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bernard tapie

  • Wonder boy

    À la découverte de Tapie, la dernière grande création de Netflix, on a envie de dire que cette série méritait une bonne dizaine d’épisodes supplémentaires, pour ne pas dire une deuxième saison, tant la vie du businessman français, homme politique, animateur, patron sportif de l’OM, chanteur (sic) et incarnation des eighties a été des plus riches.

    La série de Tristan Séguéla et Olivier Demangel suit l’ascension irrésistible puis la chute de l’ancien fils de chauffagiste, qui se rêvait chanteur à succès, avant de se lancer dans le commerce. Le jeune homme est bourré de ressources et frappe à toutes les portes. Après l’aventure d’une enseigne d’électro-ménager, Bernard Tapie trouve un filon : la reprise d’entreprises.

    Laurent Lafitte incarne le "wonderboy" avec un mélange d’élégance, de roublardise, de sensibilité… et d’ambition

    En sept épisodes, la production de Bruno Nahon retrace une période phare de la fin du XXe siècle : le début de la crise des seventies et les luxuriantes et tape-à-l’œil années 80. Et de ce point de vue, qui d’autre pouvait le mieux incarner cette période que Bernard Tapie ?

    Laurent Lafitte incarne le "wonderboy" avec un mélange d’élégance, de roublardise, de sensibilité… et d’ambition bien sûr. La ressemblance avec son modèle est frappante, jusque dans la voix. Il n’y a qu’à s’en rendre compte avec le générique de fin.

    Pour incarner Dominique Tapie, sa compagne et seconde épouse, Joséphine Japy endosse les habits d’une femme élégante, forte et d’un solide caractère. La véritable alter ego de Tapie. Que l’on se souvienne que l’actrice avait il y a peu pris les traits de la douce et discrète Eugénie Grandet dans l’adaptation balzacienne de Marc Dugain.

    Seul bémol à sa série : pour des raisons de production, les créateurs ont laissé de côté des périodes phares : la privatisation de TF1, l’affaire du Crédit Lyonnais, l’expérience théâtrale de Tapie et des derniers rebondissements financiers, quelques années avant sa mort. Mises à part ces manques, ce Tapie est d’une excellente facture. 

    Tapie, série française de Tristan Séguéla et Olivier Demangel,
    avec Laurent Lafitte et Joséphine Japy, 2023, saison unique, 7 épisodes

    https://www.netflix.com/fr/title/81087883

    Voir aussi : "Eugénie Grandet, classique et moderne"

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  • La chatte et la gagne de "La Desch"

    Et si c’était lui, l’homme du Mondial ? Alors que la France s’apprête à jouer sa troisième finale de coupe du Monde de football en Russie (le record depuis vingt ans pour une équipe nationale), l’hebdomadaire Marianne met à l’honneur le sélectionneur Didier Deschamps, vêtu en couverture, pour l’occasion, du costume présidentiel. "Deschamps Président !" proclame le magazine habituellement plus tourné vers des sujets politiques.

    Le foot est-il un sujet futile et réservé à une masse abrutie ? Pas du tout, écrit le journaliste Éric Couty, qui rappelle une citation d’Albert Camus : "Il n’y a pas d’endroits dans le monde où l’homme est plus heureux qu’un stade de football" et une autre de l’ex-entraîneur de Liverpool, Billl Shankly : "Le football n’est pas une question de vie ou de mort, c’est quelque chose de beaucoup plus important que ça."

    Et Didier Deschamps dans tout cela ? Éric Couty énumère les qualificatifs d’un coach que plus personne n’ose contester : simple, modeste, courageux, laborieux, antihéros, généreux et surtout compétiteur dans l’âme. Là est sans doute le secret d’une équipe et d’un sélectionneur, outsiders au début de la coupe du monde, loin derrière l’Allemagne, l’Espagne, le Brésil et même l’Argentine. Une équipe jeune, peu expérimenté, dotée de l’atout d’une attaque puncheuse, mais fragilisé par une défense que l’on disait peu fiable – et qui, paradoxalement, aura été l’un de ses points forts. Les mauvaises langues parlent aussi, au début du mondial, d’une certaine "chatte," avec des matchs de poules largement à sa portée (l’Australie, le Pérou et le Danemark). Mais avec aussi une moitié de tableau coriace et des équipes au-dessus du lot : l’Argentine de Messi, l’Uruguay de Cavani et la Belgique de Hazard.

    Capitaine à vingt ans

    Le sens de la gagne : voilà ce qui caractérise Deschamps et ses hommes. La finale perdue en 2016 contre le Portugal en Coupe d’Europe a été une gifle que personne ne veut revivre, et encore moins celui que l’on surnomme affectueusement "La Desch."

    Dans Marianne, Étienne Girard et Hadrien Mathoux ("La Desch, taille patron") tracent un portrait passionnant du sélectionneur français, dont l’aura et l’autorité a marqué l’histoire du foot français dès ses débuts de joueur. Si ses qualités techniques ne valent pas un Zidane, un Platini ou un Papin, il s’impose rapidement comme un patron, pour ne pas dire "un chef de meute" capable de galvaniser ses coéquipiers. À vingt ans, Dédé devient capitaine de l’équipe du FC Nantes, rappellent les deux journalistes. Deschamps n’abandonnera jamais ses oripeaux de leader. Un exemple ? Lors de sa période marseillaise, le joueur parvient à convaincre l’emblématique Bernard Tapie de ne pas le vendre au PSG afin de réussir à l’OM. Bien lui en prend : le club marseillais gagne en 1993 la Champion’s League.

    Ce ne sera que le début d’un chapelet de titres, d’abord avec la Juventus de Turin de 1994 à 1999 (une nouvelle ligue des Champions, plusieurs titres de Champion d’Italie), puis avec l’équipe de France : Champion du Monde en 1998 et Champion d’Europe deux ans plus tard. Devenu entraîneur, Didier Deschamps ne s’arrête pas en si bon chemin : sitôt devenu coach de l’AS Monaco, il emmène, en 2004, son équipe jusqu’en finale de la Champion’s League – mais pas jusqu’au titre, hélas. C’est fort logiquement que La Desch devient sélectionneur de l’équipe de France en 2012, après la parenthèse Laurent Blanc, un ancien coéquipier de la Bande à Zizou. L’équipe de France a beaucoup à se faire pardonner : peu inspirés et sans performances majeures, les joueurs traînent surtout avec eux une réputation calamiteuse (la grève et le bus de Knysna en 2010, l’affaire de la sextape de Valbuena ou le scandale Zahia avec Benzema et Ribéry).

    Comme cette époque semble lointaine. La belle histoire d’amour entre l’équipe de France et son pays atteint son paroxysme ce dimanche 16 juillet, victoire ou non. Il ne reste plus qu’à espérer que la gagne et la chatte seront avec les hommes de La Desch.

    Marianne, 13 juillet 2018