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italie - Page 3

  • BlackBanshee ou la juste cruauté

    Étranges et cruelles que créatures que celles de BlackBanshee, aka Marga Biazzi.

    Dans le subtil et néanmoins sombre album Petites Ballades cruelles proposé en France aux éditions Shockdom, la dessinatrice italienne se fait conteuse d’histoires, au fil d’un recueil s’égrenant au fil des quatre saisons.  Dix histoires sont mises en scène, avec une économie de texte mais un luxe de détails et une grande finesse dans les dessins.

    Ces ballades cruelles placent la nature au cœur de ces fables. L’homme n’y a pas le plus beau rôle, sauf exception lorsqu’il secoure par exemple un animal blessé ("Gratitude"). S’inspirant de légendes ancestrales, Marga Biazzi anthropomorphise la nature. Des êtres merveilleux, des créatures inquiétantes ou de fragiles mais impitoyables fées ("Celle qui veille") entendent demander des contes à ces êtres humains malveillants, qu’ils soient chasseurs, braconniers ou simples mortels, pour qui un animal n’est qu’une chose sans âme destinée à être tuée et mangée ("La génisse blanche").

    Des êtres merveilleux, des créatures inquiétantes ou de fragiles mais impitoyables fées

    BlackBanshee entend faire de ces contes fantastiques autant de messages en faveur de l’écologie et contre la cruauté humaine. Pour servir son propos, elle n’hésite pas à faire couler le sang, transformer une simple enfant en monstre (la revisite du Petit Chaperon Rouge dans l’histoire "Fais attention à qui tu rencontres / Quand dans le bois tu te perds") ou une créature aquatique en maîtresse criminelle ("Folle solitude).

    Parmi ces dix contes, le lecteur sera sans doute séduit par la sixième ballade ("Eté »), "L’enfant dans le champ". Nous voilà cette fois transporté au Japon chez un vieil homme recueillant un enfant martyrisé. Pas de nature détruite ici, mais une enfance piétinée.

    Voilà de curieuses, cruelles et très justes petites ballades cruelles, à découvrir. 

    Marga "BlackBanshee" Biazzi, Petites Ballades cruelles, éd. Shockdom, 2022, 96 p.
    https://fr.shockdom.com/boutique/fusion/petites-ballades-cruelles
    https://www.margabiazzi.it

    Voir aussi : "L'art de Loputyn"

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  • L'art de Loputyn

    C’est à une découverte que je vous invite, celle d’une artiste italienne, à travers un passionnant et très bel artbook proposé par les éditions Shockdom.

    Derrière Loputyn se cache la dessinatrice italienne, Jessica Cioffi, aux aquarelles délicates dans la facture et aux représentations souvent cruelles. Après avoir publié en France ses albums Cotton Tales (le dernier chapitre de l’artbook y est consacré) et Francis, les éditions Shockdom proposent un somptueux artbook divisé en sept chapitres, idéal pour découvrir un aperçu de l’œuvre de Loputyn.

    Son univers est celui de princesses perdues dans des mondes où rôle le mal et la mort.  Ces jeunes filles rêveuses (le chapitre "Rêverie"), parfois perdues dans des paysages végétaux – ce pourrait être le parc d’un domaine anglais comme une nature sauvage, à l’instar de ces trois lilliputiennes en pleine promenade – semblent tout droit sortie d’un livre pour enfant de l’époque victorienne (le chapitre "Promenade dans la nature").

    Sauf que Loputyn, aka Jessica Cioffi, vit à Brescia dans la péninsule italienne et fait partie de ces jeunes artistes européennes prometteuses.

    L’artiste s’inspire de l’imagerie du XIXe siècle pour mieux détourner les codes des contes pour enfants

    L’artiste s’inspire de l’imagerie du XIXe siècle, visible jusque dans les costumes, pour mieux détourner les codes des contes pour enfants. Dans cet artbook, les monstres côtoient d’innocentes damoiselles d’une autre époque. Loputyn ose aussi l’érotisme. Que l’on pense au chapitre "Queue de coton", à cette interprétation sensuelle de Peau d’Âne ou encore à cette jeune fille à demie-nue pourfendue par une épée en même temps qu’un loup qu’elle étreignait – et/ou qu’il attaquait.

    L’amour fait, du reste, l’objet d’un chapitre. La peintre et graphiste italienne représente à l’aquarelle ces magnifiques jeunes filles dans des tableaux où la cruauté de l’amour est implacable : adolescente accrochée à un tableau de collectionneur telle une insecte, maîtresse empalée avec son loup d’amant (nous l’avons dit), un autre loup mangeant le corps-pelote de laine d’une jeune fille. Mais ces héroïnes peuvent aussi être les manipulatrices, à l’exemple de cette ensorceleuse sexy ou de cette autre jeune fille brossant avec amour le pelage d’un loup des plus dociles.  

    À l’instar des livres pour enfants, les animaux sont omniprésents : des loups, des lapins blancs, souvent victimes naïves et innocentes, un chien enragé ("Possession"), un escargot nonchalant, sans compter ces crânes de cervidés ponctuant les illustrations de l’artbook, comme autant de vanités.

    Loputyn fait partie de ces artistes italiennes à découvrir absolument. Son univers fait de rêveries entend aussi bousculer le lecteur. La technique de l’aquarelle, la finesse des traits et l’inspiration des vieux livres pour enfants viennent servir des messages sérieux et plus sombres et cruels qu’il n’y paraît.   

    Loputyn, Artbook, éd. Shockdom, 2022, 80 p.
    https://fr.shockdom.com
    https://stay-hop.com/collections/loputyn
    https://www.facebook.com/jessica.cioffi.14
    https://www.instagram.com/loputyn/?hl=fr

    Voir aussi : "Oh, les beaux jours"
    "Terribles filles rêveuses"

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  • Bataille contre la mafia

    "Bataille" est traduit en italien par "Battaglia". "Battaglia" comme Letizia Battaglia, une photographe sicilienne qui s’est battue toute sa vie contre ce fléau qu’est la mafia. Elle est au cœur de l’ouvrage de Frederika Abbate, Letizia Battaglia, Une Femme contre la Mafia (éd. de la Reine Rouge).

    L’essai n’a pas vocation d’être exhaustif mais plutôt de faire découvrir une figure héroïque qui a fait de son art un combat contre la pieuvre mafieuse. Letizia Battaglia, décédée en avril dernier, s’est souvent expliquée sur sa démarche et sur ce choix qui a mis sa vie en danger : "On a voulu faire croire à l’opinion publique, à l’intérieur ou à l’extérieur de l’Italie, que la mafia prospérait en Sicile à cause de la société civile, d’une certaine mentalité. Mais c’est une affirmation injuste qui nous humilie et nous dénigre".

    L’appareil-photo de Letizia Battaglia est sa meilleure arme pour montrer que tout n’est pas perdu et que, face au crime, les mafiosos ne sont pas ces gentlemen dignes de figurer dans Le Parrain, mais des personnages vulgaires, violents et cruels. Disons aussi que sur l’œuvre de la photographe plane en premier lieu l’ombre de la mort.

    Cette mort, écrit Frederika Abbate, "elle la photographie avec respect". Ces clichés "sont aussi des actes de dénonciation et de combat qui produisent leur effet". Dans ses noirs et blancs, derrière la grâce, la beauté et l’innocence se cache le deuil, la violence et le désespoir. 

    Guerre civile en Sicile

    Le livre de Frederika Abbate pose quelques jalons chronologiques sur cette femme née une Sicile conservatrice, meurtrie par une agression sexuelle, enfermée par ses parents puis mariée jeune, avant que la photo ne la sauve littéralement. Elle vouera toujours un amour inconditionnel à la Sicile et à Palerme où elle est née, un amour auquel vient faire écho la propre histoire de l’auteure, transformant par moment l’essai biographique en hommage personnel.

    Le livre revient en quelques pages sur les décennies de crimes impunies suivies de l’opération "Mains propres" menée par quelques juges et personnalités incorruptibles qui ont souvent payé de leur vie leur bataille contre la mafia, qu’elle s’appelle Cosa Nostra, Camorra ou 'Ndrangheta. Un des chapitres du livre se nomme "Guerre civile en Sicile", comme pour mieux marquer l’extrême violence de ces États dans l’État. On peine à croire que Letizia Battaglia a pu survivre aux attentats, règlements de compte et exactions sur une île qu’elle a très peu quittée et qu’elle a photographiée, le plus souvent pour le journal communiste L’Ora. Elle est décédée le 13 avril dernier à l'âge de 87 ans. 

    S’écartant de l’essai biographe pur, Frederika Abbate consacre plusieurs chapitres sur les séries et les clichés de Letizia Battaglia pour mieux y faire ressortir ses influences classiques autant que sa modernité (sa passion pour Pasolini, ses photos montrant la vie quotidienne à Palerme et son engagement féministe par exemple). La mort y est toujours présente, d’une manière ou d’une autre, cette mort qu’elle savait photographier à hauteur de femme et d’homme pour mieux lutter contre la mafia, devenue son ennemi intime – et sans doute aussi le nôtre : "Avant de lutter contre la mafia, tu dois faire ton propre examen de conscience et ensuite, après avoir détruit la mafia à l’intérieur de toi, tu peux combattre la mafia qui se trouve dans ton cercle amical. La mafia, c’est nous-même et notre mauvaise façon de nous comporter". 

    Frederika Abbate, Letizia Battaglia, Une Femme contre la Mafia, éd. de la Reine Rouge), 2022, 182 p. 
    https://frederika-abbate.com
    https://www.facebook.com/letiziabattagliaofficial

    Voir aussi : "Rêves violents"

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  • Le monstre est parmi nous

    Brightvale, petit village d’environ 1000 habitants, a, au sein de sa communauté, six "Fils du Soleil Noir". Une incongruité statistique, alors que 0,1 % seulement de la population mondiale peut être identifié comme tel, soit 6 millions de personnes.

    Mais que sont ces "Fils du Soleil Noir" ? Ce terme désigne un phénomène inexpliqué : seize ans plus tôt, un matin, les habitants du globe ont découvert au-dessus de leur tête un astre noir. Il s’est levé pour une journée de 24 heures avant de laisser place le lendemain à un soleil normal. Quatre ans plus tard, le même phénomène s’est reproduit : "Ce jour-là, les gens furent victimes d’une tristesse terrible. un désespoir profond et sans fin, comme cela n’était jamais arrivé auparavant". Dans la petite bourgade de Brightvale, les conversations tournent régulièrement autour de cette bizarrerie que des scientifiques n’ont jamais pu expliquer, en dépit d’hypothèses des plus sérieuses aux plus farfelues : prions, physique quantique ou ésotérisme. 

    Les fils du Soleil Noir sont ces enfants nés suite à ce phénomène étrange : "Toutes les femmes qui furent… fécondées… sous l’influence de cet astre obscur, donnèrent naissance à des enfants avec de petites mais importantes altérations génétiques". Matthew et Clementine font partie de ces parias et ne peuvent compter que sur leur amitié et leur soutien respectif pour lutter contre les rejets des habitants. 

    Fable horrifique autour du rejet, de la peur de l’étranger et des superstitions

    Soleil noir, de Dario Sicchio, Letizia Cadonici et Francesco Segala (édité en France chez Shockdom), n’est pas seulement une histoire de SF dont l’influence du Village des Damnés de John Carpenter (1995) semble être évidente. C’est aussi une fable horrifique autour du rejet, de la peur de l’étranger et des superstitions. Matthew et Clementine incarnent les victimes innocentes dans un village des plus ordinaires tombant dans la paranoïa. Pour autant, les auteurs refusent tout manichéisme, grâce à ces deux personnages interlopes que sont Ivan et Ofelia.

    Soleil noir nous parle aussi de superstitions, de religions, de peur apocalyptique, dans un livre dont les chapitres sont imaginés comme un compte-à-rebours impitoyable. Qui sont les monstres, se demandent en substance les trois auteurs italiens ? "Le soleil noir n’est pas juste sorti du néant. Il y est aussi retourné. Tout ce qu’il reste de cette horreur, c’est vous".

    Dario Sicchio, Letizia Cadonici et Francesco Segala, Soleil noir,
    trad. Jose Maniette, éd. Shockdom, 2022, 96 p.

    https://fr.shockdom.com/boutique/yep/soleil-noir
    https://www.facebook.com/ShockdomSrl

    Voir aussi : "Retour sur Débiles & Dragons"

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  • La fille de la porte d’à côté

    Figure marquante de la bande dessinée italienne, Fumettibrutti signe avec P. mon Adolescence trans (éd. Massot) le deuxième volet d’un récit autobiographique commencé avec le remarqué Romanzo esplicito (Feltrinelli Comics, 2018), récompensé chez nos amis transalpins du le Prix Micheluzzi de la meilleure première œuvre.

    Il faut remarquer que le lecteur français qui n’aurait échappé au premier tome pourra découvrir sans difficulté ni frustration P. mon Adolescence trans.

    Fumettibrutti démarre son récit au moment de ses quinze ans. Il ou elle a quinze ans, fréquente un lycée sans grande motivation, pense aux garçons, se fait draguer, fume, fait l’amour et aussi dessine. P. Fait de son corps à la fois une carapace, un objet de désir et de séduction mais aussi toute la problématique de son identité : en refusant de citer son prénom civil, P. marque d’emblée ses interrogations : fille dans le corps d’un garçon,  Fumettibrutti– littéralement "bédémoches" – raconte comment P. suscite critiques, rejets, incompréhensions mais aussi attirance y compris chez les jeunes hommes hétérosexuels. 

    "Si on arrêtait tout ça et qu’on acceptait les différences ?"

    Comment dépasser cette adolescence rythmée par des relations toxiques, des produits euphorisants, des rendez-vous dans des lieux interlopes, des insultes et surtout un corps qui ne correspond pas à l’identité de P. ?

    Le coup de crayon rageur et efficace de l’auteure sert une histoire faite de saynètes ordinaires (dans un salon de coiffure, en boîte de nuit, dans la rue ou dans une salle de classe), de déambulations, d’échanges via les réseaux sociaux ("La fille de la porte d’à côté" est son pseudo) et surtout d’un parcours personnel autour de l’intime et de l’identité.

    Ce deuxième tome marque de ce point de vue d’une forme d’aboutissement, avec un message humaniste  venant non pas de P. mais d’un médecin :"Si on arrêtait tout ça et qu’on acceptait les différences ?"

    Fumettibrutti, P. mon Adolescence trans, éd. Massot, 2022, 208 p. 
    https://www.facebook.com/fumettibrutti
    https://www.instagram.com/fumettibrutti
    https://massot.com/collections/mon-adolescence-trans

    Voir aussi : "24 heures dans la vie d’une femme"

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  • Oh, les beaux jours

    Dandelion risque bien de rendre indifférent celles et ceux qui sont hermétiques à la magie, à la fantaisie et à la poésie. Après un voyage dans le premier tome de la série de Salvatore Callerami, voilà que sort en ce début d’année le deuxième volume des aventures de la petit Wéma, sous-titré "Gardez espoir", proposé par l’excellente maison d’édition Shockdom.

    Les dandelions sont ces esprits invisibles de pissenlits chargés de réaliser les vœux des hommes, têche qui s’annonce souvent des plus ardus, notamment lorsque la mort se mêle au jeu.

    Wéma, la dandelion du lion sacré Jua, suit son maître et protecteur dans un pays imaginaire, alors qu’un hiver rigoureux vient de s’abattre. Au même moment, sur la terre ferme, une vieille dame est en train de s’éteindre à l’hôpital. La mission pour Wéma est d’accomplir le vœu d’un enfant afin que sa grande sœur puisse dire au-revoir une dernière fois à sa grand-mère. Mission impossible ? Pas pour la déterminée dandelion. 

    Des fées, des esprits, des spectres, des gardiennes de la mémoire, des conseils de sages ou des âmes malfaisantes

    Des fées, des esprits, des spectres (les wigos), des gardiennes de la mémoire, des conseils de sages ou des âmes malfaisantes : voilà grosso modo les ingrédients de cette saga fabuleuse venue tout droit d’Italie, et dont on doit la traduction française à Federica Giuliano.

    Dandelion ravira les enfants, petits et grands, pour ses messages mêlant humanisme, altruisme et empathie. Tout cela se passe dans un univers fantastique, mais où le dérèglement climatique existe sous la forme d’un hiver dont "la transition a été brève".

    On aura bien entendu compris que l’auteur entend apporter sa contribution à un sujet sensible : "L’hiver ne veut pas s’arrêter ! On dirait que l’esprit du nord ne veut pas quitter ces terres…"

    Un vent de fraîcheur souffle sur ce deuxième volume de Dandelion, grâce évidemment à la charmante Wéma dont les paroles peuvent résonner chez chaque lecteur et lectrice : "Tu ne seras jamais vivant, Si tu restes convaincu que la seule solution est de demeurer à l'écart, loin de tous !"

    Salvatore Callerami, Dandelion, vol. 2, Gardez espoir, éd. Shockdom, 2022, 96 p.
    https://shockdom.com
    https://www.facebook.com/salvo.callerami
    https://www.facebook.com/fassioantonio

    Voir aussi : "Faites un vœu"

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  • Quand est-ce que vous nous en faites un ?  

    C’est d’Italie que nous vient Il a dit Papa !, un récit doux-amer consacré à la paternité. Son auteur Davide Caporali, dit Dado, conte cette période où la vie d’un homme bascule, lorsqu’il devient père. Son autofiction dessinée a été mise en couleurs par Chiara Zuliani et est proposé au public français par l’excellente maison d’édition Shockdom.

    Davide vit en couple avec Chiara. Un couple déjà installé, avec chacun un travail, des revenus réguliers et même un animal de compagnie, le chat Filippo. Lors d’un repas chez ses grands-parents, "la" question est lancée par la vieille dame : "Quand est-ce que vous me faites un petit-enfant, Chiara et toi ?"

    Voilà Davide mis soudainement sous pression, d’autant plus que sa compagne Chiara a abordé le sujet quelques mois plus tôt : avoir un bébé, devenir parents, fonder une famille avec un enfant… Le rêve, quoi... 

    Bientôt, le jeune homme apprend, via un test de grossesse, que les prochains mois risquent d’être bouleversés.

    "Oh, allez J’ai fait bien pire que ça dans la vie…"

    En sept chapitres et un postlude, Dado raconte au plus près les neuf mois d’une grossesse vus sous les yeux d’un futur papa tour à tour dans le déni, l’incrédulité, l’incompréhension, la maladresse mais aussi souvent de la bonne volonté à revendre.

    Dado choisit la voix de l’humour et de la dédramatisation, à travers des saynètes qui sentent le vécu : les visites à l’Ikea du coin, l’oubli d’un sac ou l’emprunt d’une voiture sur le parking de la maternité. Sans oublier ces réflexions qui rendent la bande dessinée auto-fictionnelle : "Oh, allez J’ai fait bien pire que ça dans la vie… Comme choisir de devenir dessinateur de BD !"

    Les parents de Davide et Chiara sont singulièrement discrets, l’auteur préférant s’intéresser aux grand-parents. Dans ces scènes, la BD devient poignante autant que drôle, avec un pépé a priori aux abonnés absents mais finissant par prendre une place capitale dans ce récit vivant à plus d’un titre. 

    Dado, Il a dit Papa !, trad. Maria Giulia Lambertini, éd. Shockdom, col. Lol, 2021, 144 p. 
    https://fr.shockdom.com/boutique/lol/il-a-dit-papa
    https://www.facebook.com/davide.caporali

    Voir aussi : "Respect pour les femmes"

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  • Quel tempérament !

    Je vous avais parlé il y a quelques mois de la pianiste italienne Beatrice Rana à l’occasion d’un de ses premiers albums sur le second concerto pour piano de Prokofiev et le célébrissime premier de Tchaïkovski.

    Voilà maintenant la musicienne s’attaquant à Chopin, et plus précisément aux douze Études opus 25 et aux quatre Scherzi
    Ces Études, composées de 1832 à 1836 avant d’être éditées en 1837, ont été dédiées par le compositeur polonais à la Comtesse d’Agoult, qui a été la maîtresse de son ami Franz Liszt.

    Beatrice Rana s’attaque à cette œuvre importante de Chopin avec un solide tempérament, fait de virtuosité (l’Étude n°6 en sol dièse mineur ou la n°11 en la mineur), de technicité (Étude n° 8 en ré bémol majeur), de solidité et de subtilité (Étude n°4 ).

    Parler de romantisme dans l’exécution de cet opus 25 serait un raccourci très classique – si on peut le dire ainsi. En réalité, la pianiste italienne utilise toutes les gammes de son talent et toute sa technicité pour proposer un enregistrement passionnant, vivant et élégant, à l’instar de la première étude (Étude n°1 en la bémol majeur "La harpe éolienne").

    La jeunesse s’exprime dans toute son évidence lorsque Beatrice Rana se fait virevoltante et aérienne (l’Étude n°2 en fa mineur, "Les abeilles"). Son jeu se fait dansant dans la n°3 en fa majeur, justement surnommée "Le cavalier". Qui dit jeunesse dit insouciance, une caractéristique que l’on peut retrouver dans l’Étude en mi mineur (surnommée "La fausse note" en raison de dissonances volontairement glissées par le compositeur), complexe jusqu’à s’égarer dans des chemins aventureux et modernes.

    Technique, virtuose mas sans effet de manche

    Moderne, l’Étude n°6 frappe par sa complexité et par sa très grande virtuosité dans ce qui s’apparente à un objet autant romantique que pré-debussyen.

    Romantique, Chopin l’est indubitablement dans l’Étude n°7 en ut dièse mineure, avec cette tendre mélancolie comme dans la n°10 ("Aux octaves"), plus sombre et sur laquelle plane une puissance romantique autant qu’une inspiration plus introspectif, parvenant à prendre l’auditeur à contre-pied.

    Beatrice Rana séduit particulièrement avec l’Étude 9 en sol bémol majeur ("Le papillon), étude technique, virtuose mas sans effet de manche, avec une maîtrise qu’on ne lui enlèvera pas. Plus bouleversante encore, l’Étude n°11 en la mineur démarre comme une marche funèbre, avant de  se déployer, majestueuse et sombre. Disons aussi qu’il souffle sur ce morceau un "vent d’hiver". C’est d’ailleurs le surnom donné à cette œuvre.

    L’opus 25 se termine avec la douzième étude en ut mineur, exécutée avec souplesse mais aussi avec une belle solidité.

    L’enregistrement de Beatrice Rana est complété par les quatre Scherzos (op. 20, 31, 39, 40 et 54), qui ont été composés entre 1831 et 1842 par Frédéric Chopin. L’on pourrait qualifier ces morceaux de divertissements à la fois joueurs, dansants mais non sans une certaine noirceur.

    Beatrice Rana s’en empare avec grâce, vivacité et une certaine insouciance, à l’instar du Scherzo n°4 en mi mineur. La virtuosité de la pianiste sert à merveille le premier Scherzo en si mineur ("Le bouquet infernal"), dans lequel ne manquent pas ces vagues singulières que l’on croirait métaphysiques. L’interprète se montre à la fois solide dans ce jeu et délicate dans le deuxième Scherzo en si bémol mineur. Ici le romantique se pare de romanesque grâce à ses lignes mélodiques harmonieuses.

    L’avant-dernier titre de l’album, le Scherzo n°3 en do dièse mineur se révèle dans toute sa modernité. Mélancolique et d’un sacré tempérament dans son rythme, il précède le seul Scherzo en majeur (mi majeur), aussi léger et agréable à l’oreille qu’une déclaration amoureuse.

    Voilà qui conclue de la meilleure des manières un des albums classiques importants de l’année 2021. Et une confirmation du très grand talent de Beatrice Rana.

    Frédéric Chopin, Études op.25 et 4 Scherzi, Beatrice Rana, piano, Warner, 2021
    https://www.beatriceranapiano.com
    https://www.facebook.com/BeatriceRanaPiano
    https://www.warnerclassics.com/fr/artist/beatrice-rana

    Voir aussi : "Une Italienne parle aux Russes"
    "Au salon avec Chopin et Haley Myles"

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