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mort

  • Celle qui va mourir vous salue

    Comment parler de la mort ? Comment parler de la fin de vie ? Comment évoquer les derniers mois tragiques d’une jeune femme qui se sait déjà condamnée ? C’est tout l’objet du formidable roman de la Japonaise Ogawa Ito, Le Goûter du Lion, traduit par Déborah Pierret-Watanabe et paru il y a deux ans aux éditions Picquier.

    Le livre démarre à l’arrivé de Shizuku à la Maison du Lieu, un endroit paradisiaque situé sur l’île aux citrons, dans la Mer Intérieure du Japon. La jeune femme, trentenaire, se sait condamner à cause d’un cancer. Il ne lui reste que quelques mois à vivre, ce qu’elle a caché par pudeur à ses proches, à commencer par son père.

    À son arrivée dans la propriété, elle est accueillie par sa responsable, Madonna. Il y a aussi ces autres locataires, attendant comme elle la mort. Des rites sont mis en place pour adoucir leurs derniers moments et les rendre inoubliable, dont les fameux goûters.

    L’absente ne l’est pas complètement 

    Peu de livres ont aussi bien parlé d’un sujet aussi grave et douloureux que la mort et son attente. Car il s’agit bien de cela. De Shizuku, le lecteur apprendra à partir de la deuxième moitié du roman son passé et les relations avec son père et la raison pour laquelle ils se sont perdus de vue. En attendant, elle découvre ce lieu où l’humanité, la tendresse, la générosité et l’amour sont placés au centre de la vie de cette Maison du Lion.

    La trentenaire en phase terminale fait d’un chien, devenu un  locataire habituel – mais plein de vie, lui – un compagnon qui ne la quittera plus. Rokka devient le témoin de ses promenades, avec souvent vue sur la mer. Elle y rencontre aussi Tahichi, un des quelques autochtones. L’amour serait-il possible entre ces deux-là ?

    La mort est omniprésente, mais elle n'est jamais inquiétante ni non plus lourde à porter. Elle se fait même légère, comme le corps de plus en plus maigre de Shizuku. La fin est abordée avec sagesse, y compris et surtout lorsqu’elle permet une réconciliation bouleversante, que l’auteure relate par une scène familiale avec le père de Shizuku, sa deuxième épouse et sa fille. L’absente ne l’est pas complètement en dépit du fait qu’elle manque terriblement. Rarement le terme de beauté n’a paru si approprié pour un roman.   

    Ogawa Ito, Le Goûter du Lion, éd. Picquier, 2022, 272 p.
    https://www.editions-picquier.com/produit/le-gouter-du-lion
    https://ogawa-ito.com/en

    Voir aussi : "Un coupable parfait et un crime qui ne l’est pas moins"

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  • Noir comme la mort

    Et si l’on parlait de l’avant-dernier roman de Franck Thilliez ? Sorti en 2023 aux éditions Fleuve Noire, son thriller La Faille figure parmi les bons crus de l’un des écrivains français les plus célèbres à l’étranger. Parmi les qualités de Franck Thilliez, des intrigues complexes, des fausses-pistes destinées à dérouter le lecteur ou la lectrice et une ambiance  noire, pour ne pas dire poisseuse.

    Celui-ci ne déroge pas à la règle, loin de là. L’auteur ayant choisi de placer au centre de l’intrigue ni plus ni moins que la mort, omniprésente. Là, vous allez me dire : rien d’étonnant pour un thriller et pour une enquête policière autour d’un corps mystérieux découvert enterré au fond d’un bois. Un psychopathe est d’ailleurs très vite pourchassé mais ce n’est que le début d’une histoire traumatisante à plus d’un égard. 

    De quoi aussi vous donner envie de ne jamais vouloir mourir

    La mort parcourt les 74 chapitres du roman, d’abord en s’en prenant à l’un des membres de l’équipe de Sharko suite à l’opération dans une forêt des Yvelines qui tourne au fiasco.

    La découverte d’un os singulier amène le commandant de la police criminelle sur les traces d’une Emma Dorty, survivante d’un accident et qui, depuis, a voué une fascination pour la mort, pour les miraculés et pour les EMI (Expériences de Mort Imminente). Est-elle vivante ? Pourquoi s’est-elle intéressée à d’autres rescapés comme elle, parfois devenus fous et marginaux ?

    L’enquête, menée d’abord en dehors des règles officielles, devient dangereuse pour Sharko et son équipe. Elle les mène des catacombes de Paris à une cabane isolée au sud de la région parisienne, en passant par un monastère bourguignon ou un sanatorium désaffecté.

    Dans cette intrigue où les personnages apparaissent, disparaissent, s’invisibilisent ou montrent leur plus odieux visage, Franck Thilliez s’attache à montrer, derrière cette mystérieuse Faille, combien la frontière entre vie et mort est fragile. De quoi aussi vous donner envie de ne jamais vouloir mourir.  

    Franck Thilliez, La Faille, éd. Fleuve Noir, 2023, 504 p.
    https://www.lisez.com
    https://www.facebook.com/Franck.Thilliez.Officiel/?locale=fr_FR

    Voir aussi : "Sombres Pyrénées"

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  • Les philosophes meurent aussi 

    simon critchley,philosophes,mort,philosophie,confrériePhilosopher c’est apprendre à mourir, ne cessent de répéter les penseurs au cours des siècles. Penser la mort et penser sa mort est un sujet si ardu : elles est en plus devenue taboue dans notre société ! D’ailleurs, il est communément admis (même si c’est aller bien vite en besogne !) que l’histoire de la philosophie commence avec la mort de Socrate…

    On peut être reconnaissant à Simon Critchley, lui-même philosophe, d’avoir écrit ces passionnantes chroniques qui s’intéressent autant à la mort des 190 philosophes les plus marquants de l’Humanité qu’à leur propre vision de la fin de l’existence humaine : de Pythagore, massacré après avoir refusé de traverser un champ de fèves, à Sartre qui affirmait ne pas penser à la mort, en passant par Pic de la Mirandole, empoisonné par son secrétaire, ou Diderot, étouffé par un abricot.

    Ce livre passionnant est en tout cas tout sauf déprimant. Il contient des passages drôles (de l’humour noir, bien sûr !) mais aussi de belles pages lorsque l’auteur évoque quelques brillants maîtres qu’il a côtoyés (Gadamer ou Adorno) ou des intellectuels qui ont su mourir sereinement (Foucault ou Montaigne). Les Philosophent meurent aussi est aussi un excellent ouvrage d’introduction à la philosophie. 

    Simon Critchley, Les Philosophes meurent aussi, éd. François Bourin, 360 p.
    http://confrerie2010.canalblog.com/archives/2011/04/13/20887887.html

    Voir aussi : "Jours tranquilles à Clichy"
    "Dewey"

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  • Psycho-pop

    Les psychopompes, ces esprits chargés dans plusieurs mythologies et religions, de conduire les âmes des morts, fait l’objet d’une étonnante bande dessinée de l’auteur italien Fabio Listrani. Son ouvrage Charon, paru chez  Shockdom, est maintenant disponible en français.

    Charon est le nom du passeur chargé de mener les défunts vers les Enfers. La mythologie grecque nous apprend qu’il conduit une barque à travers les marais de l’Archéon, contre un peu d’argent (la fameuse obole). Voilà pour situer le contexte de la BD de Fabio Listrani.

    L’auteur transalpin a choisi de décliner cette légende à travers six histoires qui nous racontent la mort, le passage vers l’au-delà et les missions de ces passeurs à la fois terrifiants et travaillant sans état d’âme – c’est le moins que l’on puisse dire. 

    Virtuosité

    Six histoires composent cette bande dessinée dense et dessinée avec virtuosité. Il y est question d’un malade hospitalisé, entre la vie et la mort, et dont le destin tient à la lutte acharnée entre deux psychopompes ("Contraria Sunt Complementa"). Une autre nouvelle s’intéresse à Raspoutine et à sa légende sulfureuse ("Quatre retours pour l’Hermite"). "La carpe d’or" nous plonge dans un Japon légendaire et dans une histoire de vengeance mêlant honneur, amour, crime et bien entendu mort. Le dessinateur nous entraîne également dans un récit de science-fiction défiant la science, la logique et aussi l’espace ("Per aspera ad").

    La mythologie est un thème ayant repris de la vigueur ces dernières années et il n’est pas rare de le voir traité, comme ici, sous l’angle de la BD. Ce qui l’est moins est la facture de l’ouvrage, très pop et alliant des influences divers : celui de la bande dessinée européenne, tendance Philippe Druillet et Metal Hurlant, du comics américain pour le sens du détail et du manga, si l’on pense à la "Carpe d’or". L’auteur a reçu le tour de force de proposer une bande dessinée plus sombre et gothique que véritablement sanglante (même si quelques scènes restent spectaculaires), avec des psychopompes modernes, décalés et underground.

    Cela donne un ouvrage absolument somptueux qui se lit avec lenteur afin d’apprécier chaque découpage et chaque vignette. 

    Fabio Listrani, Charon – Les Chroniques des Psychopompes, éd. Shockdom, 2022, 208 p.  
    https://fr.shockdom.com/boutique/fumetti-crudi/charon
    https://www.facebook.com/FabioListrani

    Voir aussi : "Conte de coton"

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  • Que la mort est belle !

    Je dois bien avouer que j’ai un faible pour les trois célébrités au cœur de cette adaptation de Mort sur le Nil, à l'origine un roman d’Agatha Christie : Kenneth Branagh, son réalisateur et interprète d’Hercule Poirot, Gal Gadot dans le rôle de l’héritière assassinée et Agatha Christie, bien entendu. Autant dire que cette chronique ne sera donc pas d’une objectivité à toute épreuve.

    Beaucoup connaissent Mort sur le Nil, l’un des chefs d’œuvre de la "reine du crime". Hercule Poirot embarque à bord d’un bateau privatisé par la richissime Linnet Ridgeway, sur le point de convoler en juste noce avec Simon Doyle. Quelques mois plus tôt, Hercule Poirot a été témoin de la rencontre décisive entre eux alors que Simon vivait le grand amour avec Jacqueline de Bellefort, l’une des grandes amies de Linnet. Au cours de la croisière en Égypte, une invité inattendue vient se mêler aux convives : Jacqueline, justement, malade de jalousie et encore amoureuse de Simon.

    Quelques jours plus tard, Linnet est assassiné. Seule une poignée de passagers auraient pu commettre ce crime : sa femme de chambre, sa riche marraine – une communiste invétérée – accompagnée de sa suivante, la chanteuse de jazz Salome Otterbourne et sa nièce et manageuse Rosalie, une amie de Linnet. Il y a aussi le cousin et juriste à qui la jeune femme a confié son testament et un amoureux éconduit. Sans oublier Jacqueline. Tout ce beau monde, donc, aurait pu matériellement tuer Linnet Ridgeway et aurait surtout eu intérêt à le faire. Hercule Poirot, qui retrouve son ami Bouc, aura besoin de toutes ses qualités de déduction pour résoudre cette affaire. 

    Mort sur le Nil est le deuxième opus de la franchise Agatha Christie Cinematic Universe

    Le film, proposé en ce moment sur Canal+, commence par un prélude en noir et blanc qui nous présente un Hercule Poirot simple soldat et déjà doué d’une sagacité hors pair. C’est aussi l’occasion de montrer le détective belge avec des failles et des blessures – dans tous les sens du terme. L’invention de sa moustache légendaire trouve une explication. On a tout de même envie de dire : à quoi bon.

    Le spectateur sera frappé par la mise en place très longue de l’intrigue, puisque l’assassinat a lieu à la moitié du film. Vous allez me dire : c’est l’occasion de voir Gal Gadot une bonne partie du film – et, diront les mauvaises langues, pour les producteurs de "rentabiliser" l’actrice.

    Le voyage en Égypte fait figure de belle carte postale et permet – avantage non négligeable – de se familiariser avec les potentiels coupables. Les moyens du long-métrage de Kenneth Branagh sont conséquents et il ne manque rien : plusieurs stars au casting, dont Gal Gadot et Emma Mackey, devenue célèbre grâce à la série Sex Education. Précisons aussi que Mort sur le Nil, derrière ses allures d’enquête dépaysante, loin de la campagne anglaise, est un huis-clos astucieux et agréable à découvrir.  

    Car le cœur du film est le fameux crime. Kenneth Branagh a mis un soin particulier dans la scène centrale, dévoilant beaucoup mais cachant l’essentiel, cet essentiel que le célèbre détective belge dévoilera dans la classique scène finale des suspects.

    Mort sur le Nil est le deuxième opus de la franchise Agatha Christie Cinematic Universe, après Le Crime de l’Orient-Express sorti en 2017. Ce nouveau film de Kenneth Branagh est certes un peu en deçà des attentes mais on peut parier qu’avec les chefs d’œuvres qu’a laissé "la reine du crime", le public aura droit à de jolis moments de cinéma – et de meurtres – avec Hercule Poirot, Miss Marple et consort.  

    Mort sur le Nil, film policier américano-britannique de Kenneth Branagh,
    avec Kenneth Branagh, Gal Gadot, Armie Hammer, Emma Mackey,
    Annette Bening, Russell Brand et Tom Bateman, 2022, 127 mn, Canal+

    https://www.canalplus.com/cinema/mort-sur-le-nil/h/18044134_40099
    https://www.20thcenturystudios.com/movies/death-on-the-nile

    Voir aussi : "Quand je pense à la vieille Anglaise"
    "Crimes, flegme et glamour"
    "Le garçon qui murmurait à l’oreille des ados"

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  • Quoi de neuf, encore, sur Louis XVI ?

    Que peut-on dire de nouveau sur la mort de Louis XVI, guillotiné le 21 janvier 1793 ? On serait tenté de répondre : pas grand-chose. Il est vrai que cet événement majeur, tant de l’histoire de France que celui de la Révolution, a été débattu, commenté, discuté, expliqué, étudié à l’école. Avant même de découvrir les premières pages de l'essai L'Exécution du roi - 21 janvier 1793 (éd. Perrin), n’importe quel lecteur sera surpris par le travail fourni par Jean-Clément Martin, l’un des spécialistes de la période : plus de 400 pages sur cette journée de janvier 1793, si l'on compte l’index et la bibliographie. On a connu des ouvrages plus brefs sur des périodes beaucoup plus longues. Voilà de quoi attiser la curiosité.

    L’auteur explique en préambule de son essai le sens du titre du livre : le mot "exécution" a été préféré aux termes de "mort" ou de "procès du roi" qui "euphémisent la réalité", comme il le dit. Le mot "exécution" est choisi car il "désigne une peine capitale appliquée après sentence d’un tribunal et évoque une destruction délibérée… en appliquant des règles et des procédures." Un terme qui est préféré à ceux de "régicide", "supplice", "assassinat" ou encore "martyr". Ce dernier terme est du reste développé en conclusion de l’ouvrage, lorsqu’il est question du traumatisme de ce son exécution.

    Le premier chapitre de l’essai présente le déroulé de cette journée du 21 janvier 1793 qui va relance la Révolution française selon les dires de Maximilien Robespierre et de Bertrand Barrère, député des Hautes-Pyrénées et Président de la Convention pendant le procès du roi à la fin de 1792. La mort du souverain, vécue comme un choc dans toute l’Europe, a, de fait, une portée politique majeure dans le pays.

    Là est justement est le cœur des propos de Jean-Clément Martin. Avec précision et en prenant de la hauteur, l’historien rappelle que jusqu’à sa fuite à Varenne le 20 juin 1791, Louis XVI se trouve dans une situation instable : "La monarchie subsiste, mais la royauté a disparu." Le roi a "une fonction de représentation supérieure", qui est illustrée par cette formulation : "La Nation, la Loi, le Roi." La fuite du roi et de sa famille au cœur de l’été 1791, avant qu’il ne soit rattrapé à Varenne, est un choc immense : le départ manqué de Louis XVI inquiète le pays et provoque des manifestations, téléguidées pour beaucoup par des clubs citoyens et les sans-culottes, en même temps qu’elle embarrasse l’Assemblée. Pour autant, appuie Jean-Clément Martin, "Varenne n’a pas été « la première marche de l’échafaud. »" Rappelons que cet événement important date de juin 1791, soit plus d’un an avant son procès et plus encore avant son exécution. Le 21 janvier 1793 ne s’est donc pas décidé le 20 juin 1791 comme on serait tenté de le penser, mais bien plus tard, au cours de l’été 1792.

    La "deuxième révolution"

    Ce que l’historien montre ce sont les divisions à la fois de l’opinion et des députés, alors que les guerres extérieures menées par les royaumes extérieurs menacent la France ("L’engouement guerrier est considérable"). De plus, "l’échiquier politique est (...) beaucoup plus divisé qu’on ne le croit" : royalistes, monarchiens (sic), jacobins, girondins… Il faut ajouter à cela les ultra-révolutionnaires, les sans-culottes et des rivalités personnelles. Jean-Clément Martin fait une série de descriptions précises du pays et de ses représentant. La France de 1792 est en proie à une véritable crise de nerfs. Personne n’est vraiment le maître du jeu, et encore moins le roi.

    1792, année capitale dans l’histoire de la révolution française, voit se succéder des journées révolutionnaires chaotiques, violentes et insurrectionnelles, marquées par l’instauration d’une Commune à Paris, "avec pouvoirs illimités pour sauver la Patrie". La suite, ce sont les massacres du 10 août, dont le roi sort indemne par miracle, mais qui marque aussi et surtout la fin de la Monarchie française (c'est "la deuxième révolution").

    L’historien montre les tensions entre les représentants de l’Assemblée Nationale, pris entre le roi et des insurgés, dont les sans-culottes, des citoyens ultrarévolutionnaires portés par l'envie de continuer la Révolution, contre leurs représentants, qu'ils désavouent. Ce qui se joue est cette question : continuer le mouvement de la Révolution ou installer une République stable ? La suite est l’emprisonnement du roi voté par les députés puis l’organisation de son procès, qui va faire l’objet de tractations importantes et de débats enflammés. 

    Plusieurs chapitres sont consacrés aux derniers mois de l’année 1792 au cours desquels se jouent des luttes politiques à la Convention et la création de "courants" plus ou moins lâches, à l’origine de ce que l’on appelé plus tard la gauche et la droite. Il faut ajouter à cela les désaccords parfois violents entre Province et Paris, centralisation et fédéralisme. Et c’est dans cette période tumultueuse que la première République est fondée, dans un climat confus.

    L’exécution du roi apparaît comme un événement beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît, ce qui donne toute sa valeur à cet essai riche de détails, de faits, de destins et de discours parfois ambivalents. L’auteur parle de "l’ambiguïté de la politique de la Convention, conjuguant destruction et conservation." La passion autant que la politique jouent un rôle bien entendu important : "Le roi et tous ses prédécesseurs ont été victimes de la fascination que leurs personnes exerçaient sur leurs sujets." En prenant du recul sur cet événement qui continue de marquer notre pays, il fallait de la hauteur de vue et de l’intelligence pour le comprendre. C’est tout à l’honneur de Jean-Clément Martin d’en avoir montré.

    Jean-Clément Martin, L'Exécution du roi - 21 janvier 1793, éd. Perrin, 2021, 413 p.
    https://www.lisez.com/livre-grand-format/lexecution-du-roi/9782262069889

    Voir aussi : "Thérésia versus Robespierre"

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  • Rouquine n’a pas que ça à faire

    Le duo Rouquine propose en ce moment son troisième titre, "Mortel".

    La précision et la finesse du texte est à souligner dans ce morceau d’électro-pop, où la mort et la maladie sont traités avec humour noir et dérision.

    J’ai pas que ça à faire", ponctue Rouquine tout au long de ce titre, qui est d’abord un grand cri à la vie. 

    Rouquine, Mortel, 2021
    https://www.instagram.com/rouquineofficiel

    Voir aussi : "Suis-moi, ma puce"

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  • Gwenvaël est de retour

    Laure Izabel vient de ressortir son roman Caladrius aux éditions Juno. C’est un en quelque sorte un grand retour pour son personnage principal, Gwenvaël June, après une première vie aux éditions L’ivre-book

    Parler de "renaissance" est du reste le terme approprié pour un récit à la fois sombre, gothique, tourmenté et rythmé par l’érotisme et le fantastique.

    Gwenvaël, brillant écrivain et spécialiste des mythes et légendes, est convié à animer dans sa ville du Havre une conférence sur ce sujet, dans une université où il a été lui-même étudiant. C’est une parenthèse qui s’offre à lui alors que ce quasi quadra voit arriver la mort à grands pas, en raison du Sida qu’il a contracté, lui et son compagnon Yannou, bien plus mal en point que lui ("Combien de temps au juste ? Un mois, deux, six… un an, quelques semaines, jours ?"). C’est aussi l’occasion de revenir sur ses jeunes années et sur ses tourments ("Impossible d’être aimé. Peu à peu, le lionceau devint un jeune lion condamné à avoir mal, à faire le mal, se faire mal…").

    Alors qu’il traîne sa morgue en attendant sa conférence, il croise un étrange étudiant, Ulric, à la beauté du diable. L’apparition le foudroie sur place : "Est-ce un ange, un Dieu ? Un être si plein de mansuétude qu’il en irradie l’âme ?"

    Bedroom trip

    Pour Gwenvaël, l’attirance et le rejet se disputent en lui, face à ce garçon attirant mais aux intentions sourdes et qui ne vont pas tarder à se dévoiler. L’attirance est sulfureuse mais aussi dangereuse : "Je sais que ce n’est pas de l’amour. Enfin, je crois. Non, c’est certain. Pas de coup de foudre, rien qui ressemblerait à du relationnel intime. " Par ailleurs, il y a Yannou, avec qui il a le devoir de rester jusqu’au bout.

    La maladie est dépeinte avec cruauté, voire crudité. L’auteure en profite pour entrer dans l’intérieur qu’on imagine bobo d’un couple, rythmé par les protocoles thérapeutiques, les soins infirmiers mais aussi la présence réconfortante des parents de Yannou.

    Déchiré entre son compagnon atteint par le sarcome de Kaposi et cet Ulric éclatant de santé et d’envies, Gwenvaël est entre la mort et la vie. À moins qu’il n’aie pas à choisir, et doive se laisse guider jusqu’à un "bedroom trip" de 72 heures au Normandy de Fécamp. Au bout de ce voyage, l’écrivain souffrant pourrait bien connaître non seulement des réponses à ses questions mais aussi des révélations qu’il ne soupçonnait pas.

    Dans ce roman tendu, à la fois sensuel et sombre, Laure Izabel entraîne le lecteur dans une intrigue aux lourds et terribles secrets. Les dernières pages éclairent le titre de ce roman au terme d’une ballade mystérieuse battue par le vent de la vie, malgré tout. 

    Laure Izabel, Caladrius, éd. Juno, 2020, 118 p. 
    https://www.facebook.com/laure.izabel
    https://juno-publishing.com/product/caladrius

    Voir aussi : "Mon amie Marlena"

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