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Bla Bla Blog - Page 97

  • Corpus delicti

    L’Événement d’Audrey Diwan est un très grand, très beau et très puissant film. Basé sur un roman d’Annie Ernaux (L'Événement, éd. Gallimard, 2000), le film relate la tempête et le drame d’une grossesse non-désiré dans les années 60, lorsque la contraception n’existait pas et que l’avortement était un crime. Avoir un enfant non désiré aboutissait pour les femmes – et notamment les jeunes femmes – à l’opprobre générale, au mariage forcé dans le meilleur des cas et la prison au pire.  

    Un poème d’Aragon introduit l’une des scènes du film : "Elsa au miroir", superbe texte de la littérature mais aussi portrait d’une jeune fille évanescente, paisible, soumise mais aussi tourmentée au milieu d’une tragédie.

    Anne, étudiante en lettres brillante à Angoulême, découvre qu’elle est enceinte suite à une brève relation avec un autre étudiant, comme elle. On ne sait que tardivement dans le film l’identité du garçon, mais à vrai dire cette information n’est importante que pour souligner la lâcheté du jeune homme, laissant sa relation d’un soir gérer seule une histoire dont il est coresponsable, pendant qu’il poursuit son cursus et ses relations amicales comme si de rien n’était.  

    Anne se retrouve seule, désemparée, obligée de trouver une solution à sa grossesse non-désirée. Ce drame personnel est aussi un tableau sociologique cruelle de cette France corsetée et hyper moralisante des années 60. L’amour devient vite un problème, ce qu'il ne devrait bien sûr jamais être. Drague, flirts à peine appuyés, séductions, intellectualisation et aussi interrogations sur la vie amoureuse mais aussi le pis-aller de ces jeunes femmes des années 60 : le mariage, les enfants et la soumission aux corvées ménagères, comme l’esquisse le portrait de la mère jouée par Sandrine Bonnaire.

    Les visages en gros plans ce sont aussi ces regards

    La caméra film avec honnêteté au plus près, respect et sans souci de choquer, les corps des jeunes femmes. Les corps mais aussi les visages. Il faut d’ailleurs saluer la performance de l’actrice principale, Anamaria Vartolomei (My Little Princess, La Bonne Épouse), tenant à bout de bras ce film exigeant, égrenant les semaines de grossesse, tel un compte à rebours inéluctable. Les visages en gros plans ce sont aussi ces regards : tour à tour affolés et désorientés (pour Anne), mais aussi méfiants, défiants, arrogants, désapprobateurs et suspicieux (pour son entourage, proche ou non).

    Il faut aussi parler des personnages secondaires, joués par quelques pointures : Sandrine Bonnaire en maman aimante mais enfermée dans son rôle de mère au foyer, Anna Mouglalis en "faiseuse d’ange" ou Pio Marmaï en professeur subtilement campé et moins rigide qu’il n’y paraît. Un coup de canif est au passage adressé au corps médical, avec ces médecins complaisants, résignés, voire contempteur de ces jeunes filles enceintes.

    Sans pathos ni discours lénifiant, Audrey Diwan avance avec délicatesse, parsemant son film de messages néanmoins engagés, sur la place des femmes, l’éducation, la liberté et le droit d’user de son corps. La réalisatrice ne cache pas plus la réalité d’un avortement, avec en particulier deux scènes tournées sans fard.

    Comme un dernier message, le film, qui avait commencé avec une citation  d’Aragon, se termine avec l’extrait d’un poème de Victor Hugo : "Nous garderons l'honneur ; le reste, nous l'offrons. / Et l'on marche..."

    Tout cela fait de L’Événement un très grand film, exceptionnel de qualité et nécessaire au combat féministe. Il a d’ailleurs obtenu le Lion d'or à la 78e édition de la Mostra de Venise.

    L’Événement, drame d’Audrey Diwan, avec Anamaria Vartolomei, Kacey Mottet-Klein, Luàna Bajrami,
    Louise Chevillotte, Pio Marmaï, andrine Bonnaire et Anna Mouglalis, 2021, 100 mn, Canal+

    https://www.unifrance.org/film/51968/l-evenement
    https://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Folio/Folio/L-evenement
    https://www.canalplus.com/cinema/l-evenement/h/17486029_40099

    Voir aussi : "Eugénie Grandet, classique et moderne" 

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  • Tout le monde aime l’amour

    Tiphanie Doucet s’était fait remarquée il y a quelques mois avec la revisite de "Joe le Taxi", le tube intersidéral de Vanessa Paradis.

    Chanteuse et actrice comme sa consœur et aînée, Tiphanie Doucet revient cette fois avec un single inédit, "Une love song", qui est le premier extrait de son 2e album prévu pour fin 2022 et co-produit avec Raphael D'hervez (Minitel Rose, Pégase, FVTVR Records) et Bill Cox. 

    Décidément, Tiphanie Doucet sait se faire aimer

    Sur une musique résolument pop, Tiphanie Doucet propose une jolie déclaration d’amour. Et c’est à l’ancienne que la chanteuse le fait dans un clip acidulé, avec du papier à lettres, un crayon, une enveloppe colorée à poster et des mots choisis avec soin : "Si j’t’envoyais une love song / Une lettre sur ton palier / Everybody would tell me / Not to do this way".

    On craque pour la voix veloutée de cette nouvelle figure de la scène française. Pas de doute : Décidément, Tiphanie Doucet sait se faire aimer.

    "Une love song" est à découvrir absolument, avant son prochain album. 

    Tiphanie Doucet, Une love song, single, 2022 
    https://www.tiphaniedoucet.com
    https://beacons.ai/tiphaniedoucet
    https://www.facebook.com/tiphaniedoucet
    https://www.instagram.com/tiphaniedoucet 
    @TiphanieDoucet

    Voir aussi : "Vas-y Joe, vas-y fonce"
    "Adé, l’ex de Therapie TAXI, bien partie pour rester"

    © Tiphanie Doucet 2022

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  • Les nuits sont longues et froides à Reykjavik

    Le goût pour les polars venus du nord, même s’il marque le pas, continue d’avoir ses adeptes, preuve s’il en est qu’il ne s’agit pas d’une simple mode mais d’un mouvement de fond permettant de découvrir d’autres aspects de ces pays scandinaves, apparemment calmes et paisibles.

    Cap sur l’Islande avec Les Meurtres de Valhalla, que nous propose Netflix. Rappelons que le valhalla est, dans la culture nordique, le paradis qu’Odin réserve aux guerriers les plus valeureux. Sauf qu’ici, dans la création de  Thordur Palsson, le valhalla en question n’a rien d’un lieu idyllique ni glorieux : il s’agit d’une maison de correction.

    Une série de crimes à Reykjavik convainc l’inspectrice Kata, qui est aidée d’un confrère venu de Norvège, Arnar, que cet endroit est la clé des meurtres. L’investigation  va s’avérer d’autant plus tendue que les deux policiers doivent faire face avec leur propre passé : Kara découvre un secret chez son adolescent de fils alors qu’Arnar doit gérer un secret dans sa propre famille. 

    Une Islande moderne, vivant entre passé et modernité

    Ce thriller islandais en 8 épisodes, sérieux et joué avec talent par les excellents Nína Dögg Filippusdóttir et Björn Thors, ne dépaysera pas les amateurs de polars venus du nord : scénario au cordeau, héros ou anti-héros sombres, sinon tourmentés et décors à l’avenant.

    La capitale islandaise est au cœur de la série, même si le fameux Valhalla se trouve isolée dans un paysage lunaire et froid. On est dans une Islande moderne, vivant entre passé et modernité (avec cette omniprésence des ordinateurs). Le passé, justement, est le thème de cette fiction, car derrière les crimes commis par un mystérieux serial killer, se pose la question de l’enfance tourmentée, de l’adolescence blessée et du passé qui ne passe pas.

    À cet égard, l’histoire familiale d’Arnar prend tout son sens,  au point de se télescoper avec son enquête. Quant à Nína Dögg Filippusdóttir, elle incarne une femme opiniâtre et une maman prête à tout pour jouer son rôle, quitte à mettre parfois son éthique de policière dans la poche, avec un mouchoir par dessus. Voilà ce que l’on aime chez nos héros et héroïnes modernes. 

    Les Meurtres de Valhalla, thriller islandais de Thordur Palsson,
    avec Nína Dögg Filippusdóttir, Björn Thors, saison 1, 8 épisodes, 2020, sur Netflix

    https://www.ruv.is/valhalla-murders
    https://www.netflix.com/fr/title/81043833

     Voir aussi : "Frontières"

         

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  • Un podcast sur la fantasy pour les présenter tous 

    Alors que sort sur Amazon Les Anneaux de Pouvoir, le préquel du Seigneur des Anneaux, il n’est sans doute pas inutile de faire un focus sur ce genre littéraire passionnant qu’a révolutionné Tolkien en profondeur et pour longtemps. Mais que recouvre la fantasy ? d’où vient-elle ? Qui l’a créé ? Pour répondre à ces questions, rendez-vous sur la série de podcasts, C’est plus que de la fantasy, proposé par le site C’est plus que de la SF du journaliste Lloyd Chéry.  Anne Besson, la marraine de la saison 1, est l’invitée du premier épisode, "Introduction à la fantasy".

    L’universitaire et spécialiste en fantasy répond aux questions de Lloyd Chéry avec un plaisir et une passion communicative, balayant en moins d’une heure près d’un siècle et demi d’un genre littéraire  finalement très jeune. Elle commence par répondre à une question fondamentale : quel est le point commun de toutes ses œuvres de fantasy aussi différentes que Le Seigneur des Anneaux, la saga des Conan, Le Trône de Fer ou les œuvres de Robin Hobb. "La magie", répond-elle et les "mondes magiques", qu’ils soient autonomes, décalés, qu’ils ressemblent aux nôtres ou qu’ils y soient reliés.  

    L’Heroic fantasy, ce sous-genre ancré dans un monde médiéval imaginé (avec l’influence des légendes arthuriennes), est souvent identifié à la Fantasy. C’est un raccourci, commente Anne Besson, qui rappelle les autres sous-genres comme la dark fantasy.

    L’auditeur découvrira un auteur peu connu William Morris, l’auteur à la fin XIXe d’une série de romans constitués de contes et de mythes imaginaires (Aux Forges de Vulcain). Il est redécouvert des années plus tard et réédité. La fantasy est identifié comme un genre à part entière avec Linn Carter dans les années 60, mais il ne deviendra une littérature dite "sérieuse" qu’avec la reconnaissance de Tolkien.

    Les années 30 voient l’arrivée d’une deuxième étape dans l’émergence de la fantasy, avec la série Conan de Robert E. Howard, imprimée en pulps. Pourtant, c'est bien Tolkien qui "re-relance" la fantasy avec le Hobbit en 1937 et Le Seigneur des Anneaux en 1954. Des éditions pirates dans les années 60, puis le succès de Conan dans le même temps, voit l’explosion de la fantasy, y compris dans des aspects jusque là inédits : la naissance des jeux de rôles, des éditions pirates de Tolkien et des copies grossières du Seigneur des Anneaux.

    Fantasy et SF restent statistiquement genrés

    Les années  1990 seront celles d’un retour fracassant de la fantasy en France, avec de jeunes maisons d’éditions spécialisées (Mnémos, Bragelonne) et les premières recherches universitaires. Par contre, nuance Anne Besson, les universités n’ont pas encore ouverts complètement leurs cours à la fantasy, pour de bonnes et de mauvais raisons.

    La fantasy est un genre aimé particulièrement par un public jeune car il y "un lien fondamental avec l’enfance", que ce soit la place du merveilleux, de la magie ou encore l'importance de jeunes héros avec qui les enfants et les adolescents peuvent s'identifier.

    Qui dit fantasy, dit science-fiction. Entre les deux genres, la spécialiste fait remarquer que le premier est plus présent en littérature alors que le second est plébiscité au cinéma. Il est vrai que sur grand ou petit écran "la fantasy fait facilement kitsch". Deuxième observation : il faut admettre que fantasy et SF restent statistiquement genrés, la fantasy étant plus apprécié du public féminin et la SF plus masculin. Pour l’universitaire, la grande tradition des conteuses explique en partie l’attrait du public féminin pour les œuvres de Tolkien ou Hobb.  

    Anne Besson évoque deux sagas importantes : Game of Thrones d’abord, plus réaliste, plus politique, plus historique aussi. Mais est-ce un renouvellement ? Oui, répond l’universitaire, en ce qu’il plus âpre et plus manipulateur… Populaire grâce à la télévision, Le Trône de Fer est devenu une saga poids lourd.

    Autre œuvre poids lourd : Harry Potter. Mais est-ce de la fantasy ? Oui, répond Anne Besson. Et c’est aussi une œuvre qui a renouvelé  la fantasy en la rapprochant du fantastique, avec des moments d’horreur gothique.

    L’épisode se termine par l’évocation des autres univers de la fantasy : la fantasy africaine, asiatique et plus généralement non-occidental.

    Honneur enfin à la France, avec une fantasy de qualité mais manquant d’un grand succès pour faire sa mue. Il manque sans doute de relais – médiatiques ou adaptations télés à succès – pour faire sortir la "french fantasy" de sa niche.

    Avec cette introduction à la fantasy, C’est plus que de la fantasy entend bien participer à la reconnaissance d’un genre encore – très jeune – et appelé à se développer avec le temps. 

    Un autre podcast est d'ores et déjà en ligne : "La Quête de l'Oiseau du Temps - Régis Loisel & Serge Le Tendre"

    Podcasts, C’est plus que de la fantasy, saison 1, 2022
    https://podcast.ausha.co/c-est-plus-que-de-la-fantasy
    https://podcast.ausha.co/c-est-plus-que-de-la-sf

    Voir aussi : "Vous reprendrez bien un peu de fantasy ?"

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  • Luca Simonini et le parti pris des choses

    Luca Simonini, qui présente jusqu’en octobre ses œuvres à l’Espace Saint-Martin, a assurément plusieurs vies artistiques en une seule.

    L’intéressé se présente lui-même avec une double casquette : créateur de décors de scènes et peintre. La liberté mais aussi la rigueur sont au cœur de ses œuvres. Bla Bla Blog avait parlé en 2016 d’une de ses expositions à la Galerie New Age, "Coups de pinceau" : " Luca Simonini fait de la brosse non seulement le prolongement du geste de l’artiste mais aussi une vanité contemporaine, humanisant de simples brosses".

    Son exposition à l’Espace Saint-Martin présente des œuvres à l’encre de chine sur du papier de riz traditionnel, une technique ancestrale chinoise que Luca Simonini a adopté avec passion et enthousiasme : "Beaucoup plus capricieux, [ce type de support] demande à l’artiste respect, humilité et maîtrise". Voilà qui met l'artiste dans la position et l'état d'esprit d'un artisan.

    La recherche de l’harmonie

    Dans un style dépouillé, réduit à sa plus simple expression, et néanmoins riche de variations et de subtilités, Luca Simonini exprime la vie éphémère, la poésie de la nature mais aussi la fluidité dans lequel le papier, l’encre et l’eau font osmose avec une très grande élégance. "[Le] geste minimal lié au moment et à l’instant (…) me portent naturellement vers une philosophie proche du Pantha Rhei, où le sujet, le peintre et le support sont en constante mutation."

    En s’intéressant aux choses simples qui nous entoure – rochers, poissons, écumes ou simples pinceaux – c’est bien la recherche de l’harmonie qui guide la main de l’artiste, "pour voir surgir la poésie cachée dans chaque chose qui nous entoure".

    Luca Simonini est à, découvrir ou redécouvrir à l’Espace Saint-Martin jusqu'au 29 octobre 2022.

    Exposition Luca Simonini, "Encres sympathiques"
    Espace Saint-Martin, 3 septembre – 29 octobre 2022
    199 bis, rue Saint-Martin 75003 Paris
    https://www.espacesaintmartin.com/en/pages/10-gallery.html
    https://www.facebook.com/jeanluc.simonini

    Voir aussi : "De la brosse comme prolongement du geste de l’artiste"
    "Gallery, entrance"
    "Vite, les chats"

    © Luca Simonini

    luca simonini,exposition,peinture,paris,espace saint-martin,encre de chine,papier de riz

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  • Je dis Namite

    En attendant la sortie de leur EP In The Storm, le groupe Nahaka dévoile leur premier single, "My Reggae Man".

    Plus que convaincant, ce titre saura convaincre y compris les auditeurs peu familiers du dub ce genre musical né du reggae jamaïcain.  

    "My Reggae Man", avec ces rythmes reconnaissables entre tous, est porté par Jodie Namite. La chanteuse porte sur ses épaules cette déclaration d’amour avec un sex-appeal embarquant totalement l’auditeur : "Oh my reggae man, makes me so high".

    Voilà qui est de bon augure pour la sortie prochaine de l’EP du groupe savoyard Nahaka.

    EP In The Storm : sortie prévue en septembre prochain 2022. 

    Nahaka, My Reggae Man, 2022
    https://www.facebook.com/NahakaDubLiveBand

    Voir aussi : "Fatbabs, Demi-Portion, Miscellaneous et compagnie"

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  • Droit au but

    Les Marseillais et amoureux de Marseille iront voir ou revoir Stillwater avec plaisir, proposé en ce moment sur Canal+. Et les autres ?

    Lors de la sortie du film en salles en 2021, la communication autour a fait de la cité phocéenne, en réalité  le troisième personnage principal, les deux premiers étant Matt Damon et Camille Cottin.

    L’acteur américain joue le rôle de Bill Baker, un ouvrier de l’Oklahoma, à la fois rude et austère. On apprend rapidement qu’il vivote de petits boulots en petits boulots, est proche de sa mère et vit seul.

    Lorsqu’il prend l’avion pour partir à Marseille c’est pour visiter sa fille Abigail, emprisonné aux Baumettes pour un crime qu’elle jure n’avoir pas commis. Bill essaie de faire ce qu’il peut pour soutenir sa fille mais les relations entre eux deux sont pour le moins fraîches. Cependant, l’ancien foreur est bien décidé à se lancer dans une enquête seul contre tous pour prouver l’innocence de sa fille. Enfin, seul, pas complètement : une Française, Virginie, accompagnée de sa fille Maya, l’aident et le soutiennent dans sa démarche.

    Bill se lance sur les traces d’un suspect en déambulant dans les rues, ruelles et quartiers interlopes d’une ville qu’il découvre.

    La cité phocéenne est filmée avec patience, sous tous les angles, au point d’éclipser par moment l’enquête policière

    Il y a plusieurs manières de regarder ce très bon Stillwater. La première en le voyant comme un honnête thriller sur fond d’injustice et aussi de secrets qui seront dévoilés à la fin. Bill Baker, Américain renfrogné, se révèle en enquêteur pugnace n’ayant peur de rien et prêt à tout pour sauver l’honneur – et la liberté – de sa fille, une jeune rebelle qui avait choisi quelques années plus tôt de couper les points avec son  père.

    La deuxième perspective est justement celle des relations parentales. Il y a bien sûr le couple Virginie-Maya : Camille Cottin est convaincante dans son rôle de mère célibataire, couvant d’amour son adorable fille. Bill, mal aimé de sa fille, débarque de son Oklahoma natale et découvre du même coup qu’il peut être un père aimant, lui aussi, avec une fille de substitution – Maya. Les relations que les deux entretiennent sont d’autant plus touchantes qu’elles étaient improbables.

    Et puis, il y a Marseille. La cité phocéenne est filmée avec patience, sous tous les angles, au point d’éclipser par moment l’enquête policière. Les rues tortueuses, les Baumettes, les quartiers nord, les calanques et bien entendu le Stade Vélodrome et l’OM : le Marseille de Tom McCarthy n’est cependant pas une ville de carte postale même s’il en a bien l’ADN. Le cinéaste a filmé avec justesse, rigueur mais aussi nervosité un match de football – gagné par l’OM –, et qui va contribuer à la résolution de l’enquête.

    Film de genre, enquête policière mais aussi portrait d’un homme qui se révèle et se transforme comme il le dit lui-même à la fin du film, Stillwater renouvelle, mine de rien, le thriller américain en s’ouvrant vers la France et l’Europe. 

    Stillwater, thriller américain de Tom McCarthy, avec Matt Damon, Abigail Breslin et 
    Camille Cottin, 2021, 140 mn, Canal+
    https://www.canalplus.com/cinema/stillwater/h/17028281_50001
    https://www.universalpictures.fr/micro/stillwater

    Voir aussi : "Marseille, côté nord, côté sombre"
    "Pauvre conasse"

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  • Klaudia Kudelko, à la bonne heure

    La pianiste Klaudia Kudelko sort cet été son premier album, Time, autour de deux compositeurs – Franz Schubert et Frédéric Chopin – et une compositrice, la Polonaise Grażyna Bacewicz que la pianiste entend faire découvrir ou redécouvrir.

    L’album commence avec les six Moments musicaux, D. 780, op. 94 de Franz Schubert, des œuvres pour clavier écrites entre 1823 et 1824 dans lesquelles la rêverie le dispute à la fantaisie et au lyrisme.

    Le Moment musical n°1, singulièrement léger, est servi avec retenue par une pianiste aux doigts de fée. Comme souvent chez le compositeur romantique, derrière l’apparente légèreté se cachent des douleurs indicibles. Le clavier élégant de Klaudia Kudelko vient entrouvrir la porte de ces tourments que le temps jamais ne vient effacer, à l’image du deuxième, mouvement musical, plaintif et consolateur tout à la fois.

    L’auditeur sourira au 3e Moment musical, véritable tube de Schubert en forme de danse, sur un rythme de barcarolle. La pianiste polonaise s’en empare avec un plaisir certain et communicatif, assurément, mais sans surjouer de la virtuosité.  Il est encore question de vivacité dans le moins connu 4e Moment musical aux couleurs chaudes, se déployant dans des nappes romantiques et non sans mélancolie amoureuse. La dernière partie du moment musical, allegro, revient vers l’allégresse des premières mesures. Le Moment Musical n°5, plus court (2 minutes 30) se fait plus expressionniste, pour ne pas dire tempétueux. 

    On retrouve avec le sixième et dernier Moment Musical ce qui fait l’ADN du compositeur Schubert : du romantisme assumé servi par la pianiste polonaise, délicate et toute en retenue. Ce dernier Moment Musical sonne comme un au revoir ou plutôt un adieu bouleversant. Le musicien allemand se laisse aller dans cette "Plainte d’un troubadour", jouant sur la longueur et la lenteur, comme s’il ne souhaitait plus retenir ses larmes. 

    Nul doute que le choix de cette Étude peut être interprété comme un engagement, en pleine guerre russe contre l'Ukraine

    Pianiste classique d’origine polonaise, Klaudia Kudelko ne pouvait pas ne pas faire un sort à son illustre compatriote, Frédéric Chopin. Elle consacre son album Time à trois monuments du répertoire romantique. Pour l’Étude op. 10 n°12 en ut mineur, dite "la révolutionnaire". Klaudia Kudelko démontre toute sa virtuosité dans cette œuvre demandant autant de technique que de qualités d’interprétation. Cette étude a été écrite par Chopin en 1831, soit quelques mois après l’insurrection de Varsovie contre la Russie tsariste puis le bombardement de l’armée russe. Nul doute que le choix de cette Étude peut être interprété comme un engagement de la part de l'instrumentiste, en pleine guerre russe contre l'Ukraine.

    Toute différente, l’Étude opus 27 n°7 en do dièse mineur donne tout le loisir à la pianiste de déployer son jeu aérien, mélancolique et onirique, à l’image de la Polonaise-Fantaisie opus 61 de Chopin. Klaudia Kudelko s’y balade avec un plaisir évident.

    L’auditeur français découvrira sans doute la compositrice polonaise Grażyna Bacewicz. Considérée par son  illustre contemporain Witold Lutosławski comme "une éminente compositrice polonaise du vingtième siècle et l’une des plus grandes femmes compositeurs de tous les temps". Pour Time, Klaudia Kudelko joue sa deuxième sonate. La modernité de cette œuvre, écrite en 1953, se nourrit de toute la tradition classique et romantique. Grażyna Bacewicz a composé une sonate au fort tempérament, servi par une pianiste ne se démontant pas et imposant un jeu robuste ("Maestoso"). Le "Largo" se déploie, lent et sombre, telle une marche funèbre. "Abandonne tout espoir", semblent nous dire la compositrice et la pianiste, jusqu’aux dernières notes s’éteignant dans un dernier souffle. Le mouvement "Toccata" vient clôturer l’album. Le morceau s’égaye avec liberté et gourmandise, comme si l’improvisation était à l’œuvre dans cette composition de Grażyna Bacewicz.  

    On peut remercier Klaudia Kudelko d’avoir fait connaître cette compositrice polonaise, prouvant par là-même qu’elle est une pianiste à l’univers passionnant et au panel musical très large, bien au-delà de Chopin – qu’elle sert du reste avec justesse.  

    Klaudia Kudełko, Time, C2 Management, 2022
    https://klaudia-kudelko.com
    https://www.facebook.com/klaudia.pianist
    https://www.instagram.com/klaudia.pianist

    Voir aussi : "Au salon avec Chopin et Haley Myles"
    "Elise Bertrand, ultra moderne romantique"

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