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Léa Grosson cache bien son jeu. Maman d’un garçon, en couple et heureuse avec son compagnon, provinciale et vivant à la campagne entourée d’animaux, celle qui s’est fait connaître sous le nom de Celle qui aimait grâce à son blog et ses réseaux sociaux, nous propose cette année son premier roman Depuis cette nuit (éd. La Musardine). Une vraie réussite en la matière et une entrée fracassante dans la littérature érotique.
Léna, graphiste free-lance, est une accro au jeu, au poker plus précisément. Cette célibataire bien dans son époque se rend compte qu’elle est prise au piège de cette addiction. Lors d’une soirée qui s’est mal passée – elle s’en est prise à un distributeur automatique – elle est embarquée par les flics. Faute d’avocat, elle choisit d’appeler la seule personne dont elle a le numéro. Il s’appelle Étienne, elle l'a rencontré après une sortie au casino et il tombe à point nommé : avocat, attentionné, il est irrésistible. Mieux, il est un ancien drogué aux jeux. Il lui propose de l’aider à se sortir de cette spirale infernale. La recette ? L'amour ! Car quoi de mieux pour soigner une addiction qu’une autre addiction. En l’occurrence, le sexe.
Roman particulièrement moderne et contribuant à secouer le petit monde de l’érotisme littéraire
Léa Grosson explique dans sa longue section de remerciements – en réalité une postface – que Depuis cette nuit a commencé par une nouvelle qu’elle a publiée sur son blog. Cette nouvelle est précisément le Chapitre 45 (sic) qui ouvre le roman. Et quel chapitre ! L’auteure nous offre une scène sacrément audacieuse autour d’un jeu à plusieurs. Inutile de vous en dire plus pour vous laisser la surprise. Caliente !
Après ce début, la nouvelle est devenue un projet de roman. Pour le commencer, l'auteure a fait le choix d'interagir avec ses abonné⸱e⸱s : profession d’Étienne (avocat ou professeur ?), lieu de leur premier rendez-vous (Appartement de Léna ? Résidence d'Etienne ? Une maison isolée ?) et choix du cadeau offert par le fringuant lover. La suite, c’est une série de jeux à deux – puis à plusieurs.
Léa Grosson s’est visiblement beaucoup amusée dans ce roman astucieusement présenté comme "à mi-chemin entre romance et littérature érotique". La love story est bien là, répétée à l’envi par Léna, la narratrice, mais le sexe a la part la plus généreuse. En cette période Meetoo, Léa Grosson se plaît à interroger les interdits, la soumission, la masculinité et le féminisme. Cela rend ce roman particulièrement moderne et contribue à secouer le petit monde de l’érotisme littéraire. Libre, Léa Grosson – et son alter-ego Léna – le sont, assurément.
Pas de prise de tête, vraiment, mais d’autres prises...
Parlons d’un de ces événements singuliers, a priori léger, mais qui, au fil des années, a su marquer son empreinte en faisant allier livres, arts, érotisme et engagements. Le Salon de la littérature érotique est de retour pour sa 8e édition le 17 novembre 2024 à La Bellevilloise (Paris, 20e). Bla Bla Blog, qui a accompagné cet événement dès sa naissance, ne pouvait pas ne pas en parler. Cette année encore, des auteur·e·s, des dédicaces, des conférences, des débats, des animations insolites, des jeux et des défis.
Flore Cherry et son organisateur Polissonneriestient toujours avec passion et pugnacité un salon qui entend faire de la littérature érotique un domaine ouvert à tous et à toutes en parlant de l’intimité, de l'amour, mais aussi de l’identité et de faits sociaux, à commencer par le féminisme et les nouveaux paysages de la sexualité.
De nombreuses auteures explorent les bouleversements intimes provoqués par l’omniprésence des algorithmes, l'essor des sex-toys, l'explosion de la pornographie ou encore les avancées en neurosciences. Ces transformations invisibles, mais profondes, transforment nos relations et nos désirs. Les essais présentés au salon nous invitent à prendre conscience de ces évolutions pour mieux les comprendre et les apprivoiser.
Ces autrices qui ont contribué depuis quelques années à secouer le visage souvent plan-plan de la littérature érotique
Parmi les invitées, il fait citer Aurélie Jean, scientifique et numéricienne, autrice de Le code a changé : amour et sexualité au temps des algorithmes (éd. de L'Observatoire), Aurore Malet-Karas, docteure en neurosciences présentera Cerveau, Sexe et Amour (Ed. HumenScience), Amandine Jonniaux, journaliste au Journal du Geek et son enquête vibrante sur l’univers des sex-toys : Oh my Gode ! (Ed. La Musardine), Thérèse Hargot, sexothérapeute, qui présentera Tout le monde en regarde ou presque (Ed. Albin Michel). Elle animera une conférence sur la distinction entre érotisme et pornographie. Une question ancienne mais plus que jamais d’actualité. Ajoutons également Janine Mossuz-Lavau, politologue française, autrice de La vie sexuelle en France : comment s'aime-t-on aujourd'hui ? (Ed. La Martinière). Elle viendra apporter sa vision socio-politique sur un domaine qui nous concerne tous et toutes.
Enfin et surtout, parlons de ces auteurs et surtout de ces autrices qui ont contribué depuis quelques années à secouer le visage souvent plan-plan de la littérature érotique. L’audace, la liberté mais aussi l’authenticité de ces artistes contribuent à briser les tabous et à s’émanciper des récits conventionnels, à l’instar de Camille Emmanuelle qui dénonce les romances édulcorées dans son roman Cucul (éd. Verso). Citons aussi Axelle de Sade (Kink, éd. Anne Carrière), Clarissa Rivière (Villages des Soumises, éd. Tabou), Alice Rameliet (Martin en voyage, éd. L'amour des Maux), Ann Bonny (Une heure libertine dans un monde libertaire, éd. le Murmure) ou Léa Grosson (Depuis cette Nuit, éd. La Musardine), dont nous parlerons bientôt sur Bla Bla Blog.
Rendez-vous donc à La Bellevilloise le 17 novembre prochain, de 15H à 21H, pour un événement à la fois sexy, intelligent et actuel.
Voilà une singulière et inédite rencontre que propose Bla Bla Blog. Il s’agit de celle avec Erika Lust, réalisatrice, productrice (ERIKALUST), photographe et auteure. Sa spécialité ? Le porno, mais un porno où le féminisme serait au cœur. Cette artiste et intellectuelle, aussi engagée que provocatrice, a bien voulu répondre à nos questions.
Bla Bla Blog – Bonjour, Erika. Vous portez plusieurs casquettes – réalisatrice, photographe, productrice, écrivaine, essayiste, féministe engagée, spécialiste du porno. Vous-même, comment vous définiriez-vous ?
Erika Lust – Bonjour Bla Bla Blog. Oui, je pense que j'ai plusieurs casquettes, mais avant tout, je dirais que je suis une réalisatrice de films, car c'est ainsi que j'ai commencé ma carrière. Tout a commencé avec un film que j'ai réalisé en tant qu'étudiante en master d'études de genre il y a plus de 20 ans, The Good Girl. J'ai essayé de partir du cliché du film porno avec le livreur de pizza, mais en axant toute l'intrigue sur le point de vue féminin et le désir féminin. Je dirais que j'étais déjà une féministe convaincue à l'époque, mais ce film et son succès m'ont servi de tremplin pour produire et écrire d'autres films, et même pour m'essayer à la photographie.
BBB – Vous avez beaucoup écrit et filmé autour de la pornographie, et en particulier de la pornographie féminine. Ce concept peut surprendre. Comment le définiriez-vous ? Et surtout, qu’est-ce qui différencie le porno masculin du porno féminin ?
EL – Je pense que le point important dans mon école de pensée est de se demander comment un porno éthique et féministe est possible, plutôt que de faire strictement la différence entre le porno "masculin" et le porno "féminin". Une chose qui m'a aidée dans mon travail, c'est de croire vraiment que le porno peut être féministe. Chez ERIKALUST, nous avons prouvé qu'il pouvait l'être depuis 20 ans maintenant. Nous sommes habitué.es à ce que le porno gratuit en ligne soit rempli de jeux de pouvoir fatigants qui ne mettent en avant que des organes génitaux - féminins - et des parties du corps, mais pas le plaisir des femmes. Le porno réalisé avec des valeurs féministes vise essentiellement à montrer une représentation authentique de la sexualité humaine. Le "porno féministe" vise à montrer des adultes consentants qui parlent avec respect de leurs désirs et de leur sexualité dans le cadre d'une relation sexuelle égalitaire, où le consentement mutuel et affirmatif est clairement montré comme une priorité au lieu de normaliser les simulations de coercition ou d'abus.
BBB – Le féminisme semble, chez vous, indissociable de la représentation du plaisir féminin. C’est un concept relativement nouveau, il me semble. Est-ce à dire que le porno en est encore à ses balbutiements ?
EL – Je ne pense pas que le porno en soit à ses débuts. En revanche, je pense que lier porno et féminisme est un phénomène plus récent, que l’on doit au féminisme pro-sexe, dont je me revendique. Longtemps, on avait cette idée que féminisme signifie anti porno, et anti travail du sexe au sens large. Ce n’est pas ma conviction. Pour moi, se contenter de rejeter un contenu qui existe déjà (le porno masculin mainstream) sans y apporter un regard féminin, c’est nier le désir sexuel des femmes. Elles aussi aiment parfois regarder du sexe, et aimeraient aussi voir leurs propres désirs représentés à l’écran. C’est ce que j’aimerais pouvoir leur offrir, à elles et aux hommes qui ont tout à gagner à se représenter la sexualité autrement.
BBB – Vous avez écrit ceci : "Pour de nombreuses personnes, qu'elles en soient conscientes ou non, le porno est leur principale source d'éducation sexuelle". Ce constat éloquent ne vous rend-il pas triste ?
EL – C'est un constat triste mais réel. En l'absence d'une éducation sexuelle adéquate et actualisée, le porno est devenu la principale source d'éducation de nos enfants, que cela nous plaise ou non. Nous ne pouvons pas empêcher les enfants de trouver ces sites, alors au lieu d’ignorer ce fait, éduquons-les. Si nous parlons franchement du porno avec eux, cela devient immédiatement moins honteux et ouvre le dialogue, ce qui permet un apprentissage sain et actif.
"Le porno a sa place dans le cinéma d'aujourd'hui"
BBB – Mal-aimé et déconsidéré en raison de ses représentations crues du sexe, qu’est-ce que le porno peut-il toutefois apporter dans le domaine de la culture comme dans la société ?
EL – Je pense que le porno a sa place dans le cinéma d'aujourd'hui. En fait, la plupart des gens ont normalisé la présence de scènes de sexe, même les plus crues, dans le cinéma grand public. À condition que les films aient une qualité cinématographique et un regard à la fois bienveillant et inclusif, je pense que le contenu pornographique peut faire travailler l'imagination, susciter des fantasmes et alimenter le désir chez les adultes consentants qui le regardent. Dans le cas du porno féministe et inclusif, il peut apporter une meilleure représentation des sexualités dans leur spectre large, et aider à la fois les femmes à se réapproprier leurs propres désirs, et les hommes à mieux comprendre et réaliser quels sont ces désirs spécifiques, parfois distincts des leurs.
BBB – Depuis le début du mouvement MeeToo, voyez-vous des changements importants dans le milieu porno et dans la représentation du sexe au cinéma ?
EL – Bien sûr ! Ce mouvement s'est produit en même temps dans l'industrie du cinéma grand public et du cinéma pour adultes. Le mouvement MeToo a eu un impact énorme sur notre industrie, et ceux qui ont violé le consentement, tout comme à Hollywood, ont été écartés et ont dû remettre en question leur place au sein de l'industrie. Je pense que MeToo a eu un effet positif considérable en inspirant les gens, en particulier les femmes du monde entier, à remettre en question les dynamiques du pouvoir patriarcal et à élever la voix pour dénoncer les abus sur leur lieu de travail, que ce soit sur les plateaux de tournage d'Hollywood ou dans n'importe quel autre bureau de n'importe quel autre secteur d'activité. Il y a eu une poussée puissante pour se soutenir mutuellement et cesser de normaliser l'abus de pouvoir, principalement par les hommes sur les femmes, qui concerne malheureusement tant de personnes dans les différentes couches de la société dans laquelle nous vivons, et pour créer une prise de conscience et une responsabilisation à cet égard.
BBB – Parlons séduction et vie amoureuse. Depuis MeeToo, est-ce que la drague est devenue, selon vous, has been ?
EL – Je ne le pense pas, et heureusement ! Je dirais que les codes de la drague ont évolué vers un mieux : vers plus de consentement et de respect mutuel. C'est ce que j'essaie de montrer dans mes films. Malheureusement, force est de constater que dans de nombreux secteurs, et sur de nombreux tournages, il y a encore beaucoup de machisme dans la manière dont la séduction est représentée. Et pourtant, demander la permission, respecter, offrir sans insister : c'est tellement plus sexy que de forcer ! Sur ma plateforme XConfessions, où je crée du porno à partir des fantasmes et des demandes de mes consommateur⸱ices, beaucoup d'entre elles et eux m'ont indiqué qu'ils trouvaient très excitant que les acteurs aient des échanges consensuels, qu'ils demandent le consentement de leur partenaire ou qu'ils décrivent ce qu'ils veulent faire à l'autre avant de le faire, pour laisser la place au « non ». D'ailleurs, chez ERIKALUST, nous mettons toujours à disposition des coordinateurs d'intimité, qui sont chargés de veiller à ce que le consentement et le respect mutuel soient respectés tout au long des scènes tournées par les performeurs, avant, pendant et après chaque tournage.
BBB – Pour conclure, la pornographie peut-elle être engagée, pour ne pas dire intello ?
EL – Oui, bien sûr, c'est politique. La pornographie est politique, même si elle ne veut pas l'être, même si elle n'a peut-être pas l'intention de l'être. Mais elle l'est, parce que la pornographie contient des messages sur la façon dont nous nous comportons. Et parce que la pornographie est politique, nous pouvons l'utiliser comme un outil pour raconter d'autres récits. Nous pouvons l'utiliser pour que les femmes puissent s'émanciper en voyant d'autres femmes prendre du plaisir. Sans une représentation inclusive du sexe, les femmes risquent de découvrir leur sexualité sous une approche violente et dominatrice, tandis que les hommes font l'expérience d'une sexualité marquée par la pression de la performance. Ce n'est qu'en redonnant au porno son caractère éminemment politique et son potentiel transformateur pour la société que nous pourrons lui rendre ses lettres de noblesse, en montrant à l'écran des sexualités libres, multiples, belles, féminines, respectueuses, des corps réalistes et des individus de tous âges, dans le respect permanent de chacun. Je suis convaincue que tout le monde gagne à regarder du porno éthique !
Attention, voici un ouvrage à ne pas mettre entre toutes les mains. Plurielles, paru aux éditions Tabou, est un roman qui nous transporte vers un milieu peu courant, celui du BDSM. Son autrice, Éva Delambre fait partie de ces noms fameux de la littérature érotique, jamais aussi à l’aise que lorsqu’elle interroge des thèmes de la soumission et de la BDSM. Plurielles nous propose une plongée plus vraie que nature dans un milieu vivant dans la discrétion. Éva Delambre en profite pour le désacraliser et de le faire découvrir, parfois dans toute sa crudité.
Lorsque le roman commence, Perle vient d’être acceptée comme soumise auprès d’Aymeric, un maître qui a déjà autour de lui deux jeunes femmes, Opale et Ambre. Une troisième femme, Nola, faisant office de domestique - quoiqu'aux services très élargis - vit également dans sa vaste et belle demeure. À cela s’ajoute Bella, qu’il a à son service pour quelques jours. Elle lui a été prêtée par un de ses amis et a la particularité de vivre attachée avec une muselière. Elle est traitée comme une chienne au sens premier du terme. Perle profite de ses quelques jours de congés pour s’habituer à cet environnement où la soumission va vite devenir une affaire de concurrences ("Laquelle de nous deux est-elle censée remplacer ?"), de jalousies et de questionnements sur la préférence de l’une ou de l’autre. Perle a-t-elle trouvé sa "place", comme elle s’en félicite au début du récit ?
Une affaire de concurrences, de jalousies
Il faut passer les premières pages pour s’habituer à cette histoire hors-norme qui entend faire tomber chez le lecteur toute notion de rejet, de critique et d’anormalité. C’est le temps aussi de s’habituer à la triade Perle-Opale-Ambre, sans oublier Nola, devenant par moment une maîtresse de cérémonie, bien plus investie auprès de son maître qu’elle ne veut bien se l’avouer ("Il exigeait aussi des prestations et une ouverture d’esprit qui rendaient compliqué un contrat de travail classique". Le personnage de Bella, muette de bout en bout, n’est pas le moins fascinant dans toute cette galerie de portraits, avec un Maître charismatique désirant avoir "le contrôle" sur tout et toutes.
Le roman va sans doute secouer le lecteur, autant pour ses scènes orgiaques, ses descriptions précises d’étreintes où ne manquent pas les martinets, que pour ces détails qui donnent encore plus de sel au livre : cages où peuvent être enfermées les soumises, femmes servant de tables vivantes ou séances publiques d’humiliation. Au milieu du roman, la soirée chez Maître Kann fait figure de moment assez inoubliable et qui entraînera un dénouement qui pourra étonné par sa dimension morale et sentimentale.
Éva Delambre sera l’invitée des Écrits Polissons le mardi 27 février 2024 de 19h30 à 21h30, au 153, 153, rue Saint-Martin 75003 Paris, Métro - Les Halles ou Rambuteau.
On a retrouvé la consœur de Rahan, le "fils des âges farouches"… Connie est aussi rousse que le fils de Craô était blond. Les aventures de la jeune guerrière mêlent allègrement voyages, bagarres et parties de jambes en l’air, tant la jeune femme ne crache pas sur la "baguette" (sans "r").
Un mot sur le tome 1 tout d’abord, qui voit Connie partir à la recherche de contrées anciennes et reculées. Dans Connie, la Barbare (paru aux éditions Tabou), Gianluca Maconi transporte l’intrépide rouquine au beau milieu d’une attaque de barbares contre un groupe de jeunes femmes, membres d’une confrérie de jeunes femmes pacifiques - entre autres qualités. L’issue est non seulement des plus favorables pour le groupe de jeunes femmes – Connie comprise – mais il permet en plus un rapprochement qu’on laisse deviner.
Ce n’est que le début de la saga des plus rocambolesques, où l’humour n’est pas plus absente que l’érotisme. Les hommes en prennent également pour leur grade.
Une saga des plus rocambolesques, où l’humour n’est pas plus absente que l’érotisme
Cet automne, sortait le deuxième tome et la suite de Connie, la Barbare, avec toujours le dessinateur Gianluca Maconi aux commandes. Pour Les Bijoux du Transistan, la jeune barbare passe des temps préhistoriques à un pays des mille et une nuits, le Transistan. Là, le calife attend l’épouse qui lui est promis. Une jeune femme sculpturale, mais aussi aux sombres desseins. Or, le calife n’est pas franchement intéressé par le projet d’union qui lui est promis. Il risque de même de perdre beaucoup plus. Or, c’est ce moment que choisit Connie pour arriver en ville.
Gianluca Maconi multiplie les scènes croquantes et pimentées, au service d’une histoire de quêtes, passant par des boudoirs, des chambres d’auberges plus ou moins bien fanées et de lieux plus "nature". Connie donne de son corps pour déjouer les situations les plus périlleuses, et elle le fait avec un zèle des plus louables. Tout cela, évidemment, n’est ni sérieux ni réservé à tous les publics. Chez Tabou.
Au moment d’entamer l’année 2024, faisons le bilan, comme de coutume, avec les chroniques de Bla Bla Blog ayant le plus buzzé. Et cette année, vous vous rendrez compte que c’est les livres et la littérature qui ont été les plus plébiscités. Avec également une exposition bretonne sur Tolkien, une BD des plus mutines et surtout le retour d’une chanteuse qui tient la dragée haute à tout le monde !
Voici donc le classement de cette année, par ordre décroissant.
L’écrivain Youcef Zirem est une figure importante de la littérature contemporaine algérienne. Il est aussi un opposant au pouvoir en place qui l’a contraint à l’exil, en l’occurrence en France. Journaliste, chroniqueur, écrivain, il anime aussi depuis 2017 le café littéraire l'Impondérable, à Paris.
Intellectuel, dissident (Algérie, La Guerre des Ombres, éd. Complexe), engagé et humaniste, Youcef Zirem revient en ce début d’année avec un ouvrage des plus personnels, Lâaldja, notre Mère, aux éditons Fauves. Il y parle de sa mère décédée à l’Hôpital de Sidi-Aich, en septembre 2022. Son exil politique l’a souvent éloigné d’elle, au point qu’il n’a pas pu l’accompagner pour ses derniers jours…
Delphine Bell sort en ce moment Roi et toi (éd. Le Lys Bleu). Un récit plus qu’un roman sur un homme, un père, trop tôt parti.
Voilà ce qu'écrit l'auteure : "Un matin, mon père a décidé de partir, nous laissant… Sans un mot, une trace. Où es-tu, papa ? Qui es-tu vraiment ? Toi, le père magnifique de mon enfance, dévoué, libre aussi. Ce livre est une quête, un roman policier et existentiel sur un père que je cherche encore. Il entrelace les écrits de celui qui fut un passionné de l’écriture et de la littérature. Et il pose une question : les êtres que l’on aime nous échappent-ils ? Possède-t-on vraiment ceux qu’on aime ? Qui est-on vraiment ? Papa est parti mais… Je peux écrire"…
Roman ? Récit ? Chronique familiale ? Qui que vous soyez, ouvrez ! De Tatiana Pécastaing (paru chez LC Editions) est un peu tout cela à la fois, au point de désarçonner le lecteur dès les premières pages, lorsque la découverte d’une mystérieuse lettre (avec l’énigmatique phrase "Qui que vous soyez, ouvrez !" inscrite sur l’enveloppe) nous fait passer du Kiev soviétique de 1968 à la Russie tsariste de 1912. Cette fameuse lettre aura son explication bien plus tard dans le roman.
Tatiana Pécastaing suit deux familles, celles précisément de deux de ses grands-parents. Il y a, d’un côté, Gustave, né en Ukraine. Son père était un opposant au régime tsariste, au point de s’approcher d’une organisation terroriste révolutionnaire menée par Alexandre Oulianov, frère de Lénine, arrêté et exécuté après une tentative d’assassinat contre le tsar Alexandre II. Le père de Gustave, Mikaël, est arrêté puis relâché, obligé de se faire discret. Or, c’est le régime tsariste que soutient son fils Gustave, à telle enseigne que lorsque la Révolution de 1917 éclate, le jeune homme s’engage auprès de l’Armée Blanche antibolchévique. En 1924, Gustave s’exile en France, abandonnant en Ukraine sa famille, et en particulier ses sœurs…
Rendez-vous en Bretagne pour vivre pleinement l’univers de Tolkien. Logique, me direz-vous, tant l’auteur du Hobbit et du Seigneur des Anneaux aura su s’inspirer des mythes celtes – mais pas que ! – pour bâtir une œuvre capitale dans la littérature.
Le magnifique musée de Landerneau consacré au Fonds Hélène & Édouard Leclerc pour la Culture propose, du 25 juin 2023 au 28 janvier 2024, une exposition consacrée à Tolkien et à l’illustrateur emblématique de son œuvre, John Howe. "Cette exposition montre comment à partir de l’œuvre littéraire de Tolkien, un univers pictural est inventé… Puisant dans les mythes médiévaux, [John Howe] crée un imaginaire inédit source de multiples représentations artistiques, jusqu’au cinéma", commente Michel-Édouard Leclerc…
C’est une invitation piquante, fantastique, féerique et sensuelle à laquelle je vous invite. Il s’agit de la découverte du dernier volume du Peuple des Brumes, proposé par Katia Even et mis en image par Styloïde. Bla Bla Blog avait déjà parlé de ce cycle il y a quelques mois.
Dans ce nouvel opus baptisé "Le Bal des saisons", toujours aux éditions Tabou, nous sommes dans un univers de fantasy où la nature a le plus beau des rôle. On y croise des fées, des lutins, des êtres surnaturels, des esprits de la nature – évidemment –, sans oublier des sortilèges, des sorts funestes et un monde de fantasy courant de graves dangers. Mais tout cela est mâtinée de sensualité, d'érotisme et de d'esprit mutin…
Le monde de l’édition vient de voir naître un nouvel acteur, L’éditeur à part. Christophe Pavlevski, François-Xavier Bellest et Claire Passy sont les heureux parents de ce "bébé". Nous avons voulu interroger Claire Passy au sujet de cet éditeur à part.
Bla Bla Blog – La naissance d’un éditeur est toujours un événement dans la vie culturelle. Comment présenteriez-vous L’éditeur à part ? Et d’abord, quelle est sa philosophie ?
Claire Passy – Oui, il est vrai que la création d’une maison d’édition est un évènement particulier dans la vie culturelle. Surtout dans la période actuelle où le monde de l’édition reste très encadré, homogène et prévisible…
Radical. Nicolas Le Bault arpente avec obstination les champs de l’art et de la pensée underground. Après ces créations graphiques incroyables (les publications de White Rabbit Dream,), il s’attaque aux travers de nos sociétés contemporaines avec un essai choc, Le Transhumanisme, stade terminal du Capitalisme (éd. La Reine Rouge).
La première qualité de son livre est de remettre sur la table l’étonnant et prophétique livre de Georges Bernanos, La France contre les Robots. L’auteur de Sous le Soleil de Satan annonçait soixante-dix ans à l’avance l’irruption d’une société robotisée où le statut même de travailleur allait être remis en cause…
2023 marque les 150 ans de Colette, l’une des plus grandes femmes de la littérature français. L’Yonne, son département d’origine, est bien décidé à fêter celle qui est née le 28 janvier 1873, à Saint-Sauveur-en-Puisaye dans l'Yonne.
Tour à tour auteure, mime, comédienne, journaliste, elle laisse à la littérature française sa manière exceptionnelle d'évoquer son émerveillement de la nature et ses émotions de jeunesse. Colette fait partie de ces personnalités ayant inévitablement marqué et inspiré l'Yonne. Pour célébrer son nom et son travail, de nombreux événements auront lieu tout au long de l'année dans le Département…
Voilà un ouvrage qui ravira les amoureux et amoureuses d'Hergé, et en particulier de Tintin. L'encyclopédie des Figurines de Collection, Hergé & Co, parue chez Cote-a-cas, dont il s'agit de la troisième édition, constitue un recensement amoureux des plus rares produits dérivés de l'univers d'Hergé.
Précisions d'emblée que Tintin et ses compagnons constituent l'essentiel des personnages figurés, même si on note la présence de ces autres héros que sont Jo, Zette, Jocko, Quick, Flupke ou l'Agent 15. Cette encyclopédie recense, pas moins de 680 objets…
Avec son nouvel album Et la vie coulait, Nicole Rieu est de retour en 2023 après un grand et riche parcours dans les années 70 et 80 (une participation à l’Eurovision en 1974 avec "Et Bonjour à Toi l’Artiste", une série de tubes tels que "Je suis» , "Ma Maison au bord de l’Eau", "Je m’envole" , "En courant" ou "La goutte d'eau", Grand Prix de l’Hexagone d’Or au Midem 1980), sans compter une participation à la Tournée Âge Tendre et Tête de Bois en 2012.
Observatrice, sage, engagée, mémoire vivante de la chanson, artiste moderne, philosophe : les qualificatifs ne manquent pour qualifier celle qui se pose en observatrice attentive et en contemplatrice de la vie et du temps qui passe. "Et la vie coulait / de jour en jour / De dune en dune", chante-t-elle par exemple dans "Et la vie coulait", repris en chœur sur la toute dernière piste. Nicole Rieu pose un regard introspectif et plein de sagesse sur son existence et sur le temps qui lui reste ("Et me voilà aujourd’hui près de la rive")...
Anaïs Nin : voilà un des noms les plus sulfureux et en même temps les plus passionnants de la littérature du XXe siècle. Elle est célèbre notamment pour un journal à la fois marquant, sincère et sans tabou, au point qu’il a été expurgé des années avant de paraître intégralement tardivement dans une version non expurgée. Ce n’est cependant pas de ce fameux Journal dont je vais vous parler mais de deux œuvres plus étonnantes : une bande dessinée sortie récemment et un recueil de nouvelles de l'écrivaine – certes pas le plus connu.
La BD est de Léonie Bischoff. Son Anaïs Nin, Sur la mer des mensonges, paru chez Casterman, est consacré aux années parisiennes d’Anaïs Nin, quelques années après son mariage avec le doux Hugh Parker Guiler, honorable banquier et artiste à ses heures. La jeune femme, Américaine née cubaine, n’est pas encore l’écrivaine que l’on connaît. À dire vrai, elle se cherche, trouvant son refuge dans un journal (ou plutôt ses journaux), son double, dans lequel elle confie ses interrogations, ses émois, ses souffrances, ses doutes et ses rêves.
C’est une Anaïs Nin de son époque, celle des années 30, allant de ses cours de danse avec le beau Monsieur Mirales aux soirées mondaines. Lorsqu’elle rencontre l’écrivain Henry Miller, de passage en France, l’attraction est immédiate entre les deux artistes. Mais il s’agit d’abord d’une attraction littéraire. D’abord.
Léonie Bischoff s'avère virevoltante et poétique dans ce récit qui aurait pu facilement tomber dans le scabreux. Rien de tel ici, tant l’auteure et dessinatrice suit avec tendresse et admiration une artiste exemplaire à plus d’un titre – même si son amoralité en ferait friser plus d’un et plus d’une. La ligne claire et les couleurs pastel font de cette BD un excellent contrepoint au recueil de nouvelles que les éditions Musardine ont publié en 1999 dans une nouvelle traduction.
Faire du sexe et de l’érotisme une matière vivante
Alice – car c’est de ce livre dont il est question – souffre d’une paternité – ou plutôt maternité – que Jean-Jacques Pauvert évoque en présentation, avec un mélange d’admiration et de perplexité – et presque de dédain. Les nouvelles de White Stains (c’est le titre américain) ne sont pourtant pas à proprement parler des histoires prudes. C'est le moins que l'on puisse dire.
Anaïs Nin y prend souvent à plusieurs reprises l’identité d’un homme, à l’instar du "Alice" qui ouvre le recueil, le récit d’une promenade amoureuse à la campagne qui prend un tour inattendu lorsque le narrateur et sa maîtresse – Alice, donc – croisent un autre couple.
Dans l’histoire suivante, "Esmeralda", l’érotisme sans fard – ni sans violence – se pare de provocation littéraire, puisque l’écrivaine hispano-franco-américaine conte la première étreinte imaginaire entre Phoebus et Esmeralda, les deux protagonistes du chef-d’œuvre de Victor Hugo.
Le lecteur lira avec amusement les "Souvenirs" d’un garçon dans une société prude et en particulier dans un pensionnat sévère où l’on se cache pour mieux faire la nique à la morale… L'humour n'est pas absent dans cette nouvelle qui entend pourfendre la morale et la bienséance dans une société rigide. Très rigide.
Anaïs Nin propose avec "Florence" une de ces histoires à la fois épicées et émotionnellement très chargées. Là, sans doute, se cache le cœur des écrits de l’auteure américaine. Cette manière de faire du sexe et de l’érotisme une matière vivante et humaine.
On parlera encore de féminisme dans l’éloquent "Des jeunes filles et de leur con", véritable adresse amoureuse à ses sœurs autant qu’invitation à l’amour, ce que racontent deux narrateurs du recueil. Le premier est séducteur et séduisant ("Je veux une femme") alors que le second devient chasseur et joueur ("Le membre d’or").
L’écriture d’Anaïs Nin vient de loin et touche au cœur, au point d’avoir révolutionné la manière d’écrire sur le sexe. On ne peut se priver de citer un extrait : "Ma main était entre ses ravissantes cuisses, et la façon dont elle réagissait à ses attentions me prouva que je n'avais pas oublié comment jouer de cet instrument qui, habilement stimulé, prolonge dans le corps d'une femme les échos d'une harmonie divine".
Bien entendu, les auteurs et, surtout, autrices, seront les vedettes de ce salon, avec notamment Brigitte Lahaie, Camille Aumont-Carnel, Marilyn Jess, Octavie Delvaux, Les Sapphos, Léa Celle Qui Aimait, Alexandra de Taddeo (L’Amour), Lucile Bellan (Polyamoureuse), Dr. Kpote (Pubère la vie) ou Eva Delambre. Avec la sortie récente du beau livre Hold-Up 21 (éd. Anne Carrière) auxquelles 20 autrices ont participé, et Immorales (éd. La Musardine), qui a fédéré 10 autrices, la littérature érotique met à l’honneur la sororité et le narratif féminin autour de l’amour et du sexe en cette rentrée littéraire 2023.
Mais, cette année, que nous réserve plus précisément ce salon ?
Le salon littéraire le plus sexy, le plus insolent et le plus pertinent de cette fin d’année
Dans la lignée du succès de 50 Nuances de Grey, la littérature érotique féminine met en scène des rapports de pouvoir, un sujet qui a toujours la côte. 25% des autrices du salon ont déjà écrit de la littérature BDSM, en tant que soumise ou domina. Seront présentes : Alda Mantisse (La Loi du Talon), Eva Delambre (Plurielles), Sania Saint-Germain (Intimes Connexion), Axelle de Sade, Octavie Delvaux (Immorales), Chloé Saffy (La Règle de Trois), Julie-Anne de Sée (Désir et Désordes).
Parmi les conférences et débats proposés, il faut citer celle de Brigitte Lahaie, "Trouver les mots justes pour parler aux Français" de Brigitte Lahaie, les interventions de Stephen Carrière et Alice Groult pour un échange sur le thème : "Éditeur/autrice, comment fonctionne ce duo ?" ou encore l’intervention des Sapphos "La visibilité queer dans la littérature érotique".
À l’instar des précédentes éditions, le salon de la littérature érotique accueille avec beaucoup d’intérêt le discours d’influenceurs "sexo" qui ont de l’impact auprès d’un jeune public (20 - 35 ans). En particulier Camille Aumont-Carnel (678K abonnés sur Instagram, autrice de Les Mots du Q), Les Sapphos (60K abonnés sur Instagram, autrices du Kamasutra Queer) ou encore Léa Celle Qui Aimait (43,8K sur Instagram, Et tes soupirs entre les draps).
À cela s’ajoutent des défis d’écriture érotique, avec des cadeaux à la clé, des stands originaux et des animations insolites. (L’institut de beauté littéraire par l’atelier d’Éros, des histoires érotiques hot par Le Son du Désir, sans oublier le tarot des fantasmes par Sweet Paradise).
Rendez-vous donc le dimanche 19 novembre à La Bellevilloise (Paris 20e) pour le salon littéraire le plus sexy, le plus insolent et le plus pertinent de cette fin d’année.