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Mieux vaut tard que jamais : Lilie Mae toque discrètement à nos oreilles grâce à son premier album sorti il y a un an pile (Other Girls for That).
Mais qu’est-ce qui fait la singularité de cette artiste quasi inconnue en France ? Sans doute qu’elle s’approprie la country, un genre injustement boudé et moqué par le public français, à l’oreille musicale pourtant infaillible – non, je déconne…
Bref, Lillie Mae, découverte par Jack White en personne, s’impose par son choix de trousser des titres mêlant country et pop folk avec une rare sensibilité (Wash Me Clean, You’ve Got Other Girls for That).
À l’instar de Ben Harper, ses pairs ne s’y sont pas trompés qui ont fait de Lillie Mae une de ces nouvelles voix américaines à suivre.
Au public français de se débarrasser de ses préjugés pour craquer sur cette chanteuse pop-rock country, à la voix et au physique fragile et irrésistible.
Dans une rythmique pop et jazz, et chanté en mina, un dialecte qui vient du sud de ce pays africain, Amen Viana chante Brother. Ce titre à l’enthousiasme communicatif nous parle de l’amour fraternel capable de soulever bien des montagnes.
Originaire du Togo, Amen Viana monte rapidement les échelons de la scène musicale ouest-africaine, avant de traverser la Méditerranée pour s'établir en France. Sa virtuosité à la guitare rappelle celle de Jimi Hendrix, son énergie rock celle de Living Colour, et il se taille rapidement une réputation dans de nombreux événements internationaux où il est invité à jouer aux côtés d'artistes comme Black-Eyed Peas, Angélique Kidjo, Indila, Cheick Tidiane Seck, Tony Allen.
Brother est un extrait de The Afrocanalyst, nouvel album en préparation.
En attendant la sortie en septembre prochain de son premier EP Separated, Bingo Club propose en ce moment son single éponyme.
Une petite présentation tout d’abord : Bingo Club (Dance Me), ce sont Neysa Barnett, Emile Larroche et Martin Rousselot. Ces trois là ont décidé de s’unir pour un projet musical pour le moins planant.
Écouter Separated c’est se perdre dans une zone entre terre et ciel. Et ça tombe bien, car le clip a été tourné dans l’Himalaya par Adrien Nicolay, lors d’un documentaire sur la vallée de Kullu, surnommée "La Vallée des Dieux".
Avec ce concept musical, nous sommes à la fois catapulté dans le Népal et à la toute fin des années 60, lorsque les Beatles s’étaient faits adeptes de la méditation transcendantale grâce au Maharishi Mahesh Yogi, avant un retour en Europe et la composition de l’Album blanc.
On ne peut que souhaiter la même réussite pour le trio de Separated.
Comment évoquer en images et en BD Jimi Hendrix ? Comment rendre sa mesure à une carrière fulgurante et à bien des égards révolutionnaire ? Car on a tendance à oublier que la carrière du guitariste et chanteur américain n’a duré que quatre années, au sein de son groupe The Jimi Hendrix Experience.
Mattia Colombara (au scénario) et Gianluca Maconi (au dessin) proposent dans Jimi Hendrix-Requiem électrique un biopic sous forme de bande dessinée qui condense en 144 planches la vie de l’artiste né en 1942 à Détroit et mort à 27 ans après une surconsommation d’alcool et de calmants. Trop court sans doute pour développer tous les aspects de sa vie, mais suffisamment documenté pour proposer un récit qui a vocation à être "universel", comme le disent les auteurs. Les fans de Jimi Hendrix adoreront et les autres se passionneront pour la découverte ou redécouverte de celui qui est considéré comme l’un des plus grands musiciens et guitaristes du XXe siècle.
Le lecteur replonge dans la vie brève mais passionnante d’un afro-américain, marqué par une vie familiale compliquée (il ne rencontre son père qu’à trois ans, après la démobilisation de celui-ci et la fin de la seconde guerre mondiale) et la découverte de la guitare à l’âge de quinze ans, qu’il apprend quasiment seul. Son début de carrière est chaotique : maigres cachets, petits clubs et groupes plus ou moins obscurs. Il finit par côtoyer quelques grands noms, avec plus ou moins de bonheur : Ike et Tina Turner, Little Richard ou Sam Cooke. Sa rencontre avec la mannequin Linda Keith lui permet d’approcher Chas Chandler, le bassiste des Animals, qui lui ouvre bien des portes.
Une carrière marquée par la ségrégation et le racisme
La suite, se sont d’autres rencontres – les Beatles, Paul McCartney et surtout Eric Clapton – mais surtout des concerts qui vont entrer dans les annales : les premières parties des concerts de Johnny Hallyday en 1966, le festival de Monterrey en 1967, Woodstock un an plus tard et l’Île de Wight l’année de sa mort, durant l’été 1970.
Les auteurs ont choisi de s’approprier le nom du groupe du guitariste, pour proposer "un livre qui joue avec les règles de la bande dessinée comme Jimi jouait avec les structures musicales." Trois parties constituent cet album "concept", avec une introduction, un intermède (qui est aussi un hommage au 2001 : L’Odyssée de l’Espace de Kubrick) et un épilogue. Chacune des trois parties regroupe trois chapitres consacrés à des chansons de Hendrix : Woodoo Chile, Crosstown Traffic, Burning Of The Midnight Lamp, Castle Made Odf Sand, Fire, All Allong The Watchtower, Machine Gun, Hear My Train Coming et Woodoo Child (Slight Return). De ce point de vue, la lecture des notes des auteurs en toute de livre est intéressante pour comprendre leur démarche artistique. Au passage, l’ouvrage dépeint sans l’enjoliver cette période extrêmement riche, sans gommer ses travers : drogues, producteurs sans état d’âme et discrimination.
Graphiquement, Gianluca Maconi a fait le choix du noir et blanc pour leur Jimi Hendrix-Requiem électrique. Un choix compréhensible, dans la mesure où la carrière de Hendrix a été marquée par la ségrégation et le racisme, y compris lorsque le chanteur était au sommet de sa gloire. Lors d’une interview, les auteurs lui font dire ce cruel constat : "Les blancs dansaient et s’amusaient en nous écoutant… Mais lorsque la musique s’arrêtait, on redevenait des déchets." Le message est poignant et renvoie bien entendu à une réalité toujours d’actualité. Il reste aujourd’hui son œuvre musicale exceptionnelle… et quelle guitare !
Nous avions parlé à plusieurs reprises du très prometteur Jordane Tumarinson et de ses compositions instrumentales, véritables BO… sans film.
C’est aussi de cette manière que l’on pourrait cataloguer Christophe Menassier (Loo & Monetti), qui vient de débarquer avec son premier album solo, The Unknown Movie.
C’est tout en délicatesse que le musicien nous entraîne dans un univers aux mélodies soignées et aux sons planants (Theme From The Unknown Movie).
Ce premier album, mélancolique, voire sombre (Kings All Die One Day) se pare de sonorités soigneusement choisies (les timbres du clavecin dans The Unknown Movie, le piano dans Whatever Happens In The Dark), jusqu’à proposer de véritables voyages dans l’espace-temps (Boiling confusion, Greatness And Madness Of Men, Night Race). Il faut souligner la singularité de cet album, tour à tour mélancolique, enlevé ou même métaphysique (As Long As There Is Life, Melancholic Therapy).
Romanesque
The Unknown Movie est vraiment un album incarné, dans sa manière de nous prendre doucement par la main et de nous chuchoter à l’oreille des vérités, des souvenirs, ou même des tourments (Looks Like Shadows).
Il y a aussi ces moments de fraîcheur et aussi de douceur romantique – pour ne pas dire romanesque –, avec le bien nommé Romantic Illusion Is A Good Thing ou bien The Incertainty Of Love.
L’album se termine avec Lost Man Chapter, le dernier volet mystérieux, tarantinesque et post-apocalyptique d’un premier opus maîtrisé de bout en bout.
Eskimo vient de sortir son premier album, Que faire de son cœur ?
Un album qui lance une artiste et une voix immédiatement attachante : la preuve, avec son premier single Sirène.
Nous voilà, grâce au clip, entre la France, la Scandinavie et le Japon (Eskimo-Hana est d’ailleurs l’autre single tiré de son EP).
Mais musicalement, c’est du côté de la pop neighties qu’il faut chercher les influences d'Eskimo : guitares rugueuses, sons saturés et lo-fi. Et l’apport d’instruments acoustiques, qui donnent à l'ensemble une aura et une authenticité certaine à ce flow poétique : "Où vas-tu ? / Où la laisses-tu ? / En arrière / En aval / En cale-pied / Son ancre / Beaucoup de houle / Ça tangue…"
Une vraie personnalité et un univers passionnant pour une artiste à suivre.
Mystic Señor est le troisième album d’un cycle de cinq, proposé par Sam Franck Blunier. Une pentalogie que l’artiste a fort justement nommée The Five Album Concept. Cette démarche artistique ambitieuse est à saluer pour un artiste qui manie avec justesse chanson française, pop et rock. Après les deux premiers volets, Il fait beau (2015) et Des Filles (2016), voici donc, cette année, Mystic Señor, un album qui frappe autant par son spleen pop-rock, sa masculinité fragile que par sa poésie.
L’auditeur y trouvera la marque de brillantes références, à commencer par Alain Bashung dans le premier titre, Évidemment : "Et rien ne s’oppose à l’amour / Plus rien ne s’oppose à l’amour."
Le titre Le verbe, plus enlevé, délaisse l'hommage appuyé pour l'auteur de Résident de la République au profit d’une démarche plus originale surfant du côté de la pop à la fois rugueuse et insolente d'un Patrick Coutin : "On m’a dit moche / J’ai dit tant mieux / On m’a dit croche / J’ai dit fuck off."
Électro-poèmes
"Le verbe est plus important que nous / Le verbe est plus important que tout", chante Sam Franck Blunier dans un troisième opus où le désabusement affleure à chaque note et chaque mot : l’aliénation de l’amour (Poings liés), l’anticonformisme (Le verbe), l’absurdité de l’existence (Des questions). Mais il y aussi ces éclairs d’espoir, d’amour et de spiritualité (d'où, bien sûr, le titre de l'album), à l’exemple du Verbe et de ses Électro-poèmes :La prière des mots, Le Beau et Les mains des hommes.
Les mots du chanteur sont portés par une voix à la mâle assurance, sombre et faussement détachée. Mystic Señor est l’album d’un noctambule, et à certains égards gothique. Avec Salut beauté, nous voilà dans un pop-rock XIXe et baudelairien à la sèche beauté : "Salut Beauté inouïe, est-ce toi qui nous porte ? / Beauté si fragile / Je sais bien que tu m’attends, au-delà des vallées et des cimes, / Par delà les lacs et les toits de tuile."
Quand on pensait le chanteur perdu dans des volutes de fumée de nuits au Palace le voilà pris dans une ballade, Fragile, qu'une chanteuse comme Françoise Hardy pourrait interpréter avec la même fragilité, justement.
On aime l’univers de MoonCCat, musicien, photographe et poète assumant à 200 % un dandysme qui se serait transporté en plein XXIe siècle. Un style fin de siècle donc, mêlant textes saturniens et musque pop-rock, à mi-chemin entre Jim Morrison (Shoot The Poet) et lo-fi nighties (Sanatorium Europa). L’artiste le dit à sa manière sur son site : "Musicien, photographe et écrivain, MoonCCat a été le premier voyageur temporel à essayer la machine à explorer le temps de H.G. Wells en 1895. Elle l'a conduit au XXIème siècle sans possibilité de retour."
MoonCCat revient avec Forget Me Knot, album autoproduit, sombre mais traversé aussi de brillants éclats de lumière. Ce côté romantique noir, le chanteur l’assume avec un bel aplomb, en mettant en musique les vers de Gérard de Nerval (Vers dorés), de Baudelaire (Baudelaire 20 décembre 1855) et même... d’Alphonse Daudet (L’oiseau bleu). Disons aussi que les influences du chanteur sont à chercher autant du côté de Rimbaud ou Verlaine Edgar Alan Poe que de celui de Bram Stoker ou de Hermann Hesse.
MoonCCat est également au texte dans des titres tout autant convaincants et acides : Le voyage ("Il ne faut pas regretter / Ce que la vie nous offre / Il ne faut pas penser que ce n’est pas assez… / Il ne faut pas espérer que les choses s’améliorent"), Le chat Haret, L’idole ou Ton souvenir.
Comme s'il était catapulté dans notre époque, MoonCCat y apporte sa part de mystère, mêlant, dans un album résolument rock, mâtinée de pop eighties (Baudelaire 20 décembre 1855, L’idole), du mysticisme (Le chat Haret), du désespoir (Le voyage), de sensualité (Morganella Morganii qui "provoque des incendies"), de la poésie (Shoot the poet) et du gothique éclatant de lyrisme (Shadow, L’obscurité des nuits).
"Le premier voyageur temporel à essayer la machine à explorer le temps de H.G. Wells"
Dans cet album d’une belle cohérence figure un morceau énigmatique. Avec Sanatorium Europa, le plus dandy des chanteurs nous transporte dans l’Europe des années 20, sur la trace de Thomas Mann et d’Herman Hesse, lors de son séjour à Monte Verità. Explication de texte par MoonCCat lui-même : "Si les deux auteurs allemands sont peut-être familiers à certains, notamment Thomas Mann et sa Montagne Magique, Monte Verità ne doit pas dire grand chose à grand monde car il s'agit d'une expérience communautaire assez étrange et aujourd'hui oubliée qui a eu lieu au début du XXe siècle en Suisse… Six jeunes gens de bonne famille se sont effectivement lancés dans une aventure unique en son genre : quitter la société moderne dont ils étaient dégoûtés pour créer un nouveau mode de vie destiné à retourner au plus proche de la nature en construisant de toutes pièces un village autarcique auto suffisant qui réunira artistes, peintres, danseurs, chorégraphes, occultistes, anarchistes, bref, une population très éclectique, en recherche d'authenticité. Le village s'éleva à Monte Verità, "la montagne de la vérité", à Ascona en Suisse… C'est une utopie communautaire qui s'est construite et a perduré durant une vingtaine d'années. Elle a brassé de grands noms comme Hermann Hesse, Carl Jung ou Isadora Duncan, entre autre… Le titre raconte le séjour de Hermann Hesse dans ce lieu hors norme. Il ne raconte pas sa rencontre avec un prophète étrange qui à ce moment là, avait quitté la communauté pour vivre en ermite dans une grotte : l'étrange Gustö Gräser, qui fut pour lui une rencontre déterminante et a certainement joué un rôle dans ses romans initiatiques comme Demian et Le Loup des Steppes, avec qui Gräser avait certains traits en commun…"
Sanatorium Europa est une vraie singularité dans un album à l’empreinte XIXe siècle, sombre, beau, érudit et douloureux : "J’ai dans mon cœur un oiseau bleu, / Une charmante créature, / Si mignonne que sa ceinture / N’a pas l’épaisseur d’un cheveu… / Et son bec fin comme une lame, / En continuant son chemin, / M’est entré jusqu’au fond de l’âme."