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  • Dictionnaire amoureux de Tournesol

    Les tintinophiles se précipiteront sans doute sur cet ouvrage, conçu comme un lexique dédié à l’un des personnages les plus fameux de l’œuvre d’Hergé : le Professeur Tournesol, dit Tryphpon Tournesol, un prénom insolite qui fait l’objet d’une entrée à la lettre T.

    Précisons que si on retrouve quelques illustrations dans le livre de Pierre Bénard, Tryphon de A à Z (éditions 1000 Sabords), aucune ne vient de l’œuvre d’Hergé, conséquence – on s’en doute – de ses ayant-droits, connus pour défendre l’héritage du dessinateur belge jusqu’à bloquer toutes les initiatives des amoureux de Tintin. Mais fermons la parenthèse.

    Depuis Le Secret de Rackham Le Rouge (voir "Requin" à la lettre R), le savant fait partie, avec Haddock et Tintin (sans oublier Milou), de la triade partie dans des aventures les plus incroyables : d’une île au trésor à plusieurs péripétie en Syldavie, en passant par la Suisse, l’Océanie et bien entendu la lune.

    À ce sujet, l’auteur note que la plus incroyable aventure de Tournesol, sa "page glorieuse", le voyage sur l’astre lunaire (Objectif Lune et On a marché sur la lune) n’est qu’évasivement évoqué dans les albums suivants, comme si un voile pudique était jeté sur cette épopée, ou "preuve (…) que l’épopée lunaire n’a pas fait grand bruit dans le monde, alors que le portrait de Tryphon aurait dû s’afficher partout".

    Et si Tournesol était un Oppenheimer qui s'ignorait ?

    Qu’en est-il du personnage, si attachant et finalement à la fois humain et insaisissable ? A priori, il reste l’un des moins mystérieux du panthéon tintinesque. Et pourtant, que de contrastes entre l’inventeur doux dingue des débuts – celui du requin sous-marin et de la machine à brosser les vêtements – et l’ingénieur aéronautique capable d’envoyer l’homme sur la lune ! Et que pourrait-on dire du concepteur de l’arme à ultrasons, sans doute aussi terrible que la bombe A (L’Affaire Tournesol) ? Et si Tournesol était un Oppenheimer qui s'ignorait ?

    En tout cas, Tournesol est bien un génie incompris, ce que Pierre Bénard dit dans son article "Panthéon" : "On peut en citer qui eurent, pour moins que ça, les honneurs du tombeau des Grands Hommes".

    Il faut aussi parler de cet homme plus ambivalent qu’il n’y paraît : maladroit, sourd comme un pot jusqu'à être asocial, Tournesol sait aussi se montrer d’une rare violence, lorsque par exemple Haddock touche sa corde sensible – le fameux "zouave", un mot qui a failli mettre le programme spatial à l’eau (Objectif Lune).

    L’auteur de ce dictionnaire amoureux s’étend paradoxalement moins sur les amis de Tournesol – si l’article sur "Haddock" est riche, celui sur "Tintin" est plus maigre, quant à "Nestor", il n’apparaît carrément pas – que sur les modèles de Tryphon. Les savants évoqués sont légion, à commencer par Auguste Piccard qui a servi de modèle. Pierre Bénard s’avère particulièrement pertinent lorsqu’il traite d’autres figures moins connus, à l’instar d’Isidore Isou, de Robert Godart ou Robert Oppenheimer (nous en parlions plus haut)

    Un mot enfin sur ces autres savants des aventures de Tintin, débarqués au moment de l’arrivée de Tournesol – les Calys, Sakharine et autres Halambique – comme s’il fallait pour Hergé avoir ces figures en guise de prototypes avant d’inventer, justement, le génial inventeur.

    Pierre Bénard, Tryphon de A à Z, éd. 1000 Sabords, 2023, 168 p.
    https://www.editions-1000-sabords.fr

    Voir aussi : "Aux sources d’Hergé"
    "Tintin et compagnie en figurines"

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  • Ella, elle l’a

    La jazzwoman Robin McKelle fait son retour tant attendu avec un album gracieux et séduisant, Impressions of Ella, Ella comme Ella Fitzgerald, bien sûr.

    C’est l’occasion de découvrir ou découvrir des classiques du jazz qu’Ella Fitgerald a interprété à son époque. Pour ces revisites, Robin McKelle est accompagné d’un orchestre restreint, avec Kevin Barron au piano, Peter Washington à la guitare et Kenny Washington à la batterie, sans compter le featuring de Kurt Elling.  

    Cet opus marque le grand retour de la chanteuse américaine, sous forme d’hommage à une figure tutélaire du jazz. "Ma voix a mûri, et moi aussi. J’ai senti qu’à ce moment de ma vie, ces paroles avaient un sens pour moi. Impressions of Ella est comme un retour à la maison pour moi. Comme une réunion familiale après des années de séparation. Une reconnexion avec la musique qui m’a nourrie pendant toutes mes années de formation musicale, et qui furent largement influencées par Ella Fitzgerald", confie Robin McKelle, bien décidée à remettre au goût du jour des standards du jazz.

    Que l’on pense au "Old Devil Moon", composée par Burton Lane sur des paroles de Yip Harburg pour la comédie musicale Finian's Rainbow (1947), et que Robin McKelle interprète sans coup férir, dans l’esprit des musicaux de Broadway.    

    Autre grand classique, toujours de l’entre-deux-guerre, "My One And Only" a été d’abord une chanson de George Gershwin et Ira Gershwin pour la comédie musicale Funny Face, avant de figurer dans le répertoire de la Grande Elsa. Et maintenant Robin McKelle, dans une facture des plus simples et efficaces – voix et piano, avec ce swing extraordinaire. Les frères Gershwin ont d’ailleurs une place de choix dans Impressions of Ella, avec le délicat "Embraceable You" et le mélancolique "Soon" qui vient clôturer l’album. 

    Du jazz, du vrai, du pur

    Le lecteur de cette chronique sera sans doute surpris de voir le nom de Lady Gaga cité en référence pour le titre "Lush Life" de Zara Larsson. Il est vraie que l’interprète de "Bad Romance" l’avait chanté pour son album jazz (et oui!), en duo avec Tony Bennett. C’est là l’occasion de se précipiter sur l’opus Cheek to Cheek (2014), aussi velouté et sensuel que la version de sa compatriote. On pourrait dire la même chose de "I Won’t Dance" de Jerome Kern que Robin McKelle interprète avec Kurt Elling, tout en suavité et en complicité.

    Il y a incontestablement un swing réjouissant chez Robin McKelle, à l’instar de "How High The Moon" de Morgan Lewis et Nancy Hamilton. Robin McKelle s’épanouit avec un bonheur communicatif, à l’instar du "Do Not Nothing Til You Hear from Me" que Duke Ellington avait écrit dans les années 40. Ella Fitgerald avait chanté cette chanson pour l’album de 1957 (Ella Fitzgerald chante le livre de chansons de Duke Ellington). Dans cette version de 2023, Robin McKelle ne se laisse pas impressionner par ces deux figures de la musique du XXe siècle. On y voit la marque d’une artiste à la voix puissante et capable des plus belles arabesques.

    "Robin’s Nest" ne pouvait pas ne pas apparaître dans cet hommage à Ella Fitgerald. Du jazz, du vrai, du pur, là encore. Un titre écrit par la jazzwoman, ainsi qu'Illinois Jacquet et Charles Thomson.

    Vernon Duke est à l'honneur à deux reprises à la fin de l’opus, avec deux classiques, le standard de Broadway "Taking a Chance to Love", écrit avec John LaTouche et Ted Fetter et le suave "April in Paris", cette fois avec Yip Harburg. Robin McKelle s’empare de ces classiques avec gourmandise, tempérament et passion.

    Est-il utile de dire que le bonheur est à tous les étages dans ce somptueux album ? 

    Robin McKelle, Impressions of Ella, Naïve / Believe, 2023
    https://www.facebook.com/RobinMcKelleMusic
    https://www.instagram.com/robinmckelle

    Voir aussi : "Lady Gaga et Tony Bennett, joue contre joue"

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  • Une bonne dose de Buridane

    Nouvelle voix de la chanson française, Buridane fait partie de ces artistes passionnantes, nous entraînant dans un univers à la fois dense, poétique et autobiographique. Pour ce troisième opus, Colette Fantôme, la chanteuse s’est fait accompagnée par Féloche à la réalisation et à la production, sans oublier des collaborations bienvenues, notamment Pauline Croze, apportant sa facétie autant que sa pertinence pour l’extrait "Pourquoi Tu Me Fais Pas", consacré à la question de l’enfantement.

    Dans cet album, Buridane se dépeint avec toute sa fragilité, sa sensibilité, se confessant sur ses doutes et ses échecs, à l’instar du sans concession "Total fiasco".

    Le titre qui donne son nom à l’album est des plus pertinents, en cette année de commémoration de l’auteure du Blé en Herbe ou de Sido (nous en parlions ici, sur Bla Bla Blog). "Colette Fantôme" propose ici un singulier hommage, sous forme d’un dialogue entre Buridane et Colette, tout en y insufflant de l’ardeur, de la modernité et un rythme infernal.

    La créativité musicale de la chanteuse est tout aussi réjouissante dans le bien-nommé "Slave", romanesque, romantique, brut et amoureux ("Slave est notre âme").

    "Tambourine tambourine / Comme un bruit de carabine / Dose d’endomorphine / Un fou que l’on déconfine"

    Sans doute peut-on parler de Buridane comme d’une musicienne jamais aussi à l’aise que lorsqu’elle se nourrit d’influences venues d’ailleurs ("Ni Kalifa Ala Ma"), que ce soit les Pays d’Europe centrale ou de l’est, ou encore des Caraïbes ou de l’Afrique, à l’instar également de "Pluie vaudou". Buridane choisit, pour ce dernier morceau, le contre-pied, avec un talk-over gainsbourien et des sons venus d’ailleurs, pop d’eighties et boostés d’électronique. Sans oublier cette voix envoûtante.  

    L’auditeur sera sans doute happé par "Tambourine", au texte malin, riche, irrésistible et d’une belle pertinence. Il s’agit sans aucun doute d’un des meilleurs titres de l’album. "Tambourine, tambourine /  A ma porte à ma poitrine / Un désir amphétamine / Le sang coule de ma marine / Tambourine tambourine / Comme un bruit de carabine / Dose d’endomorphine / Un fou que l’on déconfine".

    On aime la simplicité – on pourrait aussi parler d'efficacité – de cet album. Il va à l’essentiel, et dans les paroles, et dans la musique ("Pourquoi tu m’fais pas"), ce qui n’empêche pas la chanteuse de se montrer éclatante, vivifiante et lyrique ("Chasser la nuit").  Quant à "Game Over The Rainbow", il mêle avec bonheur joie, mélancolie et espoir

    L’album se termine avec un très beau morceau, voix et guitare. "Tombeau", qui, contrairement à ce que laisserait supposer le titre, n’invite ni à la tristesse ni à la désespérance, mais se veut une déambulation méditative : "L’amour n’est pas un tombeau". La vie avant tout, semble nous dire Buridane tout au long de ce Colette Fantôme.

    Burdiane sera en concert le 1er août à Barjac (30), pour "Barjac M'en Chante".

    Buridane, Colette Fantôme, Silbo Records, 2023
    https://www.buridane-officiel.com
    https://www.facebook.com/buridane
    https://www.instagram.com/buridane_officiel

    Voir aussi : "Revoilà Féloche"
    "Pauline Croze a la solution"
    "L'Yonne célèbre les 150 ans de Colette"

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  • Voyage musical à Giverny avec Julian Loida

    Au jeu des références musicales, Giverny, la création contemporaine de Julian Loidan peut autant renvoyer au courant répétitif américain de Philip Glass ou Steve Reich qu’aux compositions de Yann Kiersen. Mais pas que.

    C’est aussi avec les yeux que s’écoute l’album du jeune compositeur américain. L’auditeur pourra naviguer dans les, toiles de Claude Monet qui est le sujet, lui et son jardin, au cœur de l’opus. Ce sont les touches musicales du morceau "Giverny", comme autant de tâches de couleur d’une toile impressionniste. C’est aussi ces couleurs hivernales de "December Dreams", mêlant le gris, le jaune pâle, les teintes beiges et le blanc.

    L’ambition de Giverny n’est ni plus ni moins que de voyager et se faire voyager au cœur du Jardin du Val d'Oise. Julian Loidan choisit une palette de sons : piano, vibraphone, percussions, machines, violons, voix éthérée pour naviguer entre la fin XIXe et 2023. Monet, le peintre français sans doute le plus adulé à l’étranger, devient un personnage de notre époque, comme ne le dit paradoxalement pas le mélancolique "You Will Be Missed" ou encore le nostalgique et pas moins triste "Surrender". 

    Julian Loidan choisit une palette de sons : piano, vibraphone, percussions, machines, violons, voix éthérée pour naviguer entre la fin XIXe et 2023

    Cela n’empêche pas le musicien américain de s’emparer d’un classique de la musique française de l’époque de Monet, la fameuse "Gymnopédie n°1" d’Erik Satie, que le compositeur rehausse toutefois de teintes synthétiques. Cela donne un résultat séduisant, sans pour autant dénaturer le chef d’œuvre de l’ami de Claude Monet.

    Pour son dernier album, Julian Loida choisit des chemins étonnants et séduisants, un peu à l’image des allées que suit le touriste pour admirer le domaine de Monet. Arrêtons-nous un instant sur "Sphere", mêlant jazz et rock pour un morceau tendant au psychédélisme tellement en vogue dans les années 70. Il y a un incontestable esprit New Age dans ce titre prenant son temps, au même titre sans doute qu’"Ambrosia", infiniment plus court (un peu plus d’une minute) et aussi astral que Giverny est terrien.

    Avec "Beautiful Day" et "Collide", nous sommes carrément dans une pop bien dans notre époque, preuve supplémentaire que Julian Loida ne s’entend pas se limiter à une lecture classique de l’œuvre de Monet et de ses jardins.

    Retour enfin à la musique contemporaine américaine avec "Waves", s’inscrivant dans la vague – si l’on peut se permettre ce jeu de mot – du mouvement répétitif américain, mais cette fois coloré de jazz et de pop, pour un morceau prenant son temps et choisissant de se perdre dans les jardins de Giverny. L’auditeur sera tout aussi marqué par le choix assumé de l’électronique pour "Look Up" , une nouvelle preuve s’il en est que Claude Monet reste éternel.

    Julian Loida, Giverny, Gratitude Sound Music, 2023
    https://gratitudesoundmusic.com/latest-news
    http://www.julianloida.com
    https://www.instagram.com/julianloida

    Voir aussi : "Les couleurs musicales d’Aysedeniz"

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  • Les couleurs musicales d’AyseDeniz

    N’en déplaise aux grincheux, la musique classique et contemporaine connaît depuis quelques années un sérieux renouveau. Un exemple ? AyseDeniz et son dernier album, Patterns.

    La musicienne, originaire de Turquie, s’est fait connaître grâce au bouche-à-oreille et les réseaux sociaux. AyseDeniz cumule des centaines de milliers de fans sur les réseaux sociaux et des dizaines de millions de streams sur les plateformes. Patterns, c’est une foi renouvelée pour le classique et la composition. La pianiste a pour elle l’enthousiasme mais aussi la virtuosité, à l’exemple du singulier "Chaos" qui ouvre son album sorti ce printemps.

    La compositrice propose treize titres, relativement courts (de deux à quatre minutes) qui entendent montrer qu’il y a une vie après Bach ("AfterBach") et que le classique connaît un revival assez inattendu en ce début du XXIe siècle. Non, le romantisme n’est pas plus mort ("Enchanted Heart") semble nous glisser à AyseDeniz à l’oreille, grâce à un piano lumineux et un orchestre qui se déploie avec élégance.

    L’auditeur pourra saluer un album à la fois riche et aux multiples surprises, à l’instar de "Kelton", à la mélodie mystérieux et romanesque. N’importe quel metteur en scène trouvera dans l’opus de l’artiste turque une bande son d’une incroyable richesse, alternant lyrisme ("The Labyrinth Of Freedom"), poésie ("Sunshine City"), mélancolie ("Sarp"), fougue ("Chaos"), retenue ("Threads Of Sound"), pudeur ("Lunapark") et grands élans symphoniques ("AfterBach"). 

    Coloriste musicale

    Véritable concerto pour piano de nos jours (si l’on excepte, à partir de la seonde moitié de l’album des morceaux pour instrument solo), Patterns sait jouer des nuances et prendre l’auditeur par la main, en revenant à l’essence du classique : l’harmonie, la création mélodique et le sens de l’architecture sonore. Écouter "Lunapark", par exemple, c’est entrer dans un monde coloré et lumineux, celui de l’enfance, de l’innocence et de l’insouciance.  

    Disons-le : la musique d’AyseDeniz touche grâce à sa qualité de provoquer des images, y compris à la personne la plus réfractaire au classique ("Sharp"). Dans "Sunshine City", la musicienne se retrouve seule derrière son piano , au service d’une pièce se déroulant avec élégance et en allant à l’essentiel. Et si cet essentiel n’était pas tout simplement la beauté ?    

    Patterns abrite quelques jolies surprises, frappant par leur construction sonore, à l’instar du nu et mélancolique "Peace Finally" ou de l’impressionniste "Velvet Piano". Le choix du piano solo permet à AyseDeniz de montrer toute sa virtuosité ("The Labyrinth Of Freedom"), autant que sa justesse et ses qualités de coloriste musicale toute debussyenne ("In My Head"). On quitte comme de l’album comme on sort d’un rêve, avec une très belle valse, "April Waltz"

    Il faut enfin noter que suite au tremblement de terre catastrophique qui a frappé le pays natal d'AyseDeniz et la Syrie voisine, l'artiste a lancé Help In Harmony, un mouvement musical au profit de l'organisation Turkish Philanthropy Funds. La pianiste souhaite utiliser sa popularité sur les réseaux sociaux afin de réunir des artistes et mobiliser des dons pour de la nourriture de survie, des soins médicaux et psychologiques, des abris et bien plus encore.  

    AyseDeniz, Patterns, Audio Networks, 2023
    https://www.adpianist.com
    https://www.instagram.com/adpianist/?hl=fr
    https://www.facebook.com/ADPianist
    https://www.helpinharmony.com

    Voir aussi : "Majeur !"
    "Nul n’est prophète en son pays"

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  • L’aventure c’est l’aventure

    Voilà a priori une facture somme toute classique pour ce premier EP de Max Darmon. Son opus, La grande aventure, coche toutes les cases d’un bon album de chansons françaises : très bon travail mélodique, des textes personnels, une voix masculine impeccable et l’influence des eighties. "Fuis moi" en est un parfait exemple, tout comme "Pourquoi faut-il ?".

    Ce que l’auditeur va aussi et surtout apprécier c’est la production soignée (Max Darmon s’est entourée de Florian Robin aux claviers, Romain Roussouliere à la guitare, Wendy Killman et Florian Gouello à la batterie et Jérémy Rassat à la réalisation et direction artistique) aussi bien que le caractère robuste de cet EP. Dans le titre qui donne son nom à l’opus, Max Darmon s’affirme avec une belle densité : "Viens on s’casse, toi et moi c’est la grande aventure tu sais / Réfléchis pas, prends ton sac tes clefs puis on y va". 

    Un EP plus robuste qu’il n’y paraît

    Il faut être tout aussi attentif à la manière dont a été écrit La grande aventure. L’opus se veut un (mini) concept album sur le thème du voyage, avec des titres éloquents : "Fuis moi", "Te retrouver", "L’itinérante, "Allez viens" et bien sûr "La grande aventure".

    Max Darmon sait chanter l’amour avec une insouciance à la fois troublante et attachante ("Te retrouver"). Ne nous posons pas de question, dit l’artiste, qui adresse une belle déclaration à sa belle, quitte à faire de "beaux excès".

    Lorsque le talk-over est mené avec soin, cela donne "L’itinérante" : poétique, très eighties, Max Darmon dresse le constat d’un amour difficilement compatible avec une itinérance compliquée : "Mais face à face tout paraissait plus simple / Chérie / J’te regarde partir / L’itinérance c’est ta vie".

    L’EP se termine par "Allez viens", langoureux et sensuel slow qui nous entraîne, encore une fois, du côté des années 80. C’est impeccable, rondement mené et promet pour Max Darmon une belle aventure musicale pour la suite. 

    Max Darmon, La grande aventure, Antipodes Music2023
    https://www.instagram.com/max.darm0n

    Voir aussi : "Louis Arlette, classique et moderne"
    "Suivez Aïtone"

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  • Suivez Aïtone

    Aïtone revient avec un deuxième album, Follow, à la facture des plus séduisante. C’est à l’image du premier titre, "Inner Child", une pop éthérée, d’une belle délicatesse, très british (tout l’album est en anglais), avec la voix juste et haute d’Aïtone.

    Oui, il faut suivre Aïtone, pour reprendre le titre du morceau qui donne son nom à l’album ("Follow"). Son deuxième opus prend des chemins pop, et même britpop, avec ses sonorités claires et ses intonations que l’on dirait vaporeuses. On peut dire que le mystère court sur Follow, un mystère non exempt de souffrances et de mélancolie ("As Fire We Fall").

    On baigne dans cet album comme dans un océan musical aux délicats reflets musicaux ("Happy Thought"), aux teintes pastel ("Sail Away"). Le tout est appuyé par une production et une orchestration sans faille. Du grand classique et un vrai retour aux sources, dans une pop non sans teintes psychédéliques.

    Pour l'enregistrement de ce nouvel opus, Aïtone a fait appel à François Poitou, arrangeur au sonorités originellement plutôt tournées vers le jazz, et qui apporte aux compositions un souffle et une ampleur nouvelles. Nous retrouvons aussi sur le disque Benjamin Colin et Quentin Gouraud à la batterie et aux guitares, et François Poitou à la basse. 

    Un océan musical aux délicats reflets musicaux

    Mais le rock et la fureur ne sont pas absents, à l’instar du morceau très eighties, "We’re The Same" ou "Le temps de l’autre" – en anglais, contrairement à ce que son titre l’indique, sans doute l’un des meilleurs extraits de l’opus.

    L’auditeur sera sans doute plus sensible à la superbe ballade "Nightmare", sans doute l’une des plus jolies créations de l’album. Aïtone est comme ça : il propose une pop à la fois sophistiquée, moderne, avançant à petits pas, et avec une sensibilité qui frappe au cœur. C’est le très joli "Yards Of Limbs", l’autre très grand morceau de l’opus qui mériterait de figurer sur beaucoup de playlists.

    Après un "Cold & Fever" franchement planant et fiévreux – justement –, Follow se clôt de la plus belle des manière avec "Set On Fire", ballade faisant le pari de la mélancolie et de l’une forme classique avec cordes, à l’instar des Tindersticks. Un vrai retour aux sources. 

    Aïtone, Follow, Musigamy / Inouïe Distribution, 2023
    https://www.aitonemusic.com/music
    https://www.facebook.com/aitone
    https://www.instagram.com/aitonemusic

    Voir aussi : "Louis Arlette, classique et moderne"

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  • Le pouvoir de consolation de Sarah Lancman

    Sarah Lancman est de retour avec un nouvel album, Le Pouvoir des Mots, dans lequel la jazzwoman s’épanouit dans des compositions où la chanson française se teinte harmonieusement de jazz. Est-il encore utile de répéter que la musicienne s’aventure sur les pas de Michel Legrand ? Une influence qu’elle revendique au travers de sa reprise de "Que feras-tu de ta vie ?", titre composé à l’origine pour le film The Happy Ending et pour lequel Michel Legrand a été nommé en 1970 pour le Golden Globe de la meilleure chanson originale et pour l'Oscar de la meilleure chanson originale. "Les Feuilles mortes" est l’autre reprise, en bonus track, de l’opus. Saluons au passage l’interprétation mezza-voce et jazzy de Sarah Lancman dans ce classique de Prévert et Kosma. 

    La musicienne se fait aussi compositrice dans ce nouvel album, concocté, on l’imagine, avec un soin particulier. Du bel ouvrage. Dès le début de son opus, la Parisienne rend un superbe hommage à la plus belle ville du monde avec "Nostalgia in Paris" : romantisme, mélancolie, voix veloutée et orchestration impeccable font de ce morceau un magnifique joyau de l’album.

    Sarah Lancman sait aussi quitter les sentiers battus et surprendre avec un boléro ("Boléro Nocturne n°3) pour une succulente et soyeuse déclaration d’amour, sous le signe de la danse à deux, joue contre joue : "Tu as le beau rôle / Toi mon héros".

    L’auditeur sera également frappé par une autre danse, cette fois un tango qui sert de trame à une chanson de séparation. Paradoxal et pertinent choix de faire de la plus sensuelle des danses à deux le rythme d’une séparation. Mais une séparation douce et rassurante, comme un joli beau baume à l’âme. "Mon amour ne me fait pas souffrir / C’est quand il a disparu / Que le cœur a si mal se déchire / On souffre quand on n’aime plus".

    Jazzwoman jusque dans ses tripes

    Jazzwoman jusque dans ses tripes (son "Interlude musical" au piano) , Sarah Lancman propose avec la chanson qui donne son titre à l’album une revisite du poème "Liberté" de Paul Éluard. La musicienne s'inspire du texte emblématique de l’écrivain en chantant un message universaliste, susurré comme un désir ardent : "Mais c’est bien le pouvoir des mots / Qui rendre le monde plus beau / Démolissant les interdits."

    Outre le morceau personnel et autobiographique "Je le sais", dont Bla Blog avait parlé, Sarah Lancman prend l’auditeur par la main pour un voyage intime, chaleureux et réconfortant. C’est cette "Ôde à l’amitié" touchante ("Toi"). C’est aussi "Les hommes que j’aime" que l’on goutte avec plaisir. Sarah Lancman se lance dans un hommage aux hommes sous forme d’une liste de qualités que beaucoup reconnaîtront sans doute : "Les atypiques / Les astucieux / Les lunatiques / Les audacieux / Les romanesques / Les courageux / Les passionnés…" C’est léger et frais comme une coupe de champagne.

    On sera tout autant touché par "Ma prière", une prière païenne en vérité dans laquelle Sarah Lancman parle de chagrin, de résilience et d’un "signe" qui se fait attendre : "Que ma voix me porte / Pour tracer ma voie / Vulnérable ou forte / Je chanterai pour toi".

    Il y a un parfum de résilience, voire de consolation, dans cet album, à la fois léger dans sa forme et profond dans son message. C’est un peu à l’image de "Danse avec ta peine", un titre qui entend nous ragaillardir, et nous appeler à aller de l’avant, en un mot à aimer : "Est venu le temps de dire au revoir / Aux larmes et aux regrets / Pour enfin retrouver l’espoir / D’aimer encore et encore". 

    Sarah Lancman, Le Pouvoir des Mots, Inouïe Distribution, 2023
    https://www.sarahlancman.com
    https://www.facebook.com/sarahlancmanjazz
    https://www.instagram.com/sarahlancman

    Voir aussi : "Sarah Lancman, on le sait"
    "Sarah Lancman amoureuse"
    "Sarah Lancman : 'Oser oser !'"
    "Les bonnes fées de Sarah Lancman"

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