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alexandre dumas

  • Dumas, le fils

    Soyons précis. Des trois Dumas, c’est le deuxième qui est le plus connu. Alexandre Dumas, dit Père, est devenu pour toujours l’auteur des Trois Mousquetaires, du Comte de Monte-Cristo ou de La Reine Margot. Les qualificatifs le concernant sont bien entendu d’autant plus élogieux qu’il reste moderne.

    Qu’en est-il des deux autres Dumas. Thérèse Charles-Vallin, autrice du Troisième Dumas (éd. de la Bisquine) passe rapidement sur l’ancêtre, lui aussi nommé Alexandre, plus précisément Thomas Alexandre Davy de La Pailleterie. Général métissé, il a eu pour père un noble normand qui épousa une femme noire de Saint-Domingue. Le militaire, le "premier Dumas", donc, donne naissance au plus célèbre d’entre eux, le fameux Alexandre Dumas Père.

    Arrêtons-nous tout de suite sur cette naissance car c’est là qu’il faut chercher un des points communs des trois Dumas : une paternité mal assumée qui est au cœur de l’essai de Thérèse Charles-Vallin. Pour autant, les liens pères-fils restent très forts. Le créateur de Monte-Cristo a une fascination pour le brillant Général increvable et qui eut pour seul "tort" d’être métis. "À l’âge de quatre ans, [Il] voulait aller au ciel pour y trouver Dieu et le tuer afin de venger la mort de son général de Pierre".

    Singulièrement, Alexandre Dumas Fils ne fut reconnut lui aussi que tardivement, après une enfance difficile, trois femmes se disputant sa garde jusqu’à ce qu’il soit définitivement reconnu à l’âge de sept ans. La suite c’est un long chemin personnel et artistique jusqu’au triomphe d’Alexandre Dumas Fils.

    Féminisme

    Thérèse Charles-Vallin suit chronologiquement la carrière exceptionnelle d’un écrivain qui aurait pu se faire écraser par une paternité exceptionnelle, d’autant plus que son enfance augurait mal de la suite – un père absent, des femmes ne s’entendant pas, le rejet et les humiliations à l’école en raison de sa naissance et de ses racines antillaises. Lorsque le père se rapproche du fils, ce dernier ne pourrait que se sentir écrasé par un écrivain adulé et à la force de travail exceptionnelle : "Un véritable bourreau de travail qui peut rédiger 200 pages d’un excellent texte en une nuit". Finalement, les relations entre le père et le fils vont devenir excellentes, comme le prouvent les multiples extraits de leur correspondance, le père soutenant et appuyant le fils et le fils marquant son amour pour un père jusqu’à ses derniers jours.

    L’essai de Thérèse Charles-Vallin est passionnant en ce qu’il donne à voir un artiste s’émancipant d’un père autant admiré et reconnu que "frivole et jouisseur" mais qui finira ruiné. C’est son fils qui l’accueillera chez lui dans ses derniers jours et le veillera jusqu’à sa mort. L’auteure propose sans doute là les plus belles et émouvantes pages de son essai.

    D’Alexandre Dumas Fils, le grand public a avant tout retenu son chef d’œuvre, La Dame aux camélias. Le roman a été écrit en 1847, dans une rage que son père n’aurait pas renié. Le troisième Dumas n’a jamais caché que cette histoire d’amour et de mort lui a été inspiré par sa propre relation avec une jeune femme dont il était épris, Alphonsine Plessis et qui mourut à l’âge de 23 ans, après une vie des plus agitée.

    Dumas Fils est surtout un homme de théâtre et c’est bien naturellement qu’il se lance dans  l’adaptation sur scène de sa Dame aux camélias, avant qu’elle ne devienne ensuite une œuvre lyrique, La Traviata.

    Le Troisième Dumas est aussi passionnant par son tableau du XIXe siècle, ses fièvres politiques, le retour de l’Empire, la guerre de 1870 puis la jeune IIIe République. Dans cet essai, traversent des personnages historiques, que ce soit Victor Hugo, Émile Zola ou Sarah Bernhardt. Thérèse Charles-Vallin souligne la clairvoyance de Dumas Fils qui s’est lancé dans le féminisme et le soutien de l’égalité de droits entre hommes et femmes, une attitude à la fois rare et remarquable pour un homme du XIXe siècle, très souvent cantonné, à tort, dans celui d’artiste bourgeois.

    Finalement, Alexandre Dumas Fils est resté dans les manuels d’histoire autant que de littérature en dépit de l’ascendance de Dumas Père. Mieux, au contraire de ce dernier, il réussit à se faire élire à l’Académie Française. 

    Thérèse Charles-Vallin, Le Troisième Dumas, éd. de la Bisquine, 2024, 214 p.
    https://www.editions-labisquine.com/le-troisieme-dumas.html
    https://www.facebook.com/p/Therese-Charles-Vallin-100063155264919

    Voir aussi : "Thérésia versus Robespierre"

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  • Naissance(s) du bien manger français

    Après son Histoire(s) de vin sorti il y a deux ans, Éric Glatre poursuit son admirable de travail de prospection et de découverte d’un de nos plus beaux patrimoines culturels français.

    Histoire(s) de la Gastronomie (éd. Le Félin) se veut, comme son titre l’indique, un ensemble de récits qui entend montrer que la (bonne) cuisine française n’est ni une création spontanée ni une tradition qui se perdrait dans des temps immémoriaux.

    La période la plus ancienne qu’évoque l’auteur est le XVIe siècle. Dans le chapitre consacré à l’invention du restaurant, Éric Glatre mentionne qu’à l’époque "le terme [de restaurant] revêt une acception alimentaire pour désigner un « aliment reconstituant »", puis un "bouillon viande revigorant" au XVIIe siècle. Les lieux pour acheter de la nourriture existent, tout comme ceux pour se nourrir, mais ce ne sont pas encore les restaurants. Il faut finalement attendre la Révolution française pour que naissent les "établissements culinaires du même nom".

    Les restaurants, une invention moderne donc, intéressent au plus haut point l’auteur qui entreprend d’en faire la généalogie et d’essayer de répondre à la question ardue de savoir à qui l’on doit les premiers restaurants – parisiens. Ajoutons à ce sujet que Paris est au cœur de cette histoire de la gastronomie, la Province – et en particulier Lyon – restant largement dans l’ombre. Dommage. 

    Le lecteur de 2022 s’arrêtera avec curiosité et intérêt sur le chapitre consacré à la cartographie culinaire française durant le Premier Empire

    Éric Glatre entend défricher une histoire peu connue et pourtant essentielle de la gastronomie : celle qui se déroule sur, grosso modo, un siècle : de la Révolution à la Belle Époque. Le lecteur trouvera dans ce passionnant ouvrage aussi bien un historique des grands établissements de la Capitale que des portraits souvent hauts en couleurs de cuisiniers révolutionnaires, de critiques gastronomiques (Brisse et Monselet) ou de véritables encyclopédistes spécialisés (Alexandre Balthazar Laurent Grimod de La Reynière, Jean Anthelme Brillat-Savarin ou Jules Gouffé).

    À côté d’incursions du côté de la Grande Histoire (Napoléon Ier, qui a été "le contraire d’un gourmet ou d’un gastronome", alors que Talleyrand et Cambacérès en ont fait un outil diplomatique), Histoire(s) de la Gastronomie est surtout un essai sur la société française et sur les traditions culinaires. Le lecteur de 2022 s’arrêtera par exemple avec curiosité et intérêt sur le chapitre consacré à la cartographie culinaire française durant le Premier Empire. De longues pages sont consacrées aux "grands" restaurants parisiens ayant fait florès à partir de la Révolution et jusqu’au Second Empire, et dont les noms sont tombés dans l’oubli ("Méot") ou non ("Au Rocher de Cancale" ou "Le Grand Véfour" existent toujours).

    Éric Glatre aborde des sujet a priori anodins mais en réalité passionnants : La naissance du menu, celui des services à la française ou à la russe, le développement des salles à manger et des cuisines dans les intérieurs ou encore l’aventure de la boîte de conserve. La restauration populaire n’est pas en reste, pas plus que l’ouvrage légendaire d’Alexandre Dumas, son Dictionnaire de la cuisine, paru à titre posthume.  

    Cet essai gourmand est à dévorer de toute urgence, à quelques semaines de nos réveillons traditionnels.  

    Éric Glatre, Histoire(s) de la Gastronomie, 20 épisodes qui révolutionnèrent la cuisine française,
    éd. Le Félin, 2022, 276 p. 

    https://editionsdufelin.com/auteur/eric-glatre

    Voir aussi : "Vins et vignobles, des Gaulois à la Ve République"
    "Avec modération"

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