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Il a déjà été beaucoup raconté de ce Liberati, d'Eva, le "roman vrai" de sa compagne Eva Ionesco, réalisatrice, actrice, égérie des nuits parisiennes, ex mannequin-enfant, symbole vivant des excès de l'underground parisien, lorsque la pédopornographie pouvait s'afficher en public sans susciter plus de remous que cela. C'est justement les pages consacrées à la carrière scabreuse d'Eva (surnommée par certains "Baby Porno"), entraînée par sa propre mère Irina Ionesco, qui ont valu à Eva, la réputation d’œuvre sulfureuse pour lecteurs avertis.
Mais l'ouvrage de Simon Liberati vaut bien plus que cela, car Eva est d'abord un grand livre d'amour, construit autour d'une femme flamboyante, libre et blessée, racontée par un Simon Liberati au bord de la rupture lorsqu'il entame sa relation avec elle. Entre ces deux personnes, qui se sont croisées à plusieurs reprises depuis 25 ans, l'auteur traduit moins l'ensorcellement d'Eva sur lui que l'évidence d'un lien indéfectible ("pour toujours, jusqu'à ce que la mort nous sépare"). La passion entre ces deux êtres intelligents et cabossés par la vie signent pour eux une résurrection et une revitalisation. En cela, Simon Liberati signe une œuvre poignante sur l'amour, un amour sincère, sans concession, sans artifice, rugueux, no limit. Tout au long des pages, l'auteur clame son admiration indéfectible pour Eva Ionesco, devenue ces dernières années une réalisatrice reconnue (My Litttle Princess).
Mais ce roman sur une femme adorée est aussi un livre sur le livre.
Page 97, l'auteur entraîne le lecteur dans l'aventure de l'écriture d'Eva, qui s'achève d'ailleurs avec les dernières corrections du manuscrit. Simon Liberati avoue avoir voulu créer non pas une biographie "mais une vie, au sens où l'entendait l'Antiquité". Cette vita d'Eva, en réalité une autofiction – qui n'est pas sans rappeler par certains aspects Le Livre brisé de Marcel Doubrowski, en moins sombre, certes – suit le parcours à la fois monstrueux et fascinant d'Eva Ionesco au cœur des nuits parisiennes où l'on croise Christian Louboutin, Pierre et Gilles ou Roman Polanski.
Loin d'être un panégyrique (Liberati a d'ailleurs admis publiquement que la vraie Eva n'a pas apprécié certains passages du livre qui lui sont consacrés), le "roman" Eva dépeint avec cruauté le destin hors du commun d'une enfant transformée par sa propre mère en mannequin, objet commercial de photos et de films érotiques voire pornographiques. Vulgaire bête de foire, égérie d'un certain "art" pédopornographique, rebelle passionnée, victime instrumentalisée par des adultes sans vergogne (et d'abord par sa mère Irina Ionesco), actrice consentante d'excès en tout genre (relations sexuelles dès son plus jeune âge, alcools, drogues dures, tournages de films pornos), Eva Ionesco se révèle bien plus complexe qu'elle n'y paraît. Simon Liberati fait finalement d'Eva Ionesco la maîtresse de son propre destin, certes au prix de souffrances indélébiles et de dépressions chroniques.
Livre d'un amour d'airain, Eva parle aussi de rédemption (ou de double rédemption si on embrasse l'auteur) que Liberati déroule avec lyrisme, à coup de phrases amples et élégamment scandées. Le lecteur quitte Eva avec regret mais aussi une forme de soulagement : cette femme libre et apparemment apaisée est devenue l'actrice de sa propre existence jusqu'à faire elle-même de sa destinée une œuvre de fiction, pour le coup au cinéma (My Little Princess). Simon Liberati achève cette confession – sans doute l'un des plus beaux ouvrages de cette rentrée littéraire – par ce passage tout en délicatesse et en pudeur : "À cette distance tu mesures à peu près vingt-cinq centimètres... Tu descends, tes talons de Lilliputienne claquent sur le ciment mouillé et voilà que tu grandis une nouvelle fois jusqu'à prendre tout l'espace".
Le Livre brisé fait partie de ces ouvrages que l'on n'oublie pas de sitôt. Une vraie claque !
Ce roman, de fait une autofiction, commence en 1985. Parler d'autofiction est d'autant plus pertinent que le terme a été inventé par Serge Doubrovsky lui-même à la fin des années 1970 pour son roman Fils.
Dans Le Livre brisé, l'auteur, professeur de philosophie, entame un récit romancé qui entend relater ses amours, "dans une version fin de siècle de La Nausée". Au fur et à mesure de l’écriture chaotique de cette œuvre, sa femme, Ilse, une jeune Autrichienne de vingt ans sa cadette, intervient en tant que lectrice attentive et sévère. Elle met au défi son mari d’écrire la vérité crue de leur couple qui, à l’époque, bat déjà de l’aile. Doubrovsky s’exécute, se refusant à cacher les secrets de ses relations avec Ilse : les femmes qu’il a connues avant elle, leur rencontre, les mésententes au sujet des enfants, les frustrations d’Ilse, la violence ou l’alcool.
Alors que Doubrovsky entame le dernier chapitre de son livre, Ilse meurt subitement. "Un livre comme une vie se brise" écrit-il, en proie à une douleur qui frappe au cœur le lecteur. Comme en écho à cette vie déchirée, la dernière partie de son autofiction, poignante et inoubliable, se déroule pour parler d’un deuil insupportable, de la culpabilité et de son amour indéfectible pour sa femme. Un ouvrage magistral et superbe qui vous glace le sang. Ilse, comme rendue à la vie, nous devient proche et nous bouleverse. Il faut noter aussi le style inimitable de l’auteur : vivant, déstructuré, constitué de phrases courtes, de répétitions, de lapsus et de jeux de mots.
Auteur trop rare, Serge Doubrovsky a frappé un grand coup lors de la sortie du Livre brisé en 1989. Un livre scandaleux qui est aussi le récit d'un auteur pris au piège de son propre livre, "un livre monstre". A l'époque, le très flegmatique Bernard Pivot s'en prend même à l'auteur, dans son émission Apostrophe : "Vous avez poussé votre femme au suicide... [Mais] je ne dis pas que vous l'avez tuée sciemment". Ce à quoi, Doubrovsky rétorque : "Il a fallu me traîner, me sortir de mon lit pour venir jusqu'ici." La réaction cinglante de Pivot ne se fait pas attendre : "Vous voulez que je me mette à pleurer?"
Serge Doubrovsky, Le Livre brisé, éd. Grasset, 542 p.
À l'origine du Royaume, l'imposant et exceptionnel récit d'Emmanuel Carrère, il est question d'une crise de foi de ce dernier.
L'auteur de La Moustache (1986) et de L'Adversaire (2000) y dévoile sans fard son passé de chrétien croyant convaincu, d'ancien pratiquant sincère et admirateur des textes sacrés du nouveau Testament, au point de les avoir commentés plusieurs années. Emmanuel Carrère rappelle aussi qu'il a participé à la traduction de l'Évangile de Marc pour La Bible de Bayard (1995). J'écris "passé de chrétien" car Emmanuel Carrère s'étend sur la crise intérieure qu'il a dû surmonter, une "mise à l'épreuve" comme il l'écrit, mêlant fascination pour les textes bibliques et incompréhension du message évangélique, cette histoire de résurrection n'étant pas la moindre des aberrations : "Ces textes... je les trouve toujours magnifiques, je les trouvais déjà délirants... Ils enseignent un dédain de l'expérience, du témoignage des sens..."
À cela, s'ajoutent une angoisse existentielle qui a conduit l'auteur sur le divan d'une psychanalyste mais aussi des expériences personnelles traumatisantes. À ce sujet le lecteur ne pourra qu'être happé par ces vingt pages terrifiantes sur une ancienne nounou croyante et délirante, digne de figurer dans le film La Main sur le Berceau ! Au bout de cette crise personnelle, Emmanuel Carrère choisit de ne pas de tourner le dos à la religion catholique ou à sa foi ; il choisit par contre de la comprendre, de revenir aux racines du christianisme et de se faire homme de raison – et d'agnostique : "Pas de dolorisme, pas de culpabilité mal placée. Ne pas se flageller. Commencer par être bienveillant avec soi-même. Tout cela est plus cool, et me convient mieux... Ce que j'appelle être chrétien, ce qui m'a fait lui répondre que oui, j'étais chrétien, cela consiste simplement, devant le doute abyssal qui est le sien, à dire : qui sait ? Cela consiste, au sens strict, à être agnostique. À reconnaître qu'on ne sait pas, qu'on ne peut pas savoir." Croyant et agnostique (sic), il choisit, dans Le Royaume, un des ouvrages les plus remarqués de 2014, de se faire historien, exégète mais surtout enquêteur.
Commence alors une nouvelle partie de ce récit, passionnant comme un roman. L'auteur assume d'ailleurs complètement son statut de romancier, bien utile pour remplir les trous dans cette histoire compliquée et lacunaire du paléochristianisme, ponctué de crises souvent violentes.
La trame de son nouveau récit suit les traces de Luc, personnage éminemment important du Nouveau Testament, auteur de l'Évangile qui porte son nom mais surtout des Actes des Apôtres. Ce Macédonien lettré, de culture hellénique et attiré par la culture juive (mais sans doute pas juif lui-même), a suivi dans ses voyages autour de la Méditerranée une figure capitale du Christianisme, Paul. Ce dernier, Emmanuel Carrère en fait l'une des figures principales de son livre. L'ancien bourreau de la jeune secte admiratrice de Jésus, devenu lui-même chrétien suite à une révélation en Syrie (les visions du chemin de Damas, voir en illustration de cet article une peinture du Caravage), s'avère complexe, mystérieux, trouble et complexe dans ses motivations. Pour l'auteur, Paul (anciennement Saul) était certes citoyen roman mais n'était sans doute pas juif comme il le prétend, au contraire des autres piliers du christianisme naissant que sont Pierre ou Jacques, l'un des frères de Jésus. Entre l'ancien persécuteur romain et les ex apôtres, les désaccords vont vite se faire jour, d'abord au bénéfice des prestigieux témoins de Jésus. Emmanuel Carrère explique aussi les accusations d'antisémitisme de Paul qui ne s'est pas gêné pour faire endosser par les autorités juives l'accusation de la mort de Jésus (juif lui aussi, rappelons-le), pourtant exécuté par les autorités romaines (une thèse, contestée, de l'historien Hyam Maccoby).
Les désaccords entre Paul d'une part et les deux anciens apôtres vont rapidement dégénérer au point de voir au cours du premier siècle une rupture saillante entre juifs chrétiens (adeptes de Pierre, Jacques mais aussi de Jean de Patmos) et paléochrétiens évangélisés au cours des campagnes de Paul et de ses disciples à travers l'Europe et le Moyen-Orient. Le torchon brûlera pour de bon lors de la diffusion de l'Apocalypse de Jean qui est, dit Emmanuel Carrère, moins un texte eschatologique sur la fin du monde, ou une critique contre Néron (le fameux 666) et les Romains païens qu'une attaque contre... les paléochrétiens pauliniens.
Cette hypothèse en croise d'autres dans ce récit riche et bien documenté. À ce sujet, l'auteur revendique son métier et sa liberté d'écrivain. Moins exégète que romancier, il ouvre des voies intéressantes au sujet de tel ou tel personnage ou telle ou telle scène de la Bible : Luc n'aurait-il pas rencontré Marc (appelé également Jean-Marc ou Yohanan Marcus), l'auteur du premier Évangile ? Ce même Marc ne serait-il pas le jeune homme présent sur le Mont des Oliviers que les soldats chassent et qui s'enfuit en courant, nu ? Le deuxième témoin d'Emmaüs, avec Cléophas, ne serait-il pas Philippe, un disciple qui aurait non seulement facilité "l'enquête" de Luc mais qui lui aurait également confié par écrit les paroles brutes de Jésus captées lors des trois ans de son ministère (la source Q) ? D'autre part, Luc, en plus de ce texte capital, ne se serait-il pas fait à la fois historien et romancier pour écrire son Évangile ? Emmanuel Carrère s'y arrête longuement et commente l'œuvre de Luc, l'Helléniste. Il pointe du doigt, ça et là, incohérences, facilités de langages ou trouvailles stylistiques : "Luc parfois se contente de copier Marc [qui a déjà publié son Évangile], mais la plupart du temps … il dramatise, il scénarise, il romance... pour rendre des scènes plus vivantes."
Au cœur de ce travail littéraire, il y a bien sûr la motivation religieuse et le prosélytisme. Emmanuel Carrère appuie à ce sujet l'importance de cette source Q qui est commun à l'ensemble des Évangiles (à l'exception de celle de Jean, la plus littéraire, la plus ancienne, la plus travaillée mais certainement aussi la moins fidèle à l'histoire). Dans cette source Q, figurent des textes célèbres : des paroles du Sermon sur la Montagne, la parabole du berger et de ses cent brebis, des invitations à la pauvreté, des aphorismes... Ce qui fait dire à l'auteur du Royaume qu'un lecteur, s'il oublie le contexte de cette source, peut être sidéré "par son originalité, sa poésie, son accent d'autorité et d'évidence, et que hors de toute église il prendrait place parmi les grands textes de sagesse de l'humanité, aux côtés des paroles de Bouddha et de Lao-Tseu." Des paroles sages, qui sont cependant contrebalancées, ajoute l'auteur plus loin, par ce qu'écrit Luc faussement qualifié de "policé" et "trop bien élevé" : "Qui vient à moi sans haïr son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères, ses sœurs et jusqu'à sa propre vie ne peut être mon disciple" ou "Je suis venu jeter le feu sur la terre. Comme je voudrais qu'il soit déjà allumé !" Des paroles que Paul aurait pu dire (si tant est qu'il ne les a pas dites)...
Emmanuel Carrère se fait exégète mais aussi historien lorsqu'il trace un portrait saisissant du bassin méditerranéen au Ier siècle : la ville de Rome, foisonnante, dangereuse et fascinante, l'occupation romaine dans ses provinces, les luttes d'influence, les roitelets juifs (étonnant Hérode Agrippa Le Jeune !), la société juive chauffée à blanc, les crises religieuses, les brigandages et autres extorsions organisés à grande échelle par les autorités romaines, la cohabitation des religions sur fond de tolérance romaine jusqu'à ce que le christianisme menace de saper les bases de la société romaine. Il s'arrête aussi sur ces personnages historiques qui, à leur manière, ont influer sur le cours de l'Église : quelques disciples et apôtres de Jésus bien entendu, mais aussi l'historien Flavius-Josèphe, les empereurs Néron, Vespasien, Titus ou Domitien ou encore le philosophe stoïcien Sénèque. À côté de ces personnages antiques, Emmanuel Carrère nous parle de personnages ou de faits contemporains, sans craindre anachronismes ou comparaisons inhabituelles dans de tels essais : révolutionnaires communistes ou Philip K. Dick en premier lieu.
On ressort du Royaume soufflé par ce voyage vers les sources d'une religion vieille de deux mille ans. L'érudition, la passion, la liberté de ton d'Emmanuel Carrère font de ce récit à la fois autobiographique et historique un ouvrage important, accessible à tous quelque soit leur conviction religieuse et qui se lit d'une seule traite, comme un roman. Un roman qui remue et qui ne fait pas l'impasse sur de longues digressions tour à tour enflammées, révoltées, comiques, voire triviales. On pense ainsi à ces dix pages savoureuses sur l'intérêt de l'auteur pour les vidéos pornos sur Internet, ce qui fait dire à la femme de l'auteur, malicieuse et complice : "Quand même, il a bon dos, saint Luc!"
Chaque nouvelle sortie d'un livre de Michel Houellebecq est un événement. Son dernier roman paru, Soumission, n'échappe à la règle. Nous pourrions même ajouter : surtout son dernier roman ! Le plus célèbre écrivain français contemporain signe dans ce livre choc un récit d'anticipation qui a fait réagir bien au-delà de nos frontières.
Michel Houellebecq décrit dans cet ouvrage une France des années 2022 choisissant d'élire à la Présidence de la République Mohammed Ben Abbes, un homme politique de confession musulmane, afin d'échapper au désastre annoncé d'un chef d'État d'extrême-droite. Marine Le Pen battue au deuxième tour, les partis traditionnels laminés, le pays de Molière se convertit à un homme politique malin, séduisant et ambitieux. Après deux septennats de François Hollande, la France se convertit (dans tous les sens du terme) à un politicien alliant l'ambition, l'autorité et le sens de la concorde (le premier ministre n'est ni plus ni moins que... François Bayrou).
Le lecteur comme le narrateur – un certain François, professeur à la Sorbonne aussi désabusé que fin observateur des changements en cours – assistent, interloqués, à la lente mais diablement efficace révolution islamique. Contre toute attente, en quelques années la France retrouve sa stature mondiale alors même que la société se transforme, pour le meilleur et pour le pire : élites islamisées, femmes contraintes au voile et à la vie domestique, rapprochements avec les autres nations musulmanes, etc. François, spécialiste de l'écrivain catholique et décadent Joris-Karl Huysmans, doit se poser la question de son positionnement dans une société devenue théocratique.
On retrouve dans ce roman de Michel Houellebecq ce qui fait la force et le caractère d'un écrivain, catalogué à tort ou à raison comme un écrivain "post-moderne catholique" : humour grinçant, provocation et goût pour l'anticipation. La sortie de Soumission (qui devait s'appeler à l'origine Conversion) était annoncée avec un goût de souffre ; or, l'auteur des Particules élémentaires et d'Extension du Domaine de la Lutte s'avère bien moins acide que pour ses ouvrages précédents, sauf lorsqu'il s'agit de son narrateur (Michel Houellebcq lui-même ?). Il est décrit comme un homme paumé, dépressif et désabusé qui trouvera d'ailleurs son salut dans la religion.
Houellebecq soulève d'ailleurs des questions qui prolongent son œuvre : l'identité (nationale et personnelle), l'avenir de l'Occident et une certaine image de la décadence, à l'image de Huysmans dont l'omniprésence n'est évidemment pas fortuite.
Le blog Fantasy à la Carte propose une biographie brillante et pertinente de cet auteur de fantasy, un genre considéré encore avec un certain dédain, si ce n’est un certain snobisme. George Raymond Richard Martin est parvenu à dépasser John Ronald Reuel Tolkien (l’auteur du Seigneur des Anneaux) dans la notoriété. Le créateur du Trône de Fer peut se targuer d'être devenu en quelques années une figure majeure de la fantasy.
Retour sur la carrière de ce "roi littéraire", grâce au site Fantasy à la Carte :
De son nom complet, George Raymond Richard Martin est un auteur américain renommé pour ses écrits de science-fiction et de fantasy. Né en 1948 dans le New Jersey, il a grandi dans une famille modeste. Au lycée, il découvre les comics et se met à écrire des fanfiction (des récits écrits par des fans dont le but est de continuer ou de modifier l’histoire d’un roman, d’une série…). En 1965, il obtient même un prix pour l’une de ses nouvelles. Son diplôme de journaliste en poche, il retourne dans sa ville natale en 1971 en pensant y décrocher un emploi. Il n’en trouvera point mais cette année-là, il se découvre un certain talent d’écrivain. Cependant, il faudra attendre 1979 pour qu’il se consacre pleinement à son art. Les premières années, il écrit essentiellement des romans et des nouvelles de science-fiction. Il reçoit de nombreux prix comme en 1980, sa nouvelle Les Roses des Sables remporte trois distinctions : le prix Hugo, le prix Locus et le prix Nebula. Une jolie consécration pour un auteur à succès en devenir. Plus tard, G.R.R. Martin s’essaie à l’horreur avec ses romans : Riverdream en 1982 ou Armageddon Rag en 1983. Au milieu des années 1980, commence pour lui un travail de scénariste pour la télévision. Ainsi, il est l’auteur de séries télévisées comme La Cinquième Dimension ou La Belle et la Bête. Parallèlement à cette activité professionnelle, il se lance dans la rédaction d’une anthologie de nouvelles et de romans de science-fiction, Wild Cards, mettant en scène des super-héros.
C’est au début des années 1990, qu’il a l’idée d’écrire un cycle de fantasy, A Song of Ice and Fire, traduit en français par Le Trône de Fer…
La littérature érotique, genre longtemps méprisé, sinon interdit et vendu sous le manteau, est aujourd'hui mis sous les feux de projecteur, à la faveur de quelques best-sellers, dont Cinquante Nuances de Grey.
C'est d'un autre livre que je vais vous entretenir, Vie érotique, écrite par Delphine de Malherbe et illustrée par Isild Le Besco, actrice, scénariste, romancière et peintre.
L'histoire ? Celle d'une rencontre entre une jeune femme, surnommée Vénus, danseuse et et d'un homme, Éros, un voisin. Ils s'observent par la fenêtre plusieurs jours et se séduisent à distance. Au bout d'un moment, ils décident de se rencontrer. Éros – le lecteur va apprendre qu'il se nomme Philippe, qu'il est avocat, qu'il est marié et a des enfants – la convie dans son atelier et lui demande de danser pour elle (chapitre "Lover dose").
Je ne suis pas le premier à affirmer que l'apport des femmes dans la littérature érotique a permis de souffler un vent frais sur ce genre. Plutôt que la crudité, les pulsions et la pornographie, les auteures préfèrent l'audace, les fantasmes et la liberté. La liberté est d'ailleurs le maître-mot de ce court roman : celle des corps, de nos désirs comme de nos choix de vie.
L'apport de Vie érotique réside aussi dans les illustrations d'Isild Le Besco. Des dessins, parfois de simples esquisses, croquant des corps en mouvements, souvent sans visage. Textes et illustrations viennent s'appuyer et se répondre les uns aux autres, indissociables et magiques.
Delphine de Malherbe, dessins de Isild Le Besco, Vie érotique, éd. Robert Laffont, 175 p.
Que feriez-vous si Scarlett Johannsson débarquait un soir chez vous, épuisée, et vous demandait une aide pour disparaître quelques jours, loin des caméras, des journalistes et des sollicitations de toutes sortes ? Voilà le point de départ de ce roman de Grégoire Delacourt, La première Chose qu'on regarde.
Cette drôle d'aventure cueille à froid Arthur Dreyfuss, modeste garagiste célibataire, plutôt beau garçon (un "Ryan Gosling, mais en mieux"), installé dans un village de la Somme. La célèbre actrice de Lost in Translation, Vicky Cristina Barcelona ou Lucy frappe à la porte de sa maison alors qu'il regarde un épisode des Soprano, dans une tenue improbable ("marcel blanc et caleçon Schtroumpf").
Contre toute attente, notre héros prend sous son aile la star hollywoodienne, visiblement en état de burnout, et entreprend avec elle un chemin vers une reconstruction. Car La première Chose qu'on regarde peut se lire comme un roman initiatique. Il y est question de blessures d'enfance des deux personnages principaux (qui vont rapidement finir par se dévoiler, dans tous les sens du terme) et de désillusions de l'existence. La rencontre improbable de deux êtres que, a priori, tout éloigne, va, au fil des pages, les transformer et les rendre acteurs de leur propre destin.
Grégoire Delacourt se fait également le portraitiste naturaliste de notre société, des petites gens ou de la culture populaire. De vrais tranches de vie rythment cette histoire qui se termine par un dénouement surprenant, poignant et d'un réalisme cru comme rarement on a pu l'écrire.
Un grand petit livre.
Grégoire Delacourt, La première Chose qu'on regarde, éd. Livre de poche, 217 p.