Musique ••• Chanson ••• Eva Marchal, 88
Étrange affaire
L'âge d'or de la série télévisée que nous traversons – car il s'agit bien d'un âge d'or à l'échelle mondiale, alimenté essentiellement par de grandes chaînes américaines (HBO, Showtime pour l'essentiel) – nous offre régulièrement des créations originales tenant la dragée haute aux productions cinéma.
Prenez The Affair, dont la chaîne Canal+ diffuse en ce moment la première saison. Il est question dans cette série (dont je n'ai pu voir pour le moment que les premiers épisodes) d'une histoire d'adultère somme toute tristement banale et cruelle. Noah Solloway (interprété par Dominic West), professeur d'université new-yorkais et romancier coule une vie ordinaire avec sa femme et ses quatre enfants. Le spectateur découvre la vie trépidante et pas toujours drôle de cette famille bien installée : deux adolescents insupportables et cruels (une scène de "suicide" au début du premier épisode est digne de rester légendaire !), deux enfants en bas âge très – trop – envahissants, une femme sûre d'elle mais sans grande fantaisie (et un brin castratrice), un beau-père à l'autorité pesante. C'est d'ailleurs chez ce fameux beau-père riche et influent grâce à sa réussite dans le monde des livres et du cinéma, que toute cette petite famille se retrouve pour des vacances estivales, à Montauk. Dans cette station balnéaire, Noah fait la connaissance d'Alison Lockhart (Ruth Wilson), une jeune femme, mariée elle aussi. Cette simple serveuse tente de se relever d'un terrible deuil – la mort d'un enfant quelques années plus tôt. Le coup de foudre est annoncé entre ces deux personnes que tout semble opposé – un homme brillant à la réussite apparente et une femme modeste et brisée.
Voilà un pitch apparemment classique. Sauf que les partis pris plutôt audacieux des auteurs de cette série méritent que l’on s’intéresse à The Affair.
Tout d'abord, l'histoire de cette liaison est commentée par les deux protagonistes dans un commissariat de police, devant un inspecteur bienveillant. Le titre de cette série, comme d'ailleurs les dialogues en off, indiquent que ce dont il est question est une affaire – crime, accident ou suicide ? – dont le spectateur ignore tout, si ce n'est que Noah et Alison sont a priori interrogés en tant que témoins. L'autre parti pris, bien plus original, est de proposer dans chaque épisode deux versions des mêmes événements considérés du point de vue des deux protagonistes. Des versions sensiblement différentes, se jouant parfois sur des détails. Où est la vérité de cette étrange affaire ? Réponse à la fin de cette saison... ou pas.
Article publié précédemment le 3 novembre 2014