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chanteuse - Page 16

  • Éloge de la folie

    Lioness Shape est d’abord un trio de trois musiciennes : Manon Chevalier au chant et aux compositions, Maya Cros aux claviers et Ophélie Luminati à la batterie. Les trois musiciennes ont sorti ce printemps leur premier album Impermanence, un opus de jazz au caractère bien trempé.

    Impermanence revendique son message féministe, "pour que les femmes soient plus que beauté et tranquillité. Pour qu’elles expriment leur art, et développent leur créativité. Pour qu’elles se rendent compte de cette force incroyable qu’elles ont en elles. Force qu’elles s’efforcent de réprimer chaque jour au nom de la beauté". C’est ce qu’exprime à sa manière le premier morceau "Somos tantas" ("Nous sommes nombreuses"), un jazz à la fois méditatif et rythmé – oui, c’est possible ! – et en espagnol s’il vous plaît…  

    Tout aussi voyageur, "El Canto de mi deseo" voit le jazz se teindre là encore d’accents latins, avec un  naturel désarmant. Le groupe Lioness Shape s’aventure sur des terres mariant pop, rock, world et jazz, bien entendu, à l’image de "Self-reliance", au cool porté par la voix chaleureuse, veloutée et chaloupée de Manon Chevalier. 

    Audacieux, fou et intelligent

    Audacieux, fou et intelligent, le trio joue de l’alternance dans un album qui ne cesse d’alterner passages complètement dingues et respirations bienvenues, quand elles ne sont pas zen ("Blue Wooden Chair"). Les musiciennes savent tout aussi bien alterner les langues : l’anglais, l’espagnol et le français et même l’irlandais ("Tóg go bog é").

    Je parlais d’audace. Elle est bien présente dans le titre "L’origine". Ce morceau, d’abord très lent, s’emballe grâce à une singulière composition contemporaine que l’on peut rapprocher du "sauvage" morceau mystérieusement intitulé "Tóg go bog é" dont le titre signifie : "détendez-vous". Tout un programme. 

    Parlons également de "My Tame Bird" qui peut se définir comme un morceau jazz dopé aux percussions et aux sons électro, avec la voix incroyable de Manon Chevalier s’envolant tel un oiseau. Tout aussi enthousiasmant, "Sand World" est enthousiasmant grâce encore à son interprétation aux accents faisant penser à la chanteuse pop islandaise Björk. La chanteuse de Lioness Shape se surpasse encore dans "The Last Lullaby", un titre dans lequel elle se fait crooneuse.

    Au final, Impermanence frappe par son étrangeté omniprésente, à l’instar de "Water" qui vient clôturer cet album étonnant de créativité, de folie et d’enthousiasme grâce à trois filles formidables. 

    Lioness Shape, Impermanence, Laborie Jazz, 2021
    https://www.lionessshape.com
    https://www.laboriejazz.fr/artistes/lioness-shape

    https://www.facebook.com/Lionessshape
    https://www.instagram.com/lionessshape

    Voir aussi : "Deux de jazz"
    "Madeleine Cazenave derrière le piano"

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  • À cause des garçons

    Je vous avais parlé il y a un peu plus d’un an du dernier titre de Sophie Le Cam, "Les garçons les garçons les garçons". La chanteuse l’avait enregistré en plein Grand Confinement – bien que ce morceau ne parlait absolument pas de crise sanitaire ni du Covid.

    Sophie Le Cam propose en ce moment une nouvelle version réalisée par Antoine Sahler – qui est, donc, un garçon. Le clip est absolument à découvrir.

    "Les garçons les garçons les garçons" est un chant malicieux et amoureux pour les mecs "chelous", "cosmiques" mais aussi "tendres" et "drôles". En un mot : irrésistibles ("Et de jeunes à vieilles / Les filles veulent leur tête pareil / Posée sur l'épaule / Risquant que le khôl / Déteigne").

    Les garçons de France, de Navarre et d’ailleurs remercieront Sophie Le Cam pour cet hommage que l’artiste commente sous forme d’un souvenir d’enfance : "J'avais un amoureux en CM2, il s'appelait Laurent Petit. Il avait dit à Isabelle Valus qu'il l'aimait à 46 % et moi à 100 %".

    Sophie Le Cam, Les garçons les garçons les garçons, single, 2021
    http://www.sophielecam.fr
    https://www.facebook.com/chansonsdemoi.sophielecam

    Voir aussi : "Ah, les garçons…"
    "Que le rituel commence"

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  • Que le rituel commence

    Révélée il y a trois ans comme une nouvelle voix de la pop, Tess revient avec son EP, Origin. "Origine" comme celle de cette chanteuse venue tout droit de la Réunion et qui entend bien bousculer les canons de l’électro pop.

    Les 4 titres de son mini-album se veulent, comme elle le dit, une véritable introspection de l’âme mais aussi une ode à la vie, à l’amour de l’être et surtout à l’acceptation de soi. Un message qui parlera évidemment à tout le monde.

    Mais intéressons-nous plutôt au premier extrait d’Origin. "The Ritual" a le mérite de désarçonner l'auditeur avec un sujet fort : réhabiliter nos démons. La chanteuse le dit sans faille dans un clip somptueux, à la fois gothique et sensuel, réalisé par Francis Courbin : "Que le rituel commence… / Je parle à mes démons… J'ai besoin de toi dans ma vie / Je n'ai pas besoin de les appeler / Ils sont là depuis toujours" ("Let the ritual begin /  I talk to my demons / I don’t need to call them/ They’re right here have always been").

    L’univers de Tess et ses choix artistiques sont assumées : voilà qui rend sa découverte si importante.

    Elle sera à suivre coup sûr les prochains mois et les prochaines années. 

    Tess, Origin, EP, 2021
    https://www.facebook.com/TessOfficial
    Lien d’écoute
    @tessofficial
    https://msha.ke/tessoceane

    Voir aussi : "Mémorable évidence"

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  • On ne meurt pas d’amour

    Le voilà donc, ce fameux deuxième album de Clara LucianiCœur : 12 Titres écrits en plein covid avec l’amour et le disco comme fils conducteurs. L’auditeur y trouvera a priori plus de légèreté que dans son précédent premier opus Sainte-Victoire qui  était plus personnel, plus engagé, plus féministe, plus sombre aussi. 

    L’amour guide le nouvel opus de l’auteure de "La grenade" avec de la gourmandise, de l’envie et de la joie de vivre. L’ex-interprète de La Femme semble prendre son envol dans un album qui n’est qu’un chant d’amour et qui commence d’ailleurs par des battements de cœur. Le choix du disco prend à cet égard tout son sens avec son tempo en quatre temps réglé sur le rythme cardiaque.

    "On ne meurt pas d’amour", nous dit en substance la chanteuse pour reprendre un titre de son précédent opus : c’est le sujet du morceau éponyme : "L’amour n’a jamais tué personne / Et les seuls coups que l’amour pardonne / Sont les coups de foudre" ("Cœur").

    Clara Luciani assume pleinement ses désirs, ses élans et ses plaisirs : "Je ne peux pas oublier ton cul / Et le grain de beauté perdu / Sur ton pouce et la peau de ton dos / Le reste je te le laisse / Mais je retiens en laisse / Mes souvenirs émus de ton corps nu".

    Avec "Le chanteur", toujours aussi rythmé, nous sommes dans une facture seventies et funk. Clara Luciani fait moins le portrait d’une star que celui d’une d’une fan qui commet une " erreur d’amateur " : tomber amoureuse d’un chanteur. "Quelle grossière erreur / Tomber amoureuse du chanteur… / Mais on n'épouse pas plus / Les chanteurs que les comètes / Les étoiles filantes, les poètes."

    Pour "Tout le monde (sauf toi)", l’un des meilleurs morceaux de Cœur, Il faut toute la grâce et le talent de Clara Luciani pour chanter les frustrations, la banalité du quotidien ou les mensonges et tracer en même temps le portrait d’un homme, tout en chaleur, en gentillesse et en admiration : "Toi, tu as ton style et tes manières / Et t'as toujours l'air d'arriver / D'un long voyage, en mer / Toi, tu as tes ombres et tes mystères / Tu vas, le cœur en bandoulière / Et moi je veux juste te regarder faire".

    Nous parlions de la période de crise sanitaire qui avait permis l’écriture de l’album. Pour "Respire encore", Clara Luciani parle justement de cette période de confinement, de "l'immobilité forcée". Et d’ajouter : "Ce soir la vie va recommencer". Parlant d’une femme (sans doute de la musicienne elle-même ?), il est question dans ce formidable morceau du retour post-covid  à la vie, à l’amour, à la danse et à la musique :  "Il faut qu'ça bouge, / il faut que ça tremble / Il faut qu'ça transpire encore / Dans le bordel des bars le soir / Débraillés dans le noir / Il faudra réapprendre à boire / Il faudra respirer encore". Et toujours avec ce rythme disco, comme si Clara Luciani avait choisi d’enrober sa mélancolie dans une BO de Fame.

    Le choix du disco prend tout son sens avec son tempo réglé sur le rythme cardiaque

    L’auditeur retrouvera avec "J’sais pas plaire" et "Sad & Slow" le retour de ce qui faisait la spécificité de Sainte-Victoire : des titres pop plus lents, plus mélancoliques et plus sobres. Plus sombres aussi : "J'sais pas faire / J'sais pas plaire / C'est tout un savoir-faire / Faut aimer s'enrober de mystère". Pour l’élégant "Sad & Slow", la musicienne est accompagnée de Julien Doré au piano et au micro : "Joue moi quelque chose de beau / De sad and slow / Quelque chose sur ton piano".

    La douce mélancolie est encore présente dans "La place" qui est le constat du temps qui passe : "Me revoilà, tout comme avant mais en adulte / Même si le temps est une brute / Face au cœur il ne fait pas le poids / Me revoilà, tout comme avant mais en adulte / Même si le temps est une brute".

    Il faut absolument souligner le travail sur les mélodies et sur les orchestrations soignées, à l’instar de "Bandit", vraie et authentique chanson d’amour : "Bandit / Tu as braqué mon cœur et ma vie / Et de cambriolages en baisers volés / J'ai appris à céder."

    "Au revoir" vient en toute logique terminer un album résolument seventies. Mais le ciao de Clara Luciani est à la fois élégant, amical et non sans amertume : "Au revoir, je referai l'Olympia, au zénith les yeux fermés, toute l'éternité / Et faudra pas pleurer / après / Quand j'aurai tout chanté / Qu'enfin je me tairai". Évidemment, ce n’est qu'un au revoir, sur le même battement de cœur qui ouvre un opus inoubliable. 

    Clara Luciani, Cœur, Romance Musique, 2021
    https://www.facebook.com/claralucianimusique
    https://claraluciani.store
    https://claraluciani.lnk.to

    Voir aussi : "Clara Luciani, La Femme libérée"

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  • Transformations de Laughing Seabird

    Derrière le joli nom de Laughing Seabird se cache la Française Céline Mauge, à l’œuvre dans son très beau deuxième album, The Transformation Place,  avec ses 12 titres arrangés par Emmanuel Heyner.

    La chanteuse se fond à merveille dans un répertoire lorgnant tant du côté de l’Irlande ("My Shell"), de l’Angleterre ("Scarborough Fair"), des États-Unis ("In Spite Of") que de ce côté-ci de La Manche et de l’Atlantique ("Le somptueux règne des absents", "Karmen KéroZen", "Les filles sages et les autres").

    Avec une fausse légèreté,  Laughing Seabird aborde des sujets sérieux et parfois même rarement traités, comme la grossophobie dans le titre "I Feel Hat" qui ouvre l’opus : "I feet fat today / I ate too much yesterday evening". Pour le morceau "Vivre (No Way Back)", c’est la dépression qui est au cœur de cet appel à se ressaisir et avancer : "Chaque jour, travaille à te grandir / Réveille-toi, la terre est bien ronde / Chaque jour, œuvre à ton avenir / Et tu trouveras la voie".

    Balançant sans cesse entre folk, brit pop et chanson française, la musicienne d'origine bretonne revendique ses inspirations musicales anglo-saxonnes et irlandaises, à l’instar de la reprise du chant traditionnel "Scarborough Fair". On se ballade avec plaisir dans The Transformation Place, tant Laughing Seabird sait allier mélodies travaillées, rythmes entraînants et textes sensibles ("Direction oubliée (Let Go)").  

    "The Transformation Place", le titre éponyme de l’album, s’avère l’un des plus réussi : lancinant, coloré et gourmand, il frappe justement par ses transformations incessantes, ses ruptures et ses contrastes, tout comme par le travail sur la voix de Laughing Seabird, toujours sur le fil dans cet appel à ne jamais abandonner ses rêves d’enfant et à ne pas se fier aux premières impressions ("You have just opened the doors of your perception"). Tout cela est chanté, joué et interprété non sans clins d’œil assumé pour la musique psychédélique des années 70 (on pense par exemple au fameux "Bicycle Race" de Queen).

    Lancinant, coloré et gourmand

    L’étonnant et passionnant album de Laughing Seabird a beau être très cohérent, il n’hésite pas à prendre des chemins détournés, lorsqu’elle choisit de nous emmener du côté de l’Irlande, dans un voyage dépaysant et amoureux ("Just won’t fall in the trap / Take the road without a map / Sure to find not look for / Any key to a door… / I become the laughing seabird / And you’re my shell", "My Shell").

    Dans sa facture pop-rock assez classique, "Le somptueux règne des absents" dévoile un peu plus des failles de la douée et prolifique Laughing Seabird, comédienne, doubleuse et, ici, musicienne et chanteuse. Derrière ce titre énigmatique, se cache un morceau poignant sur une disparition qui ne passe pas : "J’ai beau me dire / Qu’il faut tenir / L’hiver s’installe et le froid empire… / J’ai beau vouloir et vaillamment croire / Mes combats sont vains quand vient le soir" ("Le somptueux règne des absents"). "L’appel du monde" semble répondre à ce cri de douleur : partir, découvrir le monde, chante-t-elle, comme en écho à ce qu’elle disait dans " The Transformation Place".

    La superbe reprise de Sailor Song" de Rickie Lee Jones ("I could fly away / But i take the sea / For stranger days than these") ainsi que le rock régressif "Karmen KéroZen" ont été inclus dans la bande original du film Ça tourne à Saint Pierre et Miquelon, réalisé par Christian Monnier et dans lequel joue, comme par hasard, Céline Mauge. La musicienne propose là aussi de nouvelles invitations au voyage, en pleine mer. Idéal pour laisser derrière soi ses tourments : "KarmenZéro, j’ai brisé mes chaînes / Rompu les barreaux de ma cage / Je suis pour toujours en voyage. "

    Laughing Seabird choisit le talk-over pour la dernière chanson faussement insouciante, "Les filles sages et les autres" : avec humour, effronterie et non sans un vibrant message féministe, Céline Mauge égratigne les contes pour enfants qui s'avèrent souvent être de vraies prisons mentales : "Les filles sages vont au paradis / Les autres, où elles veulent / Moi je poréfère suivre mon envie / Car la liberté n’a pas de prix." À bonne entendeuse… 

    Laughing Seabird, The Transformation Place, Ad Libertam / L'Autre Distribution, 2021
    https://laughingseabird.com
    https://www.facebook.com/laughingseabird
    https://www.instagram.com/laughingseabird

    Voir aussi : "Madeleine Cazenave derrière le piano"

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  • Carole Masseport est bien à sa place

    Nous attendions avec curiosité le nouvel album de Carole Masseport, En Équilibre. Après la sortie d’un premier single, "On se remet de tout", la chanteuse confirme tout le bien que l’on pensait d’elle, grâce à un album écrit et produit avec soin, avec entre autres Albin de la Simone et JP Nataf, le chanteur des Innocents.

    Carole Masseport chante en équilibre dans un opus tout en finesse ("À ma place"). Le thème de l’amour est bel et bien là même s’il s’agit d’amours cabossés mais revivifiés par de nouvelles rencontres : "une seconde chance n’a rien de ridicule… Je suis là, hélas, et lasse / Je suis là à ma place".

    Sur des textes faussement légers ("On se remet de tout"), la chanteuse assume la simplicité de textes et de mélodies parlant de la vie à deux ("Rien n’y fera"), de la recherche de l’autre ("Si elle m’aime"). L’attachement, les confessions, les trahisons et les doutes : Carole Masseport les exprime de sa voix fragile à la Enzo Enzo, avec une économie de moyens.

    Faussement légers

    Tout cela est fait avec grâce, y compris lorsque la musicienne s’engage et aborde le problème des migrants ("Calais"), avec un regard plein d’acuité et presque avec légèreté ("Garavan").

    Il faut aussi parler de "Cœur de dentelle",  une jolie balade folk avec guitare et voix sur la fin implacable d’une relation, en raison d’un homme "qui tire sur la corde… le loup qui dévore c’est toi". Cette histoire d’un échec amoureux est chantée avec une retenue bienvenue, ce qui n'empêche pas des moments de confession : "Dans mon lit c’est Hiroshima / J’y ai cru toi et moi / Tu m’as crue je ne joue pas".

    Toujours pop-folk, l’album se termine par une étonnante reprise de "Hors-saison", le tube de Francis Cabrel. Et s’il fallait chercher là les influences de Carole Masseport ? 

    Carole Masseport, En Équilibre, L’autre distribution, 2021
    https://www.carolemasseport.fr
    https://www.facebook.com/carolemasseportmusic

    Voir aussi : "Consolation"

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  • On a retrouvé Zoé Morin

    Allez, je me lance : c’est une vraie petite surdouée que je vous invite à découvrir, si ce n’est déjà fait. Elle s’appelle Zoé Morin et s’affirme comme une artiste d'une précocité exceptionnelle. Bla Bla Blog l’avait découverte il y a quelques mois. Elle revient avec un nouvel EP, J'me cherchais, à la manœuvre au texte et à la musique.

    L’auditeur qui l’avait découvert dans son précédent album retrouvera dans ce nouvel EP ce qui fait la singularité de cette jeune musicienne : son âge, justement – 13 ans – et son formidable talent.

    Il y a de l’enthousiasme à suivre la musicienne toulousaine, audacieuse, fraîche, sincère et injectant du slam, de l’électro et du hip hop dans ses chansons. On sent l’urgence dans l’écriture de ses chansons, parfois minimalistes ("T’es trop parfait pour moi"), ce qui n’empêche pas une qualité d’écriture indéniable, à l’instar du morceau "Je reviendrai pour te voir" : "Elle a attendu / Que son père revienne / Chargé comme une mule / D’un ossement de baleine."

    Zoé Morin chante et scande ce qui fait le quotidien et les préoccupations d’une jeune adolescente : l’amour et ses premiers émois ("Qu’est-ce qu’il est beau ton sourire"), les doutes ("T’es trop parfait pour moi", "J’me cherchais") mais aussi des histoires ordinaires et parfois tragiques comme ce récit sur une tragédie ordinaire, racontée au plus près ("L’accident").

    Le talent explose à tous les coins de cet EP. Zoé Morin dit qu’elle se cherchait. Et bien nous, on l’a bien trouvée. Elle est absolument à écouter et suivre, et cela pour un bon bout de temps.

    Zoé Morin, J'me cherchais, Spinnup, 2021
    https://deezer.com
    https://www.instagram.com/zoemorinchanson

    Voir aussi : "Le talent n’attend pas le nombre des années"

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  • Pauline Paris,  parle-nous de Renée Vivien

    Il y a des découvertes comme ça qui sont à la fois bienvenues et de véritables plaisirs.  

    Renée Vivien (1877-1909) sera sans doute une étonnante révélation pour beaucoup. Femme de lettres de la fin du XIXe et du XXe siècle, elle a laissé l’image d’une artiste en marge, poétesse, féministe et figure du saphisme. Elle fut entre autres amante de Natalie Barney et proche amie de Colette ou de Pierre Louÿs. Il faut lire, et en l’occurrence écouter dans la version musicale de Pauline Paris, le poème "Avril" pour comprendre pourquoi la redécouverte de cette poétesse est indispensable.

    L’enregistrement de Pauline Paris, sobrement intitulé Treize poèmes de Renée Vivien, est un excellent moyen de découvrir cette formidable femme de lettres de la Belle Époque, victime d’une "dépression suicidaire" à l’âge de 32 ans. Nicole G. Albert souligne dans le texte de présentation que Renée Vivien se disait mauvaise musicienne, ajoutant aussitôt que "chaque grand poète est un musicien". Voilà qui rend pertinent l’opus présenté par Pauline Paris.

    Dans les 13 titres de l’album, la Parisienne a choisi avec soin des textes exprimant tous à leur manière le désir, dans une langue baudelairienne et parnassienne ("La pleureuse"). Hélène Hazera commente ainsi : "À l’écoute, on remarque à quel point la versification de Renée Vivien est parfaite. Vers de huit ou douze pieds, alternance de rimes féminines et de rimes masculines".

    Odes amoureuses, chants de ruptures, déclarations enflammées : Pauline Paris s’approprie des textes mélancoliques, voire sombres, pour en faire des adaptations délicates ("Sans fleurs à votre front"), légères ("Fraîcheur éteinte") ou gourmandes ("Violettes d’automne"), comme autant de bouquets de renoncules. Pour autant, l’opus est traversé de vagues sombres ("Mon ombre suit comme un reproche… comme un remords", "Chanson pour mon ombre"). Pour faire vivre les Treize poèmes de Renée Vivien, Pauline Paris n’hésite pas à utiliser la pop-folk ("Sans fleurs à votre front"), le rock ("À l’amie"), le talk-over ("Chanson pour mon ombre"), le jazz ("Lassitude") et même la  pop tahitienne ("L’éternelle tentatrice").

    Surnommée "Sapho 1900", Renée Vivien propose des textes saphiques à la sophistication parnassienne : "Je t’aime d’être, ô sœur des reines de jadis, / Exilée au milieu des splendeurs de jadis, / Plus blanche qu’un reflet de lune sur un lys…"

    "Car j’osai concevoir / Qu’une vierge amoureuse est plus belle qu’un homme, / Et je cherchai des yeux de femme au fond du soir"

    "Parle-moi", à la facture parisienne période début XXe siècle, voit surgir des épines derrière un splendide texte au désespoir naissant et inéluctable : "Parle-moi, de ta voix pareille à l’eau courante, / Lorsque s’est ralenti le souffle des aveux. / Dis-moi des mots railleurs et cruels si tu veux, / Mais berce-moi de la mélopée enivrante."

    Dans "À l’amie", c’est une ode à une amante dont il est question, cette fois sur un rythme rock : "Ainsi nous troublerons longtemps la paix des cendres. / Je te dirai des mots de passion, et toi, / Le rêve ailleurs, longtemps, de tes vagues yeux tendres, / Tu suivras ton passé de souffrance et d’effroi."

    "Sans fleurs à votre front", l’un des plus brillants titre de cet album, se comprend autant comme le regret d’une amoureuse éconduite que comme une revendication assumée pour les amours saphiques : "Je ne suis point de ceux que la foule renomme, / Mais de ceux qu’elle hait… Car j’osai concevoir / Qu’une vierge amoureuse est plus belle qu’un homme, / Et je cherchai des yeux de femme au fond du soir".

    Née à Londres en 1877 (Pauline Mary Tarn dans le civil), Renée Vivien a proposé un poème en anglais, "The Fjord Undine" : Pauline Paris s’empare courageusement de ce conte gothique et romantique consacré à une ondine, dans un esprit très fin de siècle : "By one far-off autumn evening, beheld I the long-dreamed-of water-maiden, Undine..."

    Tout aussi lyrique et parnassienne, "Prolonge la nuit" est proposée par Pauline Paris dans une interprétation scandée, sombre et très contemporaine : "Prolonge la nuit, Déesse qui nous brûles ! / Éloigne de nous l'aube aux sandales d'or ! / Déjà, sur la mer, les premiers crépuscules / Ont pris leur essor".

    Impossible enfin de ne pas parler de l’album de Pauline Paris sans parler de ce très bel objet littéraire, éditorial, musical et graphique, car ces "Treize poèmes" se présentent comme une œuvre totale mêlant le CD de la chanteuse française, les textes de Renée Vivien, des textes de présentation et les magnifiques dessins à l’encre d’Élisa Frantz. Pour ce très bel album, Pauline Paris s’est vue décernée le Coup de Cœur de l’Académie Charles Cros 2020. Voilà qui est mérité. 

    Pauline Paris, Treize poèmes de Renée Vivien, Quart de Lune / ErosOnyx, 2021
    http://www.paulineparis.com
    https://www.instagram.com/paulineparisofficiel
    https://madeinfrantz.com

    http://www.renee-vivien.com

    Voir aussi : "Claire Gimatt, libre"

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