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Claire Passy : "L’éditeur à part, c’est l’histoire de trois personnages qui se sont rencontrés"
Le monde de l’édition vient de voir naître un nouvel acteur, L’éditeur à part. Christophe Pavlevski, François-Xavier Bellest et Claire Passy sont les heureux parents de ce "bébé". Nous avons voulu interroger Claire Passy au sujet de cet éditeur à part.
Bla Bla Blog – La naissance d’un éditeur est toujours un événement dans la vie culturelle. Comment présenteriez-vous L’éditeur à part ? Et d’abord, quelle est sa philosophie ?
Claire Passy – Oui, il est vrai que la création d’une maison d’édition est un évènement particulier dans la vie culturelle. Surtout dans la période actuelle où le monde de l’édition reste très encadré, homogène et prévisible.
C’est en partant de ce constat que nous avons fait mûrir ce projet pour ainsi donner naissance à L’éditeur à part.
Elle est née de l’initiative de Christophe Pavlevski, qui est tombé dans le monde de l’édition depuis son plus jeune âge. La première chose qu’il voulait faire différemment, c’est de s’entourer d’associés avec qui il monterait un tel projet. François-Xavier Bellest et moi l’ont rejoint sur ce projet. Cela montre déjà un aspect important de la philosophie de Léditeur à part, puisque toutes les autres maisons d’éditions ont à leur tête une seule et même personne… Pas trois.
Avec des parcours totalement différents, nous avions tous l’envie de casser les codes du monde de l’édition. Nous sommes tous engagés de différentes façons par nos parcours respectifs, tout en étant des amoureux de la littérature. Nous sommes aussi parfaitement conscients de l’impact des mots et du pouvoir qu’ils peuvent avoir sur notre société. C’est donc naturellement que nous nos chemins se croisent et que nous avons décidé de faire un bout de chemin ensemble en créant L’éditeur à part. Nous souhaitons ainsi publier des personnalités à part, qui ont quelque chose à revendiquer. Déranger sans blesser, telle est notre philosophie.
BBB – Un genre a-t-il votre préférence ?
CP – Notre ligne éditoriale est très claire et elle se résume en un acronyme : ATERA, qui signe en langue basque, "En dehors", "en marge de…". Nous publions ainsi des autobiographies, des textes engagés et des romans autobiographiques.
BBB – Derrière L’éditeur à part, je crois qu’il y a trois personnes ?
CP – Tout à fait. L’éditeur à part est issu d’un travail d’équipe. Elle n’a pas une, ni deux mais trois têtes pour la diriger. Les décisions sont prises de manière collégiale.
Evidemment, il a bien fallu une personne pour initier le projet, et il s’agit de Christophe Pavlevski. Français d’origine des Balkans et marié à la culture espagnole, Christophe est un entrepreneur dans l’âme et passionné de littérature. Le monde de l’édition, il le connaît depuis toujours et c’est pour cela qu’il a toujours eu dans un coin de sa tête cette envie de créer l’éditeur à part. Mais il s’est d’abord formé, a développé ses compétences, son réseau et s’est engagé de manière multiples et variées avant de se lancer. C’est lui qui a choisi de s’associer avec François-Xavier Bellest, sémiologue émérite, passionné par la langue française.
François-Xavier, de culture française et québécoise, manipule avec brio la langue française et sait tirer profit de sa double culture pour affirmer toute la singularité de la langue française. Auteur d’une vingtaine de romans en qualité d’écrivain fantôme pour des maisons d’éditions françaises et canadiennes, il joue avec la sémantique et la psycholinguistique pour partager des émotions complexes à travers les mots. On comprend donc aisément les raisons qui ont poussées Christophe à s’associer avec François-Xavier.
Et enfin, Christophe m’a lui aussi choisi pour des compétences complémentaires aux siennes et à celles de François-Xavier. D’origine franco-allemande, passionnée de théâtre depuis le plus jeune âge, j’ai très vite orienté mes études vers l’écriture afin de compléter mes compétences en art dramatiques. Ma passion pour les langues m’a poussée à m’ouvrir vers d’autres langues puisque j’ai très vite compris qu’apprendre une langue étrangère était le meilleur moyen d’approfondir la connaissance de sa langue maternelle. Cela permet aussi de mieux comprendre et d’appréhender différemment la multitude de cultures qui nous entoure. C’est sans doute cet aspect de mon parcours qui a développé ma curiosité de l’autre. Quant à ma passion pour la scène, elle m’a aussi amené à m’intéresser à l’écriture scénaristique. J’ai ainsi acquis cette double compétence, me permettant à la fois d’écrire pour l’autre mais aussi d’adapter cette parole pour des formats audiovisuels.
L’éditeur à part, c’est donc l’histoire de trois personnages qui se sont rencontrés : un éditeur né et entrepreneur accompli, un sémiologue et sémanticien qui manie les mots avec aisance et une artiste et entrepreneuse.
Engagés, passionnés et déterminés, tous les trois se retrouvent derrière une ambition commune : publier des personnalités à part afin de faire un pas de travers dans le monde de l’édition.
Déranger sans blesser est notre philosophie.
Déranger sans blesser, telle est notre philosophie
BBB – Que souhaitiez-vous publiez dans cette maison d’édition que vous ne voyiez pas en librairie ?
CP – Nous avons réalisé que nous lisions toujours les mêmes choses… Que les prix littéraires ne faisaient que ressortir la même typologie de textes. Nous avons du mal à être surpris, emballés, passionnés, révoltés ou questionnés par ce que nous lisons… C’est, avant tout, ce manque que nous souhaitons combler.
C’est pourquoi nous sommes L’Éditeur à part. Nous souhaitons publier des personnalités à part, qui ont un point de vue à défendre, sans pour autant blesser qui que ce soit.
Il existe évidemment toujours des livres dits "polémiques" mais qui sont rédigés contre une personne morale, physique ou les deux. Ce sont souvent des attaques frontales, qui peuvent être même agressives. Comme si l’agressivité, la violence et l’outrance étaient les seuls leviers pour sortir du lot, se faire remarquer.
Nous pensons qu’il existe d’autres manières de faire.
De plus, trop de personnes ont le désir d’écrire, mais n’osent pas se lancer. Freinés par le syndrome de la page blanche, le manque de confiance en soi ou tout simplement par manque de temps, ces personnes sont malheureusement réduites au silence Et pourtant, elles ont clairement quelque chose à dire, et sans doute plus que certaines « personnalités » qui elles, publient pour satisfaire leur égo. Nous souhaitons donc donner une voix, et surtout une plume, à ces hommes et ces femmes pour qu’elles puissent transmettre leurs expériences et leur point de vue engagé.
C’est pour cette raison que nous mettons un écrivain fantôme (ou ghostwriter) à la disposition de ces personnes. Bien évidemment, cette pratique est commune chez beaucoup de maisons d’édition mais elle reste un sujet tabou. Nous avons décidé au contraire de le faire de façon ouverte et totalement décomplexée, puisqu’une véritable relation de confiance se créée entre l’auteur et l’écrivain fantôme.
BBB – Pouvez-vous présenter les premiers ouvrages publiés ?
CP – Nous avons publié deux romans autobiographiques et une autobiographie. Le temps des pourquoi ! de Juliette Klotz est la première autobiographie que nous publions. Nous avons souhaité publier cette autobiographie puisque Juliette apporte un regard inattendu sur une période de l’histoire qui a fait couler beaucoup d’encre. Alors que Juliette Klotz est née au milieu du nazisme et se retrouve enrôlée dans la jeunesse hitlérienne, son parcours fait qu’elle est devenue une femme engagée et ouverte sur l’autre. Le sujet des populations immigrées est pour elle un sujet central de notre société. Elle a une façon particulière de porter un regard humaniste sur ces gens qui doivent fuir leur pays. Idéaliste, humaniste et éternelle optimiste, elle partage les différentes étapes de sa vie à travers ce livre pour ainsi apporter un regard nouveau sur cette période de l’histoire et les liens qui ne cessent de persister.
L’amour caméléon de François-Xavier Bellest est l’un de nos premiers romans autobiographiques. Cette réédition nous semblait parfaitement adaptée au lancement de la maison d’édition puisque François-Xavier Bellest nous peint l’envers du décor du monde de l’édition. Amené par intrigues successives, l’histoire de la négritude littéraire en France se fond à celle des sentiments où tolérance et acceptation de soi marquent l’actualité du roman. Condamné au silence des œuvres qu’il a écrites pour d’autres, François-Xavier Bellest signe de son nom la nouvelle édition de son roman autobiographique. En effet, cet ouvrage confectionné il y a une vingtaine d’années reste pertinent par les sujets abordés. Ainsi sur l’aspect littéraire, le terme nègre est remplacé aujourd’hui par écrivain-fantôme. Toute discrimination relative à la couleur de peau est ainsi exclue, ce qui devrait être la norme. Tout autant que celle des amours entre personnes du même genre, normalité en devenir.
Enfin, Les équations amoureuses de Géraldine Beigbeder est aussi l’un de nos premiers romans autobiographiques.
BBB – Parmi ces ouvrages, pouvez-vous nous parler justement des Équations amoureuses, dans lequel l’auteure, Géraldine Beigbeder, allie le sentiment amoureux avec les mathématiques. J’imagine que cette audace a dû vous interpeler !
CP – Géraldine Beigbeder signe ici son premier roman autobiographique et se livre sans tabou sur plusieurs sujets. Elle écrit ici sous le nom de Julie pour aborder les thèmes de l’amour, de la quête identitaire, de la sexualité et de l’écriture littéraire.
Influencée par notre société soutenant qu’une âme-sœur serait responsable de notre bonheur, Julie s’était mise à sa recherche en se basant sur une théorie mathématique : l’équation de Drake. Mais constatant que cette recherche ne la mène nulle part et l’éloigne de ce qu’elle est vraiment, elle décide d’utiliser la liberté qui l’anime afin de se concentrer sur la véritable quête : l’accès au bonheur. Julie, autrice en manque d’inspiration après une rupture amoureuse, se lance alors dans cette quête identitaire et traite de manière franche les différentes étapes qu’elle franchit au cours de cette recherche. Amour physique, amour spirituel, désir, homosexualité… l’auteure aborde ces sujets sans tabou afin de trouver sa propre équation, et pourquoi pas, sa propre définition du bonheur.
Géraldine est exactement ce que nous recherchions, c’est-à-dire, une personnalité à part. Alors que d’autres membres de sa famille sont beaucoup plus sous le feu des projecteurs, Géraldine est beaucoup plus discrète et pourtant, pas moins créative et engagée.
Son angle d’attaque était pour le moins inattendu. Mais l’on avait tout de suite remarqué que l’on ne tombait pas dans un roman à l’eau de rose. Géraldine a cette capacité à faire le lien entre des éléments qui, à première vue, ne semblent en aucun cas liés. Et c’est en démarrant ainsi qu’elle finit par tirer ce fil imaginaire avec son franc parler. Sa capacité d’observation mélangée à sa curiosité et à son imagination nous donne ainsi un roman autobiographique tel que Les équations amoureuses.
Quand on lit ce livre, on ne lit pas du Beigbeider, on lit du Géraldine, et c’est aussi cela sa force et sa différence.
BBB – Quels sont les futurs projets pour L’éditeur à part ?
CP – Nous souhaitons publier une douzaine d’ouvrages par an. Nous venons de sortir en mars dernier nos trois premiers ouvrages, nous travaillons actuellement sur la sortie des trois prochains ouvrages, deux autobiographies et un texte engagé. Nous avançons aussi sur l’adaptation audiovisuelle de l’un de ces ouvrages.
BBB – Merci pour vos réponses, et bonne aventure littéraire !
L’éditeur à part
https://lediteurapart.com
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Voir aussi : "Zoé Morin : « J’ai enregistré sept EP depuis mes neuf ans »"
Photo – Avec l’aimable autorisation de L’éditeur à Part
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