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• • Articles et blablas - Page 11

  • Qui êtes-vous, Nicolas Réal ?

    Après le court prélude "Laisse le vent", prélude aérien et romantique Nicolas Réal se lance véritablement dans son deuxième album, Saint Romain, franchement épatant avec sa facture électro-pop. "Strip tease sur Mars" (qui est repris dans une deuxième version à la fin de l’album)  annonce la couleur. L’album accroche grâce à sa belle densité, à la fois eighties, dandy, sexy et résolument moderne. L’auditeur sera capté par la production impeccable et un chanteur à l’univers attachant.

    "Saint Romain", le morceau qui donne son titre à l’opus propose une déambulation noctambule. Nicolas Réal utilise le talk-over pour parler de nostalgie. "Le bonheur c’était magique", déplore-t-il. Faut-il revenir sur le passé ou regarder devant soi, se demande-t-il ? "Est-ce qu’on repart pour un tour / Qu’est-ce que j ‘fous là ? / Est-ce qu’on repart pour un tour / Surtout ne pas lâcher ton bras". Finalement la réponse est dans les derniers mots de cet extrait bien plus mélancolique qu’il n’y paraît. 
    L’auditeur sera sans doute frappé par "Pandy box", récit doux amer d’une histoire d’amour éphémère d’une belle densité, sans parler de l’orchestration et de la prise de son impeccables.

    Pour le formidable "Statistype", l’un des meilleurs morceaux de l’album, Nicolas Réal trousse à coups de statistiques un autoportrait à la fois émouvant, drôle et pertinent sur un artiste autant qu’un Français de 2024 : "Je suis le statistype / Quidam algorithmique / Partenaire idéal / Je suis le plus que normal". 

    Craquant, envoûtant et pertinent

    Chroniqueur fin et ironique de la société, Nicolas Réal le prouve encore avec "Masqué", consacré à la période du Covid-19 et au confinement.    

    Sur une pop irrésistible, "Suggestion d’amie" croque avec tendresse et ironie un célèbre réseau social mais aussi le récit d’un chagrin d’amour et d’une séparation que l’on essaie – bien mal – de réparer : "J’ai retrouvé sur net / Une fille qui porte ton nom / Elle a le même visage / Et elle habite Arcachon". Et si la solution était dans la fuite ? "On nous suggère d’être amis / J’ai un avis / Je préfère qu’on reste ennemis / C’est bien plus beau, chère Émilie". Cela a le mérite d’être dit – et chanté.

    Dans l’album de Nicolas Réal, on retrouve une très belle version du tube "Tous les cris les SOS" de Daniel Balavoine. L’esprit des eighties est là mais avec quelques touches électro-rock et l’apport du supplément d’âme qu’est le featuring de Lucie Valentine.

    Dans le formidable opus qu’est Saint Romain, il ne faut pas passer à côté de l’incroyable et poétique "Paranormal". Paroles tranchantes et mélancoliques, rythmes obsédants, mélodies travaillées et chœurs envoûtants. Un formidable titre qui ne laisse pas insensible. La part sombre de Nicolas réal   se révèle dans la deuxième partie de "Laisse le vent". Il s’agit d’un live live capté à Lanzarote concluant une séparation douloureuse : "Oublie ces paroles envolées / Les aveux de mon cœur déchiré… Je garderai les amertumes / Des regrets qu’on assume". Mon chemin s’arrête ici ("Le chemin s’arrête ici" semble-t-il conclure avec fatalisme).

    Plus sombre, le sobre et délicat piano-voix "Le petit chemin" fait le choix de la douleur autant que de la nostalgie. C’est le récit d’une rencontre autant que d’un amour d’enfance qui est immortalisé par un vélo. Est-ce vraiment une fin et les souvenirs ne sont-ils pas immortels ? "Qu’importe les chemins / Pourvu qu’ils se rejoignent / Et ce petit chemin / Sera notre jardin".

    "Où est je ?" vinent conclure de la plus délicieuse des manières. En duo avec la jeune Inès, sa fille, Nicolas Réal parle d’une manière légère et enlevée de l’identité et de ces moments où l’on peut se sentir perdu. À grands coups de références à la psychanalyse, aux lapsus, aux impostures, Nicolas et Inès chantent nos fragilités et la manière de s’en sortir : "Si je pouvais j’me trouverais / Mais je sais pas où me chercher / Je pose une main courante / Disparition inquiétante / Dans les couloirs du labyrinthe / Est-ce que je dois porter plainte / Où est moi, où est je ?" Craquant, envoûtant et pertinent. Très pertinent pour un album qui ne l’est pas moins.  

    Nicolas Réal, Saint Romain, dEPOT214 Records, 2024
    www.nicolasreal-musique.com
    https://www.facebook.com/nicolas.realm
    https://www.instagram.com/nicolas_realmusique

    Voir aussi : "Dynah, entre acide et acidulé"
    "Clara Luciani, La Femme libérée"

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  • Dissidente

    Les Cramés de la  Bobine présentent à l'Alticiné de Montargis le film Dissidente. Il sera visible du 21 au 27 août 2024.

    À Richelieu, ville industrielle du Québec, Ariane est embauchée dans une usine en tant que traductrice. Elle se rend rapidement compte des conditions de travail déplorables imposées aux ouvriers guatémaltèques. Tiraillée, elle entreprend à ses risques et périls une résistance quotidienne pour lutter contre l’exploitation dont ils sont victimes.

    Dissidente, drame canadien de Pier-Philippe Chevigny
    avec Ariane Castellanos, Marc-André Grondin, Nelson Coronado
    https://www.cramesdelabobine.org/spip.php?rubrique1471
    https://www.unifrance.org/film/54663/dissidente 

    Voir aussi : "Le Veil homme et l’enfant"

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  • Escale contemporaine avec Philippe Chamouard

    Escale contemporaine, ou plutôt néo-classique avec Philippe Chamouard et trois de ses œuvres interprétées par le Brasov Philharmonic Orchestra dirigé par Christian Orasanu.

    Intitulé, Escales, l’album proposé par Indésens propose un vrai voyage musical comprenant la 9e Symphonie écrite entre 2009 et 2011, la Valse toscane, plus récente (2020) et Canadian March composée entre mars et juin 2018. En route donc vers l'Espagne, l'Italie et le Canada avec Philippe Chamouard.

    L’auditeur se laissera emporter par une Symphonie n°9 aux élans passionnés pour ne pas dire néo-romantique. Le premier mouvement au tempo de marche a des accents prokofieviens avec ces vagues de cordes, ces mélodies harmonieuses et le passage de percussions menaçantes. La passion sourd de cette composition d’une grande densité. Le même souffle se retrouve dans le long et langoureux "Adagio" comme si les Roméo et Juliette du compositeur russe reprenaient vie aujourd’hui. Philippe Chamouard précise dans le livret que ce mouvement a été écrit en premier et que "c’est la représentation d’un visage féminin imaginaire qui en est à l’origine". Gageons qu’il s’agit du visage de la célèbre héroïne de Shakespeare. Le lyrisme, la puissance, la profondeur et l’élégie sont en tout cas les maîtres mots de cette deuxième partie qui ne laissera pas l’auditeur ou l’auditrice insensible.

    Des accents prokofieviens

    Pour le troisième mouvement, Philippe Chamouard a décidé de s’emparer de deux rythmes du folklore andalou issus du flamenco. Il est vrai que souffle sur cette "Bulerie y siguiriya" un souffle tout méditerranéen. La direction de Christian Orasanu donne des couleurs et du soleil à l’Orchestre philharmonique de Brasov, jusque dans le jeu des castagnettes s’amusant et dansant avec les cordes.

    Plus complexe est le quatrième mouvement, "Misterioso & allegretto". Mystérieux en effet dans son agencement souvent menaçant de thèmes semblant discuter entre eux, mais toujours avec harmonie. Ce mouvement fait la part belle et la part sombre à un rythme lancinant, mais non sans grandeur.

    L’opus propose deux autres œuvres, plus courtes celles-là. Il y a tout d’abord cette Valse toscane. On sent le plaisir du compositeur à l’avoir créée. Il avoue d’ailleurs qu’elle trouve sa genèse dans un voyage à Sienne, en Toscane, au cours d’un printemps 2019. L’esprit romantique souffle sur cette pièce symphonique qu’il a écrit sous forme d’une valse. "Un exercice de style amusant", confie-t-il.

    L’œuvre qui clôt l’album est une impressionnante Canadian March. À l’instar de la Valse toscane, Philippe Chamouard a retranscrit le souvenir d’une marche au bord du Moraine Lake. Il n’est pas simple de mettre en musique des images – la couleur de l’eau, les paysages de montagnes ou les nuances du ciel. Le compositeur semble avoir posé un chevalet musical peut retranscrire par touches sonores des sensations  et des souvenirs d’un voyage inoubliable et plein de nostalgie.   

    Philippe Chamouard, Escales, Symphonie n°9, Valse toscane, Canadian March,
    Brasov Philharmonic Orchestra dirigé par Christian Orasanu,
    Indésens Calliope Records, 2024

    http://philippechamouard.fr
    https://indesenscalliope.com

    Voir aussi : "Peter Jablonski, très classique, très jazz"
    "Fauré, cent ans après toujours jeune"

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  • 2014-2024 : Top 10 de Bla Bla Blog

    Pour marquer les 10 ans de Bla Bla Blog, le bloggeur a souhaité faire un top 10 des articles ayant fait le plus de buzz. 
    Au programme, de la musique, des livres, de l’audace – et même beaucoup d’audace – et… une lampée de whisky – avec modération…  

    10/ "Fishbach, Y crois-tu ?"

    Fishbach.jpgEn attendant son prochain concert à La Cigale le 14 mars prochain, Fishbach, l'une des révélations dont nous avions parlé il y a peu sur Bla Bla Blog, s'est produite pour les sessions Son & Lumière de Télérama.

    Elle y interprète Y crois-tu, le premier titre de son nouvel album A ta merci…

    LA SUITE ICI…

     

     

    9/ "Haddock et Loch Lomond"

    C'est de whisky dont il sera question dans cet article. De whisky mais aussi de bande dessinée. 

    Boisson longtemps confinée dans des cercles de connaisseurs, plus ou moins snobs, jamais le whisky ne s'est aussi bien porté qu'aujourd'hui. Alors que vingt ans plus tôt les distilleries peinaient à rester rentable, elles sont aujourd'hui confrontées à une révolution culturelle autant qu'à une vraie crise de croissance : difficulté à satisfaire la demande mondiale (+ 3 % par an), consommateurs de plus en plus ouverts aux whiskies autres que le sacro-saint blend ou le single malt écossais (boissons venues du Japon, des États-Unis, d'Australie ou de France), rachats de distilleries par de grands groupes (Diageo ou Pernod Ricard). La France se classait en 2013 premier pays consommateur au monde devant le Royaume-Uni et les États-Unis avec deux litres par personne et par an ! Il est aussi à noter que le premier pays producteur au monde de ce divin breuvage est... l'Inde ! Ce qui n'est pas forcément gage de qualité, les tords-boyaux y faisant florès…

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    8/ "Adrineh Simonian comme à la maison"

    Adrinehsimonian.jpgCette information est sortie de manière relativement confidentielle il y a une dizaine de jours.

    Nous apprenions que la mezzo-soprano autrichienne Adrineh Simonian a choisi une reconversion inattendue, passant de l’univers feutré et bienséant de l’opéra pour celui, plus sulfureux du porno... féministe.

    Après ans de carrière dans l’art lyrique, de Vienne à Nice en passant par Munich, la chanteuse lyrique a sauté le pas et s’est engagée dans une voie inattendue. C'est via son site Arthouse Vienna qu'elle  propose un catalogue de films X…

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    7/ "Aurélie Dubois unmakes sex"

    Aurelie dubois.jpg"Qui es-tu pour ne pas te reconnaître ?" annonce le site Internet d’Aurélie Dubois. La citation de Daniel Androvski, psychanalyste et écrivain, annonce la couleur : les œuvres qui sont proposées par l’artiste risquent d’en dérouter plus d’un et nous tendre un miroir dérangeant sur le corps, le désir, le fantasme et le sexe. Une démarche revendiquée par Aurélie Dubois, "artiste de garde", qui affirme ceci : "Je considère que je ne fais que traduire la météo des pulsions."

    Graphiquement, l’influence de la bande dessinée est flagrante dans les œuvres de l'artiste datées de 2006. Il y a aussi de l’Egon Schiele dans cette manière de représenter ses nus et ses scènes de couples : corps contorsionnés, visages grotesques, scènes de sexe caricaturales, travail sur les cadrages. Mais qu’on ne s’y trompe pas : Aurélie Dubois reste une artiste au talent de portraitiste indéniable, comme le prouvent ces portraits de 2007 et 2012, ainsi que ces autres dessins de 2008 à 2010 d’une élégante maîtrise graphique – ce qui n’exclut pas son travail sur la déstructuration des corps…

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    6/ "Grey et sa secrétaire"

    Lasecretaire.jpgUne jeune Américaine mal dans sa peau tombe sous le charme vénéneux et érotique de Grey, son patron. Vous aurez bien sûr deviné le pitch du film... La Secrétaire.

    Alors que sort cette semaine le second volet de Cinquante Nuances de Grey, l'adaptation du best-seller de new romance de EL James , il n'est pas inutile de reparler de l'autre long-métrage notable sur le SM, sorti il y a une quinze d'années et qui prenait à bras le corps ce sujet sulfureux.

    À sa sortie en 2002, La Secrétaire de Steven Shainberg, avec Maggie Gyllenhaal et James Spader dans les rôles principaux, a été accueilli par des critiques flatteuses et une fréquentation honorable pour une œuvre qui faisait de la soumission sexuelle son thème de prédilection. Un effet collatéral de l'affaire Clinton-Lewinsky qui venait à peine de s'achever et qui faisait à l'époque les gorges chaudes des médias ? On peut s'interroger…

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    5/ "Le petit monde d’Élodie Suigo"

    elodiesuigo.jpgOn ne parle pas assez de la radio, ce média ouvert, protéiforme et souvent inventif. J’ai envie de vous parler d’Élodie Suigo et de son émission quotidienne Le Monde d’Élodie, diffusé sur France Info.

    Mine de rien, cette série de chroniques a la capacité de vous accrocher très rapidement et de devenir un rendez-vous familier grâce à des qualités finalement très simples : des interviews courtes et sensibles, sans esbroufe ni sens de la provocation. La journaliste de France Info écoute ses invités et évite de se mettre en avant. C’est ce qui fait la richesse de ses chroniques. Une richesse telle que le catalogue de ses invités est impressionnant de richesse…

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    4/ "Où es-tu, Berry ?"

    Berry.jpgOn avait quitté Berry en 2012, avec l’album Les Passagers. La chanteuse avait choisi le fil conducteur du voyage pour des chansons délicates et pudiques, portées par une voix caressante, l’une des plus belle sans doute de la scène française. Est-elle revenue de ses voyages ? Où est-elle aujourd’hui et quelle est son actualité ?

    Il convient au préalable de faire quelques rappels sur la carrière de Berry, commencée en 2008 avec un premier album, Mademoiselle, remarqué par la critique et le grand public. Disque d'or, il a été suivi de plusieurs centaines de concerts en France comme à l'étranger (Brésil, Corée du Sud ou Serbie). Mademoiselle ce sont 10 joyaux musicaux que la chanteuse a sculpté avec ses acolytes Manou et Lionel Dudognon…

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    3/ "Différenciation de la vitesse d’évolution intellectuelle"

    Parlons pub avec cet excellent spot proposé par EDF et l’agence BETC/Havas Paris, Eva et Violette. Le film a été réalisé par Réalité, de l’agence Big.

    La vénérable entreprise nationale d’électricité choisit l’humour et le contre-pied pour parler de son énergie vertueuse ("97 % sans CO2, grâce au nucléaire et aux énergies renouvelables").

    L’héroïne est Eva, chargée de surveiller sa nièce Violette, une enfant aussi surdouée que sa tante peut être bordélique, blasée et complexée par cette gamine trop parfaite. Eva ne peut que constater "qu’intellectuellement, on n’évolue pas tous à la même vitesse", sans se bercer d’illusion sur son propre compte. Sauf que grâce à EDF, la jeune femme va pouvoir avoir sa revanche sur une gamine décidément bien tête-à-claque : "Heureusement, de temps en temps, la vie fait bien les choses"…

    LA SUITE ICI… 


    2/ "Union TV : un nouveau média pour une nouvelle révolution sexuelle"

    Florecherry.jpgLe vénérable Union entrerait-il dans une nouvelle ère ? Créé en 1972, le magazine érotique et libertin fait lentement mais sûrement sa mue. Après l'édition web, c'est une chaîne de télévision qui vient de naître fin janvier (disponible sur la box SFR). Nous avons rencontré Flore Cherry, responsable de la transformation digitale à Union, pour en savoir plus sur ce nouveau média.

    Union TV a la spécificité par rapport à ses concurrents (Dorcel TV, XXL ou Pink TV) de ne pas proposer que des programmes hard. Ils sont certes visibles de minuit à 5 heures du matin, mais, plus tôt dans la nuit, de 23 heures à minuit, Union TV propose aussi des rubriques plus sérieuses mais tout aussi alléchantes. Des conseils de sexologues, sexothérapeutes confirmés, artistes et youtubeurs (Jessica Pirbay, M'sieur Jérémy ou Clémity Jane) proposent un "autre discours sur la sexualité" , indique Flore Cherry…

    LA SUITE ICI...

     

    1/ "Deborah de Robertis l’ouvre"

    Deborahderobertis.jpgÇa s’est passé au Louvre le 15 avril 2017. Deborah de Robertis, artiste franco-luxembourgeoise féministe, engagée et aux performances sulfureuses, pose dénudée au milieu d’un parterre de touristes venus mitrailler et filmer La Joconde. Devant ce public médusé et vite acquis à sa cause, Deborah de Robertis expose son sexe, comme elle l’avait d’ailleurs fait au Musée d’Orsay en 2014 devant le tableau L’Origine du Monde de Gustave Courbet. La scène, brève et violente, est interrompue par les gardiens du musée et par l’auguste établissement qui choisit d’évacuer le public...

    LA SUITE ICI…

    Voir aussi : "Bon anniversaire, Bla Bla Blog (10 ans !)"
    "Top 10 de Bla Bla Blog en 2023"

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  • Fauré, cent ans après toujours jeune

    Peu d’instruments sont aussi à la fois élégants et humains que le violoncelle. Et si vous ajoutez à cela un répertoire aussi de la classe de Gabriel Fauré, voilà qui devrait définitivement vous convaincre de découvrir l’album que Pauline Bartissol – au violoncelle, donc – et le pianiste Laurent Wagschal consacrent à l’auteur du fameux Requiem.

    En cette année Fauré (le compositeur est mort en 1924), Laurent Wagschal consacre une intégrale de ses œuvres pour piano. Pauline Bartissol le rejoint dans ses enregistrements consacrés au violoncelle et au piano. Au programme, les deux Sonates op. 109 et 117 pour violoncelle et piano et des pièces de musiques de chambre devenues universelles, à savoir la Sérénade op. 98, la célèbre Élégie op. 24, la Romance op. 69, la naturaliste pièce intitulée Papillon op. 77 et la délicieuse Sicilienne op. 78.

    Honneur donc à sa Première Sonate, dont l’"Allegro" vient démontrer que Gabriel Fauré, tout classique qu’il soit, vient prendre au vol la modernité qui est en train de révolutionner la musique. Nous sommes en 1917. L’auguste compositeur français, déjà atteint d’une surdité partielle (et oui, comme Beethoven !), propose un opus dont la vigueur et la jeunesse frappent d’emblée dans le premier mouvement "Allegretto". Rythmes, densité musicale, recherches sonores, mais sans jamais sacrifier ses talents mélodiques, prouvent que Fauré est toujours en pleine possession de ses qualités de compositeur. Le violoncelle de Pauline Bartissol prend toute sa mesure et son ampleur, avec au piano un Laurent Wagschal au jeu capable de toutes les gymnastiques et de toutes les nuances, et sans jamais se laisser dépasser. L’auditeur sera charmé par le languissant "Andante". Les cordes du violoncelle vibrent comme jamais, aidées par une prise de son impeccable. Le piano se fait plus discret, presque en retrait dans cette lente marche contemplative et non sans mélancolie.

    Plus encore que dans les deux premières parties, le troisième mouvement "Allegro commodo" est à écouter comme un dialogue entre violoncelle et piano. Pauline Bartissol et Laurent Wagschal s’engagent avec passion dans ce qui ressemble à une série d’arabesques musicales. Fauré se dévoile ici comme un compositeur à la fois retors et passionnant dans son expressivité et son travail sur les matières sonores. 

     "Ah, tu as de la veine de rester jeune comme ça !"

    L’auditeur sera sans nul doute happé par les courtes pièces proposées (courtes si l’on excepte l’Élégie, longue de plus de 6 minutes mais qui en paraissent beaucoup moins). Voilà une Sérénade (l'opus 98) d’une vigueur et d’un mystère sans égal. Composée en 1908, elle est jouée avec légèreté par les deux interprètes, décidément au diapason.

    Nous évoquions l’Élégie. Magnifique et grandiose pièce, devenue un must au fil des années. Il y a cette ligne mélodique incroyable, ce rythme lancinant et le son déchirant du violoncelle, rendant cette Élégie en ut mineur d’une beauté poignante. La pièce a au départ été composée en 1880 pour une future sonate, avant de devenir un morceau autonome au succès critique et public jamais démenti.  

    Deux autres morceaux viennent compléter ces brèves pièces. Il y a Papillon op. 77, composé en 1898. L’auditeur se laissera charmé par le lyrisme et la volupté de cette œuvre à la fois romantique et naturaliste, aussi légère et insaisissable qu’un vol de papillon. Parlons ensuite de la Sicilienne op. 78, de la même année que Papillon, bien qu’elle ait fait l’objet d’un premier traitement cinq ans plus tôt sous la forme d’une pièce orchestrale destinée au théâtre. Ici, Pauline Bartissol et Laurent Wagschal s’harmonisent avec délicatesse dans une rêverie onirique. Le talent mélodique de Fauré est à l’œuvre dans cette pièce envoûtante qu’il inclura quelques années plus tard dans sa suite orchestrale Pelléas et Mélisande, certes moins connue que l’opéra de Debussy.

    Pour compléter le programme de cet album de Fauré, Pauline Bartissol et Laurent Wagschal s’attaquent à la Deuxième Sonate pour violoncelle et piano en sol mineur op. 117. Le mouvement "Allegro" a ce je ne sais quoi d’émotions retenues mais aussi d’une sombre menace. Laurent Wagschal est impérial dans sa manière de structurer au piano cette œuvre à la fois complexe et séduisante. Quant à Pauline Bartissol, elle fait de son violoncelle un authentique être vivant aux mille aspirations et émotions.

    Voilà qui nous entraîne vers le sombre "Andante" qui s’écoute comme une marche funèbre. Il a été composé en 1921 à l'occasion des célébrations aux Invalides du centenaire de la mort de Napoléon 1er. Encore une histoire de commémoration et de centenaire. Le violoncelle est en vedette dans cette lamentation à la fois noble et pathétique, avec un piano tout aussi sombre. Les deux interprètes complètent cette sonate joyeusement avec un  "Allegro vivo" endiablé, pour ne pas dire joueur. Pauline Bartissol et Laurent Wagschal semblent s’amuser dans ce dernier mouvement. Qui aurait dit que Gabriel Fauré était capable d’une telle légèreté ? Vincent d’Indy lui-même s’en étonna à l’époque dans une lettre à la fois enthousiaste et admirative : "Ah, tu as de la veine de rester jeune comme ça !"

    Pauline Bartissol & Laurent Wagschal, Fauré, Complete Works for Cello and Piano, Indésens Calliope Records, 2024
    https://laurentwagschal.com
    https://www.facebook.com/laurentwagschal
    https://indesenscalliope.com 
    https://pauline-bartissol.com
    https://www.facebook.com/pauline.bartissol

    Voir aussi : "Fauré 2024"
    "Des papillons dans l’estomac"

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  • Nosonic, plus qu’assez bien

    Allez, un peu d’électro-rock et du bon, avec une découverte en la présence du groupe franco-irlandais Nosonic. "Je ne serai jamais assez bien" clament d’entrée les têtes chantantes du duo dans un titre envoyé sans complexe. Mélodie entêtante, rythmique enlevée et son électro impeccable ("Assez bien").

    Pour leur troisième album, La nuit et le jour, Nosonic choisit de ne pas choisir entre chanson, pop-rock et électro. Le mélange des couleurs leur va très bien, à l’instar du "Monde à l’envers" à la facture eighties.

    Il y a sans nul doute de la fraîcheur chez le duo pour qui la liberté, l’optimisme et le lâcher-prise sont une vraie philosophie : "Le temps n’a plus d’importance quand on y pense", chantent-ils ("Oublie le temps"). L’amour n’est pas oublié dans ce dialogue musical à deux. C’est "Encore et encore", l’aveu d’un couple soudé envers et contre tous et se connaissant par cœur : "Tu lis toujours en moi comme un livre aux trésors qu’on ne retrouve pas".

    L’auditeur goûtera avec plaisir le titre d’électro-pop "Le quart d’heure de gloire" voguant entre amour et désamour, reproches et considération. C’est l’histoire d’un couple s’auscultant mutuellement, avec tendresse mais aussi lucidité ni cruauté ("J’ai appris à te regarder / J’ai appris aussi à te désaimer / Te déshabiller ça m’a fait toujours peur / Je suis un enfant / Qu’en as-tu fais, malheur".

    Pour leur troisième album, Nosonic choisit de ne pas choisir entre chanson, pop-rock et électro

    "Le dialogue" se fait plus rock, un rock dans lequel le duo s’interroge sur ce qui fait l’humanité, la la vie en société comme la vie en couple : "Si le dialogue s’en va / Dis-moi il reste quoi / Peut-être un  peu les restes / D’un amour brisé". La question est là. Ira-t-on mieux si le dialogue s’en va ? Les Nosonic ne répondent pas à la question. Pourra-t-on faire la fête ? "Bon débarras peut-être" ? Cependant, "Mais qu’est-ce qu’il restera ? / De la haine ou de la joie ?" Finalement, c’est une ode au rapprochement entre nous qui est au cœur de ce titre à l’humanisme bienvenu. Quant à "Parler dans le vent", le groupe choisit la pop sur un thème similaire, la communication ("Échanger les idées / Et ça devrait aller").

    "La nuit et le jour", le titre qui donne son nom à l’album est sans doute le plus représentatif de l’album. L’électro-rock est au service d’un morceau sombre, cruel et à la belle densité. On peut parler ici d’un éternel retour, ces erreurs que l’on fait et refait et qui font souffrir, "Encore une histoire, entre la nuit et le jour, entre nous et le jour".

    Le groupe reprend "Debout", un de leur titre emblématique dans une nouvelle version. Nous voilà dans du rock rugueux au service d’un titre plein de nostalgie. La chaleur d’une boîte de nuit c’est "le bruit du bonheur", la musique, la danse, les cris l’amour, la folie et l’insouciance. Bonheur passé, nostalgie ou souvenir amer ? Le temps a passé et il semble les Nosonic portent un regard désabusé sur ces nuits "à dormir debout".

    Une déclaration d’amour vient conclure l’opus. "Aller haut" est un dialogue à deux dans lequel le couple se promet d’avancer ensemble, sans cacher pour autant cacher les écueils : les silences, les malentendus et les incompréhensions. "Des fois on se saoule / Après on boit". De là à dire que tout est perdu, non ("Je voudrais aller haut, si haut, pour toi").

    Et si Nosonic était l’un des meilleurs ambassadeurs du dialogue entre les peuples, les couples et les individus, pour la paix, la tolérance ou l’amour ? Au choix. Mais sans illusion.    

    Nosonic, La nuit et le jour, Le Son Des Villes / Believe, 2024
    https://www.nosonic.fr
    https://www.facebook.com/Nosonic
    https://www.instagram.com/nosonicworld
    En concert le 25 octobre 2024 au Cork Jazz Festival (Cork, Irlande)

    Voir aussi : "Kamas, décalée sans caler"
    "Sorcières, magiciennes et incendiaires"

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  • La Pléiade avec Outre Mesure

    La Pléiade en musique, le double album proposé par la Compagnie Outre Mesure a la particularité d’être autant une compilation de musiques Renaissance, un aperçu littéraire de cette époque – Du Bellay Ronsard ou Tyard – qu’un projet de recherche musicale.

    Voilà un singulier programme artistique, passionnant tout autant que revigorant intellectuellement. Il donne à voir et surtout écouter une période – le XVIe siècle – au cours de laquelle la langue française s’est définitivement imposée dans notre pays. Le livret de l’album rappelle qu’en 1539 l’Ordonnance de Villers-Cotterêts entérine un usage du XIIIe siècle. Le français s’impose officiellement dans les actes officielles et se normalise.

    Dans cette mouvance, un cercle littéraire s’attaque à la défense et à l’illustration du français. C’est La Pléiade, entrée pour toujours dans l’histoire. Ses membres se nomment Joachim du Bellay (1522-1560), qui tient une place importante dans l’opus, Pierre de Ronsard dont nous fêtons cette année les 500 ans (1524-1580), mais aussi Pontus de Tyard (1521-1582), Jean Bastier de la Péruse (1529-1554), Guillaume des Austels (1529-1580), Étienne Jodelle (1532-1573), Jean-Antoine de Baïf (1532-1589), puis Rémy Belleau (1528-1577), Jacques Peletier du Mans (1517-1582) et Jean Dorat (1508-1588).

    L’album de la Compagnie Outre Mesure propose un choix de textes, parfois très connus ("Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage" de Du Bellay, "Quand vous serez bien vieille" ou "Mignonne allon voir si la rose" (sic) de Ronsard), parfois des découvertes de Jean-Antoine de Baïf ("O roze reine des fleurs"), de Pontus de Tyard ("Mon œil aux traits de ta beauté") ou de Jodelle ("Je me trouve et me pers, je m’assure et m’effroye").

    Si le récitatif est régulièrement utilisé, c’est sous forme de déclamation respectant la prononciation archaïque jusqu’aux roulements de "r" ("Quand à ceulx, qui ne voudroient recevoir ce genre d’escripre" de Du Bellay, "Recherche qui voudra cet Amour qui domine" de Jodelle, "O Roy, Le grand moteur du tout" de Jean Dorat ou "Comme on voit sur la branche" de Ronsard). L’auditeur trouvera, bien entendu, des adaptations musicales, sous forme de polyphonies que l’on redécouvre. C’est Claude Le Jeune et la polyphonie d’"O roze reine des fleurs" ou "Une puce j’ay dedans l’oreille helas", polyphonie de Fabrice-Marin Caietain d’après un texte de Jean-Antoine de Baïf.

    Une vraie jolie découverte à enseigner dans les écoles de France et de Navarre

    L’auditeur sera frappé par la modernité autant que l’inventivité humoristique de "Dame de beauté positive" de Pontus de Tyard. Une vraie belle découverte à enseigner dans les écoles de France et de Navarre. Pour le reste, nous voilà dans une époque ancienne, dans cette Renaissance souvent fantasmée et derrière laquelle on devine les lointains échos du Moyen Âge ("Sur un luth").

    La polyphonie domine en Occident l’histoire musicale depuis le IXe siècle. Durant ce siècle de la Pléiade, elle vit ses derniers instants de gloire. L’adaptation chorale de "Rozette pour un temps d’absence" (Philippe Desportes) en est un brillant exemple, tout comme l’élégant "Cigne je suis de candeur" composé par Claude Le Jeune sur un texte de Jean-Antoine de Baïf. Il convient cependant de préciser que la Compagnie Outre Mesure a confié à plusieurs contemporains actuels le soin de mettre en musique plusieurs mélodies, que ce soit "O pucelle plus tendre" de Ronsard ou cette "Rozette…" dont la polyphonie en quatre parties a été adaptée par Marc Busnel. Ce dernier restitue avec talent et profondeur les mélodies de Pierre Certon pour le poème de Du Bellay "En ce moys delicieux".  Il est encore à l’œuvre dans la polyphonie "L’amour qui me tourmente", poème écrit par Jean-Antoine de Baïf, sur des airs de Fabrice-Martin Caietain. Citons encore le "Chant des nymphes de la Seine" et "Comme la Corne argentine" de Remy Belleau. Parlons encore de cette délicate et consolante pavane de Jean-Paul Paladin sur un poème de Du Bellay, "A son luth".

    Disons-le. Ce double-album est une vraie expérience musicale issue d’un véritable laboratoire artistique qu’est l’ensemble de la compagnie vendéenne Outre Mesure. Une véritable magie opère lorsque la polyphonie prend vie, à l’instar des délicieux "Puis que les yeux qui tout mon bon heur portent" de Jean-Bastier de La Péruse ou "Si vous regardez madame" de Du Bellay – encore lui. L’auditeur sera sans doute frappé par cette chanson à l’étonnante modernité qu’est "Puis qu’il vous plaist de moy estre servie" sur un poème de Jacques Peletier. Elle a été mise en musique par le compositeur Renaissance Dominique Phinot. Une contemporain nous apprend qu’en 1560, il a été brûlé en place publique pour homosexualité. On sera tout autant touché par la polyphonie a capella "Souspirs ardens".

    Le morceau le plus long de l’opus est l’impressionnante et lyrique "Déploration du bel Adonis" de Mellin de Saint-Gelais composée d’une déclamation, d’une mélodie recueillie par Jehan Chardavoine et d’une polyphonie d’Adrian Le Roy.

    Le double album se termine par le charmant, archaïque et attirant "Je veux aimer quoy qu’on en veuille dire", dont on pourra lire un message féministe avant l’heure.  

    Le dernier mot de cette chronique sera pour Joachim Du Bellay : "J’ay toujours estimé la poësie comme ung somptueux banquet". Alors, bonne écoute… et bonne ripaille.  

    La Pléiade en musique & autres Voix de Ville, Compagnie Outre Mesure, Label COM, 2024
    https://www.compagnie-outre-mesure.com

    Voir aussi : "1, 2, 3 Leïla !" 
    "Éternelle et musicale Norvège"
    "Fauré 2024"

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  • 1, 2, 3 Leïla !

    On retrouve Leïla Huissoud avec bonheur, telle une copine ou une petite sœur, avec sa sensibilité, ses blessures mais aussi une joie de vivre teintée de mélancolie.

    La maladresse, son dernier opus, écrit et composé après la crise sanitaire, est un voyage intime d’une musicienne attachante et lucide sur les difficultés du métier d'artiste. En parlant de voyage, l’auditeur sera cueilli dès le début de l’album avec le périple en train qu’est "Avant Nantes". On imagine Leïla Huissoud en passagère d’un TER en direction de la Loire-Atlantique. C’est avec tendresse que la musicienne slame sur ses voisins et voisines dont elle imagine la vie et le quotidien : "Les collégiens, les salariés, les lycéens, les habitués quotidiens du train… Les Bouchers, des médecins, des techniciens spécialisés, des gens biens qui vont au travail. C’est un beau début de journée".

    Si un seul terme convient le mieux à Leïla Huissoud c’est bien celui d’humaniste. La chanteuse le prouve avec la tendre et triste "Lettre aux paumés". Elle offre un  hommage aux gens de peu, aussi discrets que pudiques dans leur malheur : "Quand ils s’offrent c’est à la nuit / Ils ont lâché la rancœur / Leur douceur ne vient pas du joli / Mais de béances à l’intérieur".

    Avec "Jolies frangines", un titre de son précédent album Auguste, Leïla Huissoud avait prouvé qu’elle était une chroniqueuse incroyable de l’enfance. Elle le prouve encore avec "L’ascenseur" et, mieux, avec le diptyque que forment "Soleil 1, 2, 3…" et "1, 2, 3 Soleil !" Ce jeu des cours de récréation est un joli fil conducteur pour parler d’amour, de séduction, d’attachement et d’espérance ("Soleil 1, 2, 3…"). Est-ce une bonne idée que de tomber amoureux, se demande-t-elle ? N’est-ce pas risquer de souffrir ? "1, 2, 3 Soleil !" y répond par une déclaration enlevée jazzy : "Si vous saviez comme je vous aime quand je mets mes lunettes de sans-gêne / On dira que je vous surveille / 1, 2, 3 Soleil ! / Messieurs, dans mes bras !" Décidément, les jeux de l’amour et du hasard restent un sujet éternel d’inspiration.  

    Accompagnée de sa seule guitare, Leïla Huissoud fait de "Mon spectacle s’appelle…" se veut une confession sur la difficulté de se livrer au public et d’être l’objet d’une critique : "En haut de la bio, on lit ‘grosse merde’ ou ‘la moisie’, j’hésite encore". Introspective, l’ex-candidate de The Voice (nous sommes en 2014) revendique sa liberté et sa force de caractère : "Mon credo c’est d’en faire le moins / L’errance c’est un beau chemin". 

    La qualité d’écriture de Leïla Huissoud est non seulement évidente mais en plus insolente

    La qualité d’écriture de Leïla Huissoud est non seulement évidente mais en plus insolente. Il faut bien écouter ses paroles, à l’instar de "La ligue des justiciers", avec Théo Bonneville en featuring, le touchant portrait d’un homme heureux, libre, léger ("Ouais j’me sens bien"), mais aussi hymne à l’amitié et au bonheur.  

    L’auditeur sera sans nul doute touché par l’un des meilleurs titres de l’opus, "À tes amours". Ce morceau a été écrit comme une adresse à toutes ces femmes, ces "demoiselles, ces amantes, ces amours et ces chagrins",  qui ont changé à jamais l’homme qu’elles ont aimé - d'un amour certes éphémère. "Derrière un grand homme, il y a ces drames et ils ressemblent à vos prénoms" chante-t-elle. Nostalgie ? Non, plutôt un hommage aux histoires d’amour passées qui forment, construisent et rendent meilleur. "Si vous saviez comme il est beau à se cramponner à demain". Merci qui ? Voilà qui rend les ruptures moins douloureuses.

    À l’instar de PR2B et sa superbe "Lettre à P." (Rayons Gamma), la jeune chanteuse propose une jolie déclaration à son père ("Lettre au père") avec piano et voix. Au milieu de la chanson, elle lui lance une invitation à remonter la pente et reprendre le chemin de la vie ("Mais bordel qu’est-ce que ça fait mal de voir son héros s’effondrer / Putain, papa, tu peux tomber / Putain, papa tu sais être con et même des fois t’as pas raison / Merci de nous avoir tout tombé… / Allez, le daron, c’est pas trop tard".

    Il est encore question d’enfance dans "Chanson éducation" dans lequel la musicienne dit merci à ses professeurs, en dépit de son caractère brouillon et de son talent artistique que des enseignants et enseignantes ont su voir. Mais il est aussi question de ces autres professeurs, ces "éducateurs par l'impudeur", qu'ils s'appellent Ferré, Brassens ou leprest. Et là, la magie opère. En quelques mots, Leïla Huissoud parvient à travers un portrait d’elle-même, elle, l’artiste attachante, la "chianteuse", comme elle s'est surnommée elle-même : "Éducation par l’impudeur / Et pas plus balèze qu’un loser / je reprendrais bien un petit bout de cœur / Inadaptée, inarrêtable, indispensable, incapable / Habilement abîmée / Violemment  emportée par les vents détournés / Par les tourments des gens."

    Leïla Huissoud chante pour ces autres femmes, ses sœurs, celles qui semblent être "une déception déguisée en fille" et dont la maison devient, hélas, un refuge ("Déguisée en fille"). Dans une langue poétique, dense et toujours subtile, l’artiste parle de ces femmes invisibles, mises de côté, alors qu’elles devraient avoir accès à leur place, aux mouvements, à la liberté et sans être la cible de clichés (fragilité, hystérie, folie). Bref, à la violence.

    "La maladresse", qui donne son titre à l’opus, est une confession sous forme de slam. Le désenchantement est là. Leïla Huissoud s’y dévoile sans fard. C’est le morceau d’une jeune femme parlant de son "intérieur de carcasse, une colocation sans terrasse". Qu’est-ce qu’un artiste, s’interroge la chanteuse ? Comment se construire face au public ? Comment recevoir ce qu’il offre ? Comment aimer sans maladresse ? Leïla Huissoud se livre avec une lucidité d’autant plus désarmante lorsque sa voix fragile se brise. "Je me suis pas calmée / Je me suis juste cramée".  

    Et si l’on disait que La maladresse s’écoute comme un album de consolation ? Un opus qui se termine par "Les chansons tristes" qui ne le sont finalement jamais complètement. La chanson : un sujet qui est un grand classique de la chanson française, justement. Voilà qui pose d’emblée Leïla Huissoud comme une des grandes artistes de la scène actuelle. 

    Leïla Huissoud, La maladresse, French Flair, 2024
    https://www.leilahuissoud.com
    https://www.facebook.com/LeilaHuissoudofficiel
    https://www.frenchflairmusic.com/product-page/le%C3%AFla-huissoud-la-maladresse
    https://www.youtube.com/watch?v=fVHwatwxrJw
    https://tinyurl.com/4arx9h7v

    Voir aussi : "Comme un ouragan"
    "Une certaine PR2B"

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