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  • Un peu de fraîcheur avec l’œil du frigo

    Au secours, la fin du monde arrive ! Je veux dire : la canicule... Il est vrai que les chaînes d'info en continu semblent nous promettre l'enfer sur terre cette semaine : raison de plus pour nous rafraîchir avec une scène de frigo tirée d'un film légendaire, E.T. L’Extraterrestre de Steven Spielberg. Même les aliens peuvent avoir un goût prononcé pour notre célèbre appareil électroménager, si béni en ces périodes estivales. Place à l’‎Œil du frigo qui nous décrypte une scène culte de ce film sorti il y a presque quarante ans

    Un peu de fraîcheur avec cette séquence d'E.T. devant un frigo. Évidemment, on ne présente plus ce sympathique extraterrestre qui nous a rendu une visite dans les années 1980. Depuis,  plus de nouvelles : à croire qu'il n'a pas aimé la terre. À moins que cela ne soit à cause du frigo. Je me suis toujours demandé, déjà tout petit - ça date un brin - ce que penseraient les extraterrestres s'ils ouvraient un de nos frigos... Question métaphysique qui n'a jamais trouvé de réponses et qui m'a plongé après quelques dépressions spatiales à me demander si les extraterrestres existaient vraiment (à part moi, bien sûr). Bref, E.T. ouvre cette fabuleuse porte comme si un trésor se cachait derrière. On a déjà vu que Spielberg vénérait les frigos puisqu'on peut se cacher dedans en cas d'explosion nucléaire.

    Ici, ce cher Frigo est le réceptacle de nos trésors. Il est pour une fois très bien achalandé. Pas question que cet invité de marque ne découvre un frigo désert. E.T. se jette directement sur la salade de patates toute préparée de chez Boys. Allez comprendre cette marque... Certainement parce que les "boys" que nous sommes ne savent pas faire de salade de patates. Première claque : si un jour je fais un récital de l’œil du frigo je vous ferai une salade de patates à flinguer un extraterrestre. D'ailleurs E.T. ne se trompe pas : il goûte et jette le pot au chien (j'aime quand les claques font boomerang). Il aurait pu avec tout ce qui se trouve devant lui se préparer une super recette, un peu extraterrestre, avec des épices de chez lui, saupoudrée de kryptonite. Mais non, dès son arrivée , il se comporte comme un américain, salade toute préparée, et direction la bière au fond du frigo. Finalement E.T. est un Américain moyen, moche, avec du ventre et des doigts bizarres. Spielberg, nous explique ça en deux plans : qu'avons nous à montrer à ces habitants du nouveau monde ? Rien, messieurs les E.T. : venez vous soûler dans nos frigos. Oui, je sais, je suis dur, mais la preuve est là : toujours pas d'E.T. en vue depuis plus de vingt ans... On les a dégoûtés !

    Encore une petite remarque sur la porte du Frigo , le pot en haut à gauche au couvercle jaune en début de séquence, dont je n'arrive pas à identifier le contenu, devait être drôlement bon puisque l'assistant réalisateur à du le faire disparaître au profit d'un pot à couvercle blanc sur le plan de la bière.

    Il s'en passe des choses dans les frigos. E.T. aurait pu nous crier tout le film "E.T. frigo !": cela aurait été plus classe, plus mystique, plus E.T., bien plus poétique que "E.T. maison !".

    ODF

    E.T. l'extraterrestre, science-fiction de Steven Spielberg
    avec Henry Thomas, Drew Barrymore, Robert MacNaughton,
    Dee Wallace et Peter Coyote
    Etats-Unis, 1982, 115 mn

    Voir aussi : "L’‎Œil du Frigo débarque sur Bla Bla Blog"
    "E.T. Frigo"

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  • Indie King Cool

    Lorsque la rubrique de L’‎Œil du Frigo a commencé, un des premiers commentaires entendus a été : "Et le frigo dans Indiana Jones 4, alors ?"  Pertinente réflexion : notre chroniqueur de L’‎Œil du Frigo revient sur cette scène devenue culte.   

    Indiana Jones 4, ou plutôt Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal, un film de Steven Spielberg, pas si vieux que ça - 2008 - qui nous compte les aventures d'un gentil héros aux cascades rocambolesques.

    Et là, on est servi : au moment d'une explosion nucléaire, notre héros se cherche un refuge. Nous autres, pauvres mortels, nous aurions déjà versé tous les fluides de notre corps à même le sol, et nous aurions péri comme ces pantins de cire que nous voyons fondre à l'image. Mais Indy (pour les intimes), lui, c'est l'espoir de l'humanité, celui qui a toujours une troisième voie, une dernière tentative, un dernier sursaut,une dernière alternative, une belle leçon de vie.

    Lorsqu'il se dirige vers le frigo, on pense tous qu'il a trouvé un passage secret, ou alors qu'il va se faire un dernier foie gras en attendant que le champignon soit grillé. Que nenni ! Indy ne regarde même pas ce qu'il y dans le frigo. D'ailleurs on peut se poser la question de savoir à quoi cela peut servir de remplir un frigo de victuailles en plastiques pour des mannequins en cire...

    Bref, ce qui compte surtout c'est le frigo et les petites indications de Spielberg : quel farceur ! Sur la porte, il est indiqué à la place de la marque : "King cool." J'ai cherché : aucune trace de réfrigérateur de la marque King Cool. Le message est clair : en cas d'explosion nucléaire, sois le "roi du frais" devant ton frigo. En deux mots : "Garde ton sang froid". Et, il y a mieux : une fois à l'intérieur, Spielberg fait un gros plan sur les indications techniques de l'engin :"Lead lined for superior insulation." Alors là, on est scotché : "Doublé de plomb pour une isolation supérieure," comme si les américains fabriquaient en série des frigos en plomb (super léger) en vue d'un explosion nucléaire.

    Alors, amis lecteurs dingues de frigos, je vous le dis : ne cherchez plus à fabriquer un abri antinucléaire dans votre jardin ou votre cave ; achetez un frigo "King cool" , un par habitant dans la maison et enfermez vous dedans jusqu'à l'explosion fatidique. Évidemment, si vous êtes éjecté dans le désert, faites en sorte de ne pas retomber : porte face au sol, vous auriez beaucoup de mal pour sortir, et si vous croisez un rongeur qui va se cacher dans son terrier, dites-vous que vous êtes sur la bonne voie de l'optimisme. Croyez en vos rêves, vos délires et ne vous fiez pas à la nourriture en plastique. Spielberg vous le dit : tout est possible, dépassez-vous. Il suffit d'avoir le bon frigo à portée de main.

    ODF

    Indiana Jones et le Royaume du crâne de cristal, film d'aventure de Steven Spielberg, avec Harrison Ford, Shia LaBeouf, Karen Allen, Cate Blanchett et John Hurt
    USA, 2008, 123 mn

    Voir aussi :
    "L’‎Œil du Frigo débarque sur Bla Bla Blog"
    http://www.loeildufrigo.fr/2016/12/indiana-jones-4.html 

     

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  • Les films que vous ne verrez jamais

    L'histoire du cinéma est riche de ces films qui n'ont jamais vu le jour... Plus que dans n'importe quel art, il existe une histoire alternative et parallèle du cinéma qui a vu des passionnés s'intéresser à des films qui ne sont jamais sortis. L'ouvrage de Simon Braund, Les plus grands Films que vous ne verrez jamais, fait le point sur ces projets avortés.

    Les raisons de ces œuvres inabouties sont diverses : décès du réalisateur, désaccords entre artistes et producteurs, contextes historiques et sociologiques, adaptations impossibles ou projets trop ambitieux pour être menées à bout.

    En introduction, l'auteur rappelle avec justesse que la sortie d'un film est en soi un miracle, tant la difficulté est grande de voir un scénario prendre vie sur grand ou sur petit écran. Le long-métrage Les Dents de la Mer (1975) est cité en exemple : scénario mal ficelé, budget dépassé, metteur en scène inexpérimenté (Steven Spielberg n'en était qu'à son deuxième film), effets spéciaux défaillants, techniciens et acteurs peu motivés et instillant une ambiance délétère sur les plateaux. Et pourtant, au final, Les Dents de la Mer a connu le succès exceptionnel que l'on connaît et propulsé son réalisateur comme un artiste majeur.

    Mais à côté de ce succès, ce livre répertorie ces films qui n'ont jamais vu le jour : le Napoléon de Charlie Chaplin (Return from St Helena), un Jésus de Carl Dreyer (1949), La Genèse de Robert Bresson (1963) - l'un des rares réalisateurs français cité dans ce livre avec Henri-Georges Clouzot pour L'Enfer (1964) -, La Tempête de Michael Powell (1975), Dune d'Alejandro Jodorowsky (1977), Night Skies de Steven Spielberg (1980), Moon Over Miami de Louis Malle (1982), Leningrad de Sergio leone (1989), Nostromo de David Lean (1990), Crusade de Paul Verhoeven sur lequel a également travaillé Arnold Schwarzenegger (1995), Superman Leaves de Tim Burton (1998), Batman: Year One de Darren Aronofsky (2000), To the white Sea des frères Cohen (2002), The Lady from Shangai de Wong Kar-wai (2005), Gladiator 2 de Ridley Scott (2006) ou Potsdamer Platz de Ridley Scott. Ce sont quelques-uns des titres de films qui ont failli voir le jour mais qui ont été abandonnés (provisoirement ou définitivement) par leurs créateurs.

    Parmi les auteurs maudits figure en bonne place Orson Welles dont les projets cinématographiques ont été, hélas, légion : It's all True (1942), Don Quixote (1969), Le Marchand de Venise (1969), The Other Side of the Wind avec John Huston et Dennis Hopper (1973) et The Cradle with Rock (1984) 

    Dans toute cette liste de films inachevés, très souvent de réalisateurs confirmés, il en ressort quelques-uns du lot, en raison de leur histoire légendaire. 

    Tout d'abord le Napoléon de Stanley Kubrick, sur lequel le réalisateur, réputé pour sa mégalomanie et son sens du détail, travailla à partir de 1969, et pendant des années, avant de jeter l'éponge, victime du budget colossal envisagé et des désaccords des studios. "Napoléon aurait été un film extraordinaire", soupire l'auteur (voir aussi notre Dossier spécial Kubrick qui fait notamment le point sur les autres films en projet du réalisateur américain).

    Un autre film est entré dans l'histoire : Something's Got to Give de George Cukor avec Marilyn Monroe, décédée pendant le tournage (1962). 37 minutes ont été dévoilé au public en 1990 et l'auteur ne désespère pas que la magie des effets spéciaux numériques permettra un jour de voir le film terminé.

    Les fans de Hayao Miyazaki seront sans doute surpris d'apprendre que le réalisateur japonais a eu pour projet en 1971 de réaliser une adaptation du classique Fifi Brindacier (La Fille la plus forte du Monde). Encore peu connu à l'époque, Miyazaki se voit déposséder de ses droits à l'adaptation par l'auteure elle-même, Astrid Lindgren. Cependant, ajoute Simon Braund, tous les films de l'animateur semblent s'inspirer de la célèbre fillette à la force surhumaine.  

    On ne peut pas passer non plus sous silence le projet de science-fiction A Princess of Mars de Bob Clampett (1936). Une adaptation sera finalement faite par les studios Disney sous le titre John Carter (2012), qui sera aussi l'un des plus grands bides de l'histoire du cinéma.

    De tous les films répertoriés, il en est un qui un sort particulièrement du lot. Et paradoxalement, il s'agit d'un long-métrage qui a été terminé, existe en copie mais que le public ne verra sans doute jamais. Il s'agit de The Day the Clown Cried de Jerry Lewis. Tourné en 1972, ce drame interprété par Jerry Lewis lui-même, suit les pérégrinations d'un clown allemand pendant la seconde guerre mondiale, chargé de distraire des enfants que l'on conduit vers les chambres à gaz. Cette histoire a des points communs avec La Vie est belle de Roberto Benigni (1997). Mais elle en diffère par son traitement caricatural qu'en aurait fait le réalisateur et acteur (le conditionnel est de mise, tant sont peu nombreuses les personnes qui ont visionné le film de Lewis) : "Un film radicalement choquant au pathos et à l'humour déplacés" a t-on pu entendre au sujet de ce "film culte le plus extraordinaire que vous ne verrez jamais.

    Concis et passionnant, l'ouvrage de Simon Braund nous gâte avec deux trouvailles éditoriales géniales. Tout d'abord, chaque film est illustré par des affiches conçues par des designers et des illustrateurs, donnant vie à ces projets qui n'ont jamais vu le jour (en illustration de cet article figure une représentation de The Lady from Shangai de Wong Kar-wai). Ensuite, l'auteur nous propose, sur une note de 0 à 10, la chance qu'a chaque film de sortir un jour.

    On pourra certes critiquer l'aspect arbitraire et subjectif de ce choix mais il reste tout de même intéressant en ce qu'il nous propose quelques beaux projets à venir : Ronnie Rocket de David Lynch, Megalopolis de Francis Ford Coppola, The Captain And The Shark de Barry Levinson, White Jazz de Joe Carnaham, Black Hole de David Fincher (une adaptation de la BD de Charles Burns), The Trial of the Chicago Seven de Spielberg mais aussi Franck or Francis de Charlie Kaufman, qui "a plus de chances de sortir que n'importe quel autre film de ce livre."

    À noter que depuis la sortir de ce livre (en 2013) le film satirique et "maudit" Nailed de David O. Russell devrait finalement sortir en 2015 sous le titre Accidental Love, avec comme réalisateur un certain Stephen Greene, alias David Russell qui a porté cette oeuvre contre vents et marées : un film qui ne devait jamais sortir et que finalement nous pourrons voir. 

    Simon Braund, Les plus grands Films que vous ne verrez jamais, éd. Dunod, 2013

  • La Guerre des Mondes a-t-elle eu lieu ?

    De l'avis de beaucoup, la Guerre des Mondes a bien eu lieu, le 30 octobre 1938, aux États-Unis.

    Ce jour-là, sur CBS, l'annonce par des bulletins d'information de l'invasion des Martiens aurait contribué à propager un vent de panique aux États-Unis. En réalité, ces dépêches ne constituaient ni plus ni moins que l'adaptation radiophonique du roman d'HG Wells, La Guerre des Mondes. L'auteur de cette mise en scène n'était autre que le jeune et brillant Orson Welles, passé à la postérité du jour au lendemain et ce, deux ans avant de tourner son premier chef d'œuvre, Citizen Kane.

    Welles adaptant Wells sur CBS est entré dans la légende : ce 30 octobre 1938, une émission de radio parvient à berner des milliers d'auditeurs. Les services de police sont assaillis d'appels paniqués, des embouteillages monstres se forment, des personnes se suicident pour ne pas tomber entre les griffes des Martiens (ou être violées par eux !), des fausses-couches ou des crises cardiaques surviennent. Le lendemain de l'émission (intégralement reproduite et traduite à la fin de cet essai), les journaux font état de cette panique et du comportement irrationnel de milliers d'auditeurs.

    Que s'est-il réellement passé ? 

    Dans son essai La Guerre des Mondes a-t-elle eu lieu ?, Pierre Lagrange, sociologue des sciences, revient sur cet événement et le décortique pour nous montrer une réalité bien différente de celle qui a été véhiculée ad nauseam. En 1941, HG Wells s'étonnait lui-même devant Orson Welles : "Êtes-vous certains qu'il y eut une telle panique en Amérique ?

    Au vu des sources officielles, des articles de l'époque et des témoignages, aucune vague d'hystérie n'a en réalité secoué les États-Unis ce 30 octobre 1938, mise à part quelques personnes inquiètes, des appels téléphoniques aux services de police de New-York (qui interviennent dans les studios de CBS après la diffusion) et quelques chutes sans gravité. Finalement, précise le chercheur spécialiste en para-sciences, c'est le lendemain, le 31 octobre, que s'est propagée la véritable rumeur, pour plusieurs décennies et jusqu'à aujourd'hui. Journaux, hommes publics et scientifiques ont alimenté et amplifié l'idée que des foules crédules ont cru à une invasion extraterrestre sur la simple foi d'une émission de radio.

    Pierre Lagrange ne nie pas que cette dernière n'a pas fait réagir quelques auditeurs. Par contre, il s'attaque aux milliers de commentaires, d'articles et de livres qui ont considéré comme acquise cette peur collective imaginaire, en surmultipliant et amplifiant quelques faits isolés. 

    L'auteur en profite pour revenir sur l'histoire des "prodiges célestes" et autres soucoupes volantes. Ces phénomènes mystérieux ont fait l'objet d'ouvrages, de romans (Jules Verne, par exemple) et d'articles scientifiques très sérieux mais aussi, rappelle-t-il, de canulars (par exemple le Moon HoaxDans la Lune – du journaliste Richard Adams Locke, attribué faussement à l'astronome Sir William Herschel, ouvrage reproduit en annexe de ce livre). 

    Au XXe siècle, précisément à partir de 1947, la vague des soucoupes volantes s'abat aux États-Unis puis dans le monde. Les rationalistes de tout poil se gaussent de ces croyances infondées rappelant le précédant d'Orson Welles en 1938 – un précédant largement imaginaire et cependant pris pour argent comptant par des "gens sensés". Le grand public, semblent-ils dire, ne peut être constitué que de "sombres crétins incrédules" ! Or, dit Pierre Lagrange à la fin de son essai brillant, "une des plus formidables rumeurs du XXe siècle a pour acteurs principaux des gens cultivés, des représentants de la culture la plus scientifique et la plus rationaliste."  

    Si le monde a échappé à la Guerre des Mondes en 1938, conclue l'auteur, une réelle panique a secoué les États-Unis quelques années plus tard. C'était le 11 septembre 2001 : ce jour-là, des objets volants venaient s'abattre sur New-York et Washington, semant la mort et la désolation. Trois ans plus tard, Steven Spielberg réalisait son long-métrage, lui aussi inspiré du roman d'HG Wells : La Guerre des Mondes.    

    Pierre Lagrange, La Guerre des Mondes a-t-elle eu lieu ?
    éd. Robert Laffont, 352 p.