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Alexandre Monteiro, alias Hopare, est tout l’été invité exceptionnel du centre de shopping Westfield Forum des Halles à Paris. L’artiste plasticien propose au public une fresque immense sur le sol du Patio Pina Bausch.
Hopare revient ici à sa discipline première le Street Art, à travers un visage, son thème de prédilection : le visage.
L’artiste a commencé à se mettre au travail le 21 juin dernier. Il a pris possession du sol du Patio Pina Bausch, sous la canopée. Sa fresque coloré occupant plus de 250 m² prend la forme d’un visage féminin, que l’on imagine venant du bout du monde. L’œuvre est visible tout l’été par les Parisiens et les voyageurs de passage jusqu’à la rentrée.
Le mystère plane sur l’identité de ce personnage, mais à vrai dire l’essentiel est ailleurs : Le centre Westfield Forum des Halles a décidé de faire proposer cette œuvre d’art à son public : "Après de longs mois de séparation, nous avions à cœur d’offrir aux Parisiens une occasion de se retrouver autour d’une expérience culturelle et artistique hors normes !" déclare Jeremy Desprets, directeur du centre commercial des Halles.
Si les pas vous conduisent à Los Angeles ces prochaines semaines, faites un saut à la Show Gallery. La Française Cyrielle vient y exposer pendant un mois sa série Visible Light.
Des productions de Cyrielle Gulacsy, que ce soit ses travaux sur les galaxies (ARP 244 et Pareidolia en 2017), sur l’intelligence artificielle (The Big Crush, 2017) ou ses nus (00100001, 2017), il y a un point commun : le point, justement.
L’artiste suit les pas de ses brillants aînés pointillistes pour créer des œuvres à la très grande technicité. Devenue maîtresse dans l’art du dessin, Cyrielle Gulacsy utilise le point comme on manipule les pixels. Des centaines d’heures et des millions de points sont nécessaires pour faire surgir ici une série de galaxies, là un parachute plus vrai que nature, là encore des corps humains. "Je pense que le pointillisme est bien plus qu’une technique. C'est à la fois la forme et la substance de ma recherche artistique. C'est une manière d'appréhender et de transposer la réalité du monde physique, constituée d'une infinité de particules séparées par l'espace," dit-elle dans une interview pour la galerie anglaise Moosey Art.
Cyrielle Gulacsy parle de l’influence de la pop culture, mais il est clair que son travail est plus à voir avec une démarche proche de la new age, dans laquelle la méditation prend une place capitale : "Je ne prétends pas "représenter l'expérience humaine, ce qui m'intéresse, c'est plutôt de créer une expérience, de surprendre et de susciter un questionnement chez le spectateur. À propos de notre place dans l'univers par exemple."
Très sensible à l’astrophysique, Cyrielle Gulacsy parle facilement d’espace-temps, de relativité générale, de mécanique quantique, de gravité ou de... galaxies. Cette source d’inspiration, ajoute-t-elle, a été déclenchée par la lecture de l’ouvrage de Stephen Hawking, Une brève Histoire du Temps. Elle s’immerge dans l’univers, un univers qui peut être tour à tour interprété (Pareidolia), fantasmé (The Big Crush) ou alors prosaïque et d’un hyperréalisme bluffant (Parachute, Satellite Elektron 1 – 1964) : "Il y a un lien évident entre le cosmos et l'esprit et c'est un parallèle que je veux explorer," précise-elle. L’artiste prépare prochainement une série sur les moteurs d'avion et les pièces de fusées.
De véritables "Variations Goldberg de l’amour"
Cyrielle Gulacsy serait-elle une artiste perchée et obnubilée uniquement par l’infiniment grand, les phénomènes corpusculaires ou la dualité onde-particule ? Non. Celle qui a fait du point une technique lui permettant, comme le dit elle-même, de "[s’]isoler et de prendre [son] temps en retour," est bien une véritable héritière de la pop culture, mais une pop culture qui serait mixée avec le street art (l’artiste cite volontiers l’Argentin Felipe Pantone), l’art moderne européen (le pointillisme de Georges Seurat, Paul Signac, Camille et Lucien Pissarro mais aussi les monochromes à la Yves Klein dans sa série Visible Light) ou encore le geek art nourri de surréalisme (The Big Crush).
Dans une série consacrée aux nus (00100001), Cyrielle Gulacsy choisit le petit format et toujours la technique du point pour capter des sujets surpris dans leur intimité. Elle s’attache à représenter des gros plans sur des seins, des fesses, des bouches ou des dos masculins. Ces dessins érotiques – de véritables Variations Goldberg de l’amour – déclinent la nudité, les étreintes et les corps avec naïveté, humour et parfois effronterie. La composition et le graphisme ne sont pas sans rappeler les peintures tout en courbes d’une Tamara de Lempicka, voire d'un Fernando Bottero. Les corps se montrent en toute innocence dans des scènes de bronzages ou de bains de mer, en Californie, sur la Côte d’Azur, ou ailleurs. Il y a quelque chose d’attendrissant à découvrir les sujets de ces dessins en noir et blanc : des traces de bronzage de mains sur une poitrine, deux pieds reposant sous une paire de fesses, des gestes aux forts pouvoirs érotiques (étreintes, caresses, baisers, bouches extatiques) mais captés avec une retenue élégante, comme pour ne pas déranger.
Dans sa dernière grande série, Visible Light, celle-là même qui est exposée à la Show Gallery de Los Angeles, la couleur fait une entrée fracassante dans l’œuvre de Cyrielle Gulacsy. L’artiste choisit cette fois de s’attaquer, vie des quasi monochromes, aux ciels et aux transformations de la lumière à certaines heures du jour : "J'ai commencé à étudier le spectre solaire, comment la lumière change au cours de la journée en fonction de son interaction avec l'atmosphère." Derrière des titres secs (20:19, 18:24 ou 07:49), les derniers travaux de Cyrielle Gulacsy parviennent à captiver, comme si le spectateur contemplait le ciel californien un matin d’été. Les points se parent de mille feux pour offrir de véritables galaxies de couleurs.
C’est à voir en ce moment à la Show Gallery de Los Angeles jusqu’au 18 octobre.
Il faut lire la préface de 100 Artistes du Street Art, signée par Paul Ardenne ("Street Art, la rue est à nous !") pour comprend l’importance et la spécificité du street art, un mouvement mal aimé, dénigré et moqué : ses pourfendeurs l’accusent d’avoir fait du saccage urbain un moyen d’expression underground. Le dernier exemple en date étant le procès intenté par la SNCF contre l'auteur de Monsieur Chat.
Voilà qui est sévère, et Paul Ardenne n’écarte pas ce discours critique d’un revers de main. Plutôt que de dresser un tableau chronologique de cet art de la rue, le maître de conférences en histoire de l’art à l’université d’Amiens, et aussi collaborateur pour les revues Art Press et Archistorm, se fait analyste précis et pertinent du street art. Il esquisse les origines d’un mouvement culturel foisonnant, de ses courants hétéroclites, de quelques figures majeures comme des problématiques culturelles, sociales, politiques ou juridiques d’un art engagé et, au départ, clandestin : "L’art de la rue stricto sensu, ce sont (…) toutes les formes d’expressions qui se moulent dans le tissu urbain et au contact direct du spectateur."
Art intrusif, urbain (la plupart du temps, en tout cas), gratuit, entaché d’une réputation subversive, le street art est indéniablement entré dans une période de légitimité : un certain nombre d’artistes issus de cette mouvance voient de prestigieux musées publics ou privés leur ouvrir leurs portes.
Quelles sont les origines du street art ? Né en Occident dans les années 60 (les artistes ont pour pseudonymes Cool Earl, Julio204, Phase2, Eva62 ou Flint 707), cette forme de création est en réalité bien plus ancienne. Paul Ardenne rappelle que les premières formes d’expressions artistiques étaient les grattages de surfaces ou les marquages à l’encre naturelle de surfaces rupestres durant le paléolithique. Le street art serait donc un mouvement culturel aussi vieux que l’homme, même si les bombes aérosols mises sur le marché dans les années 60 ont remplacé les empreintes de mains ou les reproductions de buffles à Lascaux ou Chauvet.
Dans la deuxième moitié du XXe siècle, l’affirmation et le développement du street art, aussi critiqué soit-il (ou parce qu’il est critiqué et subversif ?) est spectaculaire. Il prend son essor dans les villes de la côte est des États-Unis avant de s’étendre en quelques années aux autres grandes cités occidentales, avec d’autant plus de vigueur que se propagent les grandes crises planétaires, pétrolières, économiques, sociales ou écologiques.
À ses débuts, rappelle Paul Ardenne, l’expression graphique de ces artistes d’un nouveau genre est avant tout narcissique : le graffeur est dans une course à la visibilité. En taggant son blaze, lui - ou sa bande (le crew) - entend s’approprier en son nom propre l’espace urbain, jusqu’au recouvrement ("pourrissement") de l’espace public (Seen).
Loin d’être le désœuvré dont on voudrait l’affubler, l’artiste de rue serait avant tout cet activiste utilisant la transgression pour faire de la rue un musée à ciel ouvert (une TAZ, ou Temporary Authonomy Zone), voire un lieu de vie où se mêlent musiques, danses, performances… en toute illégalité (5 Pointz, au Queens, New York).
Cette illégalité, voire le vandalisme, n’est pas caché par Paul Ardenne dans sa préface. Il en fait d’ailleurs une véritable problématique, la plupart de ces artistes de la rue ayant assumé d’emblée d’être marginalisés.
Art démocratique s’il en est, sans exigences académiques a priori (ce qui n’exclut pas les influences de brillants noms comme Jackson Pollock, Jean Dubuffet ou Cy Twombly), le street art a fait et fait toujours l’objet de tensions entre graffeurs et institutions publiques (Paul Ardenne cite justement le cas des pisadores à São Paulo). Pour autant, l’intégration, pour ne pas dire l’adoubement, d’artistes de rues à de grandes institutions publiques – que ce soit Jean-Michel Basquiat, Ernest Pignon-Ernest ou JR – est presque aussi ancienne que cet art lui-même. Des espaces dédiés sont concédés par les autorités pour les graffeurs – souvent du reste pour les canaliser – alors que des grands musées proposent d’ouvrir leurs galeries à ces créateurs venus de la rue.
Le cœur de cet ouvrage paru aux éditions de la Martinière est la présentation de 100 artistes (ou groupes d’artistes) incontournables. Ils sont classés par ordre alphabétique, de "5 Pointz" à "Zoo Project" et se voient consacrés équitablement deux pages, une de texte, l’autre d’illustrations.
Grâce à ces 200 pages, le lecteur peut se faire une idée d’un mouvement sans frontières, hétéroclites et aux approches parfois diamétralement opposées.
Quelques noms connus ressortent : Bansky, Jean Faucheur, Keith Haring, Invaders, JR, Miss.Tic, Monsieur Chat, Ernest Pignon-Ernest ou Jean-Michel Basquiat (alias SAMO).
Les 100 portraits brossés laissent voir la diversité de parcours chez des artistes que l’on a souvent caricaturés comme des vandales détériorant l’espace public. En réalité, ces artistes, souvent cachés derrière d’obscurs pseudonymes, ou bien œuvrant dans des collectifs plus ou moins influents, peuvent être d’authentiques avant-gardistes, prouvant que le street art ne doit pas se limiter à ces tags tracés en catimini sur des wagons abandonnés ou à des façades défigurés par des blazes.
L’art urbain, nous disent les auteurs, Marie Maertens, Paul Ardenne et Thimothée Chaillou, peut être d’une très grande technicité et conceptuellement très élaboré, lorsqu’il ne renvoie pas à des influences artistiques reconnues : le land art (JR), le minimalisme (Slinkachu), l’art brut (Nunca), le folklore (Vitché) ou la vidéo (Videoman).
Finalement, la richesse du street art dépasse, et de beaucoup, le phénomène populaire des tags, qui font tout de même l’objet d’une double page. Les créations conceptuelles de l’art urbain sont d’une richesse qui n’a pas à pâlir de la comparaison avec d’autres courants ou artistes de l’art contemporain : les interventions de Cédric Bernadotte, les peintures à la bombe monumentales d’Ash, les travaux au pochoir pop art de Bleck le Rat, les graffes de Corn-Bread, les actions engagées des Déboulonneurs, les affiches sophistiquées de Diuf, les fresques d’El Mac, les portraits emblématiques de Barack Obama par Sheppard Fairey, les peintures pointillistes (à la bombe!) de Jean Faucheur, les détournements féministes des Guerilla Girls ou ceux de Zevs, les petits personnages reconnaissables entre tous de Keith Haring, les collages monumentaux de JR, les installations minutieuses à base de tessons de bouteilles d’Olivier Kosta-Théfaine ou l’univers iconique de Miss.Tic.
Citons aussi les détournements de panneaux routiers par le collectif roumain Monotremu, les intrusions urbaines de Monsieur Chat, les poupées mangas de Laidy Aiko, les tressages au scotch rouge de Louis Pavageau (alias Ligne Rouge), les personnages éthérés de Jérôme Mesnager, la performance spectaculaire d’Alexandre Orion dans les tunnels de São Paulo, les interventions d’Ernest Pignon-Ernest, les coulures de Quick, les phrases barrées en police Verdana de Rero, les créations complexes de SAMO (Jean-Michel Basquiat), les jeux de piste de Taki 183, les travaux au scotch de Tape Art ou les grattages monumentaux de Vhils et Zhang Dali.
Le guide ne met pas sous silence l’une des plus étonnantes réalisations du street art, l’Underbelly Project. Il s’agit d’une vaste exposition secrète dans les sous-sols de New-York. Une station de métro abandonnée a été confiée à des centaines d’artistes. Sorte de "Lascaux contemporain", l’Underbelly Project est destiné à être vu par les spectateurs… des siècles futurs : "Un acte de mémoire, comme un acte d’amour sans attente de retour", commente Paul Ardenne au sujet de ce projet spectaculaire et inédit.
Un monde underground est dévoilé dans ce livre rigoureux et de qualité. Au terme de la lecture de cet ouvrage collectif, le lecteur ne verra plus de la même manière les tags qu’il croisera au coin de la rue.
Marie Maertens, Thimothée Chaillou et Paul Ardenne, 100 Artistes du Street Art, éd. La Martinière, 2011, 236 p. "Qui veut la peau de Monsieur Chat ?"
Monsieur Chat est ce personnage devenu célèbre, un chat jaune aux yeux en forme d’amande et au large sourire espiègle, créé par l’artiste franco-suisse de street-art, Thoma Vuille. Monsieur Chat est devenu si familier pour des millions de citadins de Paris, New-York ou Tokyo que l’on peine à imaginer que cette icône puisse être attaquée.
C’est pourtant ce qui se passe en ce moment. La SNCF a en effet traîné en justice Thomas Vuille pour avoir dessiné Monsieur Chat sur des parois en travaux de la Gare du Nord. Le facétieux félin, figure emblématique de l’art de rue, pourrait valoir à son auteur trois mois de prison ferme, pour récidive, Thomas Vuille ayant déjà été, par le passé, condamné à des amendes pour des faits similaires. La vieille compagnie ferroviaire ne rigole pas avec la dégradation de ses biens, y compris pour de sordides panneaux en travaux, et ce même s’il s’agit d’œuvres d’arts éphémères par un artiste internationalement reconnu.
Quel que soit le verdict, attendu le 13 octobre 2016, pas sûr que la SNCF sorte grandie par ce procès d’un autre temps.
Le bloggeur reviendra plus longuement sur le street-art dans un article à paraître demain sur Bla Bla Blog.