Musique ••• Classique ••• J.S. Bach, The English Suites, Zhu Xiao-Mei
Comme un ouragan
Et si l’on refaisait un petit retour en arrière ? Il y a trois ans, sortait le 2e album de Leïla Huissoud, Auguste. Sa découverte récente me donne l’occasion de vous encourager à découvrir un opus d’autant plus sincère qu’il revendique ses influences assumées : le jazz manouche mais aussi… Georges Brassens.
Il faut aussi préciser que la chanteuse était en tournée cet été, tournée marquée par son hospitalisation début août. On lui souhaite bien entendu un prompt et heureux rétablissement.
Revenons à Auguste, l’album qui la révèle d’ores et déjà comme une artiste au caractère bien trempé et à l’univers singulier. Celui de Leïla Huissoud est celui d’une saltimbanque se moquant des convenances et de l’académisme comme elle le dit dans "La mineure", le morceau qui clôture l’album : "Peut-être que je chanterai pas / La chanson qui vous a fait venir / Et les rappels, quand y'en a pas / C'est qu'j'ai plus rien à dire / Alors si mon art piège, je peux vous l'accorder / J'suis une merde en solfège, et pour la note / J'vous laisse payer."
L’artiste, passée par The Voice, le résume dans cet autre titre, "La chianteuse" : "Papa, maman, j'me suis trouvé / Si un jour je grandi / Je serai grogneuse amplifiée / Pour gagner ma vie… / Une chieuse en un mot / Je serai chanteuse, applaudissez." La "chianteuse", qui a choisi l’exigeant chemin de l’exigence, le dit autrement dans "Les tours de rond-point" : "J'ai des projets de débutante / Des rêves pas plus hauts que la vie / Parce que les sommets font les pentes / Je préfère quand ils sont petits."
Comme le titre de l’opus l’indique, les influences de Leïla Huissoud sont à voir d’abord du côté du cirque et de ces saltimbanques qui l’inspirent. C’est "La farce" et surtout "Auguste", qui est un des plus beaux hommages qui soit à ces personnages emblématiques des chapiteaux : "Ce sera Auguste, on choisit pas / De quel côté des rires on va / Moi j'ai pioché les doigts moqueurs / Qui vous pointent le cœur / La rime est simple mais j'hésite pas / Vous savez au bout d'un doigt".
La "chianteuse" a choisi l’exigeant chemin de l’exigence
Leïla Huissoud s’est entourée de musiciens pour colorer son album de jazz manouche ("La farce", "Auguste" ou "Écrit d'invention"). La musicienne a fait le choix d’instruments traditionnels et d’une orchestration ramassée (les tangos de "Caracole" et de "La chianteuse"), quand elle ne choisit pas l’option voix-instument solo : ce sont les cordes de "La chianteuse", le piano ("En fermant mes yeux") ou bien la guitare ("Lettre à la Suisse"). En parlant de guitare, il faut absolument mentionner l’hommage à Georges Brassens dans "Le vendeur de paratonnerre", dans un titre revendiquant son affiliation et dans le texte et dans la facture à l'auteur de L'Auvergnat – guitare sèche incluse.
Voilà qui rend cet album si attachant, a fortiori lorsque Leïla Huissoud évoque ses rêves amoureux et personnels, que ce soit "Un enfant communiste" en duo avec Mathias Malzieu, le récit d’une liaison éphémère ("En fermant les yeux") ou bien "Écrit d'invention". Le très beau morceau "Lettre à la Suisse" peut aussi bien s’écouter comme un hommage à sa Suisse d’adoption ("Froide comme une fille trop jolie / Qu'a forcément rien d'une battante / Je parle pas d'argent, ça c'est ton histoire / C'est tes finances, c'est tes connard") que comme une chanson d’amour ("C'est sûrement comme ça les étoiles / J'ai jamais pu le remercier / Le monsieur qui m'as fait venir chanter / Un mois de Janvier, à Lausanne / Grâce à lui, je t'ai découverte / Pleine de chansons et d'amitié / Ça fait pas long, l'effet de ma fenêtre".
Enfin, il ne faut absolument pas passer à côté de ce joyau que sont "Jolies frangines", formidable hommage doux amer aux deux sœurs de Leïla Huissoud. Le titre a été récompensé par un mérité Prix Georges Moustaki en 2019 : "Ça fait longtemps qu’on nous a pas / Appeler en criant / « Les filles » : c’était nous trois / Même que ça semblait évident / Je me dis que j’aurais dû profiter / Quand on confondait nos prénoms / J’étais la petite sœur de mes aînées / La peste, le tourbillon".
Auguste va bientôt fêter ses trois ans mais il est indubitablement à découvrir ou redécouvrir. Et on attend avec impatience le retour de Leïla Huissoud, en grande forme, bien entendu.
Leïla Huissoud, Auguste, Mad, 2018
https://www.leilahuissoud.com
https://www.facebook.com/LeilaHuissoudofficiel
Voir aussi : "Leïla Huissoud, la « chianteuse »"
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