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On ne l’a sans doute pas assez dit, mais il est probable que le "Grand confinement" que nous avons connu cette année pourrait bientôt devenir d’ici peu un mouvement, sinon un genre à part entière.
La nouvelle création de l’artiste et designer Michel Haillard y aurait toute sa place. Baroque, facétieux, dénicheur d’influences venues aussi bien de l’art africain que du baroque européen, Michel Haillard propose avec "Danse avec les gnous" un vernissage et une performance qui seront à découvrir ce jeudi 8 octobre à partir du 18 heures à La Cartonnerie (Paris XIe).
Cet événement, que l’artiste a aussi intitulé, non sans malice, "Le rire du pangolin – Objets magiques made in confinement", précède une exposition d’œuvres imaginées pendant le confinement, exposition qui sera visible jusqu’au 11 octobre, toujours à La Cartonnerie.
"J’ai vécu ce moment particulier comme une retraite, considérant uniquement mes ressources propres, ou sales ! Ainsi est née de l’accumulation d’objets de l’atelier cette collection qui nous ouvre d’autres espaces, d’autres mondes, ceux de la magie, qui fonctionne réellement pour qui se laisse guider par sa fantaisie et son cœur dans un grand éclat de rire," commente Michel Haillard.
Cet univers incroyable et bourré d’humour est à découvrir à La Cartonnerie de toute urgence.
Exposition de Michel Haillard "Danse avec les gnous, ou le rire du pangolin – Objets magiques made in confinement" Vernissage/performance avec Richard Laillier le jeudi 8 octobre à partir de 18h. Exposition du 9 au 11 Octobre 2020 La Cartonnerie, 12 rue Deguerry 75011 Paris Les vendredi 9 octobre de 15h à 20h, samedi 10 octobre de 15h à 20h et dimanche 11 octobre de 15h à 18h http://www.michel-haillard.com http://www.lacartonnerieparis.com
Pouvait-on imaginer pareil centenaire et pareille naissance ?
Le centenaire est celui de la création du Liban et la naissance celle du Festival du Film Libanais de France, du 7 au 11 octobre, au cinéma Le Lincoln (Paris 8e).
Deux mois après les explosions à Beyrouth, fêter le cinéma libanais prend tout son sens, comme le dit Philippe Aractingi, cinéaste franco-libanais (Bosta,Sous les bombes, Listen) et parrain du FFLF 2020 : "Voilà que dans tout ce marasme, un groupe de jeunes libanais enthousiastes décide d’organiser un festival pour honorer le cinéma libanais. Un rayon de soleil dans les pires ténèbres, un brin d’herbe improbable qui brave les décombres comme seuls en sont capables mes compatriotes."
La première édition du Festival du Film Libanais de France fait figure d’acte de bravoure autant que d’éclairage bienvenu sur ce cinéma venu de ce coin de la Méditerranée : "Un acte pionnier car premier en son genre, une initiative noble qui vient renforcer les efforts du cinéma libanais, qui reste un art artisanal en quête d’identité."
Reflet d’une société plurielle et multiconfessionnelle, le cinéma libanais ne cesse de surprendre par sa diversité, son ambition et son regard critique. Ouverture, indépendance, liberté, audace, ce sont autant de valeurs qui constituent les fondements mêmes du Festival du Film Libanais de France. Au programme : projections-débats, compétition de courts métrages, table ronde ("Comment le cinéma libanais peut-il survivre à la conjoncture actuelle ?"), master class, rencontres, mais aussi concerts avec Layale Chaker & Quartet, en ouverture du festival.
La première édition du Festival du Film Libanais de France fait figure d’acte de bravoure
La projection de longs métrages rythmera le festival : Broken Keys de Jimmy Keyrouz (en sélection officielle à Cannes 2020), Nocturne in Black de Jimmy Keyrouz (2016), All This Victory de Ahmad Ghossein (séance en partenariat avec l’Institut du monde arabe), avec également une série de focus sur Beyrouth : le documentaire Beyrouth, jamais plus de Jocelyne Saab (1976), Beirut Terminus de Élie Kamal en avant-première, Beyrouth Through Time de Philippe Aractingi, Go Home de Jihane Chouaib, Listen ("Ismaii") de Philippe Aractingi, The Beach House ("Beit el-Baher") de Roy Dib ou Allo Chérie, court-métrage hors-compétition de Danielle Arbid, extrait de la série Ma Famille Libanaise. Cette projection sera suivie de Blackjack, court-métrage hors compétition de Danielle Arbid, extrait également de la série Ma Famille Libanaise.
Un jury constitué du comédien Rodrigue Sleiman, de la comédienne Christine Choueiri, de l’écrivain et chercheur Élie Yazbek, de la productrice Myriam Sassine, de Serge Akl, directeur de l’Office du Tourisme Liban en France et de la comédienne Andrée Nacouzi remettra trois prix (Prix du Jury, le Prix de la Meilleure Fiction et le Prix Jeune espoir) à l’issue de la projection des courts-métrages en compétition : 30/2 de Hadi Ibrahim, Where To? de Robine Nachar, La Folie à deux de Charelle Abdallah, Ila Haythou – To Nowhere de Pamela Nassour, Harmonica de Jad Dona, That Stupid Armenian’s Motion Picture Show or Garen de Hrag Meguerditchian, Until The Rain Wanes de Marianne Bou Mosleh, NightShift, "طعمي السمكات" de Marc Salameh, Chmout de Rami Aidamouni, The War Of Others de Rami Ghorra, And The Party Goes On! de Michael Asmar, I Want To Be Understood And Ignored de Shadi Rabahi, Recipe In Exile de Chantal Kassarjian, What’s Your Name? de Nour Al-Moujabber, Day 6 de Layal M. Rajha et CORONA DAYS, "زمن كورونا" de Layal M. Rajha.
Cette première édition du Festival du film libanais est un autre moyen de soutenir un pays et une culture singulièrement mis à mal cette année.
La soirée d'ouverture aura lieu à l'Institut du monde arabe le mercredi 7 octobre.
Le Festival du Film Libanais de France Du 7 au 11 octobre 2020 au cinéma Le Lincoln, Paris 8e https://fflfofficial.fr
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On entre dans un roman de Modiano comme on voyage dans une ville familière. On parlant de ville, on serait d’ajouter que celle dont il s’agit est le Paris du Prix Nobel 2014. Encre sympathique (éd. Gallimard), n’échappe pas à la règle : Patrick Modiano propose là aussi une pérégrination littéraire sous forme d’une enquête énigmatique.
La personne recherchée par le narrateur, Jean – comme le premier prénom à l’état-civil de Patrick Modiano –, se nomme Noëlle Lefebvre. C’est assez mystérieusement que celui qui a travaillé pour une agence spécialisée, décide de s’y intéresser : "Pourquoi ce « dossier » plutôt qu’un autre ? A cause des blancs sans doute." Et on verra qu’en effet beaucoup d’éléments manquent dans la vie d’une femme qui semble avoir disparu comme un fantôme. Voilà donc notre homme parti à la recherche d’une femme mystérieuse au sujet de laquelle il possède peu de choses : un nom, une photo et une adresse, à Paris, bien sûr.
La pérégrination commence, et avec elle la rencontre avec des personnes qui s’avèrent au fur et à mesure du récit aussi transparents que cette inconnue dont les informations parcellaires, lorsqu’il y en a, rendent la jeune femme de plus en plus mystérieuse, à telle enseigne que Jean semble tourner en rond.
Enquête sur une disparue
Enquête sur une disparue, mais aussi enquête sur une enquête : car le narrateur n’a de cesse, des années après cette affaire, de reconstituer le cours de son travail mais aussi les dialogues avec quelques témoins ("Je compte les années et je tente d’être le plus exact possible"). Des noms et des prénoms refont surface, et avec eux des professions, des personnages interlopes, des questions, mais aussi et surtout des lieux : le cabinet d’un médecin, un dancing quai de Grenelle ou un fleuriste dans le 16e arrondissement, et alors même que le temps semble échapper à l’auteur de ces lignes : "Impossible sur un si long espace de temps d’établir un calendrier. Je crois qu’il est préférable de laisser courir ma plume. Oui, les souvenirs viennent au fil de la plume. Il ne faut pas les forcer, mais écrire en évitant le plus possible les ratures. Et dans le flot ininterrompu des mots et des phrases, quelques détails oubliés ou que vous avez enfouis, on ne sait pourquoi, au fin de votre mémoire remonteront peu à peu à la surface."
Encre sympathique s’enrichit ici et là de courriers, listings, de pièces à conviction venues de nulle part qui obscurcissent plus qu’ils n’éclairent le parcours de cette Noëlle – que Patrick Modiano finit par mettre en scène dans un dernier chapitre. Il a lieu loin de Paris, à Rome, où se conclue le récit, cette fois à la troisième personne. Cette enquête apparaît aussi comme étant celle du narrateur lui-même, lorsqu’il apparaît que des lieux et des figures de la vie de Noëlle, font écho au passé de Jean.
Ce récit d’une enquête somme toute anodine permet à l’auteur d’impressionner de révéler une autre histoire qu’une sorte d’encre sympathique rendait jusqu’alors invisible, d’où l’explication du titre du roman : "Il me semble que tout était écrit à l’encre sympathique… Peut-être, au détour d'une page, apparaîtra peu à peu ce qui a été rédigé à l'encre invisible, et les questions que je me pose depuis longtemps sur la disparition de Noëlle Lefebvre, et la raison pour laquelle je me pose ces questions, tout cela sera résolu avec la précision et la clarté des rapports de police. D'une écriture très nette et qui ressemble à la mienne, les explications seront données dans les moindres détails et les mystères éclaircis. Et, en définitif, cela me permettra peut-être de mieux me comprendre moi-même."
Catherine Dufour propose avec Entends la Nuit (éd. L’Atalante) un singulier roman de fantasy urbaine dont le premier intérêt réside sans doute dans l’univers choisi par l’auteure : une entreprise de veille média au cœur de Paris. Myriame y est embauchée en CDD après un parcours personnel et professionnel des plus chaotiques. Parce qu’elle de retour des Pays-Bas et désargentée, c’est sa mère qui l’héberge les premiers temps. La modeste chargée de veille découvre son bureau, ses nouveaux collègues, une manageuse perverse et le petit monde d’une multinationale, la Zuidertoren. L’entreprise est dirigée par Coleraine, Normanby et Clare, des actionnaires anglais richissimes, inquiétants et mystérieux.
L’entreprise dispose d’un logicien d’espionnage interne, Pretty Face : cette sorte de Facebook filme en interne ses employés, dont le visage est affiché en continu sur les écrans de la société. C’est dans cette ambiance paranoïaque à la Big Brother que, via ce réseau social, Myriame est contactée par un certain Duncan Vane. L’individu, qui s’avère être un cadre haut place, s’intéresse à la jeune femme et se montre d’une extrême courtoisie, voire d’une civilité très "old school".
Après lui avoir sauvé la vie après un mystérieux orage, il lui trouve un logement qui a la double particularité d’être contigu à la Zuidertoren et d'avoir été aménagé en luxueux studio meublé de style victorien. Duncan Vane dévoile sa véritable identifié : Lord Angus. Intriguée et séduite, Myriame, qui n’a communiqué avec lui jusqu’alors que virtuellement, est bien décidée à rencontrer son protecteur, soupirant et ange-gardien en chair et en os. Quoique l’expression "en chair et en os" n’est sans doute pas des plus appropriée.
Avec ce roman de fantasy, Catherine Dufour s’empare du mythe du vampire, sans pour autant que ce terme soit vraiment approprié, comme l’indique un dialogue : "Vous êtes… un vampire ? Ou une goule ou… un zombie ?... — Non je ne le suis pas. Je suis un mur." Cette réponse énigmatique va s'éclairer par la suite.
L’intrigue se précise à partir du premier tiers du livre, à la faveur d’une visite de l’Institut par une héroïne dont le moins que l’on puisse dire est qu’elle n’a pas froid aux yeux. En enquêtant, elle découvrira l'existence de légendes urbaines, de lémures, de mânes et de défunts pas tout à fait morts. Et parmi ces êtres surnaturels, qui ont pris possession de lieux habités par les vivants, il y a ce Duncan Vane ("Je suis un spectre. Je hante. Je suis un dieu. Je crée et je détruis. Je suis un démon. Je possède et je dévore"). Il entraîne sa "fiancée" – si l’on peut employer ce terme – dans des univers à fois funèbres, dangereux mais aussi plus vivants qu’on ne le penserait a priori. Myriame suit Lord Angus au cœur de Paris, un Paris étrange, sombre et même gothique.
Vrai roman de fin de siècle
Vrai roman de fin de siècle, à l’image du titre qui reprend un vers de Baudelaire ("Sois sage, ô ma Douleur, et tiens-toi plus tranquille. / Tu réclamais le Soir ; il descend ; le voici : / Une atmosphère obscure enveloppe la ville… / Entends, ma chère, entends la douce Nuit qui marche"), Catherine Dufour fait déambuler le lecteur dans une ville peuplée d’êtres surnaturels, la plupart des mort-vivants. Son livre est une œuvre étrange mêlant polar, fantastique et romance surnaturelle. L’auteure y insuffle aussi une voix contemporaine à travers le personnage de Myriame, jeune femme obstinée, impertinente, plus romantique qu’il n’y paraît et cachant des failles que la rencontre de Lord Angus mettra au grand jour.
S’y ajoute un message sous-jacent à cette histoire de puissants se cachant entre les murs, d’"hommes à bonnes fortunes", de "démolisseurs" et d'êtres inquiétants luttant pour le pouvoir - ou tout simplement pour exister. En entrant dans une multinationale au fonctionnement à la fois mystérieux et familier (la hiérarchie, le travail de bureau ennuyeux, le discours corporate ou les fêtes d’entreprise clinquantes), Myriame devient l’élément déclencheur d’une guerre souterraine entre puissants, guerre contre laquelle elle finit par s’insurger pour sauver sa peau : "Qu’est-ce que vous attendez de moi ?", dit-elle à son supérieur Coleraine, "Mais moi, je suis une travailleuse précaire ! Et mortelle, en plus ! Une smicarde doublée d’un éphémère. Traitez -moi de pute, si ça vous soulage. Mais c’est un métier exigent et utile, pute ! Alors que moi… un moucheron, voilà !"
Entends la Nuit, roman de fantasy urbaine à cheval entre le XXIe siècle et le XIXe siècle (l’auteure de l’essai sur Ada Lovelace fait par exemple intervenir brièvement le père de la mathématicienne, Arthur Byron), prouve que le mythe du vampire (pardon : du lémure) reste une source inépuisable d’inspiration.
Entends la Nuit a été récompensé par le prix Masterton 2019.
Les galeries d'art étant fermés en ce moment, Bla Bla Blog vous invite à découvrir en ligne une exposition virtuelle proposée par la Galerie Cyril Guernieri. Jean-Daniel Bouvard et Marc Dailly y sont à l'honneur.
Jean-Daniel Bouvard Chaleur - 2020 - huile sur toile - 116x89 cm
Jean-Daniel Bouvard Ombrages - 2020 - huile sur toile - 50x50 cm
Jean-Daniel Bouvard Pause - 2020 - huile sur toile - 81x60 cm
Jean-Daniel Bouvard Pêcheur - 2020 - huile sur toile - 100x81 cm
Marc Dailly Du salon à la cuisine - 2020 - huile sur bois - 30x40 cm
Marc Dailly Homme dans le salon - 2020 - huile sur bois - 30x28 cm
Marc Dailly Paulina dans l'atelier - 2020 - huile sur bois - 30x40 cm
Marc Dailly La dînette - 2020 - huile sur bois - 65x50 cm
La Galerie Cyril Guernieri propose également une exposition en cours, "Jardins secrets" de Christian Benoist, qui est à retrouver sur le site du galeriste.
La chorégraphe syrienne Yara al-Hasbani s’est d’abord fait connaître au début de la guerre civile syrienne en 2011 en protestant contre le régime en place. Menacée de mort, elle a choisi de s'installer à Paris.
Dans une ville confinée et abandonnée, celle où elle vit donc, la dissidente syrienne qui a connu les paysages désertés par la guerre proposait ce week-end – mais sans public – une chorégraphie devant les lieux emblématiques que sont la Pyramide du Louvre, le Sacré Cœur ou le parvis du Trocadéro, un lieu où elle avait créé en 2015 une chorégraphie en hommage aux centaines d’enfants morts d’une attaque chimique dans son pays.
Mieux qu’une performance artistique, Yara al-Hasbani entend envoyer un message de paix et de beauté dans une ville, certes en paix, mais comme abandonnée de ses habitants.
Lola Nicolle signe avec Après La Fête (éd. Les Escales) un de ces romans emblématiques de la génération Y et un véritable récit sur le désenchantement, la séparation et les amitiés que l’on tient encore à bout de bras mais que l’on sait sur le déclin. Il n’est du reste pas anodin de préciser que le roman de Lola Nicolle démarre le 13 novembre 2015, date historique, tragique et funèbre.
Raphaëlle, brillante étudiante en lettres, s’apprête à se jeter dans le grand bain du monde professionnel, plus précisément dans l’édition, et non sans réussite il faut le dire. Ce passage capital dans l’âge adulte marque aussi la fin des fêtes étudiantes, de rêves, d’amitiés mais aussi, pour elle, d’une relation compliquée avec un petit ami qui semble toujours naviguer entre deux eaux ("Sans le savoir, tu gis là, innocent dans mon regard. Comme par le trou d'une serrure, j'observe la vie que nous n'aurons jamais. Les choix qui font bifurquer. Cette case de notre passé dans laquelle je t'avais rangé").
La narratrice, jeune femme chanceuse et gâtée par la vie, propose un regard aiguisé et acide sur son pays et sur une capitale devenue un monstre à la fois attirant et repoussant : "Impossible pour les jeunes Parisiens de choisir un quartier. Ce sont les quartiers qui les trouvent, en fonction de la somme de toute façon exorbitante qu’ils sont prêts chaque mois à débourser… Bientôt les grandes villes européennes ressembleraient à des halls d’aéroport. Le chant des valises à roulettes résonnant chaque matin, chaque soir, dans les rues bien endormies de la capitale."
L’éblouissement de la culture dans les milieux populaires
Délaissant la facture bobo, que le roman laissait craindre, au profit de la nostalgie et d’une touchante mélancolie, Lola Nicolle avance aussi à pas feutrés sur le terrain social lorsqu’elle parle de la famille de celui qui ne sera bientôt plus qu’un ex. D’une plume à la fois précise et imagée, l’auteure évoque l’éblouissement de la culture dans les milieux populaires ("Jamais tu ne t’arrêtais de lire. Tu achetais les livres par cinq, dix, de poche et d’occasion, chez les revendeurs qui bordaient le boulevard. Lorsque nous croisions une librairie, c’était plus fort que toi ; tu entrais, embrassais du regard l’ensemble des rayonnages. Tu aurais aimé avoir tout lu"), de la barrière symbolique entre le Paris fantasmé et les banlieues des deuxième, troisième ou cinquième zones, des rêves de réussites déçus ("À cette époque, on encourageait les plus jeunes à intégrer des écoles de commerce, à se laisser des portes ouvertes : généraliste en rien, spécialiste en vide") ou de son goût générationnel pour la culture urbaine et rap (50 Cents, PNL, NTM, Ménélik ou IAM).
Lola Nicolle se fait observatrice d’un désamour qui va croissant, sans pour autant abandonner la tendresse qu’elle porte encore à celui qui a accompagné les derniers temps de sa prime jeunesse et qu’elle veut fixer à jamais ("Je faisais des clichés de ton corps fragmenté. En gros plan, ta bouche. Tes merveilleuses lèvres. Les tâches de rousseurs constellant tes épaules. Tes pieds, lorsque tu étais allongé… Ton corps meuble-Ikea").
Raphaëlle, navigue, à la fois consciente d’être une privilégiée mais aussi terrifiée par un futur peu réjouissant : les avertissements terrifiants du GIEC, les barrières sociales et la "corruption" des modèles anciens. Comment être heureux dans un monde marchandisé ? Comment être femme et féministe au milieu de modèles imposés ? Comment aussi réinventer la fête et comment la faire durer si c’est encore possible ?
Adieu, chère adolescence et prime jeunesse, semble écrire Lola Nicolle qui n’entend pas non plus enterrer ses toutes jeunes années : "Et aussi, pour toujours, il y aurait le premier baiser, les bateaux chavirés, l’ivresse des beaux jours… même si chacun s’était éloigné."
Une première question en introduction à cette chronique : qu’est-ce que cette "cage dorée" dont parle Klervia dans son dernier clip ? Pas la peine d’être un critique de Télérama pour lire dans ce nouvel opus l’histoire d’un amour rêvé, un cri du cœur et un appel : "Et moi j’attends devant ta porte fissurée / Je veux m’endormir avec toi / Même s’il n’y a pas d’or là bas / Sans promesses ni pourquoi / Sans contrats ni coups bas."
Bla Bla Blog pourrait-il s’avancer sur une autre interprétation de ce nouveau single ? Se pourrait-il que Klervia n’ait pas imaginé ce titre pop-folk en pensant à cette cage dorée que pourrait être Paris ? Car voici une artiste tout droit venue de Bretagne – avec une marinière en guise de signature pour cette native de Plougastel-Daoulas – naviguant, dans le clip réalisé par Pydjhaman, à Paris : Seine, métro, station Cité ou au pied de la cathédrale Notre Dame. La Cage Doré est un titre dans lequel, plus que le récit d’un homme désiré, pointe la nostalgie d’une femme partagée entre deux régions.
Voilà qui rend le personnage de Klervia d’autant plus attachant. Et si je vous que la musicienne est également astrophysicienne (la jeune femme tient un blog sur l’espace et les étoiles), voilà qui devrait vous convaincre de suivre sa carrière.