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journaliste

  • Briser la breizh omerta

    Le dernier film de Pierre Jolivet, Les algues vertes, ne mérite certainement pas les critiques chichiteuses qui ont suivies sa sortie en salle l’été dernier. Il est vrai que le sujet est aussi sensible qu’a priori peu sexy : la pollution des algues vertes en Bretagne depuis des dizaines d’années et qu’une journaliste modeste mais pugnace a fait connaître au milieu des années 2010. C’est l’histoire de cette enquête que raconte Pierre Jolivet.

    La formidable Céline Salette joue le rôle de la journaliste Inès Léraud , par ailleurs co-auteure de la BD Algues vertes, l'histoire interdite, avec Pierre Van Hove au dessin. Pigiste parisienne et chroniqueuse engagée, Inès voit le sujet des algues vertes proposé par un inconnu. Elle se rend en Bretagne avec sa compagne Judith (Nina Meurisse, parfaite et touchante). Les deux femmes s’installent dans une maison typique des Côtes-d’Armor. Très vite, Inès se trouve confrontée avec une véritable omerta dans ce coin de la Bretagne septentrionale, malgré les morts qui ont accompagné la propagation d’une algue dangereuse provoquée par l’homme et dont les effets néfastes ont été tus, à dessein. 

    Une double histoire d’amour

    Les Algues vertes est un film sur une investigation. Mais pas de grands effets ici, de scènes choc ou de séquences de tribunal. Tout juste assiste-t-on à la menace d’un menace, des intimidations parfois feutrées et des signes inquiétants – une voiture rôdant autour de la maison, des silences éloquents et des visages fermés.

    C’est l’omerta justement qui intéresse Pierre Jolivet, et que la femme d’une victime, Rosy Auffray (Julie Ferrier, qu’on a plaisir à retrouver ici), traduit dans le dernier quart d’heure : parler des algues vertes c’est mettre un danger le travail d’un voisin, d’un membre de la famille et d’un proche. La politique locale n’est pas en reste, avec un député européen (Jonathan Lambert, en contre-emploi) semblant jouer sur plusieurs tableaux à la foi.

    Les algues vertes, scandale écologique, devient au fil du récit celui d’une dérive politique et économique qui a même accompagné la sortie du film. Le tournage, apprend Pierre Jolivet, a été compliqué et marqué, lui aussi, par une omerta bretonne. La grande vertu du film, malgré ses déboires, a permis de faire connaître un scandale écologique et de provoquer des actions de sensibilisation, y compris et surtout en Bretagne.

    Véritable charge contre cette loi du silence, le film Les algues vertes propose également une double histoire d’amour : celle de deux femmes et celle pour la Bretagne, malgré tout.  

    Les Algues vertes, drame frano-belge de Pierre Jolivet, avec Céline Sallette, Nina Meurisse, Julie Ferrier, Pasquale d'Inca, Clémentine Poidatz et Jonathan Lambert, 2023, 107 mn, Canal+
    https://www.canalplus.com/cinema/les-algues-vertes/h/22973494_40099
    https://www.hautetcourt.com/films/lesalguesvertes

    Voir aussi : "Lumineuse Obscurité"
    "Nourrir son monde"

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  • Pugnace gaijin

    C’est la série coup de cœur du moment pour Bla Bla Blog, et elle est visible sur Canal+. Tokyo Vice est d’abord l’adaptation de l'autobiographie du journaliste Jake Adelstein : Tokyo Vice: An American Reporter on the Police Beat in Japan. Sorti en 2009, ce document est une plongée dans le milieu du journalisme japonais, avec un jeune Américain recruté au sein du grand quotidien tokyoïte Yomiuri Shimbun.

    Fort de ses connaissances en japonais, le "gaijin" ("étranger") parvient difficilement à se faire une place. Car, outre l’exigence du recrutement du journal, il aussi faut compter sur le travail, la pression de la hiérarchie mais aussi la culture du pays où le racisme est présent. Bien décidé à se faire une place au soleil – levant – Jake met à profit sa pugnacité après un premier meurtre que la police souhaite étouffer. Le chemin du journaliste expatrié croise la route d’une hôtesse de club, Samantha. Il semble que la mafia japonaise y ait aussi ses entrées.   

    Tokyo Vice a été coproduit par Michael Mann qui a d’ailleurs réalisé le premier épisode

    Une fois n’est pas coutume, la mise en place du récit est passionnante : l’épisode pilote est une formidable plongée dans la société japonaise. Le téléspectateur suivra avec passion Jake Adelstein, joué par le formidable Ansel Elgort (Divergente, Nos Étoiles Contraires, West Side Story), dans le rôle du jeune journaliste américain tentant de s’intégrer envers et contre tous dans un milieu pour le moins méfiant vis-à-vis de ce "gaijin" blanc et occidental, à la fois brillant, sérieux et courageux.

    Ken Watanabe (Le Dernier Samouraï, Batman Begins, Inception) est l'autre star de la série, dans le rôle d’un inspecteur japonais engagé dans une lutte sans merci contre les puissants yakusas.

    Et si je vous dis enfin que Tokyo Vice a été coproduit par Michael Mann (Heat, Ali, Collateral), qui a d’ailleurs réalisé le premier épisode, voilà qui devrait vous finir de convaincre de foncer vers la chaîne cryptée pour découvrir cette petite merveille policière. Dépaysement garanti. 

    Tokyo Vice, série policière américano-japonaise de J. T. Rogers, avec Ansel Elgort, Ken Watanabe
    Rachel Keller, Hideaki Itō, Ella Rumpf, Show Kasamatsu,
    Tomohisa Yamashita et Rinko Kikuchi, 2022, une saison, 8 épisodes, HBO, Canal+

    https://www.canalplus.com/series/tokyo-vice/h/19589470_50001

    Voir aussi : "L’autre Ragnarök"

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  • Zola au cœur de la Commune

    Voilà une sortie littéraire qui tombe à point. Alors que nous fêtons cette année les 150 ans de la Commune de Paris, Claude Sabatier propose le deuxième tome des Chroniques politiques d’Emile Zola (éd. Classiques Garnier), des articles qui couvrent les années 1871 et 1872. Une période importante, tourmentée et qui marque aussi le début de la IIIe République.

    De février 1871 à août 1872, Zola rédige, pour La Cloche les chroniques parlementaires envoyées de Bordeaux, puis de Versailles, qui analysent les débuts de la IIIe  République. Il rédige, pour Le Sémaphore de Marseille des lettres de Paris où il évoque le drame de la Commune. Ces comptes rendus politiques vont du pamphlet à la satire. En ces années charnières, ils résonnent des débats qui traversent une époque mouvementée – entre pacifisme et nationalisme, république et monarchie, province et Paris, libéralisme et ordre moral. Le journaliste élabore des motifs et des situations que le romancier développera ou transposera dans La Curée, Nana ou Son Excellence Eugène Rougon.

    Si vous n'aimiez que moyennement le Zola "romancier", vous le découvrirez sous un jour nouveau, sous une forme brève et éclatée, en journaliste fourbissant ses armes et son style avant le fameux "J'accuse" du 13 janvier 1898. Outre que le Zola des années 1871-1872 prépare ses futures grandes œuvres, l’auteur et journaliste porte dans ses chroniques parlementaires un regard lucide et aigu sur les combats politiques de son époque. La lecture de ces textes rares de Zola sont éclairées par la préface de Claude Sabatier, sans oublier les notices, éclairages historiques ou littéraires et nombreuses notes.

    Nous l’avons dit : voilà un livre qui tombe à point nommé !

    Émile Zola, présenté par Claude Sabatier, Chroniques politiques ,
    tome 2 (1871-1872)
    , éd. Classiques Garnier, 2021, 1144 p.

    https://classiques-garnier.com

    Voir aussi : "Zola, le journaliste politique"

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  • L’art d’être polisson

    Soyons honnêtes : Le dernier livre de Flore Cherry, L’Écriture érotique (éd. La Musardine) aurait sans doute mérité le pluriel. Car les écritures érotiques ont des visées et des objectifs différents ? Quoi de commun en effet entre la création d’un roman, la rédaction d’une lettre à un amant ou à une maîtresse, l’envoi de sextos ou la publication de posts plus ou moins personnels sur un blog ? Un dénominateur rassemble ces écritures : comment exprimer le désir ?

    Voilà un vrai challenge, voire même une "science" comme le déclare l’auteure qui a fait de l’écriture érotique un vrai travail – comme l’attestent ses ateliers des "Écrits polissons", son Salon de la littérature érotique, ses fonctions au magazine Union ou ses chroniques pour Sud Radio.

    L’Écriture érotique entend donner au lecteur des outils, des idées mais aussi de l’inspiration pour exprimer sur papier – ou sur ordinateur – le désir, l’excitation et la tension sexuelle. Avec, dès l’introduction, cette remarque : "Et la différence entre écriture "érotique" et "pornographique", alors ? Personnellement, je pense qu’elle est là où vous placez votre morale, votre pudeur et votre expérience de lecture."

    Flore Cherry consacre les premiers chapitres de son manuel à un préliminaire : "À quoi ça sert de bien écrire du cul ?" Voilà une question pas si anodine que cela, sauf si, comme elle le dit, vous choisissez d’esquiver le sujet en considérant que l’indicible – ici, le désir, l’attirance, les pulsions sexuelles – ne s’écrit pas. Pourtant, l’auteure voit bien des avantages à se lancer dans l’écriture érotique : commencer, voire entretenir, un lien intime avec son ou sa partenaire, vivre pleinement des fantasmes via la plume ou le clavier, "mieux se comprendre soi-même", s’affirmer et passer au-dessus de sa timidité naturelle et, pourquoi pas, "participer à une révolution." Car la littérature érotique est depuis longtemps un genre qui a su dépasser le stade de création légère. Elle porte aujourd’hui "l’étendard d’autres combats plus sociétaux. On pourrait citer en premier lieu celui des luttes féministes." Les exemples de manquent pas : Virginie Despentes (Baise-moi), Catherine Millet (La Vie sexuelle de Catherine M.) ou, moins connus, Marie-Anne Paveau (Le Discours pornographique, éd.La Musardine) et Françoise Simpère (Ce qui trouble Lola, éd. Blanche).

    Oscar Wilde, Anaïs Nin, Roald Dahl Jean de la Fontaine et même… Emmanuel Macron

    La deuxième partie de l’essai de Flore Cherry aborde le cœur de ce qu’est l’écriture érotique, et comment se lancer. Et pour cela, la créatrice des "Écrits polissons" propose une série de réflexions et d’entraînements autour de différents thèmes : la description physique, la description sensuelle, les sentiments, les rapports de pouvoir, le jeu ou l’humour.

    Mieux que de simples exercices – avec tout de même ce qu’il faut de théorie – Flore Cherry n’oublie pas de proposer des passages savamment épicées : le lecteur trouvera ainsi une série de déclinaisons sur l’art d’écrire sur la fellation sur un mode factuel, amoureux, violent, transgressif ou dégoûté.

    Avec la dernière partie de L’Écriture érotique vient enfin l’objectif ultime qui est de se retrousser les manches et de mettre en application les conseils prodigués dans l’ouvrage. Le lecteur – et, gageons-le, futur auteur – trouvera là de quoi passer au-dessus de la leucosélophobie – autrement dit la "peur de la page blanche." Des conseils qui peuvent s’appliquer à l’écriture de manière plus générale. Là d’ailleurs est aussi l’intérêt du manuel qui peut faire office de vade-mecum pour un écrivain en herbe quel qu’il soit : Où écrire ? Avec quels outils (plume, crayon, ordinateur… ou smartphone...) ? Comment trouver le temps ? Preuve du sérieux de cet ouvrage, Flore Cherry insiste sur l’importance du vocabulaire – particulièrement capital dans la littérature érotique –, de la ponctuation mais aussi de l’orthographe, un sujet qu’elle sait dédramatiser. Le lecteur trouvera enfin des chapitres spécifiques "pour écrire un texte érotique, quel qu’il soit et quelle que soit sa fonction" : lettres d’amour, sextos, journal intime, roman, théâtre, blog, voire chanson paillarde ! Flore Cherry a enrichi son manuel de trucs, d’idées, de fiches pratiques (en fin de volume) et de multiples fiches d’entraînement.

    L’ultime conseil de Flore Cherry est pour les lecteurs ou lectrices encore réfractaires à un genre encore mal considéré : arrêtons de nous "trouver des excuses", dit-elle. Et de rappeler que la littérature érotique regorge de célébrités qui s’y sont adonnées : outre Sade, elle cite Oscar Wilde, Anaïs Nin, Roald Dahl (l’auteur de Charlie et la Chocolaterie), Jean de la Fontaine et même… Emmanuel Macron.

    Flore Cherry, L’Écriture érotique, éd. La Musardine, 2020, 190 p.
    https://www.lamusardine.com/P32983-l-ecriture-erotique-cherry-flore.html
    https://popyourcherry.fr
    https://www.facebook.com/flore.cerise

    Voir aussi : "Union TV : un nouveau média pour une nouvelle révolution sexuelle"

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