toc / Il n’y a que des images / Où sont passés les sages."

    Du Breizh’n roll, d’accord. Mais aussi de l’exigence et de la chaleur (Un Italien en Irlande) dans un très bel album à mettre dans vos bagages pour cet été.

    Odrylane, Odrylane, 2018
    http://odrylane.fr

  • Qui est Nevché ?

    Et qu’est-ce que la Valdevaqueros ?

    C’est une plage de sable fin le long de la Costa de la Luz, cerclée par des dunes. Ce sera aussi le titre du prochain album de Fred Netché – alias Frédéric Nevchehirlian.

    L’homme s’est bâti une solide réputation d’artiste exigeant, nourri à des influences tous azimuts : musique populaire, poésie, slam, électro ou chanson.

    Sa biographie nous rappelle que son premier album a reçu le prix Printemps de Bourges 2005 et FAIR 2008 et que Fred Nevché a vendu en toute discrétion pas moins de 20 000 albums et s’est produit dans 400 concerts.

    Il sort son nouvel EP Besoin de la Nuit, avec Simon Henner aux arrangements. Ce sont trois titres à l’univers si particulier de Nevché, où électro et chansons se répondent et se servent mutuellement (Le Besoin de la Nuit), comme si le musicien voulait donner à ces vagues électro somptueuses un supplément d’âme grâce à un des mots, aussi simples soient-ils.

    Dans Si tu vas, Fred Nevché privilégie le texte et le minimalisme (claviers et voix) : "Rien ne sera aussi beau / Qu’un dauphin d’Ajaccio / Si tu vas / Pour un vers de Garcia Lorca."

    Le voyage et le road-movie (ou plutôt le "road-music") est le thème de Moi Je Rêve de Johnny Souvent. Dans ce slam coloré, exotique et rythmé, c’est sans doute à Valdevaqueros  que nous entraîne Nevché, sur ces plages espagnoles, avec ces "panneaux publicitaires de paysages utopiques en 3D."

    Dépaysement musical et dépaysement tout court assuré pour cet EP d’un artiste dont la sortie du nouvel album est attendu le 21 septembre prochain.

    Fred Nevché, Besoin de la Nuit, Internexterne, sortie le 8 juin 2018
    Fred Nevché, Valdevaqueros, Internexterne, sortie le 21 septembre 2018
    http://nevchehirlian.com

  • Le Grand Paon est un animal de nuit

    Sur la pochette du premier album de Palatine, se tient une silhouette mystérieuse au regard triste, menaçant et sombre. Sombre ou plutôt rouge, car c’est bien la couleur dominante de Grand Paon de Nuit. La voix androgyne à la M de Vincent Ehrhart-Devay plane sur un album pop aux images obsédantes.

    Et avec toujours ce rouge, véritable fil conducteur : rouge rassurant (Comme ce Rouge me plaît), rouge passion (Stockholm), rouge violence (Ecchymose) ou le rouge dépaysant d’un road-movie dans le sud des États-Unis (Baton Rouge).

    Le grand paon est un animal de nuit annonce Palace dans le rock nimbé d’électro, City Of Light, et dans Paris - L’ombre où le noctambule parle de ses défauts sublimés.

    Fil rouge conducteur

    Les quatre garçons de Palace, JB Soulard, Adrien Deygas, Toma Milteau et bien entendu Vincent Ehrhart-Devay, proposent onze titres alternant le rock sombre à la PJ Harvey (Golden Trickets), l’easy-listening (Marions-nous), l’électro pop (City Of Light) ou encore la chanson française, celle d’Alain Bashung ou de Christophe (Faux-Brouillards). Baton Rouge est un voyage dans les bayou, grâce à un électro country-folk aux guitares joueuses. Ce titre avait déjà été enregistré dans une version publique pour le premier EP de Palace, sorti en 2015.

    Beaucoup plus sombre, Ecchymose est un titre aux accents grunge, aussi torturé, provocateur et paradoxalement lumineux que le Where The Wild Roses Grow de Nick Cave & The Bad Seeds et Kylie Minogue  : "Bye-bye bye-bye / Je dois partir / Là où mes mains se posent / Poussent des ecchymoses."

    Palace c’est aussi du symbolisme mis en musique comme la chanson titre, Grand Paon de Nuit : "J’ai les yeux rouge / Je sors seulement la nuit/ Personne ne bouge / J’aime le silence."

    Il y a quelque chose d’unique et de fatal dans ce premier album, obsédant comme cette femme croisée dans C’était un Loup : "On voyait tout / mais pas son âme / C’était un loup sous une peau de femme." De nouveau, le rouge passion.

    Palatine, Grand Paon de Nuit, Yotanka, 2018
    En concert au Café de la Danse le 15 mai 2018
    http://palatinemusic.fr

  • Prélude de Bach

  • Les idées noires de Louis Arlette

    C’est un rock ambitieux, engagé et sombre que propose Louis Arlette dans son premier album, Sourire Carnivore. Un rock à la Noir Désir, travaillé avec un son électronique (À cœur ouvert), cher à un artiste fasciné par l’univers de Kraftwerk et ayant collaboré avec le groupe AIR. Sourire Carnivore a d’ailleurs été enregistré en partie dans leur studio de l’Atlas. Pour son premier album, le musicien a également été rejoint par le batteur Julien Boyé (Gush, Nouvelle Vague) et le guitariste Daniel Jamet (membre fondateur de La Mano Negra, Gaëtan Roussel et Saez).

    Que l’on ne se fie pas à ce nom vintage : Louis Arlette propose un opus soigné dans la musique et les paroles pour offrir un opus moderne et âpre (Sourire carnivore), aux rythmiques appuyées et sophistiquées (Providence) et aux textes où se mêlent désillusions (À la dérive), spleen (Tristesse limpide), colères (À la dérive) mais aussi percées de lumières et de soleil (L’Avalanche).

    Idole de Proust

    À l’instar de Jean-Louis Murat, Louis Arlette excelle dans ces textes d’une belle maîtrise (Jeux d’Or), tel ce titre pop lumineux qu’est Tristesse limpide : "Comme tu es rigide / Et si bien contrôlée / Il n’y pas une seule ride / Sur ton calme frigide / Triste comme un rocher / Sombre comme un passage à vide." Et l’on apprend non sans surprise que l’artiste cite volontiers quelques gens de lettres l’ayant influencé : Balzac, Hugo, Flaubert, Aragon, Villon et surtout Marcel Proust, son "idole". Rien que ça.

    Louis Arlette est parti à la recherche du temps pour mettre bas un album franc et engagé qui peut se lire aussi comme un marqueur de notre époque. L’auditeur pourra trouver dans À notre Gloire une référence au Bataclan dans cette "jeunesse dorée" fauchée par le "carnage" au "monstrueux reflet" qui "a changé de visage."

    Sombre, vivant et sacrément actuel, Sourire Carnivore marque la naissance d’un chanteur à la personnalité forte et à l’univers hors des modes. Un album à mordre à pleines dents. 

    Louis Arlette, Sourire Carnivore, Le Bruit Blanc / One Hot Minute / Wagram, février 2018