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corée

  • 4 voix désirables

    Le titre de cet album public de b•records fait référence à l’une des plus belles chansons de la musique classique. Il s’agit de Youkali de Kurt Weill, interprété par le baryton Joël Terrin accompagné au piano de Cole Knutson. Découvrir Youkali, véritable chant métaphysique, c’est l’adopter : "Youkali, c’est le pays de nos désirs / Youkali, c’est le bonheur, c’est le plaisir / Youkali, c’est la terre où l’on quitte tous les soucis." Il est rare d’entendre ce classique interprété par une voix masculine. Le baryton Joël Terrin vient offrir un contrepoint intéressant et touchant aux versions féminines de Ute Lemper ou, plus près de nous, de Barbara Hannigan.  

    Nous voilà donc embarqué dans un pays où le désir (de la musique) est inscrit en lettres d’or. Enregistré à l’Abbaye de Royaumont les 5 mai et 29 septembre 2024, l’album propose une sélection de pièces lyriques classiques ou modernes. Parité parfaite pour les interprètes : deux hommes Joël Terrin (baryton) et Jeeyoung Lim (baryton-basse) ; deux femmes, Emma Roberts (mezzo-soprano) et Iida Antola (soprano).

    Après Youkali, c’est La Truite de Schubert (Die Forelle) que vient nous régaler Joël Terrin, sans ostentation ni désir de révolutionner le genre. Tout cela est d’un beau naturalisme. Vibrant et frais. Les trois autres titres interprétés par le baryton sont moins célèbres. Avec le compositeur franco-vénézuélien Reynaldo Hahn (1874-1947), on est entre le XIXe et le XXe siècle avec la pièce La prison, au texte plein de regrets, pleurant une jeunesse gâchée et emprisonnée, dans une facture très musique française.

    Plus rare encore de ce côté-ci de La Manche, Sleep est l’œuvre du compositeur anglais Ivor Gurney (1890-1937). En Angleterre, ce "war poet", l’un des poètes-combattants pendant la Grande Guerre, est considéré comme un héros national mais aussi un mélodiste hors-pair ayant laissé des centaines de chansons. On retrouve ici, grâce à Joël Terrin, le bouleversant Sleep, extrait de ses Five Elizabethan Songs, renvoyant à son expérience de soldat pendant la première guerre mondiale. Le programme du baryton s’achève avec un compositeur américain contemporain, Ben Moore (né en 1960). The Lake of Innisfree, d’après un poème de Yeats, fait le choix de l’harmonie et de la mélodie pour en faire un morceau postromantique propre à éclairer nos journées moroses. 

    Éclectique et intelligent

    La mezzo-soprano Emma Roberts fait le choix de compositeurs plus connus, tous du XIXe et début XXe siècle. Il y a Jean Sibelius (1865-1957) et son folklorique conte poétique Flickan kom op. 37 n°5, que la traduction française illustre bien : "La fille revient d’un rendez-vous avec son amoureux". Emma Roberts l’interprète avec puissance et non sans un néo-romantisme éclatant. On est ravis de retrouver Debussy dans le lumineux et onirique Colloque sentimental. Il s’agit d’un extrait des Fêtes galantes, d’après des poèmes de Verlaine. Debussy ne se laisse pas impressionner ni écraser par les mots du poète parnassien. Il y insuffle du mystère là où la mélancolie domine le texte ("– Te souvient-il de notre extase ancienne ? / – Pourquoi voulez-vous donc qu’il m’en souvienne ? / – Ton cœur bat-il toujours à mon seul nom ? / Toujours vois-tu mon âme en rêve ? – Non"). Toujours dans la musique française, la mezzo-soprano interprète la sobre et presque minimaliste chanson de Maurice Ravel, L’indifférent. Il s’agit d’un portrait tout en nuance d’un jeune homme fugacement aperçu, aux "yeux doux comme ceux d’une fille" et à la "démarche féminine et lasse". La rencontre éphémère est rendue musicalement par des notes comme suspendues et par le timbre délicat de la chanteuse accompagnée au piano par Emma Cayeux. Deux lieder, l’un de Brahms (Die Mainacht op. 43 n°2), l’autre de Richard Strauss (Befreit op. 39 n° 4) viennent clôturer le programme d’Emma Roberts.

    Arrêtons-nous maintenant sur le troisième interprète de cet enregistrement public. Il s’agit du baryton-basse coréen Jeeyoung Lim, proposant, et c’est rare, deux pièces du compositeur coréen Isang Yun (1917-1995), Traditional Outfitv (Habit traditionnel) et Swing. Isang Yun a fait le choix de faire se rejoindre musique classique occidentale et rappels des traditions de son pays. Cela donne deux morceaux envoûtants, dépaysants et passionnants. Après un passage par son pays, Jeeyoung Lim, accompagné au piano par Gyeongtaek Lee, revient en Europe et au XIXe siècle avec deux lieder purement romantiques de Schubert (Waldesnacht D 708 et Abendstern D 806), avant de s’intéresser à Henri Duparc (1848-1933), avec sa Chanson triste, d’après un poème de Jean Lahor ("Dans ton cœur dort un clair de lune, / Un doux clair de lune d’été, / Et pour fuir la vie importune, / Je me noierai dans ta clarté").

    La soprano finnoise Iida Antola, accompagnée par sa compatriote pianiste Anni Laukkanen, propose elle aussi, à l’instar d’Emma Roberts, un passage par Debussy, cette fois avec sa pièce onirique De rêve (1893). Iida Antola s’en empare avec une interprétation à la fois lumineuse et éthérée : "La nuit à des douceurs de femmes ! / Et les vieux arbres sous la lune d'or, / songent ! / À celle qui vient de passer la tête emperlée, / Maintenant navrée ! / À jamais navrée ! / Ils n'ont pas su lui faire signer…" Suivent les Trois lieder op. 22 d’Erich Korngold (1897-1957). Il y a du post-romantisme et de la noirceur dans ces chansons crépusculaire, composées en 1828, alors que le compositeur allemand est au sommet de sa gloire. Le nazisme le fera fuir jusqu’aux États-Unis où Erich Korngold se révélera au grand public comme compositeur de films (Les Aventures de Robin des Bois, Capitaine Blood, L'Aigle des mers).  

    Hugo Wolf (1860-1903) et son bouleversant lied Kannst du dast Land vient conclure ce programme éclectique et intelligent proposé par quatre jeunes voix lyriques décidément à suivre et que l’on ne peut qu’aimer.

    Le pays de nos désirs, b•records, Orsay-Royaumont Live, 2025
    https://www.b-records.fr/le-pays-de-nos-desirs
    https://www.royaumont.com

    Voir aussi : "Un autre regard sur Philip Glass"

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  • Hiver à Sokcho 

    Les Cramés de la  Bobine présentent à l'Alticiné de Montargis le film Hiver à Sokcho. Il sera visible du 29 janvier au 4 février 2025. Soirée débat à l’Alticiné le mardi 4 février 2025 à 20H30.

    A Sokcho, petite ville balnéaire de Corée du Sud, Soo-Ha, 23 ans, mène une vie routinière, entre ses visites à sa mère, marchande de poissons, et sa relation avec son petit ami, Jun-oh. L’arrivée d’un Français, Yan Kerrand, dans la petite pension dans laquelle Soo-Ha travaille, réveille en elle des questions sur sa propre identité et sur son père français dont elle ne sait presque rien. Tandis que l’hiver engourdit la ville, Soo-Ha et Yan Kerrand vont s’observer, se jauger, tenter de communiquer avec leurs propres moyens et tisser un lien fragile.

    Hiver à Sokcho, drame coréen de Koya Kamura
    avec Roschdy Zem, Bella Kim, Park Mi-hyeon, 2025, 105 mn

    https://www.cramesdelabobine.org/spip.php?rubrique1519
    https://diaphana.fr/film/hiver-a-sokcho

    Voir aussi : "Personne n’y comprend rien"

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  • Hiver à Sokcho 

    Les Cramés de la  Bobine présentent à l'Alticiné de Montargis le film Hiver à Sokcho. Il sera visible du 29 janvier au 4 février 2025. Soirée débat à l’Alticiné le mardi 4 février 2025 à 20H30.

    A Sokcho, petite ville balnéaire de Corée du Sud, Soo-Ha, 23 ans, mène une vie routinière, entre ses visites à sa mère, marchande de poissons, et sa relation avec son petit ami, Jun-oh. L’arrivée d’un Français, Yan Kerrand, dans la petite pension dans laquelle Soo-Ha travaille, réveille en elle des questions sur sa propre identité et sur son père français dont elle ne sait presque rien. Tandis que l’hiver engourdit la ville, Soo-Ha et Yan Kerrand vont s’observer, se jauger, tenter de communiquer avec leurs propres moyens et tisser un lien fragile.

    Hiver à Sokcho, drame coréen de Koya Kamura
    avec Roschdy Zem, Bella Kim, Park Mi-hyeon, 2025, 105 mn

    https://www.cramesdelabobine.org/spip.php?rubrique1519
    https://diaphana.fr/film/hiver-a-sokcho

    Voir aussi : "Personne n’y comprend rien"

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  • French k-pop

    Née en France, c’est à l’étranger que Loulia a a fait ses armes musicalement parlant, d’abord à Berlin, puis en Corée du Sud où la jeune musicienne a passé dans plusieurs émissions TV et radios. Certaines des vidéos dans lesquelles la jeune femme chante ont réuni jusqu’à plus de 28 millions de vues. Après quatre ans à Séoul, retour en Europe et en Allemagne.

    Or, elle revient en ce début d’automne avec le titre pop "Warm" - plus exactement '따뜻해' (Warm) - que nous pourrions aisément inscrire dans le courant de la k-pop, car il a été écrit en coréen. Forte de ses racines françaises et européennes, et soutenue par la collaboration du jeune producteur Allemand Tim Schoene, Loulia donne à cette k-pop une subtilité, une douceur et une sensualité évidentes.

    L’amour comme une évidence, la chaleur, le lâcher-prise, dans un coréen susurré avec délice. Voilà qui est idéal pour commencer un automne souvent morose. Décidément, Loulia a réussi à sortir de la k-pop de ses ornières. Nul doute que son public coréen saura être touché par cette Française chantant l’amour avec cœur et grâce dans leur langue.     

    Loulia, '따뜻해' (Warm), ft. Tim Schoene, 2023
    https://www.instagram.com/loulia_officiel
    https://www.tiktok.com/@loulia_officiel
    https://twitter.com/Loulia_Officiel

    Voir aussi : "Comme un air de James Bond Girl"

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  • About Kim Sohee

    Les Cramés de la  Bobine présentent à l'Alticiné de Montargis le film coréen About Kim Sohee. Il sera visible du 6 au 11 juillet 2023. La séance du mardi 11 juillet à 20h30 sera suivie d'un débat.

    Kim Sohee est une lycéenne au caractère bien trempé. Pour son stage de fin d’étude, elle intègre un centre d’appel de Korea Telecom. En quelques mois, son moral décline sous le poids de conditions de travail dégradantes et d’objectifs de plus en plus difficiles à tenir. Une suite d’événements suspects survenus au sein de l’entreprise éveille l’attention des autorités locales. En charge de l’enquête, l’inspectrice Yoo-jin est profondément ébranlée par ce qu’elle découvre. Seule, elle remet en cause le système.

    About Kim Sohee, drame coréen de July Jung 
    avec Doona Bae, Kim Si-eun et Choi Hee-jin, 2023, 137 mn
    https://www.cramesdelabobine.org/spip.php?rubrique1348

    Voir aussi : "Sept hivers à Téhéran"

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  • Tu n’as rien vu à Hiroshima

    La facture du chef d’œuvre  de Ryūsuke Hamaguchi, Drive My Car, peut surprendre : le générique n’arrive qu’au bout de 39 minutes. Entre temps, le cinéaste aura patiemment campé le personnage principal, Yūsuke Kafuku, metteur en scène et acteur marié à Oto, une scénariste bien installée comme lui. C’est donc une histoire d’amour a priori idyllique entre deux artistes parfaitement assortis. Lui connaît une réelle reconnaissance avec sa mise en scène d’En attendant Godot de Beckett ; elle semble s’épanouir à la télévision. Pourtant, Yūsuke expérimente une fin du monde à la fois invisible et indicible : après qu’on lui a détecté un glaucome, le metteur en scène découvre l’infidélité d’Otto. Peu de temps plus tard, le jour où elle s'apprête à lui révéler quelque chose, elle décède accidentellement. 

    C’est sur cette ruine personnelle que commence la lente et délicate reconstruction d’un homme, à la faveur d’une pièce de théâtre qu’une compagnie lui demande de créer dans la région d’Hiroshima – là encore le lieu choisi est loin d’être anodin, d’autant plus que l’on peut y voir une référence à Marguerite Duras et son Hiroshima mon amour. Pour ce travail de commande, une adaptation d’Oncle Vania de Tchekhov, on lui adjoint une chauffeuse chargée de conduire sa vieille Saab.  Yūsuke accepte de se laisser conduire, ce qui lui permet d’écouter la pièce sur son autoradio. Entre l’artiste et la conductrice, les relations sont d’abord distantes, pour ne pas dire polies et glaciales. 

    Une référence à Marguerite Duras et son Hiroshima mon amour

    On se laisse conduire par le drame intime de Ryūsuke Hamaguchi et par ses près de trois heures. La magie opère. Pour preuve, le film a été multi récompensé : prix du scénario à Cannes, Golden Globes du meilleur film étranger et des nominations aux Césars et aux Oscars.

    Pour justifier toute la valeur de ce drame intime traitant du deuil, de la reconstruction et de l’amour, sur fond de littérature et d’art, précisons que Drive My Car est une adaptation d’une nouvelle de Haruki Murakami (1Q84).

    Sur cette histoire de deuil – ou plutôt de deuils multiples – Ryūsuke Hamaguchi choisit la retenue, la sensibilité mais aussi les non-dits. Évidemment, l’environnement théâtral n’est pas un hasard : alors que le début du film montre Yūsuke en plein travail sur le chef d’œuvre de l’absurde qu’est En attendant Godot, c’est Tchekhov qui est au cœur de la partie centrale du film. Le choix de la mise en scène de Yūsuke est révélatrice : le mélange des langues (y compris le langage des signes) parle – si j’ose dire – d’universalité mais aussi d’incommunicabilité.

    Le spectateur est témoin tout au long du film de la distance, d’abord physique, entre la chauffeuse et son client. Le réalisateur utilise les allusions, les ellipses (par exemple la dernière séquence du long-métrage) et les regards pour évoquer la douleur d’un auteur reconnu et d’une femme issue d’un milieu populaire, que tout semble séparer. Lorsque les mots et les confidences surgissent, les révélations frappent, voire tétanisent.

    Voilà qui fait de Drive My Car un long-métrage bouleversant, choisissant l’intelligence, l’émotion mais aussi les références au théâtre, au cinéma et à la littérature. Bref, un très, très grand film.

    Drive My Car, drame japonais de Ryūsuke Hamaguchi, avec Hidetoshi Nishijima, Tōko Miura et Masaki Okada, 2021, 179 mn, Canal+
    https://dmc.bitters.co.jp
    http://diaphana.fr/film/drive-my-car
    https://www.canalplus.com/cinema/drive-my-car/h/16772431_40099

    Voir aussi : "Stupeur et tremblements"
    "1Q84 ou 1984 ?"

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  • Han Ji Hee au centre culturel coréen

    Il y a quelques mois, nous vous parlions d’Han Ji Hee, une peintre d'origine coréenne installée en France, dont les tableaux revisitent le thème des paysages, qui deviennent grâce à elle des univers mystérieux, proches et lointains.

    Han Ji Hee est de retour pour une nouvelle exposition, "Superfux", au Centre culturel coréen, du 7 mars au 18 avril 2018.

    À ne pas manquer.

    Han Ji Hee, "Superflux", au Centre culturel coréen,
    2 Avenue d’Iéna, 75116 Paris, du 7 mars au 18 avril 2018 
    "Énergiquement fluide, intensément paisible"

    http://hanjihee.com

  • L'interview (qui tue)

    Le film The Interview (L'Interview qui tue) peut déjà être qualifié comme l'œuvre cinématographique la plus importante de 2014 et sans doute aussi de ce début d'année 2015.

    Nul doute que les auteurs, producteurs et distributeurs de ce long-métrage se seraient pourtant bien passés d'un tel honneur car la notoriété de The Interview tient justement à sa sortie limitée sur les grands écrans, aux attaques subies à son encontre et aussi à son impact géopolitique. 

    Rappelons en quelques mots l'histoire de ce divertissement aux conséquences mondiales rarement vues. Evan Goldberg et Seth Rogen (ce dernier a sévi dans des films comme 40 ans, toujours Puceau, Supergrave ou Zack et Miri font un Porno) sont à la réalisation de cette farce. 

    Elle met en scène le présentateur vedette Dave Skylark (James Franco) et son producteur Aoron Rapoport (Seth Rogen) décidés à interviewer le dictateur nord-coréen Kim Jong-un (Randall Park), ce dernier ayant déclaré être un fan du talk-show "Skylark Tonight". Alors que des pourparlers s'ouvrent pour mener à bien ce projet, la CIA, par l'entremise de l'agent Lacey (Lizzy Caplan), approche les deux Américains pour les convaincre d'empoisonner Kim Jong-un. Ils acceptent par patriotisme et se retrouvent en terrain ennemi, nez à nez avec le dictateur communiste, dans son palais présidentiel. Le projet d'assassinat va s'avérer un peu plus compliqué que prévu pour nos deux pied-nickelés, surtout que Kim (affublé, au passage, d'une particularité anatomique que le bloggeur ne dévoilera pas ici...) se montre d'une grande affabilité avec le délirant, naïf – et incompétent – Dave Skylark.     

    Dire que cette comédie bouffonne n'est pas un chef d'œuvre de comédie est un pléonasme. Humour potache, caricatures (de l'autocrate comme des États-Unis et de leurs mœurs) et gags graveleux sont assumés à 200 % par les auteurs et les acteurs du film. The Interview appartient à la lignée de ces comédies américaines revendiquant leur aspect régressif. L'influence de Sacha Baron Cohen est certaine. Mais là où l'auteur de The Dictator (2012) choisissait habilement de créer un personnage de toute pièce à mi-chemin entre Kadhafi et Ahmadinejad, Evan Goldberg et Seth Rogen ont choisi de s'attaquer frontalement à l'un des pires dictateurs de la planète. 

    Ce choix a suscité la fureur de Kim Jong-un qui a multiplié les menaces contre le film et contre les États-Unis. Faute de pouvoir convaincre l'interdiction de ce long-métrage particulièrement féroce contre lui, c'est une attaque de hackers – vraisemblablement pilotés depuis la Corée du Nord – qui a eu raison de cette comédie engagée. Les piratages subies par Sony, la fuite de documents et de secrets de production et les menaces terroristes ont convaincu la multinationale de jeter l'éponge. Mais pas The Interview de bâtir sa réputation d'œuvre déjà culte. Une œuvre qui a, du même coup, jeté un peu d'huile sur le feu dans cette partie du monde, plus que jamais en guerre froide contre les États-Unis.

    Evan Goldberg et Seth Rogen, The Interview (L'Interview qui tue), avec James Franco,  Seth Rogen, Randall Park, Lizzy Caplan et Diana Bang, USA, 2014, 112 mn