En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.
Derrière Raphaël Zaoui se cache l’un des deux fondateurs du groupe mythique des années 2010, Therapie Taxi, dissous en octobre 2021 au grand désespoir de ses fans. On ne trouvera cependant pas dans Le Dernier sur la piste (éd. HarperCollins) l’histoire du groupe pop le plus singulier et le plus remuant de ces 20 dernières années. Même s'il l'évoque, Zaoui ne cite cependant pas le nom de son acolyte Adé (Adélaïde Chabannes de Balsac), l’incroyable chanteuse des tubes Coma idyllique, PVP ou Été 90.
Ce dont il est finalement dans le roman de Raphaël Zaoui, en réalité le récit d’un artiste au talent dingue, c’est l’histoire d’un homme tentant de construire sa vie au milieu des affres et des affreux de la création. Tout commence à Paris lorsque le modeste musicien vit de galère en galère jusqu'à sa rencontre avec celle qui deviendra Adé, les deux propulsant leur nouveau groupe à des hauteurs rarement vues.
Zaoui allonge ses mots sur plus de 200 pages afin de se laisser aller à ce qui ressemble à une thérapie, entre désir d'accomplir son destin d'artiste, ivresse du succès, interrogations sur sa vie privée et le décès brutal de sa mère.
Des pages aussi crues, vibrantes et sincères que les titres de Therapie Taxi
Raphaël Zaoui n’a pas choisi la facilité ni le compromis pour son premier livre. Rien d’étonnant pour un musicien à l’origine des titres les plus pop et les plus acides de ces dernières années. L’artiste aurait-il trouvé la potion magique, entre composition musicales raffinées et textes cash ? Sans doute, écrit-il, mais là n’est pas l’essentiel.
Disons-le, les fans de Therapie Taxi se précipiteront sur les confessions du cofondateur du groupe. Mais ils trouveront surtout confidences sur son parcours, les galères des débuts puis le succès incroyable. La suite ? Des concerts, des abus – drogue, sexe et une odeur de perdition – et l’amour surgissant comme par magie.
Le Dernier sur la piste se lit d’une traite, à la rencontre d’un musicien qui ne cache (presque) rien, du deuil de sa mère à l’amour pour son fils, en passant par une séparation aussi cruelle que bienvenue. Tout cela donne des pages aussi crues, vibrantes et sincères que les titres de Therapie Taxi. Les fans du groupe se précipiteront sur ce livre cash et passionnant.
On est heureux de retrouver le duo Kaori après trois ans d’absence. Ils débarquent cette fin d’année avec leur troisième opus, Dans l’attente d’un signe.
On les avait laissés avec leur lumineux album À Ciel ouvert. Les guitaristes proposent avec cette nouvelle publication un savant mélange de chansons françaises (Rue Marquet), de blues (Tu donneras ton chèque), de sons jazzy (le magnétique instrumental Un soir à Yaouhé) et de rythmes venus d’ailleurs (Femme, ô femme).
Il y a pourtant un je ne sais quoi de nostalgie et de mélancolie, à l’instar du titre qui donne son nom à l’album ("Envolée l’illusion / Enfouis les faux-semblants, / Sous les sables du temps, / Nos semelles de plomb / Nous collent à la terre / Retiennent nos prières"). Sans propos virulents, presque avec douceur, le groupe Kaori chante la fuite du temps, les rêves enfuis, sans pour autant appeler à baisser les bras ("Cueille au creux de ta main / Tes songes les plus clairs / Laisse-les flotter dans l’air", Dans l’attente d’un signe).
Oui, les musiciens ont beau parler et chanter comme deux sages remplis d’expériences (La parole des vieux), ils laissent la porte ouverte aux belles âmes humaines, à la générosité et à l’amitié – ils en savent quelque chose (Les chemins de la vie).
Belles âmes humaines
L’amour a aussi sa place dans ce bel album qui sait si bien réchauffer les cœurs en cette saison morne à tout point de vue. C’est la jolie déclaration d’amour et le singulier hommage féministe qu’est le jazzy Femme, ô femme. N’oublions pas non plus cet appel au carpe diem et à la jouissance sans entrave (Forçat de plaisir). C’est aussi Ma belle Ilienne qui nous transporte, y compris dans les sons, du côté de la Nouvelle-Calédonie dont sont originaires les deux musiciens. Une nostalgie pour la Nouvelle Calédonie exprimée encore dans Le ciel de mes rêves : "Je veux tant / Vivre aux îles où si peu est important, / Dans l’éternel été". On les comprend.
Le Kanak Alexis Diawari et le descendant de bagnard Thierry Folcher proposent là un exemple d’album généreux (le joli morceau mêlant blues et sons traditionnels, Se tendre la main) et proposant un message humaniste en faveur du dialogue, des mélanges, de l’optimisme envers et contre tous, bref de la liberté ("Je suis un homme libre : / Mon seul maître est le vent, / Je ne pense qu’à vivre / Et oublier le temps / Si tu crois qu’par esprit de lucre / J’vais faire le beau pour un su-sucre / … Tu peux garder ton chèque !", Tu donneras ton chèque).
On sort de cet album en passant par la Rue Marquet, jazzy à souhait. Bonne humeur et sourires assurés par un groupe qui a fait le choix de la vie.
Kaori sera en concert le jeudi 14 novembre au Sunset à Paris.
Un compositeur et une compositrice ont été choisis par le pianiste Louis-Victor Bak pour son nouvel album solo, sobrement intitulé Œuvres pour piano. Le premier est Claude Debussy, avec le cycle Images, en deux livres et composé en 1905. Louis-Victor Bak s’aventure sur une œuvre très représentative de Debussy, le compositeur qui a su le mieux mettre en musique l’impressionnisme.
Pas d’esbroufe chez Bak mais un jeu tout en transparence (Reflets sur l’eau) et en délicatesse, même pour les moments plus sombres (le renversant Hommage à Rameau). L’auditeur sera tout autant séduit par les attaques du pianiste sur Mouvement, la troisième partie du Livre 1 d’Images dont la modernité frappe immédiatement aux oreilles.
Le Livre 2 d'Images commence par une page de naturalisme, devenant onirisme sous les doigts du pianiste (Cloches à travers les feuilles, ou les fuyants et joueurs Poissons d’or). Impossible de ne pas s’arrêter sur ces moments où l’écoute devient méditation (Et la lune descend sur le temple qui fut). Il y a du zen dans ces Images au fort parfum exotique qui rend ce Debussy si intemporel et si universel.
En cette période de découverte de grandes compositrices oubliées, Louis-Victor Bak apporte sa pierre à l’édifice
L’autre artiste à l’honneur est une quasi inconnue que Louis-Victor Bak entend réhabiliter. Pour autant, de son vivant, la compositrice et interprète Cécile Chaminade (1857-1944) était une célébrité mondialement connue. À l’égal de Debussy, elle a fait connaître le répertoire français jusqu’aux États-Unis. La Sonate pour piano en do mineur, op. 21, est représentative de son style classique et post-romantique. L’Allegro appassionato lorgne autant du côté de Bach que de Chopin ou des grands romantiques du XIXe, alliant fougue et virtuosité. En cette période de découverte de grandes compositrices oubliées, Louis-Victor Bak apporte sa pierre à l’édifice.
Là où Debussy faisait entrer doucement mais sûrement la musique française vers le modernisme, Cécile Chaminade nous renvoie vers la grande tradition classique. L’auditeur s’arrêtera sans doute avec un grand plaisir sur le joyau à la fois tendre et mélancolique qu’est l’Andante de la sonate pour piano. Les doigts de Bak glissent onctueusement, avec une passion poignante, telle une déclaration d’amour... enveloppée dans une marche funèbre. Rien à voir avec le court et vibrant Allegro, demandant au pianiste une virtuosité et une technique imparables.
L’album se termine par une dernière pièce de Cécile Chaminade, un Impromptu tiré de ses Six Études de concert opus 35. Nous voilà de nouveau dans le courant post-romantique, délicat et sans ostentation. Une autre belle découverte par un pianiste qui a intelligemment fait le parti d’un programme alliant des classiques d’un artiste archi-joué et d’une compositrice gagnant à être découverte.
Sacrée gageure que Toccare, l'album imaginé par la pianiste sino-canadienne Claudia Chan. Il est vrai que la musicienne est reconnue comme une spécialiste mondiale dans la création contemporaine. Pour cet enregistrement public au Bad Godesberg de Bonn et proposé aujourd’hui en disque par les éditions b.records, elle s’attaque au répertoire italien.
Au menu, Gian Francesco Malpiero (1882-1973), le doyen, Sylvano Bussotti (1931-2021), Salvatore Sciarrino (né en 1947), Giulia Lorruso (née en 1990), Simone Cardini et Francesco Fildei (né en 1973), ce dernier étant présent dans plusieurs créations.
La musique contemporaine est un univers fascinant et aux multiples dimensions, ce que montre bien ce passionnant opus, intelligemment nommé Toccare – "Toccare", comme "toucher" en italien, celui précisément d’une interprète archi-douée, envoûtante, curieuse et à la virtuosité indispensable pour aborder ces pièces singulières et bien différentes les unes des autres.
Dans le livret de présentation, à la conception originale, soignée et si caractéristique chez b.records, Claudia Chan souligne la singularité du premier compositeur de son programme, Gian Francesco Malpiero, influencé autant par la Renaissance que par la musique du début du XXe siècle : "Il est difficile à situer historiquement lorsqu’on l’entend", précise-t-elle dans son interview. L’auditeur ne sera pourtant pas totalement perdu dans les deux mouvements de Bianchi e neri (1964), alliant légèreté, gravité (Lento, non troppo) et sombres présages (en particulier le Non troppo lento).
Parlons ensuite de la deuxième Sonate pour piano de Salvatore Sciarrino datant de 1983, "une des pièces les plus difficiles que j’ai jamais jouées", confie la pianiste. Il est vrai que la technicité et la virtuosité sont indispensables pour venir à bout de cet opus de plus de neuf minutes (et un seul mouvement). Nous voilà sans au cœur d’une musique contemporaine défiant la tonalité et le rythme, près à décontenancer grâce à ses décrochages incessants et ses vagues s’étirant dans une confusion qui n’est qu’apparente.
Une audace sonore que Claudia Chan assume avec cran
Après un passage par Sylvano Bussotti et sa pièce Musica per amici, très influencée par "les traditions sérielles austro-germaniques", Claudia Chan s’attaque au cœur de son programme, à savoir Francesco Fildei, présent dans trois œuvres, un Preludio (1999), une Suite en trois mouvements et une création de 2023 dédiée à la pianiste, naturellement intitulée For Claudia. Disons tout de suite que l’auditeur sera déconcerté par l’utilisation singulière des sons du piano, transformé pour l’occasion en instrument de percussion. Les sonorités inédites font du Preludio un vibrant hommage à cette musique contemporaine revigorée après 1945 grâce à des compositeurs comme John Cage. Pour Suite (1997), jamais sans doute personne n’a composé de Toccata ou de Notturno avec une telle liberté, en se démarquant complètement du jeu pianistique.
Oubliez Bach, Chopin ou Fauré. Ce qui se joue ici est une certaine notion de la liberté et de la création pure que la pianiste juge unique dans le monde. Voilà qui donne la mesure de cette audace sonore que Claudia Chan assume avec cran. La Suite se termine avec le tout aussi étonnant Garibaldi’s little rock, dans lequel quelques notes de clavier résonnent, bousculés par les chuintements et percussions… de piano. Pour terminer sur Francesco Filidei, le For Claudia, composé pour la pianiste, obéit à la même grammaire, avec une liberté poussant l’interprète jusqu’à ses derniers retranchements, ce que Claudia Chan assume là encore non sans enthousiasme.
L’auditeur ne sera sans doute pas insensible à la benjamine de cet enregistrement, à savoir la compositrice Giulia Lorusso. Avec la fascinante pièce Kemò-vad, créée en 2021, elle nous entraîne dans un voyage musical zen et orientalisant. Claudia Chan caresse littéralement les touches de son piano avec une économie de moyens, au point que le silence est roi dans cette méditation sonore.
Simone Cardini vient compléter ce programme italien. Sa composition de 2020, Restare non ha luogo, un long mouvement fait de pauses, de saccades interrogatives et de touches pianistiques tour à tour inquiétantes et mystérieuses, prouve là encore la vitalité de jeunes compositeurs transalpins. Claudia Chan les chouchoute avec amour et en leur donnant une visibilité – et une audition – unique. Grazie mille, Claudia !
La puissance, l'âpreté et l’ambition caractérisent dès les premières notes cet opéra oublié de Camille Erlanger, La Sorcière, drame composé en 1919. Sur un livret d’André Sardou, d’après une pièce de son père Victorien Sardou, La Sorcière avait déjà connu une première vie au théâtre grâce à Sarah Bernhardt qui incarna avec succès le rôle-titre en 1903. La Sorcière version opéra est proposée cet automne par b.records, avec un riche coffret de présentation, notamment un guide d’écoute bien documenté.
Disons tout de suite que cet opéra rarissime séduit à la fois par son classicisme, ses lignes mélodiques, son discours humaniste mais aussi sa fureur. Nous sommes ici dans une facture vériste qui a beaucoup séduit le public mélomane du début du XXe siècle. Avoir ressorti cet opéra tombé complètement dans l’oubli est bienvenu, tant la figure de la sorcière a perdu son souffre pour devenir l’incarnation de la femme libre et persécutée. Voilà qui fait de ce théâtre chanté une œuvre particulièrement d’actualité.
La sorcière Zoraya est au cœur d’un récit où se mêlent le mystère, la superstition, la magie, l’amour, la séduction, la jalousie et finalement la mort, sur fond d’Inquisition dans l’Espagne catholique du début du XVIe siècle. Dans cet opéra représenté en 1912 à l’Opéra-Comique, non sans un franc succès, il faut voir et écouter La Sorcière comme un étrange clin d’œil. Voilà une œuvre qui s’attache à parler de l’amour entre un chrétien et une musulmane, un message d’amour, de tolérance et de paix écrit par un compositeur… juif – et ce, deux années avant le déclenchement de la première guerre mondiale.
L’histoire prend comme ligne conductrice celle de l’obscurantisme religieux autour d’une figure devenue hyper moderne, celle de la sorcière, incarnée par Zoraya. Elle est connue pour sa grâce, sa beauté fatale mais aussi sa bonté et sa douceur naturelle. La sorcière musulmane est incarnée par l’impressionnante Andreea Soare à la présence magnétique, portant à bout d’un bras un opéra incroyable de puissance. Enrique (Jean-François Borras), chef des archers de Tolède, croise Zoraya. Il en tombe amoureux (ce qui est l’occasion d’une brûlante déclaration dans la scène 2 de l’acte II). C’est le début d’un sombre engrenage qui mène tout ce beau monde vers les turpitudes de la tristement célèbre Inquisition espagnole et vers un sinistre bûcher.
La musique se fait implacable et les voix masculines semblent écraser de leur puissance l’une des principales victimes
Nous voilà dans un drame amoureux des plus traditionnels : mariage arrangé contre passion amoureuse, rejet de la société, brutalité du pouvoir. Cette fois, à l’instar de Tosca ou de Carmen, une autre héroïne espagnole, c’est une femme indépendante qui se bat pour sa liberté et pour l’homme qu’elle aime (scène 2 de l’acte III), même si c’est le prix est une autre femme – Joana, promise à Enrique. Intrigue amoureuse inextricable.
L’auditeur se laissera sans aucun doute séduire par les tensions mélodiques dont l’amateur d’opéra durant la Belle Époque était particulièrement sensible. À ce sujet, on trouvera dans le coffret de La Sorcière un texte éclairant sur les évolutions de l’opéra à la fin du XIXe et au début du XXe siècle, avec l’influence de Wagner. Michele Niccolai parle d’un profond renouvellement en France de ce que l’on peut nommer le "théâtre musical" : leitmotiv, naturalisme lyrique, mélange de tradition ancienne et de modernité. La virtuosité vocale n’est pas recherchée ici mais plutôt la mise en musique des émotions, lorsque par exemple Zoraya tente de convaincre Enrique de fuir avec elle en Afrique, à l’insu de Joana (scène 2 de l’acte II).
L’auditeur contemporain sera sans doute frappé par les deux derniers tableaux qui renvoient à d’autres scènes, celles du roman italien Le Nom de la Rose, à ceci près que nous sommes devant un tribunal de l’Inquisition espagnole du XVIe siècle. Obscurantisme religieux, justice expéditive et tortures judiciaires font face aux passions humaines, à l’amour, à la folie (la simple d’esprit Afrida) mais aussi à la terreur. La musique se fait implacable et les voix masculines semblent écraser de leur puissance l’une des principales victimes – à savoir la sorcière Zoraya. "L’amour est plus forte que la crainte", chante-t-elle lorsqu’on l’accuse d’envoûtements et de "rapports impurs avec Don Enrique".
Rarement une œuvre lyrique aura été aussi brutale (l’opéra date pourtant des premières années du XXe siècle). Il y a du Vérisme italien dans cette pièce au naturalisme puissant. Certaines critiques de l’époque ont comparé à juste titre le Grand Inquisiteur Ximénès avec le cruel Scarpia du Tosca de Puccini : "Ces aveux, la malheureuse ! / Sous la menace de vos tenailles !", chante la malheureuse Zoraya, une autre Tosca, femme forte et victime, acculée, désespérée et sidérée ("Non… c’est vrai… c’est vrai…"). "Nous la brûlerons après vêpres !" s’exclame, implacable, l’Inquisiteur dans un air de triomphe.
Le second tableau du dernier acte, plus court, est aussi celui qui a sans doute le plus marqué les esprits : un bûcher, un public venu assister à l’exécution d’une sorcière et une Zoraya plus passionnée d’amour qu’elle ne l’a jamais été. La tension est à son paroxysme dans cette dernière partie. Compositeur classique, Camille Erlanger n’en fait pas moins œuvre de modernité dans ces scènes à l’expressionnisme qui a dû marquer les spectateurs du début du XXe siècle. Les chanteurs et chanteuses semblent cernés par la densité de l’orchestre et des chœurs de la Haute École de Musique de Genève, tout comme Zoraya et Enrique sont écrasés par le destin cruel et inéluctable.
En ressortant La Sorcière d’Erlanger, b.records ressuscite un opéra passionnant et représentatif du courant musical français du début du XXe siècle, sur un sujet qui n’a jamais été aussi actuel. Féministe avant l’heure, osons le dire. Et impitoyable.
Grâce à des captations lumineuses, le pianiste français met à l’honneur un compositeur trop souvent restreint à son Requiem, certes magnifique. Les œuvres pour piano solo sont présentées en 4 CD par ordre chronologique de composition, un choix intelligent.
L’auditeur découvre ou redécouvre la virtuosité et la fraîcheur d’un maître en musique de chambre, avec d’abord sa rare Sonate en fa majeur n°5 mêlant classicisme mozartien (Allegro ma non troppo et Menuet) et romantisme très XIXe siècle (Final). Dans le livret, Laurent Wagschal cite Beethoven et Haydn. À l’époque, Gabriel Fauré a tout juste 18 ans.
Le premier CD offre un bel aperçu des œuvres de jeunesse du compositeur, très influencé par ses pairs, que ce soit Chopin (Mazurka N 8), Bach (Prélude et Fugue en mi mineur) ou Schubert (les Impromptus op. 25 et op. 31), avec cependant, déjà, un solide tempérament, à l’instar de l’imagée et virtuose Gavotte N 14. L’auditeur retrouvera tout l’esprit de la musique française de la fin du XIXe siècle, avec en particulier la délicate et irrésistible Romance n° 3 ou encore la Ballade op.19 exceptionnellement longue – près de 14 minutes, alors que la quasi-totalité de ses pièces ne dépasse pas 7 minutes.
Une première Barcarolle, celle en mi bémol majeur op 25, certes pas la plus connue, vient ponctuer le premier CD de l’Intégrale, balayant les années d’apprentissage et de jeunesse de Fauré qui parvient vite à imposer son style : romantisme tout en retenue, fluidité des compositions et fausse légèreté que l’on retrouve aussi bien dans le 2e Impromptu op.31 que la pathétique 1ère Nocturne op. 33.
Le style "faurien" s’épanouit dans le deuxième disque du coffret de cette intégrale mémorable. Nocturnes et Barcarolles se taillent la part du lion. Peu avare en virtuosité gratuite comme le souligne le livret de présentation, le compositeur français préfère la mesure, la subtilité, la finesse, sans sacrifier le sens de la mélodie ni la mélancolie affleurant à chaque note, à l’instar de la poignante 5e Nocturne op. 37. La deuxième Valse-Caprice en ré bémol majeur vient apporter de la fraîcheur toute romantique, mais non sans ombres tristes.
Qui dit Barcarolles dit Fauré. Le deuxième disque en propose trois, à savoir les 2e, 3e et 4e, respectivement op. 41, 42 et 44. Fauré excelle dans le sens de la mélodie comme dans ses compositions fluides, servies par les doigts gracieux de Laurent Wagschal mais aussi avec ce sens de la rondeur. L’auditeur ne pourra rester indifférent à sa poignante interprétation de la célèbre Pavane op. 50. Une vraie belle redécouverte.
Le compositeur français préfère la mesure, la subtilité, la finesse
Le troisième CD du coffret s’intéresse aux années fastes de Fauré. Dans ces années 1890, il est dans la plénitude de son art, reconnu comme musicien important et peut se consacrer à ses compositions plus librement, mais aussi à de prestigieuses responsabilités comme directeur du Conservatoire de Paris. Laurent Wagschal se penche sur sa 4e Valse-Caprice au piano en la bémol majeur op. 62. Derrière le romantisme, on sent aussi poindre la modernité dans cette pièce ambitieuse. Ce disque propose également des Nocturnes – dont l’ample n°6 et la sombre n°7 –, les magnétiques Barcarolles op. 66 et op. 70, mais aussi les Pièces brèves op. 84 et des Thèmes et Variations op. 73. Les 11 variations et son thème solennel frappent par leur concision (de 40 secondes à moins de 2 minutes) et par leur précision – pour ne pas dire efficacité. L’auditeur s’arrêtera sans doute avec émotion sur les VIIIe et IXe Variations toutes en délicatesse. Dans ce 3e CD, impossible de ne pas passer à côté de la transcription pour piano de deux moments de son opéra Pelléas et Mélisandre (Prélude, la fameuse Sicilienne et la lugubre Mort de Mélisandre). C’est un compositeur nourri par le Symbolisme qui s’exprime à travers ces trois mouvements où l’onirisme le dispute à la mélancolie. Amour, mort, nature et immortalité se fondent dans une œuvre incroyable. Le troisième album du coffret se termine par ses Huit Pièces brèves op. 84. Guère plus de deux minutes pour ces charmantes compositions au classicisme très musique française. Le sens de la mélodie est là. La délicatesse (Capriccio) et le romantisme aussi (Adagietto, Allégresse). On voit entend même le vénérable compositeur faire œuvre de jeunesse et de fantaisie (l’Improvisation à la fraîcheur intacte ou la bien nommée Fantaisie, justement). Il propose également un hommage à Bach dans deux fugues ressemblant autant à des exercices pour piano qu’à des… pastiches.
Le quatrième et dernier CD s’intéresse aux dernières compositions de Fauré alors que ce dernier, à l’instar de Beethoven, perd progressivement l’audition. Barcarolles et Nocturnes dominent cette dernière partie. Fauré s’y épanouit en majesté (7e Barcarolle op. 90), mais la modernité surgit aussi, ce qui vient contredire l’image d’un compositeur réduit à une musique française néo-classique – et pour certains vaguement ennuyeuse. Que l’on pense à cette Impromptu n°4 en ré bémol majeur op. 91, aux volutes rêveuses et mélancoliques ou à la 8e Barcarolle op. 96 à la fois virtuose et gaillarde dans sa jeunesse et que Laurent Wagschal vienne servir avec la même fraîcheur. Modernité aussi dans cette étonnante et joueuse 5e Impromptu op. 102 ou cette sinueuse 10e Barcarolle. C’est dans les Nocturnes que la mélancolie du vieux Maître transparaît le plus (9e 10e et 11e Nocturne) mais aussi dans la somptueuse 9e Barcarolle op. 101.
On a souligné la brièveté des pièces brèves de Gabriel Fauré. En voici un nouvel exemple avec ces Neuf Préludes op. 103, dont la plus longue dépasse tout juste les trois minutes. Laurent Wagschal propose un jeu tout en contrastes : raffinement et clarté debussyenne dans le Prélude n°1, fantaisie dans le n°2, élégance retenue dans le n°3 en sol mineur ou délicatesse mélodieuse dans la n°4. Dans ces Préludes, l’ombre de Bach ne pouvait pas être absente. On la retrouve dans la n°6 en mi bémol mineur. Fauré nous devient familier et proches grâce à ces Préludes aux mille accents, surprenant l’auditeur par leur variété et parfois leur fausse nonchalance (la 8e en ut mineur) ou au contraire leur touchante pudeur (la 9e en mi mineur qui vient clore ces Neuf Préludes).
Le coffret se termine sur des œuvres crépusculaires, singulièrement plus longues (12e et 13e Nocturnes). Ces Nocturnes et Barcarolles tardives sont celles d’un compositeur toujours inventif, ne tournant jamais le dos au modernisme.
Avec ce magnifique coffret, à offrir pour les fêtes, Laurent Wagschal offre un des plus beaux hommages à Gabriel Fauré dont nous fêtons cette année les 100 ans de la mort.
L’amoureux du jazz qu’était Claude Nougaro n’aurait pas craché sur ces revisites d’Yvan Cuijous et Louis Winsberg. Leur projet musical, 1 Voix, 6 Cordes, maintenant sur disque, c’est 10 chefs d’œuvre de Nougaro, du "Cinéma" à "Toulouse", en passant par "Armstrong", " À bout de souffle" ou "Cécile ma fille".
Pour cet album hommage, Yvan Cujious et Louis Winsberg se sont entourés de featurings prestigieux – et parfois locaux. Francis Cabrel vient chanter "Cécile ma fille", gardant la douceur et la tendresse de la version initiale. Thomas Dutronc rejoint Yvan Cujious et Louis Winsberg pour une jolie version colorée et jazzy d’"Armstrong". Anne Silla s’empare, quant à elle, de "Rimes", un titre moins connu du poète et chanteur toulousain. L’auditeur y découvrira une superbe œuvre que magnifie la voix veloutée de l'une de nos meilleures chanteuses du moment.
Les Toulousains Big Flo & Oli ne pouvaient pas être en reste
L’auditeur découvrira ou redécouvrira "La pluie fait des claquettes", visitée avec un joli naturalisme et avec presque rien : des cordes pincées et une rythmique jazzy, donnant du lustre et une nouvelle lecture de la version originale. "Dom Juan" fait, de son côté, le pari de l’humour et de la légèreté. "Pour "Le jazz et la java", c’est le nom de Django Reinhardt qui vient en tête. Yvan Cujious & Louis Winsberg reprennent avec émotion "Une petite fille", sans toutefois la même noirceur et le désespoir originels de Claude Nougaro. La virtuosité demandée pour ces revisites est évidente, à l’instar de la belle énergie de "À bout de souffle".
Les Toulousains Big Flo & Oli ne pouvaient pas être en reste et c’est bien évidemment le tube "Toulouse" que les deux rappeurs interprètent pour clore l’opus. Le duo n’abandonne pas leur style urbain et rap. Ils offrent à Nougaro une déclaration d’amour slammée résolument moderne et s'écartant beaucoup de la version connue. La mélodie de "Toulouse" est gardée mais le texte original est abandonné. Une autre manière de rendre hommage au Grand Claude.
Pour célébrer le double anniversaire de la Fnac, leader de l’équipement sonore, et de Yamaha, référence mondiale en matière de hi-fi, l’artiste pop-street internationalement reconnu JISBAR s’associe à ces deux icônes pour une collaboration unique. À cette occasion, Jisbar personnalisera à la main 70 platines Yamaha MusicCast VINYL 500, chaque pièce étant signée et numérotée, créant ainsi de véritables œuvres d’art fonctionnelles.
Ces 70 modèles personnalisés seront distribués exclusivement dans une dizaine de magasins Fnac en France et sur Fnac.com, permettant aux amateurs d’art et de musique d’acquérir une pièce unique. Le lancement des célébrations se fera à la Fnac Ternes à Paris, où une sélection de ces platines sera présentée lors d’un événement spécial.
L’artiste pop-street français Jisbar a présenté ses œuvres le 3 octobre 2024 au magasin Fnac Ternes lors d’une soirée de lancement. Cette soirée marque le début d’une exposition qui se tiendra tout au long du mois d’octobre, permettant au public de découvrir cette fusion innovante entre art et technologie.