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Depuis les attentats de Charlie-Hebdo, les journaux sont sous le choc et ont réagi à leur manière à l'attentat et aux atteintes aux libertés d'expression. Parmi ces revues, le journal satirique Sans-Culotte 85 a voulu marquer le coup.
Ce "canard vendéen qui ne joue pas les fayots" entend être le poil à gratter d'un Département encore largement influencé par un certain milieu catholique (traditionnel). Pour l'édition de février, un numéro spécial, la rédaction de Sans-culotte 85 a choisi de se nommer "Sans-Calotte 85", en réaction aux attaques islamiques (et religieuses) du mois de janvier. C'est aussi une référence, affirme la rédaction du journal, au fameux hors-série de novembre 2011, Charia-Hebdo. ("Un Charia-Hebdo à la vendéenne"). La Une du Sans-Calotte 85 représente l'évêque Alain Castet, dont la ressemblance avec le sénateur UMP local Bruno Retailleau peut troubler... Quant au titre "Ceci n'est pas un prophète", c'est un clin d'œil appuyé à la célèbre une du numéro 1178 de Charlie Hebdo.
Mais le choix éditorial le plus original de la revue satirique réside dans son traitement de l'attentat de Charlie Hebdo. Comme le rappelle Marie Coq dans un billet, "Il n'y a pas de blasphème qui tienne : personne n'a jamais forcé un musulman à caricaturer son prophète, puisque cela lui est interdit, et y'a (sic) aucun jugement à porter là-dessus." Le Sans-Culotte 85 (ou plutôt "Sans-Calotte 85") s'appuie, comme tout journal satirique qui se respecte, sur de nombreuses caricatures.
Or, ouvrant cette revue, le lecteur sera surpris de n'y trouver aucun des dessins caractéristiques de ce titre : en lieu et place des illustrations, caricatures et personnages croqués, le texte est parsemé de plages blanches, comme si un maquettiste malicieux ou mal intentionné avait décidé de sortir les illustrations de la revue ! Ces espaces vides sont autant de rappels à une liberté d'expression blessée et en danger.
En ayant choisi de sacrifier les caricatures, le Sans-Culotte 85 joue la provocation. Mais cette provocation est assortie d'une jolie pirouette, car ces caricatures manquantes dans la mise en pages sont finalement bien présentes... en fin de magazine, hors contexte, avec seulement les numéros de page indiquant leur emplacement originel. Il ne reste plus au lecteur qu'à se munir d'une paire de ciseaux et d'un tube de colle pour remettre les dessins à leur place dans la revue.
Cette manière forte d'interpeller le public sur l'importance de la liberté d'expression est aussi pour le bloggeur une manière de rappeler que la satire reste une tradition française ancienne qui est prête à vendre chèrement sa peau. Le Sans-Culotte 85 est dans cette droite ligne : "Nous sommes des Sans-Culottes... C'est pour cela que nous ne baissons pas nos pantalons !" est-il proclamé sur leur site Internet.
Son précédent album, Glad Rag Doll, piochait du côté du blues et de la comédie musicale. Cette fois, dans Wallflower, Diana Krall s'attaque au répertoire pop, rock et folk des années 60 et 70, avec deux exceptions cependant : "Don’t Dream It’s Over", une reprise des Crowded House (datant de 1986), "Feels Like Home", en duo avec Bryan Adams (de Chantal Kreviazuk, 1999) et le titre "If I take you home tonight", une nouveauté écrite par Paul Mc Cartney, dont il sera question un peu plus loin.
Dans Wallflower, la jazzwoman se fait crooneuse. Sa voix caresse chaque mot et chaque note, avec tact, élégance et sensualité. La chanteuse est accompagnée par une orchestration très classique : piano, cordes et quelques guitares et nous offre des versions soyeuses de "Desperado" (Eagles, 1973), "Sorry Seems To Be The Hardest Word" (Elton John, 1976) ou "I'm Not In Love" (10CC, 1975). Trois titres qui restent relativement fidèles aux originaux.
Reprise sans surprise ? Voire. Car l'auditeur est d'emblée cueilli à froid avec une interprétation langoureuse de "California Dreamin'" (1965). Mais là où les The Mammas & Papas se faisaient virevoltants, Diana Krall choisit la mélancolie. Mélancolie qui est le dénominateur commun de l'ensemble de l'album. Un album sans grande surprise diront les médisants, mais diablement efficace !
Hormis "Desperado", Diana Krall reprend un autre titre des Eagles, "I Can’t Tell You Why" (1980). Les fans du groupe californien auront sans doute un peu de mal à retrouver le titre pop psychédélique original. La chanteuse en fait une relecture latinos et plus légère.
L'artiste nous propose des relectures, et parfois des découvertes aussi voire plus convaincantes que les versions originales : "Alone Again (Naturally)", en duo avec Michael Bublé (Gilbert O'Sullivan, 1972), "Superstar" (avec la version des Carpenters, 1971), "Operator (That's Not the Way It Feels)" (Jim Croce, 1972) ou "Wallflower" (Bob Dylan, 1971), qui donne le titre à l'album.
Au milieu de ces titres, qui fleurent bon la nostalgie, figure un titre original, "If I take you home tonight" de Paul Mc Cartney. Mélodie imparable, orchestration soignée et interprétation inspirée : tout concours à faire de ce titre un futur standard de la pop. Il confirme également que Paul Mc Cartney est sans doute le meilleur compositeur vivant et Diana Krall une superstar et l'une des plus belles voix actuelles.
Non, ne fuyez pas en découvrant le titre de cet article !
Ce dont je vais vous parler concerne le choix éditorial d'un journal, Le Commercial du Gard, un hebdomadaire régional au choix éditorial que le bloggeur tient à saluer. De quoi est-il question dans ce journal ? Comme son titre l'indique, d'actualités commerciales locales principalement : sur 5 à 8 pages, en fin de revue, s'étalent des annonces aussi peu passionnantes que des liquidations judiciaires, dissolutions d'entreprises, constitutions et immatriculations de sociétés, ventes aux enchères publiques et autres avis de greffes de tribunaux.
Pas de quoi s'enthousiasmer, me direz-vous, sauf bien sûr si le Code du Commerce est votre livre de chevet !
Sauf que tout l'intérêt du Commercial du Gard réside précisément dans ses premières pages (quatre à six, voire plus, selon les éditions). Une telle gazette laisserait penser que le comité de rédaction choisisse de jeter son dévolu sur des sujets tels que l'économie, la politique ou des billets sur la le commerce local. Mais rien de tout cela. Le magazine nîmois (85 ans d'existence au compteur !) choisit régulièrement de couvrir un large faisceau de la vie culturelle : musique classique, littérature, cinéma, théâtre, opéra... et tauromachie !
Ainsi, à côté de ces classiques informations judiciaires et commerciales, le numéro du 11 février 2015 nous parle d'un enregistrement de pièces de Frédéric Chopin avant de s'intéresser à une biographie de Joseph Haydn par Frédéric Gonin. Ce billet classique partage la une (et oui !) avec la présentation d'un essai de Christine Clerc, consacré aux relations entre Charles de Gaulle et André Malraux.
Ce choix éditorial (les médisants parlerons "d'auberge espagnole") n'a rien de surprenant pour Le Commercial du Gard, qui assume parfaitement ses choix. Ainsi, dans les récents numéros, le lecteur peut y lire, pèle-mêle, un hommage au pianiste Aldo Cicolini (en photo), une présentation des folles journées de Nantes, un billet consacré à la fondation Maeght, des critiques de disques classiques de Nathalie Dessay, Alexandre Tharaud et Emmanuelle Haïm ou encore un article pointu sur les voies romaines en Gaule !
Les personnes allergiques à la tauromachie (en page 3) ne s'attarderont sans doute pas sur les chroniques régulières consacrées à ce "divertissement", et partageant la page avec un extrait des Diaboliques de J. Barbey d'Aurevilly, dans la grande tradition des feuilletons du XIXe siècle.
Du reste, la littérature n'est pas en reste avec une large place consacrée aux critiques de livres. Et là encore, c'est un certain éclectisme qui est de mise : avec Le Temps des Héros de Gérard Chaliand (éd. Bouquins), une compilation de textes épiques chantant les héros à travers les siècles, Les Gardiens de Dieu de François-Xavier Cerniac (éd. Cité Editions), un polar sur fond de secrets gouvernementaux et occultes et Deux Veuves pour un Testament (ed. Points Policier), un polar de l'auteure américaine Donna Leon.
Rareté, même pour une revue locale, Le Commercial du Gard ouvre largement ses colonnes aux sociétés savantes de la région : en l'occurrence, le lecteur régulier peut suivre numéro après numéro l'histoire de la ville de Nîmes (par un certain Ménard, membre de l'Académie Royale des Inscriptions et Belles Lettres). En l'occurrence, c'est Charles Martel qui est à l'honneur dans l'édition que le bloggeur a parcouru.
Chaque numéro s'intéresse au cinéma. Pour le numéro du 11 février 2015, outre un focus sur le festival Écrans britanniques, une critique est consacrée au film de la réalisatrice autrichienne Jessica Haussner, Un Amour fou, "une (presque) comédie romantique sur le double suicide de l'écrivain Heinrich von Kleist avec une certaine Henriette Vogel qu'il connaissait à peine..."
Pour être complet signalons des rubriques classiques : recettes, mémento et éphéméride et conseils pratiques.
Finalement, le bloggeur salut dans Le Commercial du Gard une certaine idée de l'ouverture d'esprit, de la culture et des arts. Un beau résultat pour une revue locale, au départ consacrée à des informations commerciales et judiciaires peu sexy.
Héloïse Letissier, alias Christine & the Queens a été, comme on s'y attendait, la grande gagnante des Victoires de la Musique 2015.
En la consacrant artiste féminine de l'année et en récompensant son clip "Saint-Claude" (vidéo ci-dessous), l'académie des Victoires a consacré une artiste complète et exceptionnelle.
Après la mort de Mao, qui se souvient de la place qu'a occupée Montargis dans la naissance du parti communiste chinois ? Sans doute d'abord les protagonistes eux-même, et à commencer par Deng Xiaoping. Lors de son retour en France en 1975, cette fois en visite officielle, l'ancien étudiant souhaite revoir Montargis et "[y] manger des croissants" ! Ce voyage emprunt de nostalgie n'aura jamais lieu mais son ancien employeur, la multinationale Hutchinson, retrouve la trace de son passage dans les années 20 (voir l'article précédent). Il s'agit d'une fiche archivée. Par ailleurs, Deng Xiaoping n'aura de cesse de rappeler l'importance de cette petite ville du Loiret dans l'Histoire de la Chine moderne.
En 1982, la France, socialiste depuis un an (et avec des ministres communistes au gouvernement), forme de grands espoirs au sujet de ce gigantesque pays, "sur le point de s'éveiller". Ce dernier est en passe de respirer après plusieurs décennies de guerres civiles, d'une révolution culturelle terrible, de programmes politico-économiques lancés à la hussarde et de purges au plus haut sommet de l'État. Des millions de morts ont accompagné la mue de cette région du monde. Deng Xiaoping, l'ancien petit ouvrier de Montargis est à la tête de l'État et s'apprête à le moderniser contre vents et marées. Le "Socialisme à la chinoise" se voit mâtiner d'un libéralisme a priori contre-nature, ce qui ne semble pas troubler outre-mesure le pragmatique Deng : "Peu importe qu'un chat soit blanc ou noir, le plus important est qu'il puisse attrape des souris", affirme-t-il avec conviction.
Un voyage officiel est organisé en cette année 1982, rassemblant maires de grandes villes et industriels influents. Deng Xiaoping met une condition à ce voyage : que parmi les invités crânement présents figurent Max Nublat, le modeste maire (communiste) de Montargis. La journaliste Sylvie Braibant raconte avec verve et talent cet événement digne d'un film : "Max Nublat (...) fit sa petite valise, grimpa dans l'avion réservé à l'imposante suite française, fut placé un peu derrière les autres. Après l'atterrissage et alors que tous s'apprêtaient à descendre, des officiels chinois pénétrèrent dans la carlingue, très affairés, et demandèrent à tout le monde de se rasseoir, à l'exception de "Monsieur le maire de Montargis". Très étonné, et même légèrement inquiet, il passa donc devant tout le monde : au bas de la passerelle, sous une banderole de bienvenue déployée à son nom, une somptueuse limousine attendait. Il fut embarqué toutes sirènes hurlantes vers le Palais impérial. Là, les portes s'ouvrirent les unes après les autres. Dans la dernière pièce, un homme attendait tout sourire et les bras ouverts. Deng Xiaoping dit "dans mes bras Monsieur le maire de Montargis" et il serra bien fort contre lui un Max Nublat au bord d'une double apoplexie, physique et psychique."
Ému et nostalgique, Deng Xiaoping se souviendra longtemps d'anecdotes survenus cinquante ans plus tôt à Montargis : l'apprentissage de la valse dans un dancing, La Gloire (devenu un hôtel et restaurant étoilé), un PV récolté pour le non-fonctionnement du feu rouge d'un vélo ou le souvenir d'une collègue d'atelier aux yeux de couleurs différentes : "Impossible qu'il ne soit pas allé à Montargis", témoignera le maire de l'époque après coup.
Trente années se sont passées depuis cet événement diplomatique. Après la mort de Deng Xiaopingen 1997, les relations étroites entre la Chine et Montargis ne sont pas laissées lettre morte, loin s'en faut. Difficile à placer sur une mappemonde, la petite ville du Loiret tente cependant de cultiver cet héritage, non sans arrière-pensée économico-touristique. Timidement, des initiatives se font jour pour capitaliser sur les relations sino-montargoises : circuit touristique, musée de la Chine au 15 rue du Tellier (anciennement 15 rue du Pont de l'Ouche, un site qui avait servi de résidence à de jeunes Chinois), manifestations culturelles sous l'égide d'une ambitieuse association Amitiés Chine-Montargis et de sa charismatique présidente, Peiwen Wang.
Comment conclure cette série d'article sur les liens hors normes qui unissent une modeste ville française et une superpuissance ? Peut-être en évoquant un dernier protagoniste.
René Dumont, candidat aux élections présidentielles de 1974, était le fils de la directrice du collège du Chinchon, un des lieux d'accueil d'étudiants chinois. Du même âge que Deng Xiaoping, "l'homme au pull-over rouge" se lia d'amitié avec Cai Chang, agronome réputée et future vice-présidente de l'Assemblée nationale de son pays. Plus de cinquante ans après la venue de Li Shizheng, venu en France étudier l'agronomie, c'est René Dumont qui entreprend plusieurs voyages en Chine sur le même sujet. Il constate là-bas les évolutions agricoles de la réforme agraire chinoise de 1949, non sans naïveté ni aveuglement d'ailleurs("Saluons le dévouement des dirigeants chinois à l’intérêt national et à celui des travailleurs", écrit-il). Il en retire des enseignements sur l'agronomie marxiste ("Une autre politique de développement existe déjà, dans le pays le plus peuplé du monde, qui permet une croissance mesurée certes, mais sans aide extérieure, sans chômage, sans gaspillages, avec très peu de pollutions : celui de la Chine"). Il en vient à affirmer, en utopique patenté, ses convictions sur la nécessité d'une révolution mondiale... écologique.
Ce voyage d'un Montargois dans le pays de Deng Xiaoping, avec en arrière-fond l'agronomie chère à Li Shizheng, peut être lu comme un formidable pied de nez du destin. C'est aussi une manière fascinante de boucler la boucle de cette aventure humaine, sur fond de révolutions.
Un remerciement particulier à Peiwen Wang
Sylvie Braibant, "De Montargis à Pékin : le grand bond en avant", janvier 2013 Jérôme Perrot, "Montargis, l'étape secrète de la Révolution chinois", Humanité Dimanche, 16-22 octobre 2014 Régis Guyotat, "Montargis, berceau de la Chine nouvelle", Le Monde, 9 septembre 2006 Alexandre Moatti, "René Dumont : les Quarante ans d'une Utopie", La Vie des Idées, 11 juillet 2014 Association Amitié Chine-Montargis Musée de la Chine, 15 rue Tellier, Montargis
Sur ce cliché, une vingtaine de jeunes Chinois posent dans un jardin. On trouve parmi eux Cai Hesen et son amie Xiang Jingyu. Il y a aussi Li Fuchun, Cai Chang et Ge Jianhao, la propre mère de Cai, en fuite de son pays pour avoir refusé la tradition des pieds bandés. Des commentaires ont situé cette photo au sud de Paris, voireà Fontainebleau. En réalité, c'est bien à Montargis que ce cliché a immortalisé la scène, et plus précisément au Jardin Durzy, toujours visitable.
C'est là, au coeur de ce modeste parc, que le théoricien historique Cai Hesen ainsi que son amie Xiang Jingyu, font part à Montargis de leurs thèses "pour sauver la Chine et le monde". Nous somme dans les journées des 6 au 10 juillet 1920. Ceux qui étaient jusqu'alors de paisibles étudiants expatriés se révèlent des idéalistes passionnés, près à changer le monde. Révolutionnaire, le Mouvement Travail-Etudes l'est à plus d'un titre. Non contents de se former à des techniques modernes destinées à développer leur pays, de jeunes hommes et de jeunes femmes (la mixité étant là aussi nouvelle) découvrent aussi, dans le pays qui les accueille quelques temps, la liberté, l'expression politique mais aussi les idées marxistes qu'ils vont assimiler et chercher à développer dans leur pays : "Sans la France, je ne sais pas dans quelle obscurité nous serions" affirmait ainsi le théoricien Chen Duxiu.
Le 13 août 1920, soit un mois après les discours de Durzy, Cai Hesen fait part à Mao Zedong, de sa proposition de créer un parti communiste ambitieux, révolutionnaire, uni et organisé (cette lettre est consultable sur ce lien). "Mon vœux c'est que tu prépares notre Révolution d'Octobre", écrit-il à son ami : dictature du prolétariat, appui de la Russie léniniste et "aspect internationaliste" sont les jalons de ce programme politique. Il est à noter que cette idée intervient six mois avant le congrès de Tours qui voit la scission de la SFIO française et la naissance du parti communiste français. A la demande de son ami Cai, Mao, qui n'a jamais quitté la Chine, lui adresse une carte postale. Sur celle-ci, visible dans le Musée de la Chine de Montargis, le futur Grand Timonier indique son accord pour la création d'un parti communiste chinois. Un an plus tard, en juin 1921, se réunit à Shanghai le premier congrès du PCC.
Mais un autre personnage fait son apparition dans cette histoire.
Deng Xiaoping a tout juste 16 ans lorsqu'il vient lui aussi se former à Montargis. Jeune homme issu de la petite bourgeoisie de son pays, il est recruté en 1922 puis en 1923 dans l'usine Hutchinson qui retrouvera trace de son passage des décennies plus tard, sous le nom de "Teng Hi Hien". L'ouvrier est fiché comme un employé jugé peu fiable : "A refusé de travailler. Ne pas reprendre" ! (voir la photo ci-joint)
Le voyage en France du futur dignitaire marque profondément ce jeune homme gai et agréable, qui est passé par la Normandie avant de découvrir la misère des ouvriers du Creusot. Au cours de ses études à Montargis, il fait une autre rencontre décisive : celle de Zhou Enlai, conquis lui aussi par les idées marxistes... mais aussi grand amateur de tennis.
Pendant le séjour de Deng, Cai Hesen et Xiang Jingyu sont retournés en Chine afin de se lancer dans la lutte de leurs idées. Mais ils sont arrêtés, torturés et exécutés en 1928 et 1931.
La suite de l'aventure communiste chinoise appartient à quelques-uns de ces jeunes Chinois ambitieux et profondément marqués par leur séjour dans cette petite ville du Loiret : Deng Xiaoping, le futur dirigeant de la Chine moderne, Chen Yi, ministre des affaire étrangères sous le Général de Gaulle ou Li Fuchun, qui deviendra vice-premier ministre et théoricien de la Chine moderne.
Des décennies plus tard, on se souviendra du passage de ces hommes et de ces femmes à Montargis...
Pourquoi Montargis est-elle la plus chinoise des villes françaises, au point d'être reconnue jusqu'à Pékin ?
Un visiteur qui débarque dans cette modeste sous-préfecture du Loiret pourrait être étonné par des plaques touristiques en français et en mandarin, disséminés dans différents endroits de la ville, balisant un parcours touristique consacré à ce pays lointain. D'autres traces d'une influence chinoises existent : une place Deng Xiaping en face de la gare SNCF de la ville, la statue en bronze de Li Xiao Chao représentant "L'enseignant, dit Monsieur le Maître" sur la place du Patis, le petit musée de la Chine inauguré en septembre dernier par Liu Yandong, vice-présidente de la République populaire de Chine et numéro trois du régime, sans compter le nouvel an chinois, qui est fêté ce week-end en grande pompe. Dans son édition du 16 au 22 octobre 2015, L'Humanité Dimanche soulignait, de son côté, la tradition déjà ancienne de l'apprentissage du mandarin à Montargis, plaçant cette ville en tête dans la Région Centre pour l'apprentissage de cette langue. L'association locale "Amitié Chine-Montargis" est une preuve supplémentaire de liens hors du commun qui relient Montargis et un pays de plus de 1,3 milliards d'habitants. Mais, au fait, pourquoi cet engouement pour ce pays lointain, dans une ville où les communautés asiatiques se montrent plutôt discrètes ?
L'histoire de cette relation est si exceptionnelle que le bloggeur – lui-même montargois – ne pouvait pas ne pas y consacrer plusieurs articles.
Nous sommes au début du XXe siècle. À l'époque, dans la Chine impériale, pauvre et aux structures sociales archaïques ("médiévales", diraient certains), Li Shizeng, issu de la grande bourgeoisie chinoise, se rend en France afin d'y étudier l'agronomie. Paris est son premier port d'attache mais le jeune homme, de santé fragile, décide de s'en éloigner et de s'installer à la campagne.
Il choisit Montargis, peu éloignée de la capitale en raison du chemin de fer et qui offre en plus l'avantage d'abriter l'École Pratique d'Agriculture du Chesnoy (l'actuel Lycée agricole du Chesnoy). C'est dans cet environnement propice que Li Shizeng créé à partir de 1912, grâce à la municipalité locale, mais aussi avec le soutien de son ami Sun Yat-sen, premier Président élu en 1912, un système révolutionnaire, le Mouvement Travail-Etudes.
Novateur et avant-gardiste, le philanthrope voit dans cette organisation le moyen de former et d'éduquer de jeunes intellectuels de son pays. La France est en pointe dans l'agronomie, raison pour laquelle plusieurs centaines de Chinois rejoignent ce pays et la petite ville du Loiret. Tout est organisé pour favoriser l'intégration de ces jeunes gens, hommes et femmes (cette mixité est déjà en soi une vraie révolution !) : accueils dans les écoles de la région, hébergements chez l'habitant, recrutements dans des entreprises et des usines locales (dont Hutchinson). Certains ne repartiront d'ailleurs jamais.
Mais ce qui n'aurait pu être qu'une histoire locale rejoint la grande Histoire. Une grande Histoire dont les protagonistes se nomment Cai Hesen, Xiang Jingyu, Chen Yi, Li Weihan, Li Fuchun, Zhou Enlai ou Deng Xiaoping et dont l'objet est la naissance du parti communiste chinois à Montargis...
Les insomniaques sont sans doute tombés au moins une fois sur l'émission télévisée Voyage au bout de la Nuit. Un véritable OVNI : sur D8, tous les jours, à partir de trois heures du matin, se produit en effet cette émission littéraire, sans doute la plus originale du PAF.
Le concept de ce programme culturel est d'une simplicité évangélique. Dans un décor minimaliste, une personne, installée sur un divan confortable, lit une œuvre littéraire. Tout simplement.
Ici, pas de commentaires autres qu'une présentation succincte de l'ouvrage, pas de présentateur jouant les Monsieur Loyal, pas de montages sophistiqués et pas d'auteurs invités (à l'exception de quelques artistes venant faire de temps en temps quelques piges : l'essayiste Philippe Meyer, l'acteur, auteur et réalisateur romancier Michael Cohen ou encore... Nabilla !).
Pour Voyage au Bout de la Nuit, le cahier des charges est réduit à sa plus simple expression : un livre, un plan quasi fixe et un comédien, ou plus précisément une (jolie) comédienne.
Les artistes mis à l'honneur ne sont souvent pas des inconnus : Victor Hugo, Gustave Flaubert, Guy de Maupassant, Conan Doyle ou Louis-Ferdinand Céline, dont le roman le plus célèbre a donné le nom à cette émission.
Aux sceptiques qui pourraient dire que Voyage au bout de la Nuit aurait plutôt mérité de se nommer Voyage au bout de l'Ennui, le bloggeur rappellera que ce divertissement culturel fait partie des programmes historiques de D8 et pourrait bien s'ancrer définitivement dans notre paysage télévisuel. Une telle idée – un livre, une présence, une voix – est si simple que le miracle opère, même si aller au bout de chaque programme de lecture s'avère ardu.
De grands chefs d'œuvre de la littérature mondiale sont dépoussiérés et trouvent une autre vie et de petits joyaux oubliés sont dévoilés, par la grâce et le glamour d'une présence chaleureuse et apaisante.
À trois heures du matin, les insomniaques peuvent en tout cas trouver le plus intelligent et le plus séduisant spectacle qui soit à cette heure de la nuit. Culte, sexy et fascinant.