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roman - Page 19

  • Tango passion

    9782818968130.jpgLe Temps d’un Abrazo, le dernier roman d’Isabelle Vouin, commence par des confidences singulières : celles d’un mas dans le sud de la France. Et c’est du reste cette maison, ce Moulin, qui vient conclure le livre et révéler les derniers secrets d’une histoire liant indéfectiblement amour et tango : "Les pierres ont une mémoire et nous observent. Elles enregistrent dans nos atomes les images et les émotions de nos vies."

    Ce témoin silencieux porte le récit d’un deuil impossible et d’une reconstruction de deux êtres cabossés par l’existence, ne semblant s’ouvrir au monde et à la vie qu’à travers la danse et l’abrazo, cet art de l’étreinte et de se prendre dans les bras, moment essentiel dans la pratique du tango.

    Nina a vécu heureux avec Ivan, danseur de tango doué mais décédé subitement, laissant sa compagne inconsolable. Elle choisit de se débarrasser de son passé et de vendre la maison qu’elle rénovait avec passion. Deux ans plus tard, elle y revient cependant, comme en pèlerinage : le mas est devenu, à la faveur de Salomé, sa nouvelle propriétaire, un lieu dédié au tango. Contre toute attente, un danseur accoste Nina et lui propose une danse. Elle accepte à contrecœur. L’homme se nomme Jean, et il a lui aussi derrière lui un lourd passé. Le tango et leur abrazo scelle bientôt une rencontre amoureuse.

    Scandé de références musicales

    Le Temps d’un Abrazo est scandé de références musicales – Alfredo de Angelis, Osvaldo Pugliese ou John Powell – avec en postlude les paroles d’Adios Corazón d’Héctor Sapelli et Lalo Etchegoncelay. Le tango, l’étreinte, les pas à deux : Isabelle Vouin fait de la plus sensuelle des danses et de ces instants sur une piste une métaphore de la séduction, de l’amour et de la vie en couple. Pour Nina, le tango est à la fois le catalyseur de souvenirs la ramenant à Ivan, mais aussi ce moment d’abandon qui lui permet d’oublier : "M’oublier dans ses bras, ce corps, cette musique, cette moiteur, le sang qui pulse, cette énergie, n’être plus que tournoiements, effleurement, dialogues, abandons."

    Dans cette histoire de passion et de tango, c’est bien de vie dont il est question. Les deux protagonistes, Nina et Jean, tentent chacun à leur manière de cicatriser et de renaître, l’une d’un décès brutal, l’autre d’un traumatisme survenu sur un champ de bataille. Quelques pas de danse pourraient-ils illustrer ce qu’est la difficulté de vivre ? Isabelle Vouin semble répondre par l’affirmatif, lorsqu’elle fait dire ceci à son héroïne : "Il faut m'éloigner du buste, des pupilles, des mains, de la peau, de l'odeur, de la transpiration, de cette vie qui m'aspire. Reculer pour ne pas se coller à nouveau." Jean, de son côté, expérimente aussi cette attraction irrésistible autant que tétanisante pour cette future partenaire : "Une sale sensation de manque, soudain. Et cette impression de trou dans l’estomac qui revient. Sa noirceur me manque. Oui c’est ça, sa noirceur. Sa fragilité. Son désintérêt de la vie."

    Le tango, ce moment où se jouent le désir, l’art et la vie en mouvement, est l’autre personnage de ce récit amoureux. Isabelle Vouin en parle avec la même passion que ses personnages danseurs – Nina, Jean, Ivan ou Salomé : "Les danseurs évoluent dans le sens inverse des aiguilles du temps. Les dos se redressent, les genoux s’assouplissent, les traits se détendent, les joues se remplissent, les fronts se lissent et les rides disparaissent."

    Le temps d’un abrazo et d’un tango, la vie reprend ses droits, sans doute.

    Isabelle Vouin, Le Temps d’un Abrazo, éd. Grand Angle, 2019, 135 p.
    https://www.angle.fr/scenariste-isabelle-vouin-880.html

    Voir aussi : "Qui va tango va sano e lontano"
    "Roman-feuilleton 3.0 sur un air de tango"

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  • Nathalie Cougny : "J’aime bien surprendre, sinon c’est pas drôle !"

    Nathalie Cougny fait partie des artistes que Bla Bla Blog suit avec intérêt : peinture, romans, théâtre, poésie, engagement. Cette artiste est partout et toujours avec passion. Sa dernière actualité est un roman, Paris Rome, qui imagine la rencontre de nos jours d'une jeune peintre médiatique avec Nietzsche. Rencontre improbable et incroyable qui méritait bien qu'on pose quelques questions à l'auteure. 

    Bla Bla Blog - Bonjour Nathalie. Tu as sorti ce printemps un nouveau roman : Paris-Rome. Derrière ce titre singulièrement simple se cache une histoire étonnante : celle de la rencontre de nos jours d’une artiste-peintre talentueuse et d’un philosophe bien connu, Friedrich Nietzsche. Finalement, de quoi s’agit-il ? D’une uchronie, d’un conte philosophique ou d’un roman surréaliste?

    Nathalie Cougny - Certainement un peu des trois, mais avant tout un roman qui n’a de surréaliste que la présence de Nietzsche à notre époque et qui replace un personnage historique, réel, dans une fiction philosophique. Mais en fait, tout est vrai, même si tout n’est pas réel (sourire).

    BBB - L’image de Nietzsche est encore aujourd’hui entachée de nombreux a priori qui n’ont rien à voir avec le personnage comme avec ses idées. Qu’est-ce que Nietzsche a encore à nous apprendre et que pourrait-il dire de nos sociétés?

    NC - Je pense que les détracteurs de Nietzsche ne le connaissent pas, ne l’ont pas vraiment lu et se sont arrêtés sur des a priori colportés et une déformation de sa pensée initiale par ceux qui ne pouvaient pas faire mieux. En même temps, c’est difficile et c’est ce qui fait son génie, de comprendre une pensée que lui-même pouvait déconstruire pour montrer que rien n’est fixe. C’est ce que j’aime chez lui car, en effet, rien n’est établi et nous sommes en perpétuelle évolution. Par exemple on lui a prêté une accointance avec le régime nazi alors qu’il était antiantisémite. Mais sans doute que sa sœur y est pour beaucoup, elle qui s’est mariée à un nazi et qui a tenté de falsifier ses écrits après sa mort. La philosophie en général a plus que jamais à nous apprendre ou plutôt à nous replacer au centre de nous-même, dans une société ultra violente qui nous isole, nous rend dépendants, nous empêche de réfléchir à travers une surconsommation toujours plus grandissante et tente à nous faire perdre notre identité, je veux dire par là, qui nous lisse. La peur et la défiance sont des leviers majeurs pour parvenir à éteindre les âmes et en faire ce que l’on veut. Toutes sortes de peurs sont entretenues aujourd’hui pour nous empêcher de faire surface : le chômage, le terrorisme, la montée de l’extrême droite, répondre par une pulsion instantanée, des lois pour tout et n’importe quoi qui nous enferment, alors qu’il suffit parfois de bons sens, de remettre des valeurs en place, de se tenir aux choses, d’être ouvert à la différence et surtout d’éduquer en ce sens. Quand est-ce qu’on nous parle de réussite, de beau, d’amour ? On devrait d’ailleurs introduire la philosophie à l’école dès le plus jeune âge avec des méthodes adaptées. Aujourd’hui, nous avons oublié le sens réel du désir, du courage, du discernement, de la réflexion et donc de la philosophie. Nietzsche pourrait nous dire de ne pas nous laisser prendre à ce piège et de nous dépasser pour combattre ce qui nous tue à petit feu, l’Homme de pouvoir, et devenir ce changement, ce "surhomme", pour construire une autre société, plus juste, plus vraie, sans faux semblants, se départir de la morale chrétienne, notamment, qui est encore bien présente et qu’il tenait pour responsable de notre malheur, de cette négation de soi car elle n’est que souffrance pour l’Homme. De nous fier davantage à notre instinct plus qu’à la connaissance qui reste une interrogation, car nous vivons sur des schémas de représentation de l’Histoire, de ne pas nous laisser aveugler par ces marionnettes qui s’agitent constamment sur la place publique, d’être ami de notre solitude, d’être des créateurs, des bâtisseurs. 

    BBB - La philosophie est au centre de ce roman. Mais aussi la peinture, car l’autre personnage de ce roman est Charlotte K, une peintre. Toi-même tu es peintre, d’ailleurs. Jusqu’à quel point ce roman est un dialogue entre toi-même et Nietzsche ?

    NC - Jusqu’à un point ultime (sourire) de réalité, de projections et de fantasmes. N’ayant pu, et pour cause d’époque, rencontrer Nietzsche, comme d’autres visionnaires ou révolutionnaires dans les codes, je pense à Klimt, Darwin ou George Sand, qui pour moi sont de réelles personnalités qui repoussent nos limites, font avancer les mentalités ou la compréhension du monde, j’ai tenté ce huis clos amoureux, car l’amour, sous plusieurs formes, est le fil conducteur de tout le livre, avec ma pensée aussi, en toute modestie. D’ailleurs, je pense que je n’aurais pas fui, comme Lou Salomé, un peu lâchement, je ne me serais sans doute pas mariée, mais je serais restée avec Nietzsche (sourire). Après, il me semblait essentiel d’amener l’art comme vecteur pour faire face à ce monde, pour nous sauver quelque part de cet engrenage. L’art nous ramène à nous-même tout en éclairant le monde. De plus, Nietzsche aimait l’art et défendait, comme aujourd’hui Boris Cyrulnik que j’ai eu la chance de rencontrer, au moins un (sourire), l’art comme "outil" de contradiction face à l’enfermement de la société, ses travers et ses abus. Les artistes sont essentiels pour, non seulement nous faire prendre conscience de la réalité à travers leurs œuvres, nous toucher, nous donner du bonheur, nous faire réfléchir et c’est valable pour tous les arts, mais leur liberté doit leur permettre aussi d’être des porte-voix, de faire tomber les préjugés et de défendre des causes ouvertement. Pour moi l’artiste est hors monde et en plein dedans, il n’est pas cet être naïf, perché sur son nuage et indifférent à tout, pour moi il est en plein dans la vie et son rôle est de premier plan.

    J’aime les auteurs troubles et les personnages forts

    BBB - Une question me taraude : plutôt qu’un nom de famille pour Charlotte, tu as choisi l’initiale K. C’est un hommage à Kafka ?

    NC - Ça aurait pu être une Métamorphose à la Kafka, que j’ai pas mal lu aussi il y a longtemps, j’aime les auteurs troubles et les personnages forts, marquants, à la psychologie intrigante, à la limite entre la raison et la folie. Mais c’est un pur hasard, je trouvais que ça sonnait bien et j’avais envie de laisser planer un mystère, dont je n’ai pas tiré profit d’ailleurs dans le livre.

    BBB - Paris-Rome se lit comme un roman véritablement engagé, âpre et en un sens provocateur comme beaucoup de tes livres. On sent chez toi la femme toujours en mouvement. Quel est ton moteur ?

    Plus la société veut nous "enfermer", plus elle nous pousse à être engagé. J’estime que nous vivons des régressions, notamment pour les droits des femmes dans le monde, mais pour les personnes elles-mêmes, la multiplication des violences en tout genre, la liberté d’expression, le droit à la différence. J’ai le sentiment qu’on cherche à nous étouffer dans une société où le jugement gratuit est devenu la norme, notamment à travers les réseaux sociaux. J’avoue ne pas le subir personnellement, mais je le vois tous les jours. Mon moteur c’est la vie, peut-être parce que je suis athée et que je ne crois pas à la vie après la mort, alors c’est ici et maintenant. C’est ce que j’ai appris de Nietzsche notamment, le grand "oui" à la vie et dépasser toute chose, toute souffrance pour en faire quelque chose de positif, ne pas être dans le ressentiment, dans la jalousie, dans tous ces sentiments qui sont des freins à la vie et nous empêchent d’avancer. Ma vie a commencé sans père et a continué à mettre sur ma route des épreuves, encore récemment le décès de ma mère, que je surmonte par la création, l’amour, le partage, le soutien aux autres aussi et par ce sentiment que la vie, qui est gratuite et nous offre tous les possibles, doit être respectée, défendue et surtout vécue. Après, c’est à nous de la rendre acceptable et belle, nous en avons les moyens en nous, mais nous subissons tellement de choses de toute part que nous nous laissons enfermer. Ce roman est engagé car il déconditionne l’amour, pas seulement par l’histoire de Paris-Rome, mais aussi avec Rencontre à risque, à la fin du livre. Il montre différents aspects de l’amour et balaie un peu le schéma classique de la vie à deux sous le même toit, qui pour moi n’est pas une condition au bonheur. C’est déjà ce que j’avais fait dans mon premier roman Amour et confusions, en plus érotique. Il est engagé aussi pour la condition des femmes et c’est récurrent dans mes livres. La société doit accepter que des femmes fassent le choix de rester libres, ce qui ne veut pas dire forcément seules, dominantes ou je ne sais quoi, mais vivre leur vie et leur sexualité comme elles l’entendent, sans jugement. Ces femmes font peur, à tort et à raison (sourire), à tort pour les hommes qui voudraient partager leur vie et à raison pour ceux, qui que ce soit, qui voudraient les diriger.

    BBB - Un de tes combats est pour la violence faite aux enfants. Peux-tu nous dire où en est aujourd’hui ton combat ?

    NC - C’est un long combat difficile pour plusieurs raisons et il suffit de voir ce que font les associations depuis des années, sans toujours parvenir à leur fin en ce qui concerne la prévention, les lois et l’application des lois. Le plus dur est encore à faire je pense, car il faut absolument remettre de l’éducation, mais le refus de la société à ouvrir les yeux et le renoncement des politiques à mettre en place des actions fortes font que rien ne change ou très peu de choses. D’un côté on a allongé le délai de prescription de 20 à 30 ans, ce qui est très bien et de l’autre les victimes ont toujours du mal à porter plainte parce qu’elles sont seules et peu considérées. On ne veut pas croire la difficulté à entamer une action en justice et tout ce que cela implique personnellement et psychologiquement, par exemple. Comme on ne veut pas croire que des parents maltraitent leurs enfants, jusqu’à la barbarie parfois. Les formations promises auprès des professionnels sont rares ou inexistantes, il n’y a pas assez de moyens à tous les niveaux, alors que les violences sexuelles, par exemple, coûtent 8 milliards d’euros à la sécurité sociale chaque année. Mais il n’y a aucune prévention en France. Donc il faut faire avec. Si je suis arrivée sur ce sujet, c’est d’abord parce que des femmes que je faisais témoigner avaient presque toutes subi une agression sexuelle étant jeune. Je me suis dit alors qu’il fallait commencer par là. Ensuite pour des raisons personnelles de proches qui avaient subi l’inceste et en découvrant dans mon entourage, au cours de discussion même anodines, de nombreuses personnes, des femmes, qui avaient subi un viol étant enfant, et il y en a beaucoup trop. Mon implication contre la maltraitance des enfants est plus récente que celle pour les violences faites aux femmes, même si j’ai, tout au long de ma vie, fait des choses pour les enfants. Elle commence en 2017 avec une pétition qui interpelle les politiques, le clip de prévention des agressions sexuelles sur mineur : C’est mon corps, c’est ma vie !, également visible sur le site de France TV éducation et le projet d’un album jeunesse à destination des enfants du primaire. Je suis en discussion depuis plus d’un an et demi avec le ministère de l’éducation nationale, notamment, pour faire de la prévention dans les écoles via cet album. Mais je ne perds pas espoir, je cherche toujours une maison d’édition pour cet album, car je suis persuadée qu’il faut s’adresser directement aux enfants, qui sont les principaux concernés, pour faire changer les mentalités et libérer la parole. Je suis également membre de l’association StopVeo enfance sans violence, dont la présidente, Céline Quelen, déploie des actions essentielles, notamment via un Kit de prévention intitulé : “Les violences éducatives, c’est grave Docteur ?”. Un outil composé d’une affiche et de dépliants, lesquels sont mis à disposition des familles chez les médecins et les professionnels de santé, et ainsi font prendre conscience des conséquences des violences éducatives ordinaires et que l’on peut/doit élever un enfant sans violence. J’invite d’ailleurs tous les professionnels de santé à se rendre sur le site et à commander ce kit.

    BBB - Parlons poésie. Car la poésie fait aussi partie de ton parcours. J’ai l’impression d’ailleurs que c’est quelque chose d’important, que tu y reviens régulièrement et que tu fais de la poésie un moment de respiration. Est-ce que c’est ainsi que l’on pourrait qualifier ton rapport avec ta démarche artistique?

    NC - Oui, la poésie est très importante pour moi et oui c’est une grande respiration. Même si c’est une part de moi liée aux hommes et donc avec des souffrances aussi. D’abord, c’est la poésie sensuelle qui m’a fait connaître, à ma grande surprise. Je me suis aperçue qu’elle touchait beaucoup de monde, touchait dans le sens des émotions, du vécu, de l’intime, femmes comme hommes pour des raisons différentes et je reçois quantité de messages pour me dire merci et que ça fait du bien. Quel bonheur ! Ma démarche artistique est une démarche humaniste, qui rassemble. La poésie, c’est mon vent de liberté, un vrai plaisir de partage, alors que la peinture est plus introspective encore. La peinture touche à l’inconscient pour moi et reflète mon ressenti, un besoin urgent d’exprimer souvent une douleur pour m’en libérer. La poésie exprime mes émotions et mes sentiments, jusqu’au plaisir sexuel, dans une grande liberté. C’est sa force d’ailleurs, la liberté. Je crois aussi que tout mon travail a un grand rapport au temps, au temps qui passe trop vite, à l’instant que je veux saisir, à toutes ses minutes qui nous échappent et que je veux figer par les mots ou sur la toile, comme des instants de vie à ne jamais oublier.

    BBB - La surprise est toujours au rendez-vous lorsque l’on suit ton parcours. Sur quoi travailles-tu? Un nouveau roman, de la poésie, du théâtre ? Ou bien vas-tu t’essayer à une nouvelle expérience artistique?

    NC - Oui, j’aime bien surprendre, sinon c’est pas drôle (sourire) ! Alors, je travaille actuellement en tant que co-auteur sur l’écriture de livres pour deux personnalités avec des sujets qui ont du sens et qui devraient faire parler, c’est un gros travail qui va me prendre beaucoup de temps. Le one-woman-show Sex&love.com qui s’est joué près de 100 fois est actuellement revisité en pièce de théâtre. Nous sommes en train de faire la bande annonce pour une montée sur scène dans les mois qui viennent, avec deux comédiennes vraiment superbes et talentueuses. Je poursuis mon projet sur la maltraitance des enfants avec la recherche d’éditeur pour l’album et je suis invitée par la mairie de Nice pour 3 jours de conférence/débat et d’intervention devant des classes de primaire en novembre prochain. Et puis, il y a toujours une place pour les projets imprévus. C’est ce qui fait aussi tout le charme de ma vie d’artiste …

    BBB - Merci, Nathalie.

    NC - Merci, Bla Bla Blog.

    Nathalie Cougny, Paris-Rome, Et Nietzsche rencontre Charlotte
    suivi de Rencontre à risque
    éd. Publilivre, 2019, 234 p.
    https://www.nathaliecougny.fr

    Voir aussi : "Voilà l'homme"

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  • La voix de Mademoiselle numéro 11

    Nous avions parlé sur Bla Bla Blog, il y a quelques mois, du dernier roman de Kim Chi Pho, Le Clos des Diablotins

    Pour découvrir autrement ce formidable roman et entendre Mademoiselle Numéro 11 interprétée par Jean-Benjamin Jouteur, c'est ici : https://salondelautoedition.fr/2019/05/20/j-11-kim-chi-pho.

    Kim Chi Pho sera présente au Salon de l’autoédition à Lyon le 1er juin 2019

    Kim Chi Pho, Le Clos des Diablotins, Amazon, 2018, 273 p. 
    www.facebook.com/mademoisellenumero11
    https://salondelautoedition.fr

    Voir aussi : "À la recherche du diable perdu"

  • Rose était son nom

    La biographie de Franck Bouysse nous apprend qu’avant de se consacrer à son cycle des saisons à la Manufacture des livres l’auteur corrézien a signé plusieurs polars. De là vient sans doute cet art du suspense et cette plongée dans la noirceur humaine si caractéristique de son dernier roman, Né d’aucune Femme.

    Dans une France rurale de la fin du XIXe ou du début du XXe siècle, Gabriel, un modeste prêtre, est réclamé pour se rendre dans un proche asile afin de bénir le corps d’une femme tout juste décédée. Elle se prénomme Rose. Peu de temps auparavant, au confessionnal, une femme lui a demandé de récupérer sur sa dépouille des cahiers. Lorsque le père revient à son presbytère en compagnie de son sacristain, il a entre les mains un témoignage écrit par une jeune paysanne relatant son histoire.

    Lorsqu’elle avait 14 ans, Rose a été vendue par son père à un notable pour devenir domestique. Battue, maltraitée, violée et séquestrée par ce "maître des forges", Rose n’a pas d’autre choix que d’ourdir une vengeance contre lui et sa mère. La jeune fille va payer chère sa révolte contre des notables tout puissants, ne trouvant son salut que dans les cahiers que découvre Gabriel quelques années plus tard.

    C'est à travers l’écriture que passera la rédemption de Rose

    Franck Bouysse relate dans un livre polyphonique la destinée incroyable d’une femme, en choisissant de faire parler son héroïne avec sa langue à elle, puisque c’est à travers l’écriture – une écriture âpre, organique et peu académique – que passera la rédemption de Rose : "Les mots, j'ai appris à les aimer tous, les simples et les compliqués que je lisais dans le journal du maître, ceux que je comprends pas toujours et que j'aime quand même, juste parce qu'ils sonnent bien. La musique qui en sort souvent est capable de m'emmener ailleurs, de me faire voyager en faisant taire ce qu'ils ont dans le ventre, pour faire place à quelque chose de supérieur qui est du rêve."

    L’auteur insère au milieu du récit de la paysanne devenue domestique, d’autres voix : celle du père, Onésime, étouffé par la culpabilité ("Onésime eut la certitude que la pire des choses n'était pas de mourir, mais de perdre toute raison de mourir"), celle de la mère désœuvrée ("Une mère, c'est fabriqué pour s'inquiéter, y a rien à faire contre"), celle d’Edmond en témoin impuissant et s’exprimant dans une sorte de chant funèbre ("Je sais pas où il l'a trouvée. / Elle a pas voulu me dire. / Ils vont lui mener la vie dure, lui et la reine mère, c'est sûr. / Il y a pas grand chose qui peut les arrêter, je suis bien placé pour le savoir. / Ici, le malheur, il est caché partout."), et bien entendu les propres phrases de Gabriel. Ils viennent clôturer ce roman où les mots de pardon, de bienveillance et d’humanité prennent tout leur sens : "Les âmes. Les Pères m'ont enseigné qu'elles ne se vernissent pas, qu'elles se traitent en profondeur, qu'il est bien plus charitable de pardonner l'homme ballotté par le malheur que de courtiser celui qui par naissance et fortune en est préservé. La vertu sans mérite n'est rien d'autre qu'un déguisement de carnaval."

    Né d’aucune Femme vient d'obtenir le Prix des libraires 2019.

    Franck Bouysse, Né d’aucune Femme, éd. La Manufacture des Livres, 2019, 334 p.
    https://www.lamanufacturedelivres.com/auteurs/fiche/1/franck-bouysse

    Voir aussi : "Pendant que j’écrivais, j’étais avec elle"

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  • Nous nous sommes tant aimés

    marie rault,roman,love story,histoire d’amour,lisbonneLe titre du premier roman de Marie Rault, Une prodigieuse Histoire d’Amour (éd. Le Lys Bleu), a le mérite d’intriguer en raison de son apparente banalité. Il est en tout cas fidèle à l’intention de l’auteure qui déroule une love story s’étalant sur une dizaine d’années – si l’on oublie le dernier et singulier dernier chapitre.

    Léa, la narratrice, est une manageuse dans un palace parisien. Cette professionnelle aguerrie est aussi et surtout une femme aux fêlures secrètes, à la fois assoiffée d’idéal amoureux mais ne croyant pas aux contes de fée : "Quand avait-elle cessé d’être une jeune femme comme les autres ? D’où lui venait cette inaptitude à la vie ? Ou plutôt cette nécessité du trop-plein de vie ? Cette frénésie de l’exception, cette boulimie de la tachycardie, cette addiction à l’absolu."

    La brillante responsable est envoyée à Lisbonne pour convaincre l’auteur à succès Pierre Capucin de tourner adaptation d’un de ses romans dans l’hôtel où elle travaille. Elle rencontre par là-même son écrivain fétiche ("Ses livres étaient pour elle une bouffée d’oxygène, un repère, une fenêtre nécessaire vers ceux de son espèce"). Entre les deux, le courant passe immédiatement : "Léa avait reconnu Pierre comme un de son espèce."

    Dix ans de la vie amoureuse d’une jeune femme de la génération Y

    Marie Rault aurait pu bâtir une simple histoire de fan concrétisant le rêve absolu de connaître intimement l’objet de sa passion. Au lieu de cela, l’auteure choisit habilement et subtilement d’arpenter les souvenirs de cette femme grande voyageuse et grande amoureuse.

    De Paris à Lisbonne, en passant par Pondichéry ou Barcelone, les temps et les lieux s’entrecroisent dans un bloc espace-temps insécable : la famille, les amis, les amants, les secrets, les maladies, les séparations et la mort sont vus à travers le prisme de la relation passionnelle entre Léa et Pierre.

    Marie Rault a fait le choix de chapitres courts et elliptiques pour écrire en moins de 120 pages dix ans de la vie amoureuse d’une jeune femme de la génération Y.

    L’ écriture délicate, précise et sans ostentation prouve la naissance d’une prometteuse auteure qui sera absolument à suivre : "Au milieu de la foule, elle chérissait le secret qu’elle portait. Elle avait l’impression d’être devenue une ombre, un fantôme. Pas quelque chose d’effrayant et d’étrange, plutôt une âme drapée de soie."

    Marie Rault, Une prodigieuse Histoire d’Amour, éd. Le Lys Bleu, 2019, 119 p.
    https://cassenoisette383.wixsite.com/marierault

    Voir aussi : "À la recherche du diable perdu"

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  • Voilà l’homme

    Comment qualifier le dernier livre de Nathalie Cougny, Paris-Rome ? Uchronie, roman d’amour ou conte philosophique ? Un peu de tout cela sans doute, et c’est ce qui fait tout l’intérêt de ce roman – qui est complété par une nouvelle, Rencontre à risque.

    Paris-Rome suit Charlotte K., de nos jours (la précision est importante), dans un voyage qui doit mener la jeune et célèbre peintre parisienne à Rome pour une exposition à la Villa Borghèse. Dans le train qu’elle prend, un homme s’installe dans le même compartiment : il s’agit de Friedrich Nietzsche en personne. Il va lui aussi à Rome et sa rencontre avec la jeune femme est tout sauf un hasard. Entre les deux voyageurs – l’artiste mondialement admirée pour ses œuvres "lyriques" et le philosophe légendaire – une conversation s’engage, et la personne la plus fascinée n’est sans doute pas celle que l’on croit.

    Il fallait l’audace de Nathalie Cougny pour imaginer une telle rencontre, aussi inattendue que surréaliste. Le postulat que Nietzsche soit toujours vivant en 2019 n’est ni expliqué, ni développé : cet "éternel retour" est un fait, que le lecteur doit accepter dès les premières pages.

    La vraie surprise vient de la rencontre fortuite de Charlotte et de Friedrich, dans le huis-clos d’un train. Le roman se déroule pendant un voyage qui sera tout sauf un périple ordinaire. D’ailleurs, rien ne se passe comme prévu. Des menaces font craindre pour la sécurité des passagers, en particulier pour Nietzsche, et des manifestations perturbent le voyage. Des militaires se sont installés dans le train afin de protéger le philosophe aussi célèbre que controversé. Le périple et les conversations entre Charlotte et Friedrich se déroulent dans ce climat tendu. Tout peut basculer à chaque instant. Mais pourtant les deux célébrités conversent avec une courtoisie très XIXe siècle, tout en se mettant à nu pour la première et sans doute la dernière fois.

    Faire descendre Nietzsche de son piédestal, comme Zarathoustra

    Assez singulièrement, c’est sur le passé de la peintre que Nathalie Cougny s’intéresse : son enfance endeuillée par le décès de ses parents, sa découverte de l’art, ses succès, ses dépressions ou sa vie sentimentale. Nietzsche apparaît comme un homme presque ordinaire, débarrassé d’une forme de carcan que l’histoire et la légende lui ont laissée. "Ecce homo" : semble nous dire l’auteure, pour reprendre le titre d’un de ses livres. "Voilà donc cet homme", semble répondre en écho Charlotte K., devenue l'espace du voyage l’alter ego de Nietzsche.

    Charlotte, interlocutrice et égale du philosophe dans ce roman surprenant à plus d’un titre, porte une voix universelle à laquelle lui répond une autorité morale et intellectuelle, mais dont l’armure vient se fissurer au fur et à mesure que le dénouement approche. Voilà qui est paradoxal pour ce "philosophe au marteau" ! Nathalie Cougny, avec ce dialogue philosophique défiant la logique et le temps, vient faire parler l’auteur de Par-delà le Bien et le Mal de nous et de notre monde, sans pour autant en faire la star ou la légende vivante qu’il est devenu dans le monde parallèle de Paris-Rome. Nathalie Cougny choisit en effet assez audacieusement de faire descendre Nietzsche de son piédestal, comme Zarathoustra lorsqu'il quitte la montagne pour descendre parmi ses semblable.

    La nouvelle Rencontre à risque vient compléter ce conte moderne, comme si ce récit à la première personne était celui de Charlotte elle-même, dans une autre circonstance. Mais au contraire de Paris-Rome,l’auteure délaisse le dialogue enlevé pour un texte dense, âpre et sensuel sur un amour sans retour. Nathalie Cougny ausculte une relation empoisonnée entre une narratrice et un homme plus jeune qu’elle, avec acidité et sans concession, comme autant de coups de marteau adressés à cet homme.

    Nathalie Cougny, Paris-Rome, Et Nietzsche rencontre Charlotte
    suivi de Rencontre à risque
    éd. Publilivre, 2019, 234 p.

    https://www.nathaliecougny.fr

    Voir aussi : "Nathalie Cougny, en adoration" 
    "Mes hommes"
    "En corps troublé"

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  • Au cœur d’une femme

    Paru chez Plon en 1998, avant de faire l’objet d’une réédition dix ans plus tard, Le Cœur d’une Autre est le troisième roman de Tatiana de Rosnay. Tout comme L’Appartement témoin, l’auteure s’intéresse à la quête d’un homme paumé, un anti-héros que le destin fait basculer dans une histoire hors-norme.

    Bruce Boutard est un antipathique et fieffé misanthrope, divorcé et à la vie sans aspérité autre que son fils Mathieu : "J'avais les habitudes lugubres d'une vieille fille ; ces vieilles filles velues à bouillottes qui se parlent seules à voix basse, qui portent des chaussettes de laine pour dormir et leur Damart même quand il fait chaud. Rien de tragique, pourrait-on dire. Rien d'extraordinaire. Cependant - hélas ! -, il s'avère que je suis un homme." Un être franchement antipathique que le lecteur va pourtant suivre avec passion.

    Suite à un malaise, Bruce apprend qu’il souffre d’une maladie du cœur et qu’il doit être greffé en urgence. Au bout d’une attente interminable, une bonne nouvelle arrive et Bruce reçoit un nouvel organe. De retour de l’hôpital, l’ancien homme acariâtre et misogyne se trouve changé, tant dans le caractère, que la sensibilité et les goûts. Un voyage en Italie avec son fils le convainc que son nouveau cœur l’a profondément transformé. Il parvient à connaître l’identité de la donneuse, décédée la veille de sa greffe. Elle se nommait Constance Delambre et semble maintenant revivre "à travers ce cœur transplanté." La vie du greffé est transformée à jamais. Bruce n’a désormais qu’une obsession : savoir qui est cette femme à qui appartenait son nouveau cœur, un cœur qui semble être possédé d’une mémoire.

    Une quête impossible

    C’est une quête de la vérité qui est au centre de l’histoire, une quête au départ impossible car, comme le rappelle l’auteure, le don d’organe est anonyme. Il fallait une astuce de romancière pour permettre à Bruce de se mettre en piste : la rencontre avec Joséphine – de nouveau une histoire de cœur – va s’avérer décisive.

    Comme pour L’Appartement témoin, c’est en Italie que se déroule l’enquête sur la piste de Constance, mais qui est aussi celle du peintre Paolo Ucello et d’un mystérieux tableau. C’est l’occasion pour Tatiana de Rosnay de proposer de belles pages sur l’artiste florentin, notamment cette description de La Bataille de San Romano : "C’était un grand tableau sombre aux teintes ocre et bistre, peint avec une vigueur candide et une rigueur des lignes qui me fascina. Intrigué par le tumulte discipliné de l’œuvre, la symétrie parfaite des lances et des plumes plantées dans les armets, il me semblait que je me trouvais transporté au milieu d’une bataille. J’entendais la clameur sourde d’une lutte, le choc de boucliers contre armures, les bruits métalliques des cuirasses, des épées, des glaives, les hennissements des chevaux enchevêtrés, harnachés de pourpre et d’or, dont deux gisaient au sol, l’un agonisant, l’autre figé par la mort… Derrière la violence de la bataille s’étirait un paysage tranquille; des vendangeurs travaillaient dans les vignes, et un chien poursuivait des lièvres à travers champs."

    Comme l’explique Tatiana de Rosnay dans la préface écrite en 2011 de ce roman, ce n’est pas un lieu qui déclenche l’intrigue mais "un cœur qui, en changeant de corps, va se remettre à palpiter dans une nouvelle poitrine, encore empreint d’émotions antérieures." La seconde préface de cette édition, de Joël de Rosnay, aborde le thème de la greffe sous le regard du scientifique : "Une greffe de cœur peut-elle changer la psychologie et le comportement d’une personne ?" se demande-t-il. Un début de réponse est donnée par l’épigénétique, poursuit-il : une discipline récente qui tendrait à montrer que la base du livre de sa fille Tatiana est loin d’être absurde.

    Le lecteur oublie rapidement les doutes sur les effets de ce nouvel organe et se laisse porter par cette histoire de "mémoire neuve" – pour reprendre un titre de Dominique A. Il suit les pas d’un Bruce transformé en vrai beau personnage romanesque, grâce à une mystérieuse donneuse qu’il n’aurait jamais dû connaître et qui lui a fait pourtant don du plus grand des cadeaux  : "Je lui dois la vie, et le goût de la vie. Comment lui dire merci, puisqu'elle n'est plus sur terre ?"

    Tatiana de Rosnay, Le Cœur d’une Autre
    éd. Le Livre de Poche, 1998, éd. Héloïse d’Ormesson, 2009, 282 p.

    http://www.tatianaderosnay.com

    Voir aussi : "Tatiana de Rosnay, son œuvre"
    "Premiers fantômes"

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  • Perdu au milieu des elfes

    fantasy,elfe,centaure,christine ringuet,romanElfes, licornes, hippogriffes, nains, centaures ou dragons : rien ne manque dans ce petit roman de fantasy qu’est La Constellation des Elfes, écrit et auto-édité par Christine Ringuet (Amazon).

    Dans le pays de Galiaé, un jeune homme, Kalen, recueille accidentellement une elfe et sa licorne. En quelques heures, sa vie ennuyeuse et pleine de frustration prend un tour féerique, dans tous les sens du terme. C’est aussi l’occasion pour lui de vivre sa va vie avec des créatures fantastiques et dans des pays pas moins imaginaires.

    On accroche ou pas à ce premier roman, relativement court pour un livre de fantasy (environ 200 pages). Les amateurs se laisseront conduire en douceur dans cette quête initiatique qui se laisse goûter sans honte.

    En début d’année, Christine Ringuet a publié son deuxième roman, Eléanor X (auto-édité lui aussi).

    Christine Ringuet, La Constellation des Elfes, Amazon, 2018, 205 p.
    https://www.facebook.com/christine.ringuet.7

    Voir aussi : "Taddeuz à l’école des sorciers"

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