Musique ••• Chanson ••• Eva Marchal, 88
Le retour de Zeitoun
Sorti au début de l’été, le dernier album de Frédéric Zeitoun, J’aimerais, est une occasion en or de découvrir un artiste complet et à la carrière incroyable : auteur, parolier, chroniqueur à la radio et à la télé, comédien mais aussi chanteur bien dans son époque, sachant aussi bien manier sa plume dans l’encre bleue délicate que dans le vitriol.
Au vu du pedigree du personnage, l’auditeur ne sera pas surpris de découvrir un album s’inscrivant dans le registre d’une chanson française classique alliant écriture soignée des textes et orchestration traditionnelle. Frédéric Zeitoun propose une production attrayante et élégante : piano, accordéon, cordes ou guitares et non sans accents orientaux ("Vivre vivre").
De quoi est-il question dans cet album dont la sincérité est indéniable ? "J’aime tout le monde" proclame par exemple Frédéric Zeitoun sur un air de jazz manouche, dans ce qui apparaît comme l’aveu d’un vrai gentil : "J'ai envie d'embrasser / À bouche que veux tu / Mes ennemis d'hier / Et même des inconnus / Rancunier de nature / Je deviens écolo / Et la terre est si belle".
À ce morceau altruiste autant qu'amoureux vient en écho cet autre titre, "J’aimerais", que l’on pourrait qualifier comme une prière pour soi, chacun et autrui : "J’aimerais que les points sur les i ne soient plus jamais dans la gueule. J’aimerais qu’on respecte la vie pas seulement dans un linceul…. Au conditionnel improbable, j’aimerais tant et tant de choses, magnifiques et invraisemblables, comme une terre jonchée de roses".
L’aveu d’un vrai gentil
Vrai album humaniste, J’aimerais parle de vie ("Les pires mensonges") d’épanouissement mais aussi d’amour ("Tant que tu es là"). C’est aussi "Apprends à désobéir", une adresse destinée au fils du chanteur ("Apprends à désobéir / Ne ploie jamais sans réfléchir / C’est ton onzième commandement / Comme les dix premiers / Souviens-t-en."). C’est encore "Vivre vivre", un morceau sur "l’urgence" de vivre et de "dire aux gens qu’on les aime tant". Frédéric Zeitoun entend parler de son expérience : "Est-ce le privilège de l’âge ? / Les années nous rendent plus sage / Je sais le bonheur bien fragile / Je sais tout ne tient qu’à un fil". "Parenthèse" parle, lui, de lâcher prise : "Prendre un pari sur l’inconnu" pour "imposer" son histoire et "préférer le risque aux regrets" pour se laisser diriger par son cœur seul.
Homme de son époque, Frédéric Zeitoun règle également ses comptes avec notre époque corsetée et un peu trop sérieuse. C’est le sujet de "Rire de tout" : "Les temps se font dures… régime sans sucre et sans sel, régime sans sexe et sans gluten". Contre "la pensée unique" et le prêt à penser, l’artiste propose une chanson contre les censures de tout poil et pour l’impertinence.
En parlant de chanson, celle "sans chanteur" propose, sur un thème assez classique, de faire s’exprimer une chanson attendant son interprète ("Facile à habiller un piano seul me suffirait."), son public et le succès ("Pourquoi elle et pas moi ?"). "La chanson sans chanteur" a du sens pour un parolier qui a signé pour une pléthore d’artistes.
Citons aussi cet autre titre, "La vie sur son visage" qui est le portrait d’un vieil homme à Lisbonne, durant l’été 2019. Il s’agit du portrait d’un bel homme aux cheveux blanc portant fièrement "la vie sur son visage", chante Frédéric Zeitoun qui dédie cet extrait à Gérard Davoust.
Le musicien ne pouvait pas terminer mieux son album que par le morceau "En mieux", une chanson autobiographique merveilleuse qui résume l’état d’esprit d’un artiste hors-pair : "À l’éternelle question / Si c’était à refaire... / Je réponds sans ambages en regardant les cieux / Je ferais tout pareil mais en mieux".
Frédéric Zeitoun, J’aimerais, Roy Music, 2021
https://fredericzeitoun.fr
https://www.facebook.com/fred.zeitoun
Voir aussi : "Souvenirs de Piednoir"
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