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  • Puis-je… vous parler d’Arvo Pärt ?

    Tabula Rosa est une composition par une figure imposante de la musique contemporaine, l’estonien Arvo Pärt avec sa musique mélodique, harmonique et aux influences religieuses (le compositeur revendique sa croyance et ses origines orthodoxes). "La musique d’Arvo Pärt nous conduit des ténèbres à la lumière… cette musique n’est pas seulement relaxante – elle véhicule drame et profondeur", dit d’ailleurs Renaud Capuçon, soliste et chef d'orchestre de cet opus.

    Le "Ludus" est un long cheminement de près de 11 minutes ponctué de sons de cloches, comme un chemin initiatique, avec des litanies et des leitmotivs se répétant, portés par le violon habité de Renaud Capuçon et un Orchestre de Chambre de Lausanne qu’il dirige.

    Les 3 dernières minutes ont cet aspect sombre pour ne pas dire funeste Un e sorte de mater dolorosa, rappelant l’importance de la musique sacrée dans l’œuvre d’Arvo Pärt. Jusqu’à s’éteindre dans une profonde gravité

    D’autres œuvres de Pärt composent l’album de Renaud Capuçon. Il y a Fratres, présenté ici dans une version pour orchestre et violon. Dès l’ouverture, Arvo Pärt se distingue par une exubérance et une fantaisie peu habituelle, avant d’aller vers un halo inquiétant où lumières et ténèbres semblent se jauger. Une dialectique musicale a lieu dans ce morceau passionnant, tout autant qu’il séduit par son harmonie et sa puissance symphonique. L’auditeur pourra voir derrière ce morceau d’un peu plus de 10 minutes un chant humaniste pour tous nos frères et sœurs humains.  

    Summa, un titre plus lumineux et apaisé, est servi par un orchestre majestueux dans un morceau symphonique célébrant la magnificence et la dignité. 

    Idéal pour entrer dans le répertoire contemporain

    Silouan’s song est un bouleversant chant aux silences et pauses éloquents. L’orchestre de chambre entonne un chant pathétique avec une ligne mélodique qui n’est pas sans renvoyer à la Symphonie n°3 de Henryk Górecki.

    Darf ich que l’on pourrait traduire par "Puis-je…" est l’un des morceaux les plus subtils et les plus minimalistes de l’album. Il peut s’écouter comme une délicate attention amoureuse, faite sur la pointe des pieds, mais non sans les sombres échos du violon magnétique de Renaud Capuçon.

    Spiegel im Spiegel, énigmatique par essence ("Expliquer j’explique"), séduit par sa mélancolie et sa facture instrumentale (violon et piano). Ce titre peut s’écouter comme une lente déambulation.  Renaud Capuçon fait taire l’orchestre symphonique pour une parenthèse plus intimiste, avec ces respirations rendant l’œuvre d’autant plus vivante.

    Für Lennart in memoriam conclut ce séduisant album, idéal pour entrer dans le répertoire contemporain, avec un morceau aux élans tout aussi pathétiques que le "Silouan’s song". L’Orchestre de Chambre de Lausanne ponctue les envolées de cordes de retenues et de pauses. Il est vrai que, là encore, pour reprendre une célèbre citation de Sacha Guitry sur Mozart, "Le silence qui suit Arvo Pärt c’est encore du Arvo Pärt". Et Renaud Capuçon, justement, vient rendre un hommage appuyé au compositeur estonien avec cet album qui fera certainement date. 

    Arvo Pärt, Tabula Rasa, Orchestre de Chambre de Lausanne, Renaud Capuçon, Warner Classics, 2021
    https://www.arvopart.ee/en
    https://www.renaudcapucon.com/fr
    https://www.ocl.ch
    https://www.warnerclassics.com/fr/release/part-tabula-rasa-capucon

    Voir aussi : "No Dames, no drames"
    "Histoires de tangos par Lucienne Renaudin Vary"

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  • Histoires de tangos par Lucienne Renaudin Vary

    Dans la sphère classique, c’est la trompette qu’a choisie Lucienne Renaudin Vary. Un instrument moins courant que le piano, le violon ou le violoncelle dans le répertoire solo mais qui porte chance à la jeune musicienne. Ses tournées dans le monde entier lui permettent de faire découvrir un répertoire moins connu mais passionnant, grâce à un instrument au timbre coloré et éclatant.

    Pour Piazzolla Stories, son dernier album, Lucienne Renaudin Vary rend un hommage appuyé au compositeur argentin qui a su non seulement dépoussiéré le tango mais a surtout su lui donner ses lettres de noblesse. Cette année, le compositeur aurait eu 100 ans. La musicienne donne à ces morceaux choisis une lecture pleine de relief et de sensualité, à l’exemple de "Chin Chin" et d’"Oblivion", autant jazz que tango. Lucienne Renaudin Vary sait transporter l’auditeur dans des paysages lointains, évidemment d’abord du côté la pampa.

    À côté de morceaux de tango mélancoliques et nostalgiques ("Chau Paris", "Ave Maria"Tanti anni prima" ou encore "Chiquilín de Bachín", avec Thibaut Garcia à la guitare), Piazzolla apparaît comme un authentique compositeur classique : celui par exemple de María de Buenos Aires. La musicienne française propose un extrait éponyme de son opéra sur un livret d’Horacio Ferrer. Accompagnée par l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo dirigé par Sascha Goetzel, la trompettiste déploie 12 minutes d’un air lyrique et enlevé comme une comédie musicale. 

    Éclectisme

    Il faut aussi absolument évoquer le superbe "Tango pour Claude", l’adaptation majestueuse et bouleversante par Richard Galliano de "Vie violence" qu’il avait composé pour le regretté Claude Nougaro.

    Il est également question de jazz avec les titres "Years of Solitude" et "Close Your Eyes and Listen". Ces fusions étonnantes et passionnantes de tango et de jazz cool sont adaptés de l’album Summit (1974) d’Astor Piazzolla et du jazzman et saxophoniste Gerry Mulligan.

    Lucienne Renaudin Vary fait également une incursion dans l’univers classique qu’elle connaît bien avec le célèbre Caprice n°24 de Nicccolo Paganini et la Sonate n° 1 en sol mineur BWV 1001 de Bach, adaptée pour l’occasion à la trompette. Toujours férue éclectisme, l'instrumentiste s’attaque également à Nadia Boulanger et à son "Lux aeterna", un cantique de 1909, dans une version solo.

    Les fans de tango ne seront pas surpris par le dernier morceau de l’album, qui est un standard incontournable du tango : le "Volver" de Carlos Gardel. Il ne pouvait en être autrement.

    Lucienne Renaudin Vary, Piazzolla Stories, Warner Classics, 2021
    https://www.facebook.com/luciennetrumpet
    https://www.warnerclassics.com/fr/artist/lucienne-renaudin-vary

    Voir aussi : "En suivant le fil de Khatia Buniatishvili"

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  • Hollywood interdit

    La rétrospective que propose le Festival Lumière en collaboration avec la Warner couvre une période très courte dans l’histoire du cinéma : de 1929 à 1934, alors qu’une crise économique sans précédent balaye les États-Unis, quelques créateurs et créatrices d’Hollywood jouissent d’une liberté de ton sans précédent, et vont s’en servir au service de films subversifs, scandaleux, glamours, révolutionnaires ou à l’esthétique nouveau.

    Au début des années trente, les ligues de vertu ne dominent pas encore les commissions de censure et le Code Hays ne s’est pas encore imposé. Hollywood va profiter de ce vent de liberté inédit.

    Ces artistes, réalisateurs, actrices ou acteurs se nomment Barbara Stanwyck, Jean Harlow, Loretta Young, Clark Gable, John Wayne, Lionel Barrymore, Clarence Brown, William Wellman, Roy Del Ruth ou Michael Curtiz. En cinq ans ils vont offrir au cinéma mondial quelques bijoux, le plus souvent oubliés, et que le Festival Lumière et la Warner proposent depuis le 1er juillet, grâce à une rétrospective, visible en salle tout l’été.

    Le public va pouvoir redécouvrir ces dix films méconnus, pour ne pas dire oubliés :

    Âmes libres de Clarence Brown, avec Norma Shearer, Leslie Howard, Lionel Barrymore et Clark Gable (1931)
    La fille d’un avocat tombe amoureuse d’un élégant gangster que son père a défendu avec succès… Un film noir avec les remarquables Lionel Barrymore (Oscar du meilleur acteur), Clark Gable et Norma Shearer.

    L’Ange blanc de William A. Wellman, avec Barbara Stanwyck, Ben Lyon, Joan Blondell et Clark Gable (1931)
    Une infirmière tout juste diplômée (Barbara Stanwyck) découvre qu’un praticien laisse mourir les enfants de la famille où elle travaille pour toucher un héritage… Un magnifique portrait de femme et brûlot sur l’institution hospitalière.

    Blonde Crazy de Roy Del Ruth, avec Norma Shearer, Leslie Howard, Lionel Barrymore et Clark Gable (1931)
    Bert et Ann travaillent dans le même hôtel, et deviennent vite un duo d’inséparables arnaqueurs… Un film de hors-la-loi à l’intrigue audacieuse et la mise en scène libre et belle.

    Jewel Robbery de William Dieterle, avec William Powell, Kay Francis, Helen Vinson, Hardie Albright et Alan Mowbray (1932)
    Vienne. Une baronne adultère s’éprend d’un élégant voleur durant le braquage d’une bijouterie… Une brillante comédie cynique mêlant haute société, cambriolage et séduction, avec William Powell et Kay Francis, éblouissants.

    La Belle de Saïgon de Victor Fleming, avec Clark Gable, Jean Harlow, Gene Raymond, Mary Astor, et Donald Crisp (1932)
    En Indochine, le triangle amoureux entre le directeur d’une plantation, l’épouse de son ami et une aimable prostituée au charme magnétique… Un grand drame érotique avec Clark Gable et Jean Harlow.

    La Femme aux cheveux rouges de Jack Conway, avec Jean Harlow, Chester Morris et Lewis Stone (1932)
    Une femme ambitieuse séduit son patron marié pour s’élever, par tous les moyens, dans la hiérarchie de la Compagnie Legendre… Un des films les plus subversifs de l’ère pré-Code, noir, incisif et comique, avec la mythique Jean Harlow.

    Employees’ Entrance de Roy Del Ruth, avec Warren William, Loretta Young et Wallace Ford (1933)
    New York. Un directeur de grand magasin tyrannique et abusif engage Madeline en échange d’une nuit avec elle… Un film impertinent sur le capitalisme triomphant, entre dénonciation et humour.

    The Mind Reader de Roy Del Ruth, avec Warren William, Constance Cummings et Allen Jenkins (1933)
    Chandra, un escroc passant pour un guérisseur aux produits miraculeux, parcourt les foires du pays avec son complice… Une comédie et romance mordante, portrait d’une Amérique en pleine Grande Dépression.

    Baby Face d’Alfred E. Green, avec Barbara Stanwyck, George Brent, Donald Cook, Alphonse Ethier, Henry Kolker et Margaret Lindsay (1933)
    Ignoblement prostituée par son père, Lily Powers (Barbara Stanwyck) part à New York. Elle gravit les échelons d’une banque, utilisant les hommes comme marchepied… Un très grand film provocateur, qui choqua l’Amérique.

    Female de Michael Curtiz, avec Ruth Chatterton, George Brent, Lois Wilson, Johnny Mack Brown et Ruth Donnelly (1933)
    Alison Drake dirige fermement l’entreprise héritée de son père. Elle s’éprend d’un inconnu, qui s’avère avoir pour mission de sauver son entreprise en faillite… Un film étonnant dont la liberté de ton laisse poindre une critique du capitalisme.

    Une rétrospective avec le soutien de l'Association Française des Cinémas d'Art et d'Essai (AFCAE), de l'Agence pour le Développement Régional du Cinéma (ADRC) et du Centre National du Cinéma et de l'image animée (CNC). 

    Rétrospective "Forbidden Hollywood"
    Proposée par Warner et le Festival Lumière à Lyon
    http://www.festival-lumiere.org
    https://www.warnerbros.fr

    Voir aussi : "Le paradis d'Hollywood"

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