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Séries et TV - Page 10

  • Phyllis et les féministes

    Cate Blanchett est méconnaissable dans son rôle de Mrs America, alias Phyllis Schlafly, cette mère de famille républicaine collet monté, partie en guerre contre un amendement constitutionnel pour l’égalité hommes-femmes, l’Equal Rights Amendment. Un paradoxe, mais cette série n’en est pas à un près.

    Nous sommes en 1972 lorsque l’État fédéral américain s’apprête à voter ce vieil amendement qui semble faire quasi consensus, si on excepte quelques vieux Républicains arc-boutés sur une vision traditionnelle de la famille. Mais contre toute attente c’est une femme, une inconnue au nom imprononçable, qui se lève contre cette loi et organiser une bataille idéologique impitoyable.

    Cate Blanchett interprète Phyllis Schlafly, impressionnante de roublardise, d’intelligence, de culture, de pugnacité, d’efficacité, de cynisme mais aussi de contradictions et de mauvaise foi. Cette mère de famille, mariée à un homme aussi traditionnel et républicain qu’elle, se lance dans un combat perdu d’avance. L’Amérique du début des années 70 est en plein bouleversement : luttes contre la ségrégation, mouvement hippie, révolution sexuelle, guerre froide et guerre du Vietnam. L’Equal Rights Amendment enverra-t-il les filles dans les tranchées du Mekong et les toilettes mixtes seront-elles bannies ? Phyllis Schlafly est la figure de cette contre-culture conservatrice qui cherche à préserver le contrat social traditionnel : les femmes au foyer et la conviction que l’inégalité entre hommes et femmes est une réalité intangible.

    Après le vote au Congrès de cet amendement (premier épisode), Phyllis et ses amies se lancent dans une course de fond pour empêcher la ratification de la loi au niveau des États. Pour mener à bien sa mission quasi divine, Phyllis/Cate Blanchett doit utiliser des trésors d’inventivité pour imposer son lobbying, dans un mouvement qui peut être qualifié d’ancêtre du Tea Party.

    Phyllis et ses amies se lancent dans une course de fond

    Mais ce combat porte en lui son lot de contradictions. Car en se soulevant comme un seul homme contre l’égalité qu’elle, femme, serait en droit d’au contraire réclamer, Phyllis Schlafly se lance surtout dans une guerre qui bouleverse aussi son propre rôle social. Pire, face à un mari conservateur, contre qui se joue une lutte sournoise, la mère de famille doit aussi échapper à son rôle de mère de famille effacée. Elle use finalement d’armes féministes et de convictions féministes contre ses adversaires idéologiques – précisément les féministes.

    Justement, la force de Mrs America est de s’intéresser au camp féministe. Face à une Phyllis Schlafly déterminée, les progressistes de tout poil (féministes, pro-avortements ou noirs) pèchent moins en raison de leurs convictions que de leurs dissensions internes, des guerres d’ego, le tout dans un contexte politique détonnant : les élections présidentielles de 1972, avec un Richard Nixon conquérant pour sa réélection et son outsider démocrate, George McGovern, incapable de gérer correctement les courants progressistes de son propre camp.

    Cate Blanchett est parfaite dans le rôle de cette mère de famille lancée dans un combat d’une autre époque. Les années 70 sont d’autant mieux décrites que les apparitions de personnalités historiques ne manquent pas. Le tableau de l’Amérique traditionnelle de cette décennie est d’autant plus frappante qu’elle se confronte aux réalités de notre époque : néo-conservateurs, combats féministes, luttes contre les inégalités. Voilà, qui fait de cette série historique une formidable caisse de résonance pour le monde d’aujourd’hui.

    Mrs. America, série historique de Dahvi Waller
    Avec Cate Blanchett, Uzo Aduba, Rose Byrne, Kayli Carter et Ari Graynor
    États-Unis, 2020, sur Canal+

    https://www.canalplus.com/series/mrs-america/h/13631742_50001

    Voir aussi : "Kad Merad, Baron noir et très noir"

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  • Kad Merad, Baron noir et très noir

    Revoilà Kad Merad dans son meilleur rôle : celui de Philippe Rickwaert, alias Baron noir après une saison 2 assez inégale, dans laquelle l’homme politique, à la fois passionné, ambitieux, roublard et machiavélique, s’engageait dans une traversée du désert et tentait de se remettre dans la course. La France est gouvernée par Amélie Dorendeu, bien décidée à faire de sa Présidence une période d’ouverture politique.

    La saison 3 de Baron noir est celle du grand retour de Philippe Rickwaert, dont les déboires judiciaires n’en finissent pas de ternir son image. Ce come-back pourra-t-il passer par le parti socialiste, dont l’avenir semble bouché, ou bien par l’autre mouvement de gauche dirigé par le charismatique Michel Vidal ? Dans une France de plus en plus fragmentée, et où le populisme devient de plus en plus présent, le Baron Noir fait de l’audace sa carte maîtresse, aidé par sa conseillère en communication Naïma Meziani.

    Les auteurs réservent les coups les plus cinglants au populisme

    Baron noir est la grande série politique du moment. Antoine Chevrollier et Olivier Panchot sont aux manettes d’une création audiovisuelle ambitieuse, dont la pertinence n’est pas la moindre des qualités. Évidemment, les petites manigances politiques, le quant-à-soi et les ambitions personnelles sont pointées du doigt sans ménagement. Mais les auteurs réservent les coups les plus cinglants au populisme de gauche ou de droite (incroyable Frédéric Saurel, interprète de l’inquiétant Chistophe Mercier). Le spectateur pourra également trouver derrière chacun des personnages leurs modèles dans la vie réelle : Julien Dray pour le personnage de Philippe Rickwaert, Jean-Luc Mélanchon pour celui de Michel Vidal (formidable François Morel), Marion Maréchal-Le Pen en Léandra Tallier (Sarah Stern) et même Emmanuel Macron dont la posture politique et les attaques ont inspiré la présidente Amélie Dorendeu (Anna Mouglalis).

    Intrigue passionnante, scénarios et dialogues parfaitement écrits, mise en scène soignée (certaines séquences ont même été tournées à l’Élysée !), il faut ajouter à ces qualités de Baron noir les interprétations : Kad Merad, bien sûr, qui tient là son meilleur rôle, mais aussi Anna Mouglalis, François Morel et Rachida Brakni, qui impose au fur et à mesure de cette saison 3 sa présence impressionnante.

    Baron noir, Saison 3, drame politique d’Antoine Chevrollier et Olivier Panchot
    Avec Kad Merad, Anna Mouglalis, Hugo Becker, Astrid Whettnall,
    Rachida Brakni, François Morel, Frédéric Saurel, Patrick Mille,
    Lubna Gourion, Alex Lutz et Sarah Stern

    8 épisodes, 2019, Canal+
    https://www.canalplus.com/series/baron-noir/h/6251363_50001

    Voir aussi : "Ton univers impitoyable"

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  • Breizh watching avec KuB

    En cette période de grand confinement, évidemment l’Internet devient plus que jamais l’outil pour se divertir et se cultiver. Et parmi ces webmédias, il y a KuB, édité par l’association Breizh Créative. KuB, comme son nom l’indique, est né en Bretagne et entend encourager la création bretonne en proposant plus de 1600 vidéos en accès libre : documentaires, créations théâtrales ou graphiques, films de fiction, animation, clips, lectures ou concerts.

    La plateforme bretonne peut se vanter de proposer un joli catalogue particulièrement varié : 372 documentaires d’auteur, 243 portraits d’artistes, 200 clips musicaux, 184 captations de spectacle, 162 enquêtes et reportages, 113 fictions, 94 web séries, 92 magazines culturels ou encore 86 films dessins animés.

    Parmi ces vidéos, l’internaute trouvera par exemple des clips comme la trilogie californienne (The Californian Trilogy) de James Eleganz, des documentaire comme Du pôule Nord au pôule Sud d'E. Gilles et G., le docu-fiction sonore Demain s’ouvre au pied de biche d’Alexandre Plank au sujet d’une indépendance… de Douarnenez, la création Art vidéo d'Isabel Perez del Pulgar, des fictions inédites à l’exemple du court T'es con Simon ! de Claire Barrault ou le magazine culturel Le grand BaZH.art.

    Mémorable mis à disposition jusqu’au 23 mars

    KuB a également mis en ligne une intégrale des courts métrages de Bruno Collet, nommé aux Oscars pour Mémorable, un film que la plateforme met gratuitement à disposition jusqu’au lundi 23 mars 2020.
    Chaque semaine, cinq nouveaux programmes sont proposés, qui reviennent sur la genèse de ces œuvres, le parcours de l’artiste et le contexte de ces vidéos.

    En 2020, l’objectif de KuB est d’augmenter sa notoriété et de diversifier ses financements, avec le développement de co-éditions vidéo et la recherche de mécénats privés. KuB entend également augmenter la visibilité de la création en Bretagne par sa présence dans le Projet audiovisuel breton associant France 3 Bretagne, TVR, TébéO, TébéSud et Brezhoweb. Avec KuB, ces médias coproduisent une centaine d’œuvres par an via un Contrat d’Objectifs et de Moyens (1,6 M€ attribués aux porteurs de projets).

    Le webmédia breton de la culture entend non seulement jouer à plein son rôle de catalyseur, mais aussi de montrer que la production audiovisuelle ne vit pas seulement à Paris.

    KuB a reçu le Prix Audiens de l’initiative numérique 2019 et le Prix Breizhacking 2019. à Breiz watcher donc, dès maintenant : c’est la période idéale.

    KuB, édité par Breizh Créative
    www.kubweb.media
    https://vimeo.com/371093580

    Voir aussi : "Binge-watching de spectacles avec Opsis TV"
    Voir aussi : "Eleganz en diable"

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  • Les monstres sont parmi nous

    La série Hunters, débarquée il y a quelques semaines sur Amazon, avec Al Pacino dans le rôle titre, pourrait bien faire grincer des dents. D’abord parce que le showrunner David Weil a fait un choix étonnant pour cette histoire de chasse aux nazis à la fin des années 70 : aborder le sujet frontalement, sous l’angle du thriller déjanté que Quentin Tarantino n’aurait pas renié. Certains critiques ont parlé d’un croisement entre Inglorious Basterds et La Liste de Schindler : un raccourci, bien sûr, mais qui dit bien à quel point Hunters a choisi l’angle du thriller sanglant, de l’humour noir et de l’uchronie grinçante pour parler de la Shoah.

    En 1977, Jonah Heidelbaum, jeune new-yorkais vivant avec sa grand-mère, survivante de l’un camp de la mort, assiste à son assassinat. L’orphelin est bientôt accosté par un Meyer Offerman, un autre rescapé du génocide juif, qui lui propose son soutien. Jonah intègre, dans les jours qui suivent, une équipe de chasseurs de criminels de guerre installés en Amérique. Ces nazis cachés et intégrés ont un plan en tête pour déstabilisé le pays qui les a accueillis à bras ouverts.

    Un croisement entre Inglorious Basterds et La Liste de Schindler

    Le tout premier épisode commence par une scène choc mettant en scène le terrifiant – et aussi très drôle – Biff Simpson (Dylan Baker). Ce n’est que le début d’une longue série de meurtres, de chasses et d’enquête. Malgré un pilote aux longueurs certaines, Hunters se développe en assumant complètement son côté subversif s’inspirant tour à tour de la blackpoitation, des films de genre (action, ado, uchronie, thriller, drame familial) et du cinéma de Quentin Tarantino. Les créateurs incluent dans la série ancrée dans l’Amérique de Jimmy Carter (qui est d’ailleurs représenté) des scènes historiques au cœur du ghetto de Varsovie et d’un camp de la mort.

    Al Pacino est brillant, comme toujours, dans cette série sombre, sanglante, et filmée comme un divertissement morbide : que l’on pense au personnage Travis Leich, joué par Greg Austin. Une des morales de l’histoire est que le nazi n’est sans doute pas là où on le croirait, et qu’il peut avoir un visage d’ange.

    Hunters, série de David Weil, avec Al Pacino, Logan Lerman,
    Kate Mulvany, Tiffany Boone, Carol Kane, Saul Rubinek et Josh Radnor
    Saison 1, 10 épisodes, États-Unis, 2020, sur Amazon

    https://www.amazon.com/Hunters

    Voir aussi : "Mes parents étaient des espions communistes"

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  • Sacré Messie

    De nombreuses critiques ont réagi à la sortie sur Netflix, en début d’année, de la série Messiah : cette histoire d’un homme venu de nulle part, incarnation pour certain d’un prophète extraordinaire, un Jésus du XXIe siècle, ne pouvait que susciter fascination, intérêt ou encore sarcasme.

    En imaginant une intrigue eschatologique à notre époque, le showrunner Michael Petroni entend assumer jusqu’au bout son parti-pris de proposer une série mêlant le sacré, les conflits géopolitiques, des réflexions sur les crises actuelles, sans oublier des histoires particulières : le sombre agent israélien Aviram Dahan (Tomer Sisley), l’officier de la CIA Eva Geller (Michelle Monaghan), le jeune Arabe Jibril Medina (Sayyid El Alami) et bien entendu ce mystérieux Al-Massih (Mehdi Dehbi).

    Messiah s’avère bien plus passionnant que ne le laisserait deviner sur le papier ce récit très new age qui ne lésine ni sur les symboles parfois très appuyés (l’arrivé du prophète à Washington notamment), ni sur les discours religieux s’inspirant largement des textes sacrés, ni sur des destins bouleversés par une apparition qui dépasse tout le monde (l’adolescente Rebecca et son pasteur de père ou encore le jeune Samir).

    Un récit très new age

    La série proposée par Netflix a nécessité de très importants moyens, comme le prouvent les scènes à Jérusalem ou dans la capitale américaine. Le spectateur est entraîné aux quatre coins du monde et suit des personnages fascinés, aimantés ou révulsés par ce nouveau messie apportant en réalité plus la guerre que la concorde.

    Personnage insaisissable et incompréhensible, Al-Massih est tour à tour qualifié de héros arabe, de magicien, de personnage divin ou d’escroc. Qui est ce messie ? La question est au centre de la série, et plus la saison avance, plus l’incertitude s’épaissit, semant chaos mais aussi conflits.

    La saison 1 s’achève par un accident qui rend le personnage de cette réincarnation christique encore plus fascinante, qui promet une sacrée saison 2 !

    BC

    Messiah, série dramatique de Michael Petroni
    Avec Mehdi Dehbi, Tomer Sisley, Michelle Monaghan,
    John Ortiz et Melinda Page Hamilton,
    Saison 1, 10 épisodes, États-Unis, Netflix, 2020

    https://www.netflix.com

    Voir ausi : "Un deo gratias pour deux papes"

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  • Un deo gratias pour deux papes

    Les deux derniers papes en question sont Benoît XVI et François. Deux personnages historiques diamétralement opposés, qui font l'objet d'un film Netflix, Les deux Papes de Fernando Meirelles, avec Jonathan Pryce, Anthony Hopkins.

    Il y a d’un côté le doctrinaire et intellectuel Joseph Ratzinger, successeur de Jean-Paul II sous le nom de Benoît XVI, et attaché à perpétuer la ligne conservatrice de ce dernier. De l’autre côté, nous avons Jorge Mario Bergoglio, cardinal et archevêque de Buenos Aires, outsider remarqué lors de l’élection par le conclave du premier qui deviendra pape sous le nom de François. Cet homme, venu du continent sud-américain, passionné de football et de tango, a une position plus sociale et assez proche de la Théologie de la libération.

    Nous sommes en 2005, et après l'élection sans surprise de Benoît XVI, élection que le film nous présente avec une précision rarement vue, Bergoglio, qu’interprète avec passion Jonathan Pryce, se décide à se retirer des affaires de Dieu et à prendre sa retraite. Invité par Benoît XVI en 2012 dans sa résidence d’été de Castel Gandolfo, l’ecclésiastique argentin informe le pape de sa décision, que le prélat balaie de la main : il a pour le futur François une autre idée. Pas question donc de retraite. Bientôt, ces deux hommes que tout oppose débattent avec passion de théologie, de leurs égarements mais aussi de l’avenir de l’Eglise. Et à une époque où Le Vatican a déjà maille à partir avec des scandales sexuels et financiers, le cardinal Bergoglio semble être la personne qu'il faut.

    La double rencontre de Benoît XVI et du futur François à Castel Gandolfo puis au Vatican a-t-elle eu vraiment lieu ? Quelques critiques s’en sont émues, sans doute à tort. Car là n’est pas le sujet réel du film : c’est bien d’un double portrait dont il est question dans Les deux Papes : le conservateur et rigide prélat allemand contre le bonhomme et sensible cardinal argentin. Fernando Meirelles en fait le personnage central du film distribué par Netflix, en insistant sur la période sombre de la dictature argentine.

    On retiendra aussi de ce passionnant long métrage, au scénario passionnant et aux dialogues denses, les descriptions précises du Vatican et des conclaves. Une vraie curiosité qui a conduit l’académie des Golden Globes a nommé le film dans quatre catégories : meilleur film dramatique, meilleur scénario, meilleur acteur dans un drame (Jonathan Pryce) et meilleur acteur dans un second rôle (Anthony Hopkins, métamorphosé pour incarner le rugueux Benoît XVI).

    Les deux Papes, biopic de Fernando Meirelles
    avec Jonathan Pryce, Anthony Hopkins, GB, Italie, Argentine, USA, Netflix, 125 mn, 2019

    https://www.netflix.com/fr/title/80174451

    Voir aussi : "Ton univers impitoyable"

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  • Ma sorcière bien aimée

    Plus maligne qu’elle n’y paraît, The Witcher coche toutes les cases de la série de fantasy : un royaume imaginaire durant un Moyen Âge fantasmé, des héros sans peur mais pas sans reproche, de la magie à tous les étages et des êtres fantastiques – elfes, loups-garous et bien entendu dragons. Adaptation télé de la saga à succès d’Andrzej Sapkowski, The Witcher vaut largement le détour dans sa manière de raconter les quêtes de ses trois personnages principaux : il y a le sorceleur Geralt de Riv, la sorcière Yennefer de Vengerberg et la princesse Ciri, sur la trace du premier.

    L’arrière-fond de cette histoire est une guerre secouant tout sur son passage, à grands renforts de combats à l’arme blanche, de sièges implacables… et de tours de magie pouvant s’avérer d’une incroyable efficacité (épisode 8, Bien plus). Le fantastique est omniprésent dans The Witcher. Le Sorceleur est un chasseur de monstres à la fois redouté et méprisé. Il trace sa route dans des contrées malveillantes, sans cacher sa morgue à qui croiserait son chemin (ah, les fameux "Merde !" de Geralt de Riv, interprété par Henry Cavill – le "Superman" made in DC Comics –, complètement transformé pour ce rôle !). Yennifer, la sorcière au destin improbable, va finir par fendre l’armure du ténébreux chasseur de mutants, même si l’histoire amoureuse s’avérera – sans rien spoiler – assez "compliquée".

    "Petit porcelet"

    Qui dit quête, dit transformation identitaire des personnages, à commencer par Ciri, enfant royale choyée avant d’être plongée du jour au lendemain dans un monde de sang, de fer et de feu. La fin de la première saison promet d’ailleurs de futurs développements intéressants sur cette "enfant-lumière" – pour reprendre le terme du Shining de Stephen King.

    Contre toute attente, The Witcher brouille les cartes : Yennifer, paysanne laide et rejetée au début du récit (le "petit porcelet", souffre-douleur) devient grâce à la magie une magnifique et magnétique sorcière (épisode 3, Lune de trahison), au grand dam de sa perceptrice Tissaia, que le dernier épisode va montrer sous un nouveau jour.

    Mais si The Witcher fascine, c’est aussi et surtout parce que la showrunneuse Lauren Schmidt Hissrich a pris le parti d’un scénario non-chronologique, faisant alterner les époques, les quêtes, les voyages, les rencontres et les chasses aux monstres – qui ne sont pas toujours ceux que l’on croit.

    La série ne fait pas l’impasse sur les combats rudes à la Game of Thrones, sur les guerres politiques ou sur les intrigues fantastiques (épisode 5, Espèces rares), mais avec une économie singulière de scènes érotiques – #Metoo est sans doute passé par là.

    The Witcher, vrai trip de fantasy, offre en plus un étonnant couple constitué de l'impressionnant Geralt de Riv et de la magnifique Yennefer de Vengerberg.

    The Witcher, série de fantasy de Lauren Schmidt Hissrich avec Henry Cavill, Freya Allan
    Anya Chalotra, Jodhi May et Björn Hlynur, USA, saison 1, 8 épisodes, Netflix, 2019
    https://www.netflix.com
    https://sapkowskipl.wordpress.com

    Voir aussi : "Ton univers impitoyable"

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  • Ton univers impitoyable

    Cette semaine, les Golden Globes ont mis à juste titre à l’honneur des films comme 1917, Joker ou Once Upon a Time… in Hollywood. Mais une autre création s’est imposée lors de cette cérémonie : la série Succession, avec une récompense de meilleur acteur dans une série dramatique pour l’impressionnant Brian Cox et un un Golden Globe de meilleur acteur dans un second rôle dans une série, une mini-série ou un téléfilm pour l’étonnant Kieran Culkin, pour son rôle incroyable de Roman Roy.

    Succession, dont une troisième saison est prévue pour l’été 2020, est une plongée dans les arcanes d’une multinationale mêlant médias, divertissements et communication. Un univers impitoyable, pour reprendre le générique de Dallas, une autre série, certes datée, mais qui faisait elle aussi d’une famille richissime américaine un lieu d’affrontement autour de l’argent, du pouvoir, des ambitions et des rancœurs.

    Plus intense, plus âpre, plus cruelle et et plus passionnante que la série culte des années 80, Succession est une tragédie familiale autant qu’un tableau d’une Amérique pervertie, amorale et empoisonnée par l’argent.

    La saison 1 démarre comme la promesse d’un passage de relais réussi entre Logan Roy, le fondateur de la multinationale Waystar Royco, et son fils, le brillant Kendall Roy (Jeremy Strong). Pour le patriarche de soixante-dix ans, c’est l’assurance d’une retraite dorée avec sa troisième épouse, Marcia Roy (Hiam Abbass). Sauf que, contre toute attente, Logan, milliardaire tout-puissant et dictatorial, décide de rester finalement aux commandes de sa société pour quelques années encore. C’en est fini de la succession pacifique : en refusant de se retirer des affaires, Logan Roy déclenche du même coup une guerre au sein de sa propre famille, avec pour protagonistes essentiels ses propres enfants, Kendall, Roman et Shiv (Sarah Snook), qui se voyaient bien prendre leur part du gâteau. Mais le "vieux" a la peau dure, et n’est pas décidée à abandonner ses propres ambitions.

    Coups tordus, secrets de famille, conflits boursiers et histoires sordides

    Les deux saisons font s’entrecroiser plusieurs intrigues faites de coups tordus, de secrets de famille, de conflits boursiers et d’histoires sordides : la chute de Kendall bien décidé à prendre sa revanche, une OPA hostile menaçant l’empire des Roy, les projets privés et publics de l’aîné Connor Roy (Alan Ruck), une affaire de croisières que vont tenter d’étouffer le beau-frère Tom Wamsgans (Matthew Macfadyen) et le cousin Greg Hirsch (Nicholas Braun) ou le mariage de Shiv qui clôture une première saison avec un rebondissement inattendu (épisode Personne ne disparaît, primé aux Emmy Awards 2019 pour son scénario).

    Cette impressionnante fresque familiale, tournée avec des moyens que l’on imagine conséquents, est une des meilleures production de HBO. Écriture du scénario et des dialogues, interprétations (primées, comme il a été dit), décors, musique (Nicholas Britell) ou générique magnifique : tout concourt à faire de cette série proposée par OCS un moment de télé exceptionnel, inratable et inoubliable.

    Succession, série dramatique de Jesse Armstrong
    avec Hiam Abbass, Nicholas Braun, Brian Cox, Kieran Culkin
    Peter Friedman, Sarah Snook et Jeremy Strong, USA, OCS, deux saisons, 2019

    https://www.hbo.com/succession

    Voir aussi : "Mes parents étaient des espions communistes"

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