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iran - Page 2

  • Si vous avez tout compris à cet article c’est que je me suis mal exprimé

    La science ne fait pas partie des sujets habituellement traités sur Bla Bla Blog. Une fois n’est pas coutume, je vais cependant faire le focus sur un scientifique au parcours exceptionnel, récompensé il y a quelques semaines par une médaille de l’innovation 2016 du CNRS. Trois autres scientifiques ont également été récompensés : Cathie Vix-Guterl, Marin Dacos et Thierry Heidmann. "Ces médailles de l’innovation viennent ainsi rappeler ce fait : la recherche entretient de multiples liens avec la société qui l’entoure et bien nombreux sont les scientifiques engagés, à des titres tout aussi multiples, dans des actions de transfert en relation directe avec les entreprises" commente Nicolas Castoldi, délégué général à la valorisation du CNRS.

    Ali Zolghadri, professeur et chercheur à l’université de Bordeaux se voit primé pour son travail innovant en automatique. Le CNRS récompense du même coup un parcours exceptionnel.

    Né en Iran à Shiraz il y a 53 ans, Ali Zolghadri est venu en France pour faire ses études supérieures. Après un master en robotique et un doctorat en Automatique, il intègre l’université de Bordeaux comme maître de conférences en 1993. Nommé professeur d’université en 2003, il occupe plusieurs postes à responsabilité au sein de pôles de recherche : direction de la formation doctorale "Automatique, signal et image et productique", responsable d’une équipe de recherche et co-animateur du DAS G2MCO du pôle de compétitivité Aerospace Valley ou responsable de plusieurs projets scientifiques français et internationaux.

    Son CV long comme le bras reflète tout autant ce qui se fait de mieux dans la recherche française qu’il illustre la pugnacité d’un homme, très attaché du reste au système universitaire français régulièrement concurrencé par les universités américaines, anglaises ou chinoises. Le CNRS récompense aussi un homme modeste qui s’est lui-même déclaré autant honoré que surpris par ce prix.

    La médaille du CNRS vient récompenser des avancées innovantes en automatique. Ali Zolghadri a travaillé avec Airbus sur la conception d’algorithmes utilisés pour assister les pilotes et diagnostiquer certaines pannes du système de commandes de vol en temps réel. Ce brevet est aujourd’hui exploité depuis janvier 2015 sur les Airbus A350. Ce qui est récompensé est ni plus ni moins qu’une science peu connue du public mais omniprésente dans notre quotidien : l’automatique.

    Qu’est-ce que l’automatique ? C’est là que les choses se corsent. Comment définir le plus simplement possible cette matière ? A priori, le terme d’automatique ferait penser à une branche de l’électronique, l’automaticien étant ce spécialiste penché au-dessus de machines plus ou moins sophistiquées. En réalité, cette science se révèle bien plus complexe et plus vaste. L’automatique touche à l’identification, la modélisation et l’analyse des systèmes dynamiques : forts en maths, vous aurez peut-être une petite chance d’intégrer le petit cercle des automaticiens si l’algèbre et les systèmes linéaires, l’échantillonnage, la géométrie différentielle, les algorithmes ou le calcul des variations ne vous sont pas totalement inconnus. On comprend que la robotique et la cybernétique ont leur place dans cette science aux applications infinies : ce peut être autant les régulateurs de vitesse, les machines-outils dans l’industrie lourde, les centrales nucléaires ou bien encore les navettes spatiales. Ali Zolghadri est d’ailleurs le co-auteur d’un ouvrage sur le contrôle et guidage des véhicules aérospatiaux (Fault Diagnosis and Fault-Tolerant Control and Guidance for Aerospace Vehicles, avec David Henty, Jérôme Cieslak, Denis Efimov et Philippe Goupil, éd. Springer, Londres, 2014). Sans enlever la place de l’homme dans le pilotage d’un avion, Ali Zolghadri travaille sur la conception d’un pilote virtuel plus à même de gérer une situation de crise ou de vol complexe.

    Ce sont ces travaux peu connus du grand public mais pourtant fondamentaux, qui ont été récompensées par le CNRS. La prochaine fois que vous prendrez l’avion ou que vous utiliserez, de retour de week-end, votre régulateur de vitesse sur autoroute, nul doute que vous aurez une pensée pour l’automaticien qui a pensé à votre sécurité.

    Ali Zolghadri, David Henty, Jérôme Cieslak, Denis Efimov et Philippe Goupil, Fault Diagnosis and Fault-Tolerant Control and Guidance for Aerospace Vehicles, éd. Springer, Londres, 2014
    Nicolas Castoldi, "Toute la richesse de l’innovation française à l’honneur", CNRS Innovation, 26 mai 2016
    "Ali Zolghadri reçoit la médaille de l’innovation du CNRS 2016", http://www.u-bordeaux.fr, 19 mai 2016
    Médaille de l'innovation CNRS 2016 : Ali Zolghadri
    Ali Zolghadri © Frédérique PLAS

  • Encore quelques lignes sur l'Iran

    En complément de mon article sur le Carnet de voyage du Globecroqueur consacré à l'Iran, voici une citation que je ne peux m'empêcher de partager et publier :

    "Du lointain passé, le temps s'en est allé. En ces temps où ont disparu les longs bavardages nocturnes, elle revient parfois, l'odeur âcre qui coule au cœur de la vie. 

    Alors, le talon aiguille, rouge d'une passion ardente, dit d'une voix méprisante : que sais-tu de l'amour?" 

    Mahmud, Téhéran, été 2008

     

  • Le Globecroqueur en Iran

    Amateurs de guides de voyage, ce carnet de route sur l'Iran est pour vous. 

    Un voyage en Iran, dans le pays des ayatollahs, de la puissante République islamique chiite : étrange destination, me direz-vous. C'est pourtant ce qu'a entrepris Philippe Bichon, qui se surnomme lui-même le Grobecroqueur (il est l'auteur de plusieurs guides en Égypte-Syrie, en Inde et au Tibet).  

    Pourquoi l'Iran ? Alors que vient de se terminer une des plus longues batailles diplomatiques de ces dernières années, l'accord sur le nucléaire iranien, l'ancien royaume perse est en passe de s'ouvrir au monde, via notamment le tourisme. Dans son dernier numéro, le magazine Carto fait un focus sur le nouvel engouement de cette destination depuis l'arrivée au pouvoir de Hassan Rohani (2013). Ainsi, nous apprenons que le tour-opérateur Clio a enregistré 40 % de réservations supplémentaires entre mai et décembre 2013, qu'entre 2003 et 2013 le nombre de visiteurs a triplé dans la République des mollahs et que les retombées économiques y ont crû de 7,4 % en 2014. 

    Mais revenons à ce carnet de voyage de Philippe Bichon. Ce dernier y relate son périple touristique en Iran, durant l'été 2008, alors que ce pays était en pleine crise nucléaire, derrière Mahmoud Ahmadinejad. Mieux qu'un livre, le Globecroqueur nous offre une restitution plus vraie que nature de son cahier de route : dessins, aquarelles et croquis reproduits, journal fidèle imprimé à laide d'une police de caractère de type manuscrite ("au nom prédestiné de "Philippe"", précise l'auteur), insertion de témoignages (avec leurs traductions) d'Iraniens ou de voyageurs ayant croisé le chemin du baroudeur, ouvrage agencé en deux parties afin de retrouver l'esprit des deux cahiers originaux reliés en fin de voyage chez un artisan de Téhéran.

    Au final, l'objet que le lecteur découvre est un bijou graphique, élégant, original : une rareté éditoriale. Le contenu est à l'avenant : avec précision et passion, le Globecroqueur nous fait vivre en détail les étapes de son périple d'un mois dans un pays moins connu pour ses joyaux touristiques que pour ses crises internationales. 

    Les cinq semaines de voyage nous font découvrir tour à tour Shiraz et le mausolée de Shah-e-Cheragh, son bazar ou la mosquée Jameh Ye Atigh, Persépolis et ses vestiges antiques, Kerman et le bazar Vakil, Rayen et sa citadelle en pisé, Mahan et le Aramgah-e Shah ou le mausolé du derviche Ne'matollah Vali, Yazd et la Jameh Masjed (Mosquée du Vendredi), classée au Patrimoine mondial de l'UNESCO, son Musée de l'Eau ou ses badgirs (citernes d'eau), Kharanaq et son étonnant minaret vacillant, Meybod et sa citadelle en ruine ou Ardakan, ville typique en pisé. Il nous fait également visiter par procuration Kashan et son caravansérail ou ses "historical houses" (la Khan-e Abbasin, la Khan-e Borujerdi ou la Khan-e Tabatabai), les villages typiques comme Abyaneh ou Cham, un site consacré au zoroastrisme, religion antique tolérée par la République islamique. 

    Huit jours de ce voyage sont consacrés à Ispahan, ville mythique perse qu'un vers du XVIe siècle surnommait "la moitié du monde". Cette mégapole d'un million et demi d'habitants regorge de merveilles sur lesquelles s'arrête longtemps le Globecroqueur : Naqsh-e-Jahan, la plus grande place du monde après celle de Tien Anmen (512 mètres sur 160), le bazar d'Ispahan, la mosquée du Shah, le palais Chehel Sotun, celui de Hasht Behesht (Huit Paradis), la medersa Chahar Bagh, la mosquée Jameh, les rives de la Zayandeh ou le quartier arménien de Jolfa avec la cathédrale de Vank. C'est surtout à Ispahan que se révèle l'art perse des fresques, des miniatures, de la faïence ou de la mosaïque.

    Le voyage du Globecroqueur se termine par la capitale, Téhéran : ville moderne, foisonnante et passionnante avec le palais de Sa'd Abad, l'ancienne résidence du Shah (avec les fameuses bottes de bronze, symboles de la chute de l'ancien régime), la Tour Azadi commémorant en 1971 les 2500 ans de l'empire perse, l'Iran Bastan, le musée archéologique de Téhéran, le bazar, la Shah Masjed ou les excursions vers le belvédère surplombant Téhéran, non loin du Tochal et ses 3964 mètres de haut.

    Mais Philippe Bichon n'est pas ce baroudeur "bouffeur de kilomètres" – comme un de ces touristes français qu'il croise et qui n'hésite pas à dire tout le mal qu'il pense des journaux de voyage ! – mais un homme ouvert et curieux, avide de comprendre la société iranienne. Ce n'est pas la moindre des qualités de ce carnet de route que de faire oublier l'image obscurantiste de l'État chiite. Certes, les tchadors, les Pasdaran (Gardiens de la Révolution), les affiches de propagande montrant côte à côte Khomeiny et Khameney, les arrestations pour cause de voile pas assez couvrant et les interdictions religieuses absurdes existent et choquent le voyageur occidental. Mais ce que le lecteur français découvre c'est la véritable facette de la société iranienne : l'hospitalité, l'ouverture d'esprit, la générosité et la soif de liberté. Le Globecroqueur n'est pas avare en détails sur les anecdotes de ses voyages et sur la vie quotidienne des Iraniens qu'il rencontre : la cuisine locale (le byriani, le tacheen, le dough ou les glaces dont les Iraniens sont friands), la passion nationale pour le pique-nique, la musique, réprimée par les ayatollahs mais paradoxalement omniprésente, les bornes de solidarité, les problèmes administratifs et la vie sociale particulièrement riche.  

    Et derrière cette vie riche, il y a aussi et surtout ces Iraniennes et ces Iraniens croisés, que ce soit Saleh, Mahmud, Azadeh, Hediye, Amir, Samar, Rassoul, Nasim, Narguess ou Hamid. Les témoignages que beaucoup ont laissé dans le carnet de voyage du Globecroqueur est un supplément d'âme à ce guide qui est une vibrante invitation à découvrir l'Iran, ses joyaux, sa culture et ses habitants.   

    Philippe Bichon, Carnet de Route : Iran, éd. BleuEdition, Pau, 2009
    Des extraits de ce guide en libre consultation

    www.globecroqueur.com
    phil@globecroqueur.com
    T. Chabre, "L'Iran à l'heure de la diplomatie du tourisme", Carto, juillet-août 2015
    "Encore quelques lignes sur l'Iran"

    Article dédicacé à Brigitte, Ali, Tania et Sacha

     
    France3 Pau - Philippe Bichon - exposition... par Philippe_Bichon